Intervention de Sébastien Lecornu

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 28 février 2023 à 17h30
Audition de M. Sébastien Lecornu ministre des armées

Sébastien Lecornu, ministre :

S'agissant de l'Afrique, je souhaiterais commencer par rappeler le rôle de nos différentes bases sur ce continent, toutes n'ayant pas les mêmes missions.

Nos forces prépositionnées sont présentes car des États souverains l'ont décidé à la suite d'accords de défense comportant des cahiers des charges bien définis. Cela est vrai pour le Sénégal, le Gabon, la Côte d'Ivoire, le Tchad, Djibouti, ou encore plus récemment pour le Niger, qui a récupéré une partie des infrastructures de l'opération Barkhane. La réflexion que le Président de la République m'a demandé de conduire concerne assez spécifiquement le Tchad, la Côte d'Ivoire, le Sénégal et le Gabon. La base de Djibouti relève également d'un accord de défense mais cette base est très tournée vers l'Indopacifique. C'est la raison pour laquelle elle n'est pas intégrée à cette réflexion.

Toutes ces bases n'ont pas les mêmes missions. Celles au Gabon et au Sénégal ne comprennent aucun équipement d'intervention, les forces prépositionnées qui s'y trouvent n'assurant que des activités de formation. Il ne doit y avoir à Dakar que quelques véhicules de l'avant blindé (VAB). Dans d'autres bases, les fonctions de formation sont complétées par des fonctions d'intervention. C'est le cas pour Abidjan - Port Bouët, comme pour notre base au Tchad. Cette distinction est importante. Si l'on mélange les fonctions des bases, on ne peut pas comprendre pourquoi certaines regroupent 1000 effectifs et d'autres 450/500. Contrairement à certaines affirmations, les chiffres des effectifs n'ont pas diminué.

Nous mentirions aux Françaises et aux Français si nous ne constations pas collectivement que les forces armées sénégalaises, ivoiriennes ou gabonaises ne sont plus celles d'il y a 20 ans. Les efforts de montée en puissance de ces armées ont été prodigieux. Je tiens à leur rendre hommage. Le sujet est désormais de correspondre aux attentes de nos partenaires. Au gré de ses rencontres et de ses discussions, le Président de la République a estimé qu'il était temps de mettre à jour notre présence. S'en suit désormais un dialogue, qui n'est pas le même suivant les États puisque le degré d'avancement des réflexions reste disparate.

Il n'y aura aucune fermeture de base. Nous nous dirigeons vers une ouverture de ces emprises aux partenaires africains concernés. L'objectif est de former davantage, soit en termes d'unités constituées (officier, sous-officier, état-major, hommes du rang), soit en termes de qualité de formation - je pense notamment aux formations des forces spéciales. Nos formations doivent répondre à des besoins nouveaux. Ainsi, l'armée de Côte d'Ivoire faisant face de plus en plus au terrorisme, celle-ci a besoin de centres de reconditionnement pour ses soldats, sur le modèle de nos maisons Athos.

Notre plan d'action sera sur-mesure et pourrait se traduire par une diminution du nombre de nos soldats dans ces emprises puisque l'objectif est bien de renforcer les partenariats entre soldats français et étrangers. Je ne peux pas donner aujourd'hui de quantum puisque le travail prendra encore du temps. Il s'agit selon moi d'une opportunité historique pour l'armée française car nous accompagnons une montée en puissance d'États amis, qui ont décidé - à la différence d'autres États...- de lutter contre le terrorisme. Il ne s'agit donc pas d'un recul de la France dans ces pays mais bien au contraire d'une manière d'être présente différemment, dans le cadre d'un partenariat renforcé.

Enfin, je rappelle que ces accords sont passés avec des États souverains et que notre présence ou notre départ répondent à leur volonté. Les caricatures sont nombreuses sur ce sujet. Certains commentateurs nous reprochent d'avoir quitté le Burkina Faso. Même à l'égard de pouvoirs illégitimes issus de coups d'État, nous ne pouvons pas fouler au pied la souveraineté de ces pays. J'aurai l'occasion de revenir devant votre commission pour vous présenter l'état d'avancement de ces discussions. Nous avons une occasion historique de maintenir une présence militaire toujours aussi affirmée, en lui faisant prendre un visage différent, qui donne droit à des formations de meilleure qualité. Cette réorganisation traduit par ailleurs bien la stratégie de nos armées, qui doivent pouvoir davantage se projeter depuis l'hexagone.

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