Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Grenelle de l’environnement, les accords de Paris et la loi Élan ont été autant d’occasions de nous engager à concentrer nos efforts en faveur de la rénovation énergétique, en vertu du principe selon lequel la meilleure énergie est celle que l’on ne consomme pas.
Les objectifs que l’Union européenne s’est fixés en matière de réduction des émissions de carbone, en particulier la volonté d’atteindre la neutralité d’ici à 2050 et celle de diminuer nos émissions de 55 % d’ici à 2030, ont conduit les instances européennes à engager un trilogue autour de l’instauration d’un marché carbone pour le bâtiment et le transport. Celui-ci rendrait les coûts afférents à l’utilisation de l’énergie d’un bâtiment non rénové supérieurs à ceux de la rénovation elle-même.
Il est d’autant plus nécessaire de s’atteler à cette exigence dans le contexte actuel. Depuis un an, le coup de tonnerre qu’a constitué l’agression de l’Ukraine par la Russie a mis en évidence la dépendance de nos économies aux combustibles fossiles et remis en cause les habitudes européennes en matière d’énergie. Dans notre pays, l’ensemble des ménages et des collectivités sont confrontés à un renchérissement significatif de leurs factures énergétiques.
Dans ces conditions, il est indispensable de trouver des solutions pour financer la rénovation, en particulier des 400 millions de mètres carrés que compte le parc immobilier public. Dans votre rapport, madame la rapporteure, vous en estimez le coût à 400 milliards d’euros, soit près de 20 % du PIB. De tels montants portent du reste à s’interroger sur l’adéquation de nos moyens, y compris des nouveaux moyens dont nous débattons, mes chers collègues, aux enjeux qui nous attendent.
En tout état de cause, même s’il n’y suffira pas, le dispositif introduit par la présente proposition de loi est intéressant. Il consiste à expérimenter l’intégration d’un tiers dans le portage financier et technique d’une rénovation énergétique de bâtiment, dérogeant ainsi aux articles du code de la commande publique qui encadrent les investissements et les dépenses publiques.
Le tiers réaliserait l’investissement et recevrait du commanditaire – l’État, une collectivité territoriale ou un établissement public – le remboursement de l’avance et des intérêts.
Compte tenu des besoins urgents que j’ai évoqués, nous ne pouvons que saluer ce texte, qui permet une avancée intéressante.
Il faudra toutefois nous montrer doublement vigilants.
Premièrement, il ne faudrait pas que ce dispositif favorise les gros maîtres d’œuvre qui disposent d’ingénierie financière au détriment des petits artisans et des PME, qui participent grandement de la vitalité de nos territoires. Nous devrons donc veiller aux capacités de financement des acteurs.
Deuxièmement, monsieur le ministre, comme d’autres collègues, je m’inquiète du risque d’accumulation des engagements financiers pour des collectivités qui sont de moins en moins aidées par l’État et que les coûts de l’énergie exposent à une situation de précarité financière.
Le recours à ce nouvel outil devra donc être surveillé de près afin de prévenir les dérives auxquelles les PPP ont exposé un certain nombre de collectivités, mais aussi le ministère de la justice. Il est donc particulièrement bienvenu que ce dispositif soit instauré à titre expérimental. En tout état de cause, il sera nécessaire d’en effectuer un suivi.
Ces réserves et la nécessité de rester vigilant étant exprimées, et tout en regrettant que l’Union européenne et l’État ne consacrent pas davantage de moyens à la rénovation énergétique des bâtiments publics, le groupe Socialiste, Écologique et Républicain se prononcera en faveur de cette proposition de loi.