Le projet de hub en Guadeloupe et en Martinique est né d'un problème identifié et qui touche l'ensemble de l'industrie maritime : les nouvelles règles OMI 2023 de l'Organisation maritime internationale (OMI), mises en oeuvre en 2024, contraindront les transporteurs maritimes à faire davantage attention à leurs rejets de CO2. Nous aurons donc du mal, à l'avenir, à desservir des territoires actuellement desservis. C'est comme les nouvelles normes pour les réfrigérateurs : nous aurons une classification par rapport à l'utilisation du navire sur la ligne. Les services sur les Antilles et la Guyane seront touchés par ces nouvelles règles. Nous devrons revoir notre schéma et investir sur des navires plus grands car actuellement nous avons des rejets trop importants pour continuer à desservir ces territoires.
Nous avons des navires de 3 500 équivalents vingt pieds (EVP) pour l'Europe, de 2 200 EVP pour la Guyane. Nous devrons nous adapter pour desservir ces territoires tout en respectant les règles de l'OMI. Actuellement, ils sont desservis toutes les semaines avec un temps de transit tout à fait acceptable, même pour les produits frais.
Nous avons trouvé une solution : construire des navires de dernière génération, soit de 7 000 EVP - taille maximale - qui pourraient décharger en Guadeloupe et Martinique, et créer de la valeur en transbordant des conteneurs pour le plateau des Guyanes, et en Martinique en transbordant des conteneurs issus du nord du Brésil et des Caraïbes. Nous avons défini ainsi ce concept de hub pour l'import en Guadeloupe, et pour l'export en Martinique. Ce projet verra le jour en 2024-2025. Ces navires seront propulsés au gaz naturel liquéfié (GNL). L'objectif est de créer un corridor vert, et que le navire brûle du biométhane, gaz qui n'émet pas de CO2. Nous sommes encore en négociations, et espérons pouvoir naviguer entre l'Hexagone et les Antilles et la Guyane avec un navire totalement vert. Le GNL émet 20 % d'émissions de CO2 de moins que le fioul.
Je n'avais pas connaissance du dossier sur le hub de Saint-Pierre-et-Miquelon. Je crois que ces annonces ont été faites en 2016 par le Premier ministre Manuel Valls. Pour un hub, il faut massifier un flux entrant et/ou sortant. À Saint-Pierre-et-Miquelon, il faudrait chercher des destinations canadiennes ou américaines. Or actuellement, le consommateur dans ces territoires veut un service direct. Pour pouvoir mettre en place ce type de système, on subirait la concurrence des lignes directes, par exemple Le Havre-Halifax, sans passer par Saint-Pierre-et-Miquelon.
Je serais néanmoins ravi d'étudier ce projet pour comprendre sa finalité et savoir quels volumes étaient en jeu. Pour exporter des marchandises vers les États-Unis, il faut aussi remplir des formalités douanières pour respecter la Container Security Initiative (CSI), ce qui rajoute une complexification.
CMA CGM est partenaire de Neoline, un navire qui démarrera en 2025, avec l'équivalent de 1 200 mètres linéaires, soit 260 conteneurs, et pourra contenir 400 véhicules à l'intérieur. Il fonctionnera à l'électrique et à la voile. Nous avons hâte de voir ce navire innovant à Saint-Pierre-et-Miquelon.