Monsieur le ministre, la mixité sociale est à l’école publique ce que les droits de l’homme sont à la France : une part de son être, le résultat d’une histoire et d’une politique de longue haleine.
La première égalité est celle de l’accès au savoir. C’est le droit fondamental et inaliénable à une instruction que notre école publique n’est malheureusement plus en mesure de fournir à tous les enfants de notre pays.
La crise de confiance est telle que de plus en en plus de parents se tournent vers le privé, moins par conviction que pour échapper aux failles de l’école publique.
Le constat et les chiffres sont, hélas, bien connus, de la dégradation du climat scolaire identifiée dans un rapport du Sénat pointant le phénomène du « pas de vague » à l’étiolement de l’autorité dû à une politique du laisser-faire. Ajoutez à cela l’absence de reconnaissance d’un statut qui perd en attractivité, et vous obtenez logiquement une crise des vocations dans l’enseignement.
Tel est le cocktail explosif qui empêche vraiment la mixité sociale.
Laisser l’école publique se dégrader conduit mécaniquement à un déport vers le privé. Pour assurer une mixité sociale dans l’école de la République, encore faut-il que le niveau général de l’instruction prodiguée aux élèves soit redressé partout, pour tous et dans la durée.
Vous proposez de colmater un bateau dont il faut redresser le gouvernail par des binômes d’établissements et un charcutage de la carte scolaire indignes des enjeux.
Ne nous trompons pas de débat, et encore moins de solutions, monsieur le ministre. Le sociologue Jean-Pierre Terrail rappelait en 2006 que les enfants de toutes les classes sociales peuvent mener une scolarité égale dès lors que le savoir transmis est le même partout.
La maîtrise des acquisitions élémentaires neutralise le poids de l’origine sociale dans les parcours scolaires. Telle est donc la clé si l’on veut vraiment et durablement gommer le poids des inégalités sociales.
Comme l’indiquait votre illustre prédécesseur Jules Ferry, « avec l’inégalité d’éducation, je vous défie d’avoir jamais l’égalité des droits ».
Monsieur le ministre, comment comptez-vous agir pour garantir à nouveau cette égalité et rétablir la mission essentielle et première de l’école publique ?