secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. - Nous avons suivi attentivement les travaux de votre mission d'information.
Cette crise a bousculé les jeunesses, dans leur situation familiale, territoriale. Pourquoi « les jeunesses » ? Parce qu'il y a en France 12 millions d'adolescents et de jeunes adultes : collégiens, lycéens, étudiants, parfois en décrochage, de jeunes actifs ou en recherche d'emploi ; certains peuvent compter sur leur famille, d'autres non. Parler des jeunesses au pluriel, c'est prendre en considération leur diversité.
Cette classe d'âge est marquée par une multitude de transitions : études, entrée sur le marché du travail, autonomie financière, accès au logement. Cela multiplie les besoins d'accompagnement.
Notre rôle est de mettre au coeur de notre action la promesse républicaine, et l'égalité des possibles - de faire en sorte que les possibles se construisent.
On a pu parler, au cours de cette crise, de tensions entre générations, d'individualisme. Ce n'est pas ce que j'ai vu. J'ai vu, au contraire, des jeunesses engagées, solidaires. Un exemple : le site jeveuxaider.gouv.fr a reçu 350 000 inscriptions, dont 45 à 47 % de moins de trente ans. Pour beaucoup, c'était leur premier engagement. Plus de 58 000 missions de service civique ont également été adaptées de manière proactive à la crise sanitaire.
Il y a néanmoins des difficultés incontestables. Un jeune sur cinq vit en dessous du seuil de pauvreté. Quelque 14 % d'entre eux ne sont ni en emploi ni en formation, leur taux de chômage est deux fois supérieur à la moyenne de la population.
Nous avons évoqué, avec la sénatrice Michelle Meunier, l'impact psychologique de la crise sanitaire sur les jeunes, souligné par le psychiatre Boris Cyrulnik ; il y a aussi un impact économique avec la rupture qu'a été la fin brutale des petits boulots , pour les jeunes étudiants et jeunes actifs. La première réaction du Gouvernement à cette rupture a été de mettre en oeuvre rapidement le plan « 1 jeune, 1 solution ».
Dès 2017, le Gouvernement s'est donné pour priorité de réduire le chômage. Nous avons ainsi débloqué 15 milliards d'euros entre 2018 et 2022 pour former plus d'un million de jeunes ; nous sommes également allés chercher les jeunes en décrochage, en particulier dans les outremers, car notre regard doit être territorialisé.
Nous avons aussi été à l'origine d'avancées sociales : obligation scolaire entre 16 et 18 ans, accès accéléré à l'apprentissage notamment. Ma mission consiste à lever les freins à l'égalité des chances, où qu'ils se trouvent.
Le plan des 1 000 premiers jours, pour les 0-3 ans auxquels vous faisiez référence, est porté par Adrien Taquet. Citons également le dédoublement des classes de CP et CE1, les cités éducatives, l'éducation prioritaire, la détection renforcée des difficultés sociales.
Des mesures d'urgence ont été prises : 200 euros ont été versés à plus de 800 000 jeunes au début de la crise sanitaire, complétés en décembre par un versement de 150 euros à 400 000 bénéficiaires des APL et boursiers.
Comment toucher plusieurs jeunesses sans opposer les catégories, dans une vision universelle de l'accompagnement ? C'est la première question que nous nous posons. Nous atteignons aussi les jeunes aux endroits où ils se trouvent avec des dispositifs comme les job tutors dans les CROUS, une mesure portée par Frédérique Vidal.
Le plan « 1 jeune, 1 solution » a été prolongé jusqu'au mois de décembre, son budget passant de 6,7 à 10 milliards d'euros.
Il faut également mentionner des mesures diverses pour soutenir l'emploi : car protéger l'entreprise, c'est protéger les plus jeunes, le dernier arrivé étant souvent le premier sorti. Nous avons mis en place le chômage partiel accompagné et des stimulations au recrutement comme l'aide de 4 000 euros pour l'embauche d'un jeune de moins de 26 ans. J'ai enfin porté la création de 100 000 missions de service civique supplémentaires.
Un combat m'a tenu particulièrement à coeur : la lutte contre le non-recours. J'ai constaté, à ma prise de fonctions, qu'il était particulièrement élevé ; or les difficultés d'accès à l'information reproduisent et aggravent les inégalités. Il fallait donc universaliser, mais aussi faciliter l'accès à l'information. Grâce à la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (Djepva), nous avons lancé la « Boussole des aides », une sorte de point d'entrée permettant à chaque jeune, après la réponse à un bref questionnaire, de s'informer sur les droits auxquels il peut prétendre. Nous avons aussi voulu concentrer sur le site 1jeune1solution.gouv.fr des réponses sur les stages, les jobs d'été.
Le ministère de l'éducation nationale a fait le maximum pour garder les écoles ouvertes, et garantir à tous les jeunes un accès à l'éducation et un accompagnement social, surtout pour ceux qui subissent des difficultés familiales.
Notre choix a été de conjuguer cette action avec un engagement très fort auprès de l'animation socio-éducative et l'éducation populaire. M. Blanquer a souhaité, dans ce nouveau ministère élargi de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, accompagner l'enfant dans tous les moments de sa vie, en conjuguant éducation formelle et informelle. C'est le sens du dispositif des vacances apprenantes, reconduit et renforcé par les « colos apprenantes ».
En matière d'accès à l'information, beaucoup d'organismes existent pour accompagner les jeunes. Je souhaite également évoquer le dispositif « 1 jeune, 1 mentor », qui réunit des associations travaillant autour de la question de l'accompagnement. Le mentorat peut s'exercer à différents moments de la vie ; je pense à l'association Socrate, avec des lycéens qui accompagnent des collégiens, ou à des associations plus connues comme l'association de la fondation étudiante pour la ville (Afev) ou Télémaque. Disposant d'un budget de 30 millions d'euros, le collectif mentorat a permis le passage de 25 000 à 100 000 jeunes « mentorés » cette année ; l'ambition est de doubler ce chiffre l'année prochaine.
Dans cette volonté de lutter pour l'égalité des chances, il y a le projet du service national universel (SNU), que je porte plus particulièrement. Pour rappel, le SNU concerne les jeunes entre 15 et 17 ans. Pour la première fois cette année, 25 000 jeunes vont être accueillis sur tout le territoire. L'idée du dispositif est d'identifier les personnes en difficulté et d'apporter un accompagnement personnalisé ; son ambition est également de faire se rencontrer les jeunesses de notre pays.
La crise nous a mis face à nos responsabilités d'accompagnement. Nous devons contribuer à l'impulsion d'un nouvel élan et corriger des inégalités qui se sont accentuées pendant la crise. L'information de la jeunesse est, à mes yeux, un vrai combat pour ne plus laisser la place au hasard.
J'ai également sollicité l'office franco-allemand et l'office franco-québécois de la jeunesse, afin de relancer la mobilité en profitant d'un budget européen renforcé ; je pense notamment au corps européen de solidarité, un dispositif encore trop peu connu qui permet à des jeunes de vivre une mobilité internationale sans être dans le cadre universitaire.