Monsieur le président, monsieur le directeur général, madame la présidente, mes chers collègues, je partage tout à fait les propos indiqués par notre présidente sur le mépris du débat parlementaire et les inquiétudes sur la sûreté nucléaire. Cette réforme, présentée dans le cadre d'amendements gouvernementaux, peut être une source de défiance, quel que soit d'ailleurs son impact réel. Je le déplore, car il faut au contraire bâtir la relance du nucléaire sur la confiance. Mais aussi sur l'anticipation, et non la précipitation.
C'est la raison pour laquelle nous avons inscrit, dans le projet de loi « Nouveau nucléaire », plusieurs dispositions en faveur de la sûreté nucléaire. Elles visent à intégrer la résilience au changement climatique dans la démonstration de sûreté des réacteurs et la cyber-résilience dans leur protection contre les actes de malveillance, prendre en compte les risques de submersion et d'inondation et de recul du trait de côte dès l'attribution des concessions maritimes, maintenir le principe d'un rapport intermédiaire sur la mise en oeuvre des prescriptions de l'ASN dans le cadre des réexamens ou encore consolider les attributions et le fonctionnement de la commission des sanctions de l'ASN.
Dans ce contexte, la réforme annoncée par le Gouvernement, qui n'a fait l'objet d'aucune concertation ni d'aucune évaluation, soulève plusieurs inquiétudes.
Tout d'abord, je souhaiterais savoir ce qui justifie le changement de position de l'ASN sur ce dossier. En effet, dans un rapport de 2014, l'ASN avait estimé, aux côtés de l'IRSN, que « le dispositif de contrôle des activités nucléaires civiles repose sur un dispositif dual dont l'efficacité en matière de gouvernance des risques est démontrée ». Vous aviez précisé que « le principe de dualité a été retenu dans d'autres champs de l'action publique (le ministère de la santé) ou dans d'autres pays (l'autorité allemande) ». Vous aviez enfin préconisé « d'inscrire dans la loi le principe de publication des avis rendus par l'institut [et] de donner un caractère législatif à la mission de l'IRSN ». Autant d'arguments et de propositions qui ne semblent plus avoir cours aujourd'hui.
Plus encore, j'aimerais savoir ce que vous pensez de la réforme proposée par le Gouvernement. Le premier amendement présenté par lui, sur la consolidation des attributions de l'ASN, vous paraît-il adapté ? Reprend-il bien l'ensemble des missions de l'IRSN ? Et qu'en est-il du second amendement, sur les transferts des personnels de l'IRSN ? Pouvez-vous nous assurer que ses effectifs seront tous bien reconduits, avec des niveaux de rémunération et des conditions de travail similaires ? Jusqu'à quand s'étaleront ces transferts ? Et quel sera l'effort de formation ?
Enfin, je voudrais savoir comment vous comptez répondre aux recommandations de l'Opecst. Dans quel schéma seront assurées les missions d'expertise et de contrôle ? Entendez-vous instituer une « muraille de Chine » entre ces activités ? Par ailleurs, comment seront garantis le dialogue avec la société civile et l'absence de monopole dans l'expertise nucléaire ? Enfin, dans quelle mesure et sur quels points intégrerez-vous le retour d'expérience des systèmes intégrés étrangers ?
Je souhaite aussi poser une question complémentaire, en lien avec l'actualité : quel est le point de vue de l'ASN sur le phénomène de corrosion sous contrainte ? Quid de la fissure plus importante que prévu observée à Penly ? Remet-elle en cause les perspectives de disponibilité et de recettes du parc existant ?