Si nous souscrivons à l'idée que le mandat actuel de Frontex doit pouvoir être développé dans sa totalité avant d'envisager une éventuelle évolution et à la nécessité de renforcer le contrôle des Parlements nationaux, nous avons demandé que la PPRE soit examinée dans des conditions normales parce que nous la trouvons anachronique et décalée.
En effet, les nominations ont eu lieu, et la crise de Frontex est d'abord liée à l'incapacité actuelle de sa structure à témoigner des manquements aux droits fondamentaux dont elle pourrait être directement témoin.
La crise de Frontex est directement liée à l'existence d'une crise de confiance, née du soupçon sur le fait qu'elle ait participé à un certain nombre de refoulements, en particulier de la part de la Grèce, ou, à tout le moins, qu'elle en ait été témoin - nous pouvons en avoir la certitude. Par conséquent, si l'on veut que Frontex fonctionne, il convient de renforcer sa crédibilité et de prévenir une nouvelle situation de crise qui serait liée à des manquements en termes de respect des droits fondamentaux.
À cet égard, une proposition de résolution qui met l'officier aux droits fondamentaux sous contrôle direct du conseil d'administration de Frontex et qui empêche une expression aussi indépendante que possible ne nous semble pas aller dans la bonne direction.
Frontex a une mission difficile. En réalité, ce n'est pas une agence de garde-frontières : chaque fois que l'agence intervient dans un État, elle le fait sous la responsabilité de celui-ci. Les mandats de Frontex ont été révisés en particulier par rapport à la situation et aux besoins d'accompagnement de la Grèce. Si un jour l'agence dénonce la manière dont les autorités grecques effectuent des refoulements, pourra-t-elle continuer à agir en Grèce ? Frontex n'a pas pu agir à la frontière biélorusse, même si les méthodes utilisées par les autorités polonaises n'étaient pas conformes aux droits fondamentaux, parce que l'on n'a pas fait appel à elle.
Aujourd'hui, Frontex se trouve donc dans une situation où elle n'a pas la responsabilité directe de surveiller les frontières extérieures de l'Union européenne : elle accompagne les États membres, qui sont chacun responsables d'une partie de leurs frontières et les défendent de manière souveraine. L'agence doit pouvoir dénoncer un certain nombre de choses dont elle ne saurait être complice. Or la PPRE ne lui donne pas la possibilité de mieux les dénoncer qu'auparavant.
Par ailleurs, pour réussir à convaincre, dans la durée, les pays susceptibles de faire appel à Frontex de le faire, il est essentiel qu'elle soit inattaquable sur la question des droits fondamentaux : le contrôle par l'agence du respect des droits fondamentaux doit être libre. Nous avons donc un certain nombre de réserves sur la volonté que traduit la résolution de mettre sous tutelle ceux qui sont responsables des droits fondamentaux. Je pense, au contraire, que la protection des droits fondamentaux par Frontex et la manière dont elle peut dénoncer d'éventuels manquements dont elle serait témoin sont au coeur de sa crédibilité ainsi que de son efficacité sur le long terme.
C'est la raison pour laquelle nous déposerons en vue de la séance des amendements sur la partie de la résolution relative à l'officier aux droits fondamentaux, même si je remarque que le rapporteur, après un certain nombre d'auditions, en particulier celle du directeur de l'immigration, l'a fait un peu évoluer.