Intervention de Christophe Béchu

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 9 février 2023 à 9h15
Audition de M. Christophe Béchu ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Christophe Béchu, ministre :

Monsieur Mizzon, il existe, en effet, une marge de manoeuvre pour mieux faire connaître l'Agenda rural. Toutefois, celui-ci reste totalement nécessaire, car les communes rurales sont en pointe dans la transition écologique, malgré le discours contraire que l'on entend parfois. En effet, la capacité de stockage du carbone repose sur leur aptitude à mener cette transition, et c'est là que les tensions sont potentiellement les plus fortes : parfois les investissements n'existent pas et il n'y a pas d'alternative à la voiture, ou bien, dans d'autres cas, les alternatives sont des impasses sur le plan écologique, de sorte qu'il faut conjuguer avec la réalité du terrain pour trouver des solutions, comme le leasing social pour la voiture électrique à moins de 100 euros.

L'Agenda rural contribue à faire des territoires ruraux des fers de lance de la transition écologique, à renforcer leur attractivité, à améliorer la vie des habitants et à accompagner les élus. Il doit entrer dans une nouvelle phase et s'intégrer dans une réflexion sur les zones de revitalisation rurale et, plus largement, dans le pacte de confiance que nous devons nouer avec la ruralité pour éviter le sentiment d'abandon de ces territoires.

Je maintiens ce que j'ai dit sur la garantie : retenir un hectare ne me semble pas approprié. La taille des communes varie de quelques unités à 1,8 million d'habitants. Le texte prévoit le critère d'un hectare pour toutes les communes, quelle qu'en soit la taille. Je plaide pour que la garantie rurale s'applique uniquement aux communes rurales. Le critère pour entrer dans cette catégorie doit-il être celui du nombre d'habitants ou de la faible densité ? On peut en discuter. Il me semble a priori qu'un critère de faible densité permettrait de mieux tenir compte de ce que l'Association des maires ruraux de France (AMRF) indique.

Quoi qu'il en soit, à partir du moment où un pourcentage identique s'applique à toutes les communes, le dispositif me paraît juste : une commune de 2 000 habitants bénéficiera, ainsi, d'un peu plus qu'une commune de 200 habitants. Je vous le dis clairement : il n'y aura pas de commission mixte paritaire (CMP) conclusive sur ce texte si l'on maintient la règle d'un hectare. Par conséquent, soit nous améliorons le texte, soit nous privilégions des postures à quelques mois d'une échéance électorale, ce qui serait dommage.

Les impacts en termes de surface sont les mêmes. Si l'on donne un hectare à toutes les communes, cela représentera 35 500 hectares ; si l'on donne 1 % à chaque commune, cela représentera 34 500 hectares. En revanche, si l'on réserve ce bénéfice aux communes peu denses, on réduit le chiffre de moitié, soit 17 000 hectares. On sera donc, à la fin, sur un volume comparable, mais pas réparti de la même manière.

Il ne faudrait pas que, dans la discussion sur le plancher ou la garantie, on finisse par créer un monstre qui consisterait à considérer que les communes peu denses n'auraient droit à rien de plus. En effet, il est souhaitable que les perspectives et les trajectoires soient significativement plus élevées que cette garantie dans bien des endroits, y compris parce qu'il y a une attractivité naturelle qu'il ne faut pas masquer.

Pour ce qui est des aménités rurales, voilà deux années consécutives que le montant de la dotation biodiversité pour les communes a été doublé : l'effort, en tendance, est réel. Je considère que cela reste un bon axe, car la question de la biodiversité pèsera sur bien des sujets en 2023 : après la COP15 de décembre dernier, l'enjeu principal porte sur la Stratégie nationale pour la biodiversité et sur son financement.

Aujourd'hui, la biodiversité est en partie financée par les agences de l'eau, alors que les dépenses liées à la situation hydrique ne font qu'augmenter. Avec la secrétaire d'État Bérengère Couillard, nous avons finalisé un plan Eau, qui comprend une cinquantaine de mesures portant notamment sur l'encadrement des forages, la réutilisation des eaux usées, la question des eaux grises, la lutte contre le gaspillage des eaux, la sécurisation de l'eau potable, etc.

Pour en venir à un sujet qui vous préoccupe et qui est loin d'être un « marronnier », 700 communes ont connu des difficultés en matière d'eau potable l'été dernier. La proportion de celles qui gèrent la compétence seules démontre que ce système n'est pas tenable. L'intercommunalisation de la gestion de l'eau va devenir une question de santé publique et de sécurisation. Il existe une corrélation et une simultanéité quand on superpose les cartes entre la gestion solitaire et le défaut d'approvisionnement. De faibles prix au mètre cube sont parfois l'indice d'un sous-investissement et d'un niveau de fuite élevé. On peut difficilement expliquer que l'eau est un sujet crucial et ne pas reconnaître la nécessité d'assurer un minimum d'interconnexions de sécurité et de rebouclages pour que le dispositif soit plus résilient. Par conséquent, je n'aurai pas la main qui tremble lorsqu'il s'agira d'expliquer que l'on ne peut pas remettre en cause l'obligation de l'intercommunalisation en 2026. Je connais les attentes sur ce sujet. Je ne souhaite pas rigidifier le dispositif. Je crois à la nécessité d'avoir des cartes qui tiennent compte de la réalité, mais on ne peut pas laisser les communes gérer seules, sauf en cas de situation géographique très exceptionnelle.

En matière de péréquation, la multiplication des couches archéologiques dans la DGF, dues à des « bouts de réforme » qui se sont additionnés, nécessiterait d'ouvrir une réflexion plus large sur la manière d'accompagner les collectivités territoriales. La question de la péréquation y aurait toute sa place. Quoi qu'il en soit, les écarts de richesse entre les collectivités rendent la péréquation objectivement juste : elle renforce la cohésion des territoires.

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