Intervention de Daniel Neuenschwander

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 8 février 2023 à 13h35
Audition de M. Josef Aschbacher directeur général de l'agence spatiale européenne conjointement avec la commission des affaires européennes de l'assemblée nationale

Daniel Neuenschwander, directeur du transport spatial de l'Agence spatiale européenne :

Trois conditions sont nécessaires à la restauration durable de l'accès à l'espace. D'abord, dans les mois qui viennent, nous devrons suivre avec rigueur la préparation du vol inaugural d'Ariane 6, opération sine qua non pour l'Europe, dans la situation actuelle, et surtout la montée en puissance du programme de production, en vue de lancer des missions de souveraineté européenne. Ensuite, il faut assurer le retour en vol de Vega-C et, au-delà de la solution technique, en assurer une exploitation robuste par la révision de l'industrialisation du produit. Enfin, il convient de créer une vraie compétition pour le lancement de missions performantes de l'ESA dans la gamme des micro-lanceurs, voire des mini-lanceurs.

Nous travaillons aussi avec la Commission européenne sur un « ticket de vol européen » pour de petites missions technologiques. Dans ce domaine, le secteur public, Commission et ESA main dans la main, peut favoriser les jeunes pousses.

À moyen terme, c'est-à-dire à l'horizon 2025, il conviendra de soutenir l'industrie dans les technologies clés. Le rattrapage en matière de réutilisation des lanceurs est clairement un must have. En 2016, l'ESA a engagé le développement du moteur-fusée Prometheus. Lancé à l'initiative de la France, c'est un élément clé de la réussite de la réutilisation. Nous disposons d'un certain nombre de briques mais le rattrapage est long et nécessite des investissements. Nous travaillons sur la réutilisation d'un premier étage et nous avons un projet de réutilisation de deuxième étage, beaucoup plus complexe, mais ce sont des étapes que nous devons franchir.

À l'horizon 2025, Ariane 6 devra monter en puissance, ce qui posera la question du partage du risque d'exploitation entre secteur public et secteur privé. Ce sera un autre facteur clé de succès. Le secteur public ayant déjà pris des engagements jusqu'au modèle de vol 15, nous avons un peu de temps, mais il importe de fixer une perspective à l'industrie pour une exploitation stabilisée.

À plus long terme, à l'horizon 2030, il faudra revoir le modèle européen d'accès à l'espace, basé sur des sources multiples, menant à des capacités compétitives sur le marché accessible.

Comment garder l'avance du Centre spatial guyanais (CSG) ? Le segment n'est pas remis en question, mais le CSG doit être politiquement pérennisé comme port spatial de souveraineté pour l'Europe. Ensuite, il faut l'ouvrir pour en faire une base multi-applications incluant des projets commerciaux, pour y ajouter des navettes. La navette du projet Space Rider devrait atterrir en Guyane. Enfin, il faut moderniser significativement la base en la rendant plus flexible, plus digitale et plus verte, c'est-à-dire compatible avec les enjeux environnementaux.

La France, l'Allemagne et l'Italie ont pris des initiatives nationales dans le domaine des micro- et des mini-lanceurs. Le Royaume-Uni et l'Espagne ont aussi des projets avancés. La pérennité de ces initiatives est liée à l'évolution de la demande. La compétition des idées, des technologies, des projets est saine et doit être favorisée. L'ESA a plusieurs leviers d'initiative à ce sujet. Enfin, il convient de s'assurer que la demande effective dans le segment des services de lancement corresponde à l'offre. Si tel est le cas, une convergence des capacités entre les trois pays pourra s'opérer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion