En application des articles 13 et 65 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, nous allons procéder, ce matin, aux auditions de quatre personnalités qualifiées dont la nomination est envisagée pour exercer les fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) : Mme Élisabeth Guigou et M. Patrick Titiun, dont les candidatures ont été proposées par le Président de la République ; Mme Dominique Lottin et M. Patrick Wachsmann, dont les candidatures ont été proposées par le Président du Sénat.
Ces auditions sont publiques : elles sont retransmises sur le site internet du Sénat. Elles seront suivies de votes, qui se dérouleront à bulletin secret, comme le prévoit l'article 19 bis de notre Règlement, à l'issue de chaque audition, dans notre salle de commission. Aucune délégation de vote ne sera admise, conformément à l'article 1er de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique, autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote.
Conformément à l'article 13 de la Constitution, je vous rappelle que, pour Élisabeth Guigou et Patrick Titiun, le Président de la République ne pourrait pas procéder à leur nomination si les votes négatifs au sein de notre commission et de la commission des lois de l'Assemblée nationale représentaient au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Le dépouillement aura lieu simultanément dans les deux commissions, vers 12 h 30.
Pour Dominique Lottin et Patrick Wachsmann, le Président du Sénat ne pourrait procéder à leur nomination si les votes négatifs de notre commission représentaient au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.
En application de notre Règlement, il me revient, préalablement à ces auditions, de formuler un certain nombre d'observations sur ces candidatures.
Vous le savez, le CSM comporte, à côté de représentants des magistrats, un représentant des avocats, un représentant du Conseil d'État et six personnalités communément qualifiées de « laïques », c'est-à-dire non-magistrats, désignées à parts égales par le Président de la République, le Président du Sénat et le Président de l'Assemblée nationale. Ces personnalités seront appelées à participer, de manière collégiale, aux décisions des trois formations du CSM : sa formation plénière et les formations compétentes pour le siège et pour le parquet.
Je rappelle que les candidats doivent évidemment connaître parfaitement le fonctionnement de notre justice, compte tenu du rôle disciplinaire, mais aussi du rôle de nomination du CSM. Il faudra également assurer l'accompagnement de toutes les évolutions législatives des prochains mois.
Je souhaite vous communiquer quelques éléments d'information sur chacune de ces personnalités.
S'agissant, tout d'abord, des personnalités proposées par le Président du Sénat, les deux candidats me semblent présenter deux profils complémentaires.
Dominique Lottin, tout d'abord, possède une expérience de la magistrature, au sein de laquelle elle a notamment exercé des fonctions d'encadrement en tant que chef de juridiction. Elle a ensuite été membre du Conseil constitutionnel, de 2017 à 2022. Elle a également récemment rendu au garde des sceaux un rapport intéressant sur l'équipe du magistrat, sujet de réflexion immédiat et sujet d'avenir pour nos juridictions.
Le second candidat proposé par le Président du Sénat, Patrick Wachsmann, est agrégé en droit public et fut professeur de droit à l'Université de Nancy, puis de Strasbourg, jusqu'en 2019, où il a été responsable du diplôme d'études approfondies de droit public - devenu Master 2 - pendant près de quinze ans. Il a notamment travaillé sur l'application de la Convention européenne des droits de l'homme par les juges français. M. Wachsmann est également déontologue de la ville de Strasbourg depuis 2014.
Son parcours paraît très complémentaire à celui de Mme Lottin. Juriste reconnu et fin connaisseur du droit national et européen, il pourra aussi s'appuyer utilement sur ses compétences et son expérience de déontologue pour traiter ces questions, le CSM accordant désormais une attention toute particulière au suivi déontologique et aux obligations des magistrats.
Pour leur part, les candidats du Président de la République présentent deux profils différents.
Élisabeth Guigou, que vous connaissez tous, a un profil beaucoup plus politique que les deux candidats précédents. Elle a occupé des responsabilités éminentes aux niveaux national et européen. Je rappelle qu'elle a notamment été garde des sceaux de 1997 à 2000. Mais sa connaissance du monde judiciaire ne s'arrête pas à ses fonctions ministérielles : vous vous souviendrez notamment que Mme Guigou a présenté devant notre commission des lois, le 1er décembre 2021, le rapport du groupe de travail qu'elle présidait sur la présomption d'innocence, dans la continuité de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, qu'elle avait portée.
Son expérience et son parcours présentent évidemment un intérêt pour le CSM.
Enfin, Patrick Titiun, second candidat présenté par le Président de la République, est actuellement chef de cabinet du président de la Cour européenne des droits de l'homme, fonction qu'il occupe depuis 2007, après avoir exercé différentes responsabilités au Quai d'Orsay, puis au Conseil de l'Europe.
M. Titiun est également ancien magistrat judiciaire, mais a démissionné de ces fonctions il y a sept ans.
Là encore, il est incontestable que le parcours juridictionnel et européen de M. Titiun serait un atout pour le CSM, et son profil, plus institutionnel et moins politique, est complémentaire de celui de Mme Guigou.
Les candidats devront présenter les raisons pour lesquelles ils ont accepté d'être proposés et répondre à nos questions.
Leur crédibilité ne pose pas de difficulté.
En l'absence d'opposition de notre part, ces quatre personnalités viendraient siéger auprès de M. Christian Vigouroux, désigné par le Conseil d'État, de M. Jean-Luc Forget, désigné par le Conseil national des barreaux, ainsi que de Mme Diane Roman et M. Loïc Cadiet, tous deux universitaires, désignés par la présidente de l'Assemblée nationale.
Nous allons commencer par l'audition de Mme Dominique Lottin.
La réunion, suspendue à 9 h 25, est reprise à 9 h 30.