Intervention de Esther Benbassa

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 15 mars 2023 à 8h35
Projet de loi pour contrôler l'immigration améliorer l'intégration — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Je souligne la contradiction de ce texte : d'un côté, il présente l'immigré comme « l'ennemi » de l'unité française, et caresse dans le sens du poil les penchants d'une partie de la population qui s'oppose à l'immigration. De l'autre côté, je suis d'accord avec certains articles montrant que nous avons besoin de ces immigrés, car le marché du travail les requiert, faute de personnel dans certains secteurs.

La liste des métiers en tension sera-t-elle changeante ou stable ? Qu'en est-il de la précarité d'un tel titre de séjour ? Une fois que le métier ne sera plus en tension, la personne détenant ce titre recevra-t-elle une OQTF ? Va-t-on exclure les étudiants en fin d'études du bénéfice de cette carte ?

Ce texte contient beaucoup de rhétorique, mais peu de solutions, et ne répond pas aux problèmes des préfectures pour fixer des rendez-vous : il y a des mois d'attente entre le récépissé et l'obtention de la carte.

Il y a quinze jours, j'ai visité un CRA. Il y a de vrais troubles dans ces centres avec le mélange des détenus et des retenus. Les directeurs s'en plaignent. Aucune solution n'a été proposée par ce texte. Je suis opposée à la rétention dans des centres administratifs, mais il est anormal que ce texte n'apporte aucune réponse à ces difficultés.

Instaurer un juge unique pose problème. Les assesseurs du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) sont les seuls à maîtriser les faits, enjeux et menaces géopolitiques allégués par les requérants. En les supprimant, le Gouvernement donne quartier libre à des juges uniques non formés en la matière.

Se posent aussi les problèmes des mineurs non accompagnés et de l'intégration des étrangers à la société française. On parle d'intégration, sans voir quelles sont les véritables solutions. Qui paiera les frais de certification d'un certain niveau de maîtrise de la langue française pour obtenir la carte pluriannuelle, qui coûte entre 90 et 150 euros selon les régions ?

C'est un texte musclé, plutôt qu'un texte ouvrant la voie pour que ces immigrés puissent être employés dans les secteurs en tension.

Ce texte est également contradictoire et lourd. Pourquoi le rajouter à la panoplie de tous les textes débattus au Sénat depuis de nombreuses années sur le sujet de l'immigration ?

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