À cet égard, les conséquences de la réforme de 2010, qui a repoussé à 62 ans l’âge légal de départ, sont parlantes. En 2019, six ans après ce report, la Cour des comptes a constaté une hausse de 800 millions d’euros du coût annuel des arrêts maladie, dont elle attribue une large part au report en question.
Le mois dernier, une étude du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) a confirmé ce phénomène : le report de l’âge légal de départ à 62 ans a provoqué une augmentation significative de la fréquence des arrêts maladie.
Il faut donc prendre en charge la pénibilité et adapter les postes. Or, en la matière, presque tout reste à faire. Vous avez supprimé la prise en charge de quatre facteurs de pénibilité, et vous ne les rétablissez même pas tous !
Par exemple, au lieu de balayer la question, complexe, des agents chimiques dangereux, il faudrait au contraire mener un vrai travail sur les activités responsables d’émissions d’aérosols dangereux, sur le fondement des nombreuses bases de données existantes.
Il faut même aller plus loin : réserver les postes les moins pénibles aux salariés les plus âgés, favoriser le recours effectif au compte professionnel de prévention, qui n’est mobilisé que par 6 personnes éligibles sur 1 000, et prévenir les risques divers – mener, en somme, une politique de prévention ! Un tel effort s’est révélé payant dans les pays qui ont déployé des moyens en ce sens.
Mais le virage de la prévention amorcé au mois de novembre dernier a percuté le mur de Bercy. Ce texte n’est pas une loi de finances sociales, c’est une loi de Bercy !
Les Français, eux, ont tout compris. Cette réforme financière, vous voulez l’imposer à leurs dépens. Dans les petites villes, sur tout le territoire, messieurs les ministres, ce sont des personnes qui travaillent, souvent pour peu de revenus, qui se révoltent. Ce ne sont pas des inactifs ! Il est temps de les écouter, avant que le sourd ressentiment qui traverse le pays ne porte d’autres conséquences.
Nous avons élu un chef de l’État pour qu’il fasse barrage à l’extrême droite, pas pour qu’il défende un projet qui ajoute du carburant au moteur de celle-ci.