Intervention de Timothée Furois

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 22 mars 2023 à 9h40
Mesures budgétaires et fiscales mises en oeuvre pour répondre à la crise des prix de l'énergie — Audition de Mm. Matthieu deConinck sous-directeur chargé de la fiscalité des transactions fiscalité énergétique et environnementale à la direction de la législation fiscale et timothée furois sous-directeur des marchés de l'énergie à la direction générale de l'énergie et du climat

Timothée Furois, sous-directeur de l'énergie à la direction générale de l'énergie et du climat :

La CRE a examiné ces dispositifs dans le cadre de ses dernières délibérations. Dans le projet de loi de finances initiale, le coût du bouclier tarifaire était estimé à 45 milliards d'euros, pour 36 milliards d'euros de recettes liées au mécanisme de compensation des charges de service public de l'énergie (CSPE) relatif aux producteurs d'énergies renouvelables. En ajoutant les 3 milliards d'euros permettant de tenir compte des dépenses résiduelles de la CSPE dues au titre de l'année 2022, on obtient le solde initial de 12 milliards d'euros du programme 345 « Service public de l'énergie ». Lors de l'examen parlementaire, l'amortisseur électricité a été ajouté, pour un coût estimé à 3 milliards d'euros. Parallèlement, la CRE a révisé à 32 milliards d'euros ses estimations de recettes de CSPE pour 2023. Il a fallu aussi prendre en compte l'élargissement des boucliers à l'habitat collectif. Si l'on ajoute le coût - 2 milliards -, des amendements adoptés, on obtient ainsi environ 50 milliards de dépenses, pour un solde du programme 345 de 21 milliards d'euros environ.

Les estimations de la CRE sont provisoires. Elles reposent sur des projections de prix et de portefeuilles, qui peuvent évoluer : les fournisseurs ont dû déclarer à la CRE leurs charges estimatives pour 2023 en janvier avant que leurs clients n'aient pu leur déclarer s'ils étaient éligibles à l'amortisseur. Un fournisseur n'a pas les moyens de savoir avec certitude si un client est éligible ou non à l'amortisseur. Leurs estimations sont donc indicatives.

Dans les dépenses pour 2023, figure un reliquat de dépenses au titre de 2022, car cette année-là les dépenses au titre des boucliers ont été faibles : des acomptes sur le bouclier électricité pour 122 millions d'euros, et sur le bouclier gaz pour 580 millions, et le paiement, pour la période de novembre 2021 à juin 2022, du bouclier collectif sur le gaz à hauteur de 590 millions d'euros. Les montants du bouclier gaz pour l'année 2022 ont été estimés par la CRE en novembre dernier à 3,5 milliards d'euros : si l'on retranche l'acompte déjà versé, il reste donc 3 milliards d'euros à payer.

L'évaluation du bouclier pour l'habitat collectif est délicate, car ce mécanisme est applicable ex post : le montant pour le premier semestre, entre novembre 2021 et juin 2022, s'élève à 590 millions d'euros. Le montant pour le second semestre 2022 n'est pas encore connu ; les dépôts de dossiers sont possibles jusqu'au 1er juillet dans certains cas : c'est à ce moment que l'on connaîtra le montant des boucliers collectifs pour 2022. On estime que le coût serait de 3 milliards d'euros pour le second semestre.

J'en viens aux dispositifs pour 2023, qui ont fait l'objet d'une délibération de la CRE au début de l'année. Les chiffres sont inférieurs aux estimations initiales. Le montant du bouclier électricité individuel s'établit selon la CRE autour de 24 milliards d'euros, un petit peu moins que l'estimation contenue dans le projet de loi de finances. L'écart est nettement plus élevé pour le bouclier gaz individuel, dont le coût est estimé par la CRE à 1,8 milliard d'euros pour le premier semestre, là où le projet de loi de finances comportait une prévision de 18 milliards d'euros pour 2023.

Le mécanisme de l'amortisseur a évolué depuis le projet de loi de finances initiale, car l'amortisseur spécifique aux TPE a été ajouté en février. La CRE estime que le dispositif coûtera 3,67 milliards d'euros en 2023, dont 600 millions pour les TPE. C'est assez proche de l'estimation fournie lors de la présentation du projet de loi de finances.

Tels sont les chiffres fournis par la CRE en février. Ils sont évidemment susceptibles d'évoluer en fonction des prix et des volumes consommés.

En contrepartie, les recettes tirées de la CSPE seront moins fortes que le montant de 32 milliards d'euros évalué par la délibération de la CRE en novembre dernier, en raison des prix plus faibles de l'électricité. Il est plus difficile d'estimer les recettes réelles liées à la CSPE en 2023, sachant que l'évaluation de leur montant fera de nouveau l'objet d'une délibération de la CRE en juillet prochain.

Après avoir répondu aux questions relatives aux dépenses, j'en viens à celles que vous m'avez adressées sur les « trous dans la raquette » et les évolutions de ces dispositifs.

Tout d'abord, les habitats collectifs chauffés à l'électricité n'étaient initialement pris en charge par aucun dispositif. C'est désormais le cas, à la suite de la publication de décrets le 30 décembre dernier, qui s'appliquent au second semestre 2022 pour l'habitat collectif qui utilise de l'électricité et pour l'année 2023. Les structures juridiques éligibles à ce dispositif sont les mêmes que celles qui sont éligibles au dispositif relatif à l'habitat collectif qui se chauffe au gaz.

D'ailleurs, la liste des types d'habitats collectifs chauffés au gaz éligibles à un tel dispositif a été progressivement élargie. À partir du 1er juillet 2022, ont été ajoutés à cette liste les casernes de gendarmerie, les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et les logements en intermédiation locative. D'autres organismes ont été ajoutés en janvier 2023, notamment des structures de l'aide sociale à l'enfance et des établissements de protection judiciaire de la jeunesse, car ils avaient été omis dans les premiers dispositifs. Ainsi, le périmètre du bouclier collectif gaz a été ajusté et complété au fil du temps. Le dispositif électricité, qui a été mis en oeuvre à sa suite, reprend ce périmètre.

De plus, les boucliers tarifaires pour les particuliers, qui s'appliquent automatiquement, fonctionnent assez bien. L'amortisseur électricité a été mis en oeuvre dans des délais très contraints - il a pris effet le 1er janvier dernier alors qu'il a été voté dans la loi de finances pour 2023. Les fournisseurs ont dû réaliser un travail informatique considérable pour que le dispositif soit mis en oeuvre dans les premières facturations de l'année 2023. À mon sens, c'est une belle réussite. Selon les projections des fournisseurs, il resterait néanmoins des entreprises éligibles à ce dispositif qui n'y ont pas encore eu recours..

Enfin, le taux d'usage du chèque énergie est évalué à la fin de la campagne, qui dure un an. Aussi, le taux d'usage des chèques qui ont été attribués en toute fin d'année dernière, voire au début de cette année, en ce qui concerne le chèque énergie exceptionnel, ne peut pas être comparé à celui d'une campagne arrivée à son terme. Pour autant, à l'heure actuelle, il est d'un peu plus de 57 %. En ce qui concerne les chèques énergie fioul et bois, le ratio entre le nombre de personnes ayant effectivement bénéficié des chèques et le nombre de personnes éligibles est plus faible. L'enjeu serait de maintenir le portail ouvert plus longtemps et de renforcer la communication auprès des ménages.

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