Ma réponse sur les retenues provoque généralement beaucoup de critiques de la part de mes collègues écologues et hydrologues, qui ne s'entendent pas sur l'opportunité des retenues.
Une bassine est un objet mal identifié. J'ai tendance à considérer qu'une bassine est une retenue qui comporte plus d'une digue, par contraste à un barrage sur une rivière. Les « giga-bassines » par excellence sont constituées par les retenues des grands lacs de Seine, qui comptent quatre retenues, une sur l'Yonne et trois en dérivation sur l'Aube, la Marne et la Seine. Ces bassines, en dérivation par rapport aux cours d'eau principaux, sont alimentées par un canal de prélèvement et restituent l'eau au cours d'eau par un autre canal. Il est frappant de constater que ces giga-bassines sont parfaitement acceptées et sont même devenues des sites importants pour les écologues et les protecteurs des oiseaux. Je pense donc qu'une retenue n'est pas condamnée, dès sa conception, à être quelque chose de démoniaque.
Les bassines des Deux-Sèvres et les quelque 11 000 plans d'eau, dans le bassin versant de la Sèvre nantaise, sont alimentés par les ruissellements. Certains de ces plans d'eau sont très anciens et ne posent pas de problèmes a priori. Ils appartiennent au paysage. Ce qui soulève des difficultés, c'est un type de bassine bien définie, alimentée par pompage.
La première question que posent ceux qui s'y opposent est de savoir pourquoi prélever l'eau de la nappe superficielle. Le fait d'alimenter ces bassines par pompage est perçu par certains défenseurs de l'environnement comme une intention de contourner les restrictions, alors qu'on pourrait défendre le contraire. Je ne défendrai rien quant à moi, mes recherches ne m'ont pas permis de trancher cette question.
Une réserve de substitution alimentée par des écoulements de surface me semble plus acceptable. Son impact au moment du remplissage est plus fort, mais elle ne présente pas d'incidence différée, l'eau souterraine étant destinée à s'écouler et à rejoindre, pour la quasi-totalité des eaux souterraines françaises, un cours d'eau avant de se jeter dans la mer.
Je pense qu'un gros travail de communication reste à faire. Les grands lacs de Seine font d'ailleurs un énorme effort de communication sur leurs avantages et sur les populations d'oiseaux qu'ils abritent. Ils sont très bien acceptés. Il n'y a donc pas de raison que d'autres ouvrages ne puissent pas être acceptés de la même façon.
J'ajoute, s'agissant du recyclage des eaux usées traitées, que celui-ci se fait depuis très longtemps, mais on le faisait sans le dire puisque, dès lors qu'une station d'épuration rejette de l'eau dans un cours d'eau, celle-ci repart dans le cycle naturel, la seule exception étant les communes littorales, qui rejettent les eaux traitées directement en mer.
Le bassin de la Sèvre nantaise compte ainsi plus de rejets de stations d'épuration que de prélèvements agricoles.
Comme cela a été dit, cela peut poser des problèmes de chimie des eaux et générer des effets sur l'environnement. Nous savons tous que les stations d'épuration n'ont pas la capacité d'épurer les eaux en totalité. Se pose donc la question des perturbateurs endocriniens, ces résidus médicamenteux se retrouvant dans les cours d'eau, où ils perturbent la faune aquatique - phénomènes de changement de sexe chez certaines espèces de poissons, etc. - mais aussi sur l'ensemble de l'écosystème. On a effectivement du mal à en évaluer les effets.
Il n'empêche que les stations d'épuration ne peuvent stocker l'eau, et il serait illusoire de prétendre qu'une station d'épuration pourrait avoir un rendement de 100 % et produire une eau distillée.
Il y aura donc toujours un flux de pollution, et il faudra toujours des flux d'eau non polluée pour diluer une partie de celui-ci. Je ne dis pas que c'est bien ou mal : pratiquement, c'est ce que l'on observe.