Monsieur Bruno Le Maire, ministre de l’économie, invité d’une station de radio le 20 février dernier, avait resservi à ses auditeurs un discours désormais bien connu, tendant à qualifier les oppositions de « dealers de peur », comme si contrôler l’action du Gouvernement et ses prévisions économiques revenait pour les oppositions à outrepasser le rôle qui doit être le leur au Parlement.
« Je ne veux pas que certains jouent avec les peurs des Français en disant : “récession”, “chômage”, “vague de faillites”. Cela ne correspond pas à la réalité et je pense qu’il est bon en politique de revenir à la réalité et de garder son sang-froid », disait-il.
« Revenir à la réalité » impose de se mettre d’accord sur les faits.
Est-ce la réalité que les radiations atteignent un record sans précédent en novembre 2022, avec 58 100 radiés, une première depuis 1996, date du premier recensement de cette statistique ?
Est-ce la réalité que les radiations représentent 9, 7 % des sorties au quatrième trimestre de l’an dernier ?
À manier à tort et à travers les arguments autour de la responsabilité en politique, on finit par s’exposer soi-même, et son gouvernement, au risque de manquer de rigueur et donc d’être pris en défaut, si ce n’est pour mensonge, du moins pour subjectivité démesurée et, en somme, pour irresponsabilité.
Par cet amendement, nous proposons de majorer le déficit structurel ; notre intention est bien de vous alerter sur le fait que vos estimations ne sont pas justes et que, dès lors, vous ne tiendrez pas les objectifs que vous vous assignez et que nous ne partageons pas.
Alors que le déficit structurel de notre pays est estimé à 4, 9 % du PIB par la Commission européenne pour 2023, la majorité sénatoriale fondait ses ambitions, lors de l’examen du projet de loi de programmation, sur une tout autre prévision : 3, 6 % de déficit structurel.
C’est bien une différence d’approche qui nous oppose. Cette différence a des conséquences budgétaires extrêmement importantes, car nous minorons d’autant la part conjoncturelle imputable au déficit public, c’est-à-dire aux mesures temporaires ; les mêmes mesures dans lesquelles le Sénat voulait trouver sa voie de passage pour justifier une austérité plus importante !