Je suis ici pour rendre compte des travaux du COR. Vous avez porté des appréciations sur la réforme, mais il n'est pas dans mon rôle de vous donner mon opinion.
Le rapport cite deux conventions : la convention EPR et la convention EEC. Dans mon exposé, je n'ai évoqué que la convention EPR, c'est-à-dire celle qui sert de base aux lois de financement de la sécurité sociale dans un souci de simplification du débat. La convention « équilibre permanent des régimes » (EPR) prévoit une intervention financière de l'État limitée au strict équilibrage des régimes de la fonction publique civile et militaire d'État (compte d'affectation spéciale « Pensions ») et aux régimes spéciaux retracés au sein de la mission « Régimes sociaux et de retraite » pour lesquels il verse une subvention. Il prévoit une intervention de l'État financière stabilisée, indépendante de la baisse annoncée des dépenses du CAS Pensions et de la mission « Régimes sociaux et de retraites ». Ainsi les moindres dépenses constatées en direction de ces deux postes budgétaires seraient intégralement réinvesties dans le système des retraites. Vous disposez de toutes les informations au sein du tableau « Convention EPR » du rapport.
Certains m'ont demandé si nous disposions de temps pour faire la réforme. Après avoir été à l'équilibre en 2021, le solde était excédentaire en 2022, avant de se dégrader dès 2023 et 2024. Je n'ai pas à porter de jugement sur l'urgence de la réforme. C'est à la représentation nationale et au Gouvernement de prendre les décisions qui s'imposent.
Vous m'avez interrogé sur une éventuelle action sur les cotisations et le niveau des pensions à la place de la mesure d'âge. Pour équilibrer le système à l'échéance des vingt-cinq prochaines années, il existe en effet trois possibilités : repousser l'âge, augmenter les cotisations, diminuer les pensions.
Dans l'hypothèse d'un taux de croissance annuelle de la productivité à long terme de 1 %, le taux de prélèvement sur l'ensemble des rémunérations est de 31,2 % en 2021. Si rien n'est fait, le taux de ressources baisse en moyenne sur vingt-cinq ans à 30,1 %. L'évolution nécessaire par rapport au taux spontané est donc de 1 % : au lieu de prélever 30,1 % des rémunérations, il faudrait prélever 31,1 %. Quelle est l'évolution nécessaire par rapport au taux initial ? Elle est de zéro à l'horizon de vingt-cinq ans puisqu'il y a déjà une baisse. La retraite, c'est un paquebot : il faut prévoir une visibilité à cinquante ans, mais il est possible de se donner des règles de pilotage pour une durée moins longue. C'est la raison pour laquelle le décret qui définit nos missions a prévu que nous fassions des calculs sur vingt-cinq ans.
Idem pour l'évolution de la pension relative pour atteindre l'équilibre en moyenne sur les vingt-cinq prochaines années. En 2021, les pensions relatives représentaient 50 % des rémunérations. Spontanément, ce taux va baisser à 47,1 % en moyenne sur les vingt-cinq meilleures années. Afin d'atteindre l'équilibre, il faudrait que la baisse soit de 6,5 % par rapport à la pension initiale ; par rapport à l'évolution spontanée, la baisse devrait être de 3,4 % supplémentaires. Nous tenons ces tableaux à votre disposition.
Vous avez souligné que les prévisions s'avéraient toujours décevantes. Je suis d'accord avec vous ! Je n'ai pas de boule de cristal et je n'en sais pas plus que vous. J'ai parfois le vertige face à toutes ces courbes de prévisions jusqu'en 2070. Quand j'entends parler de la guerre en Ukraine, des menaces nucléaires, du réchauffement climatique, des tensions avec la Chine, je me dis que je devrais plutôt cultiver mon jardin... Si je continue, c'est parce qu'en démocratie, il faut prendre des décisions, notamment sur les retraites. Pour cela, il faut être éclairé. À horizon d'un an, on peut parler de prévisions ; à cinquante ans, ce sont des projections raisonnables et raisonnées. C'est ce que nous faisons avec les membres du COR pour orienter les débats et les décisions parce que, sinon, vous seriez extrêmement démunis. Nous essayons de ne pas être prétentieux, nous faisons ce travail parce que nous pensons qu'il peut être utile.
Sur les exonérations, pour ce qui est de la retraite, elles sont compensées, sauf pour celles concernant les heures supplémentaires, dont l'impact financier relève de l'épaisseur du trait.
S'agissant des étrangers, notre système de retraite ouvre des droits dès lors qu'une personne travaille en France, qu'elle soit française ou étrangère. Ce système contributif repose sur une logique différente de celle de l'Aspa, qui est un dispositif de solidarité nationale. Pour toucher cette aide, il faut vivre au moins six mois en France et avoir eu auparavant une résidence légale de dix ans dans notre pays. J'ajoute que la réciproque est vraie : heureusement qu'il y a une reconnaissance internationale des droits à la retraite pour les Français qui travaillent à l'étranger et bénéficient de retraites étrangères de retour dans notre pays !
Sur la capitalisation, nous n'écartons aucun paradigme. Des réunions du COR ont été consacrées à l'épargne retraite. Les dispositifs de capitalisation, les produits d'épargne retraite peuvent être rendus obligatoires par un accord collectif dans une entreprise, mais pour l'essentiel ils sont facultatifs. Notre système de retraite par répartition est, en comparaison internationale, relativement généreux. Je vois mal les actifs d'aujourd'hui cotiser en répartition pour la retraite de leurs anciens et en capitalisation pour eux-mêmes.