En juin prochain, un rapport du COR, qui doit raisonner à législation actuelle - donc modifiée éventuellement par le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) - vous indiquera l'équilibre financier global au terme de la réforme. Je siège au COR, lequel réalise de nombreuses projections à très long terme qui sont autant de discussions possibles. Il devrait sans doute être plus précis et identifier plus clairement une échéance à moyen terme. Les partenaires de l'Agirc-Arrco gèrent à horizon de quinze ans, et cela fonctionne bien. Pour autant, multiplier les hypothèses trouble davantage les esprits, même s'il faut conserver des prospectives à échéance d'une génération. L'Insee réalise des prévisions démographiques hautes, basses et moyennes, on pourrait ainsi recadrer un peu le travail du COR ; vous avez la main : cela relève de la loi.
On ne peut se satisfaire d'un système prévoyant 98 % de réparation de l'usure professionnelle, mais seulement 2 % de prévention, alors que les cotisations patronales atteignent 14 milliards d'euros. Au total, on dépense 100 millions d'euros par an dans les entreprises pour la prévention de l'usure professionnelle, laquelle consiste, pour chaque poste de travail, à identifier, au travers du Duerp, les risques associés, à prévoir les moyens suffisants pour les réduire ainsi qu'à limiter les risques d'accident. Nous devons apporter les compétences nécessaires dans les TPE et dans les PME pour accompagner le chef d'entreprise sur la prévention de l'usure et du risque professionnel. Actuellement, tout passe dans la réparation. C'est humainement inacceptable ; nous devons parvenir à basculer vers la prévention. Pour nous y aider, un fonds de 1 milliard d'euros permettra d'enclencher la culture de la prévention dans tout l'écosystème de production de biens et de services.
Il y aura toujours de l'usure professionnelle, et il faudra y faire attention, par exemple pour les métiers en milieu hyperbare. On peut réfléchir à des durées d'exposition maximale, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) y travaille sans doute. Je rappelle que 85 % à 90 % des sorties pour inaptitude concernent les trois facteurs ergonomiques de troubles musculo-squelettiques. Dans le dispositif d'usure professionnelle, il ne faut pas créer des catégories actives ou des régimes spéciaux, mais bien traiter correctement le risque. C'est cela qui est envisagé avec ce dispositif : vers 45 ans, en milieu de carrière, une première étape est réalisée. Chacun réagit à raison de sa physiologie à l'exposition au métier. Interviennent alors le médecin du travail et les acteurs de la prévention et de la désinsertion professionnelle. En matière de formation professionnelle, une visite de mi-carrière est prévue, qui doit proposer un bilan à 360 degrés. Si le salarié souhaite conserver son métier, il faut trouver les moyens de l'accompagner ; si, à 60 ans, il est abîmé par l'usure professionnelle, il faut lui offrir la possibilité de partir plus tôt ou lui proposer des réorientations au sein de l'entreprise, de la branche ou vers d'autres métiers, grâce à des dispositifs de transition professionnelle. Il s'agit donc d'un suivi individuel renforcé du salarié.