Une dose journalière admissible (DJA) était définie au niveau européen et la France était en dessous de celle-ci. Je pense que c'est un élément d'explication du décalage. Dans les autres pays, les teneurs demeurent bien plus élevées.
Sur la santé environnementale, il y a effectivement beaucoup d'intervenants et une multiplicité des tutelles. Je n'ai pas de réponse magique... Il est probable qu'il faille une implication scientifique et politique plus forte sur ce sujet, et peut-être imaginer une forme de chef de filat. Le sujet est tellement global et complexe que l'on en arrive à un éparpillement et à une multiplicité des acteurs. Cela nous renvoie, sur beaucoup de points, à la question des collectes de données. Il faut probablement une meilleure coordination et davantage de moyens.
Sur l'antibiorésistance, pourquoi Santé publique France s'occupe-t-elle de la médecine humaine et l'Anses de la médecine vétérinaire ? Il y a, d'abord, une raison historique. Les structures de santé humaine se sont occupées de l'antibiorésistance dans le domaine humain, et les structures vétérinaires - à l'époque, l'Afssa et l'ANMV - de celle au niveau animal.
Nous nous intéressons à l'antibiorésistance pour au moins trois raisons : par égard pour l'animal malade à soigner, mais ce n'est pas un problème majeur en médecine vétérinaire ; pour l'alimentation humaine, les denrées que nous ingérons pouvant nous amener à consommer des bactéries résistantes ou des phages de bactéries résistantes - les résidus d'antibiotiques sont très contrôlés au niveau alimentaire : plus de 20 000 analyses sont réalisées chaque année sur les antibiotiques, mais les facteurs de résistance peuvent être présents ; pour l'éventuel passage à l'homme d'une pathologie avec un germe de résistance.
Or, s'il y a, en médecine humaine, une liberté de prescription assez large et une problématique de remboursement, en médecine vétérinaire, on peut maîtriser plus facilement les règles de prescription et il n'y a pas de remboursement. Et le plan Écoantibio a montré que nous étions capables de limiter les quantités de manière extraordinaire et de faire passer la consommation d'antibiotiques critiques quasiment à zéro. L'agriculteur ou le propriétaire d'un animal de compagnie n'a pas accès aux antibiotiques : il faut passer par un prescripteur, le vétérinaire, qui, du reste, doit respecter un certain nombre de règles.
Fusionner l'ensemble dans un seul bloc n'aurait pas d'intérêt, compte tenu des spécificités. En revanche, il est très important que l'articulation soit extrêmement fine. C'est le cas actuellement, puisqu'il y a énormément de relations sur ce sujet entre l'Anses, Santé publique France et l'ANSM, ainsi qu'entre la direction générale de la santé (DGS) et la DGAL. L'articulation entre les différents acteurs a progressé ces dernières années. D'ailleurs, un colloque est organisé chaque année par la DGAL et la DGS sur les avancées en matière de lutte contre l'antibiorésistance. Je suis donc convaincu que le dispositif doit rester au niveau de l'Anses.
L'eau du robinet est très contrôlée. Il y a des seuils limites à respecter. Ils sont parfois dépassés, auquel cas il faut faire soit de la dilution, soit de la fixation sur charbon actif. Il existe des méthodes. Je pense qu'il est préférable - mais c'est aux scientifiques de se prononcer - de boire l'eau du robinet plutôt que l'eau en bouteille, sachant que les dépassements sont rares, sauf peut-être dans quelques zones, compte tenu des moyens de contournement dont on peut disposer.
J'en viens aux cerises : je pense que vous évoquez le diméthoate, que j'ai interdit sans hésitation quand j'étais DGAL, car la teneur des produits traités était supérieure à la dose toxique aiguë pour les enfants. Certains pays continuent de l'utiliser. Je ne sais pas où nous en sommes aujourd'hui. À l'époque, nous avions mis en place des mesures pour obtenir des garanties sur le non-traitement au diméthoate des cerises importées. Les plans de contrôle étaient bien négatifs. Je pense que c'est toujours le cas. On peut peut-être parler de surtransposition, parce que la substance n'était pas retirée au niveau européen, mais il y avait tout de même un risque de toxicité aiguë pour les enfants, ce qui est rare pour un produit phytosanitaire. Je continue donc d'assumer le retrait du diméthoate.
Très sincèrement, je n'ai pas l'impression que le ministère de l'agriculture ait un leadership sur celui de la santé. Cependant, il est vrai qu'il finance beaucoup.