Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 4 mars 2023 à 9h30
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 — Article 1er

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol :

J’observe que ceux qui soutiennent cet article – ils veulent même parfois en durcir encore les dispositions – parlent d’injustice pour les salariés qui ont plus, pas pour ceux qui ont moins. Jamais ils ne prennent pour étalon les salariés qui ont davantage d’acquis sociaux, qui ont mieux négocié leurs rémunérations, qui ont obtenu, par des luttes sociales, de meilleures conditions de travail.

J’observe aussi que cette conception ne vaut que dans un sens : ceux qui soutiennent cet article n’ont cette perspective que pour les salariés, il en va tout autrement pour les revenus du capital. Pour eux, il est juste que les revenus du capital assurent des conditions et une qualité de vie bien meilleures que les revenus du travail. L’injustice devient subitement vertueuse !

Dans ce sens-là, vous n’êtes pas troublés, au contraire ! Vous pensez même, d’une certaine façon, que l’injustice contribue au bonheur économique : c’est la fameuse théorie du ruissellement. Or ce que vous appelez le ruissellement, c’est simplement de l’injustice qui crée encore plus d’injustice !

On parle souvent du désamour des salariés pour leur entreprise, du manque d’esprit d’entreprise, ce que l’on appelle de nos jours l’esprit corporate… Dites-vous bien que ce qui faisait l’esprit d’entreprise, la communauté de travail, c’était aussi cette somme d’avantages – les billets de train, le régime de retraite, les réductions sur l’achat d’une voiture pour ceux qui travaillaient dans l’industrie automobile, etc.

Je ne suis pas une nostalgique du capitalisme social ou du paternalisme, mais j’en vois aujourd’hui les vertus. La volonté constante de tout niveler par le bas tend à désagréger les relations sociales et l’esprit d’entreprise.

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