En novembre 2017, le Parlement était saisi d’un projet de loi relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024. Le Sénat s’était prononcé, à l’unanimité, en faveur de l’adoption de ce premier texte. Cette unanimité témoignait de la volonté, quelles que soient les travées, de réussir Paris 2024.
Cinq années plus tard, et un an et demi avant les Jeux de Paris, voici le Parlement de nouveau saisi d’un projet de loi. Si ce dernier était à l’origine affublé du même titre, le Sénat a accepté notre demande, en ajoutant à l’intitulé la précision suivante : « portant diverses autres dispositions » – le changement n’est pas anodin.
Nous souhaitons toujours, comme l’ensemble des sénateurs et sénatrices, la réussite des Jeux. Cette réussite passera-t-elle par l’adoption de ce nouveau texte ?
Bon nombre de mesures très utiles sont présentes dans ses vingt-quatre articles. Ainsi, les adaptations nécessaires en matière d’offre de soins et de formation aux premiers secours sont compréhensibles. On perçoit bien la nécessité d’avoir un centre de santé au sein du village olympique, tout comme celle de former davantage de personnes aux premiers secours.
Le chapitre II consacré à la lutte contre le dopage est d’importance. L’autorisation donnée à l’examen des caractéristiques génétiques ou à la comparaison des empreintes génétiques pour les analyses antidopage a provoqué de vifs débats dans l’hémicycle. Nous nous félicitions de l’adoption de l’amendement de notre collègue Jean-Jacques Lozach, qui a pour objet un échange d’information entre l’Agence française de lutte contre le dopage et Tracfin.
Le chapitre V, tel que modifié par le Sénat, permet d’éviter le recours aux ordonnances pour l’application du texte en outre-mer. Cela devient une habitude légistique sénatoriale, et c’est un progrès indéniable.
La sécurité de ces jeux Olympiques est l’un des enjeux principaux mis en avant par le Gouvernement. Alors que notre pays reste confronté à des menaces d’envergure, nous comprenons que l’exécutif y consacre d’importantes ressources, nous comprenons la recherche d’efficacité derrière le fait d’accorder plus de pouvoirs au préfet, nous comprenons la mise en conformité du régime de la vidéoprotection avec le droit européen de la protection des données.
Nous sommes donc prêts à comprendre beaucoup de choses, mais cela ne veut pas dire que nous soyons prêts à tout accepter !
Dans ce texte, les jeux Olympiques et Paralympiques sont ce qui nous intéresse. Or plusieurs mesures présentées comme des expérimentations temporaires sont amenées à être pérennisées au-delà de l’échéance des Jeux.
Cela résulte de la volonté du Gouvernement, mais aussi de plusieurs évolutions défendues par la majorité sénatoriale.
Par exemple, le Sénat a retiré tout caractère expérimental à la possibilité pour le laboratoire antidopage français de procéder à des tests génétiques sur les échantillons prélevés sur les sportifs. Pourtant, la mise en œuvre d’une telle mesure qui déroge aux dispositions du code civil issues des lois relatives à la bioéthique aurait mérité un débat approfondi et une expertise pluraliste – ce n’est pas l’unique rapport d’évaluation envisagé par la majorité sénatoriale qui suffira à combler ce manque.
Au sujet de la vidéosurveillance automatisée, la position de la majorité sénatoriale aboutit à préjuger de la pérennisation de cette technique de contrôle, laquelle constitue pourtant un véritable tournant en matière de sécurité publique. En allongeant la durée de l’expérimentation bien au-delà de la période des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, en anticipant d’ores et déjà sa reconduction, voire son application définitive, ce texte définit un nouveau standard de sécurité pour notre pays.
Même rendu plus précis par nos travaux, même en comprenant un droit d’information du public renforcé, ce texte n’est pas, selon nous, le bon véhicule législatif pour porter des choix aussi lourds.
Par ailleurs, l’organisation des jeux Olympiques de 2024 constitue un prétexte pour apporter une solution sécuritaire à certains problèmes de maintien de l’ordre au sein des stades et pour renforcer démesurément les peines applicables, alors même qu’un groupe de concertation entre représentants des supporters et des ministères concernés est à l’œuvre.
Des associations de supporters, que l’on peut considérer comme des amies du monde sportif, ont ainsi exprimé leurs plus vives inquiétudes quant au contenu de ce texte. Les articles 12 et 12 bis, sur l’initiative de la droite sénatoriale, sont d’autant plus malvenus que l’exécutif souhaitait ces dernières années restaurer le dialogue avec les supporters.
En outre, faut-il vraiment prévoir des peines de prison, si des militants envahissent le Stade de France pour porter un message politique ?