Nous avons le plaisir de recevoir cet après-midi Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports chargée de la jeunesse et de l'engagement.
Dans le cadre de cette mission d'information, nous avons eu à coeur, notre rapporteure Mme Lubin et moi-même, d'entendre et de rencontrer de nombreux intervenants. Ce matin encore, nous étions à Gennevilliers pour découvrir les cités éducatives. Dans ces rencontres, il y a du débat, de l'échange, des idées contradictoires. Nous souhaitons toucher un panel aussi large que possible, avec une attention particulière pour les 0-3 ans et les 15-25 ans. En parallèle de nos travaux, nous suivons aussi la proposition de loi sur le ticket restaurant étudiant, qui bénéficiera notamment à ceux qui n'ont pas accès à un restaurant universitaire.
secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. - Nous avons suivi attentivement les travaux de votre mission d'information.
Cette crise a bousculé les jeunesses, dans leur situation familiale, territoriale. Pourquoi « les jeunesses » ? Parce qu'il y a en France 12 millions d'adolescents et de jeunes adultes : collégiens, lycéens, étudiants, parfois en décrochage, de jeunes actifs ou en recherche d'emploi ; certains peuvent compter sur leur famille, d'autres non. Parler des jeunesses au pluriel, c'est prendre en considération leur diversité.
Cette classe d'âge est marquée par une multitude de transitions : études, entrée sur le marché du travail, autonomie financière, accès au logement. Cela multiplie les besoins d'accompagnement.
Notre rôle est de mettre au coeur de notre action la promesse républicaine, et l'égalité des possibles - de faire en sorte que les possibles se construisent.
On a pu parler, au cours de cette crise, de tensions entre générations, d'individualisme. Ce n'est pas ce que j'ai vu. J'ai vu, au contraire, des jeunesses engagées, solidaires. Un exemple : le site jeveuxaider.gouv.fr a reçu 350 000 inscriptions, dont 45 à 47 % de moins de trente ans. Pour beaucoup, c'était leur premier engagement. Plus de 58 000 missions de service civique ont également été adaptées de manière proactive à la crise sanitaire.
Il y a néanmoins des difficultés incontestables. Un jeune sur cinq vit en dessous du seuil de pauvreté. Quelque 14 % d'entre eux ne sont ni en emploi ni en formation, leur taux de chômage est deux fois supérieur à la moyenne de la population.
Nous avons évoqué, avec la sénatrice Michelle Meunier, l'impact psychologique de la crise sanitaire sur les jeunes, souligné par le psychiatre Boris Cyrulnik ; il y a aussi un impact économique avec la rupture qu'a été la fin brutale des petits boulots , pour les jeunes étudiants et jeunes actifs. La première réaction du Gouvernement à cette rupture a été de mettre en oeuvre rapidement le plan « 1 jeune, 1 solution ».
Dès 2017, le Gouvernement s'est donné pour priorité de réduire le chômage. Nous avons ainsi débloqué 15 milliards d'euros entre 2018 et 2022 pour former plus d'un million de jeunes ; nous sommes également allés chercher les jeunes en décrochage, en particulier dans les outremers, car notre regard doit être territorialisé.
Nous avons aussi été à l'origine d'avancées sociales : obligation scolaire entre 16 et 18 ans, accès accéléré à l'apprentissage notamment. Ma mission consiste à lever les freins à l'égalité des chances, où qu'ils se trouvent.
Le plan des 1 000 premiers jours, pour les 0-3 ans auxquels vous faisiez référence, est porté par Adrien Taquet. Citons également le dédoublement des classes de CP et CE1, les cités éducatives, l'éducation prioritaire, la détection renforcée des difficultés sociales.
Des mesures d'urgence ont été prises : 200 euros ont été versés à plus de 800 000 jeunes au début de la crise sanitaire, complétés en décembre par un versement de 150 euros à 400 000 bénéficiaires des APL et boursiers.
Comment toucher plusieurs jeunesses sans opposer les catégories, dans une vision universelle de l'accompagnement ? C'est la première question que nous nous posons. Nous atteignons aussi les jeunes aux endroits où ils se trouvent avec des dispositifs comme les job tutors dans les CROUS, une mesure portée par Frédérique Vidal.
Le plan « 1 jeune, 1 solution » a été prolongé jusqu'au mois de décembre, son budget passant de 6,7 à 10 milliards d'euros.
Il faut également mentionner des mesures diverses pour soutenir l'emploi : car protéger l'entreprise, c'est protéger les plus jeunes, le dernier arrivé étant souvent le premier sorti. Nous avons mis en place le chômage partiel accompagné et des stimulations au recrutement comme l'aide de 4 000 euros pour l'embauche d'un jeune de moins de 26 ans. J'ai enfin porté la création de 100 000 missions de service civique supplémentaires.
Un combat m'a tenu particulièrement à coeur : la lutte contre le non-recours. J'ai constaté, à ma prise de fonctions, qu'il était particulièrement élevé ; or les difficultés d'accès à l'information reproduisent et aggravent les inégalités. Il fallait donc universaliser, mais aussi faciliter l'accès à l'information. Grâce à la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (Djepva), nous avons lancé la « Boussole des aides », une sorte de point d'entrée permettant à chaque jeune, après la réponse à un bref questionnaire, de s'informer sur les droits auxquels il peut prétendre. Nous avons aussi voulu concentrer sur le site 1jeune1solution.gouv.fr des réponses sur les stages, les jobs d'été.
Le ministère de l'éducation nationale a fait le maximum pour garder les écoles ouvertes, et garantir à tous les jeunes un accès à l'éducation et un accompagnement social, surtout pour ceux qui subissent des difficultés familiales.
Notre choix a été de conjuguer cette action avec un engagement très fort auprès de l'animation socio-éducative et l'éducation populaire. M. Blanquer a souhaité, dans ce nouveau ministère élargi de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, accompagner l'enfant dans tous les moments de sa vie, en conjuguant éducation formelle et informelle. C'est le sens du dispositif des vacances apprenantes, reconduit et renforcé par les « colos apprenantes ».
En matière d'accès à l'information, beaucoup d'organismes existent pour accompagner les jeunes. Je souhaite également évoquer le dispositif « 1 jeune, 1 mentor », qui réunit des associations travaillant autour de la question de l'accompagnement. Le mentorat peut s'exercer à différents moments de la vie ; je pense à l'association Socrate, avec des lycéens qui accompagnent des collégiens, ou à des associations plus connues comme l'association de la fondation étudiante pour la ville (Afev) ou Télémaque. Disposant d'un budget de 30 millions d'euros, le collectif mentorat a permis le passage de 25 000 à 100 000 jeunes « mentorés » cette année ; l'ambition est de doubler ce chiffre l'année prochaine.
Dans cette volonté de lutter pour l'égalité des chances, il y a le projet du service national universel (SNU), que je porte plus particulièrement. Pour rappel, le SNU concerne les jeunes entre 15 et 17 ans. Pour la première fois cette année, 25 000 jeunes vont être accueillis sur tout le territoire. L'idée du dispositif est d'identifier les personnes en difficulté et d'apporter un accompagnement personnalisé ; son ambition est également de faire se rencontrer les jeunesses de notre pays.
La crise nous a mis face à nos responsabilités d'accompagnement. Nous devons contribuer à l'impulsion d'un nouvel élan et corriger des inégalités qui se sont accentuées pendant la crise. L'information de la jeunesse est, à mes yeux, un vrai combat pour ne plus laisser la place au hasard.
J'ai également sollicité l'office franco-allemand et l'office franco-québécois de la jeunesse, afin de relancer la mobilité en profitant d'un budget européen renforcé ; je pense notamment au corps européen de solidarité, un dispositif encore trop peu connu qui permet à des jeunes de vivre une mobilité internationale sans être dans le cadre universitaire.
Ce matin, nous étions à la cité éducative de Gennevilliers. Que se passera-t-il à l'issue des trois ans de l'expérimentation ? Avez-vous commencé à travailler sur l'avenir de ces cités éducatives ?
Je ne peux pas prendre d'engagement à la place du ministre de l'éducation nationale. Ce que je peux vous garantir, c'est la volonté du ministère de l'éducation nationale d'accompagner ces alliances territoriales, qui peuvent prendre plusieurs formes, notamment celle des cités éducatives.
Nous avons rencontré beaucoup d'acteurs engagés et passionnants qui travaillent en direction de la jeunesse et, à l'issue de ces rencontres, ressort l'impression d'un manque de coordination. Que répondez-vous à cela ?
Madame la sénatrice, votre constat est partagé. L'idée des cités éducatives était précisément de réunir tous ces acteurs. Il y a une nécessité de coordination. Au niveau ministériel, on a constitué ce pôle réunissant plusieurs temps de la jeunesse ; ainsi, nous avons lié la vie associative, l'engagement, le sport et l'éducation.
La réforme de l'organisation territoriale de l'État (OTE) est entrée en application le 1er janvier dernier. Elle rassemble les administrations de l'éducation nationale, de la jeunesse, de l'engagement et des sports. La jeunesse nécessite des politiques transversales, et nous souhaitons aller plus loin dans l'inter-ministérialité, notamment avec Élisabeth Borne, la ministre du travail, sur la question du mentorat. Au niveau des territoires, on retrouve cet état d'esprit dans les projets éducatifs territoriaux (PEDT), avec un véritable partenariat entre l'État, les collectivités et les associations.
La réforme de l'information jeunesse ou encore le développement de la Boussole ont pour objectif de faciliter et de simplifier l'accès à l'information pour les jeunes. Le plus important pour eux est d'avoir un point d'entrée ; c'était l'un des premiers engagements de la lutte contre le non-recours.
Aller au-devant de la personne est souvent une démarche fructueuse, comme nous l'a encore rappelé Louis Schweitzer la semaine dernière lors de son audition. Pensez-vous améliorer le dispositif « 1 jeune, 1 solution » ? Les chiffres, pour l'instant, ne sont pas au rendez-vous.
Un jeune sur deux ignore les aides dont il peut bénéficier. Nous avons donc cherché à renforcer ces expérimentations et ces projets où l'on va vers les jeunes, en s'appuyant sur les acteurs associatifs et ceux de l'éducation populaire qui ont cette culture. Cette idée est aujourd'hui portée par le collectif mentorat avec qui l'on travaille. Le renforcement du budget d'accompagnement des missions locales va également dans ce sens. Pour cela, nous travaillons beaucoup avec la ministre du travail et Brigitte Klinkert, la ministre déléguée à l'insertion. Si l'on veut lutter contre le non-recours et la non-consommation de dispositifs, il faut démultiplier ces expérimentations.
Dans Ouest-France ce matin, un article faisait état des travaux de deux chercheurs qui ont produit une étude sur la ségrégation scolaire. La carte est caricaturale, avec une surreprésentation des catégories socioprofessionnelles favorisées dans les établissements du centre de Nantes. La carte scolaire ne fait pas partie des prérogatives de l'État, mais avez-vous des idées pour endiguer ce phénomène ?
Pour compléter la question de Michelle Meunier, qu'en est-il des zones rurales ?
J'ai lu cet article et la carte présentée est, en effet, assez inquiétante. Pour redynamiser la mixité sociale et lutter contre la ségrégation scolaire, j'évoquerai deux outils : le premier, c'est le SNU, qui a vocation à faire vivre cette mixité sociale ; le deuxième, ce sont les travaux menés par le ministre de l'éducation nationale et Nathalie Élimas, la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire, pour développer des options et des parcours spécifiques dans le cadre du plan pour l'égalité des chances.
Avec l'Institut national de la jeunesse et d'éducation populaire (Injep), nous travaillons sur des profils de jeunes issus des territoires ruraux, des régions ultramarines et des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Dans le collectif mentorat, nous avons cherché des associations connaissant bien les territoires ruraux ; je pense, par exemple, à l'expertise de l'association Des territoires aux grandes écoles. Tous les projets que nous menons dans les QPV ont vocation à s'ouvrir aux jeunes ruraux.
Où en est la mise en place du SNU ? Dans les objectifs fixés, quelle sera la part du service civique ? Je m'interroge également sur l'organisation matérielle du SNU ; à quelle période de l'année va-t-il se dérouler ? Pendant les vacances scolaires ? Et sous quelles formes vont se décliner les missions d'intérêt général (MIG) prévues dans la seconde phase du SNU ?
La première expérimentation du SNU date de 2019. Parmi les retours d'expérience, on peut évoquer le fait qu'un jeune sur deux n'avait jamais pris le train de sa vie ; on a également pu identifier de nombreux problèmes de santé. Durant cette première expérimentation, 2 000 jeunes ont été accueillis dans 13 départements.
En 2020, en dehors de la Nouvelle-Calédonie, nous n'avons pas pu organiser de séjours de cohésion. Toutefois, certains jeunes qui s'étaient engagés avaient envie de réaliser leur MIG ; nous avons permis l'inversion du calendrier et ils ont pu vivre leur expérience, notamment dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Après avoir noté cette appétence, nous avons, avec Brigitte Bourguignon, la ministre déléguée chargée de l'autonomie, accompagné la création de 10 000 missions « Service civique solidarité senior », permettant à des jeunes en service civique de vivre ce lien intergénérationnel.
En 2021, nous avons reçu plus 30 000 candidatures, avec des profils divers. On a recensé un tiers de jeunes urbains, un tiers de jeunes ruraux et un tiers de jeunes issus des zones périurbaines. Les profils familiaux et sociaux-professionnels sont également très variés, beaucoup plus que lors de la première expérimentation. Le SNU est pensé comme un moment de creuset républicain, où l'on débat, où l'on apprend, où l'on fait ensemble, avec l'aide des structures de l'éducation populaire et du monde éducatif, et celle des corps en uniforme.
Concernant l'encadrement, un adulte aura sept jeunes sous sa responsabilité. Parmi les centres d'hébergement, on compte des centres de vacances, des internats, des lycées généraux ou agricoles. La question du calendrier déprendra de l'obligation, et il n'y aura pas d'obligation sans un débat parlementaire et une généralisation du dispositif qui concerne aujourd'hui entre 700 000 et 800 000 jeunes. En 2021, avec un nombre de 25 000 jeunes et le choix du volontariat, nous restons en dehors du temps scolaire.
La règle posée est de sortir de chez soi et de son département pour rencontrer l'autre. Au niveau de l'articulation, la MIG se déroule après le séjour de cohésion ; elle dure 15 jours ou 82 heures, et elle est principalement portée par le monde associatif, des collectivités de toutes tailles et des corps comme ceux de la gendarmerie, de la police ou des armées.
La dernière étape du SNU, celle du volontariat, concerne les missions d'engagements longs, entre 6 et 12 mois en fonction de la mission et selon les mobilités ; c'est là qu'intervient le service civique, à la fin du processus entamé par le séjour de cohésion. Avec l'agence du service civique, on travaille sur les parcours d'engagements ; par exemple, on précise à chaque jeune les formats européens de service civique auxquels il peut prétendre au-delà de ses études. Ce dispositif sera une réussite s'il arrive à conjuguer mixité sociale et mobilité territoriale, et si chaque jeune en repart avec des apprentissages qui lui serviront.
Concrètement, comment cela va-t-il se passer ? Quand on est une association ou une commune, faut-il en passer par les appels à projets ?
Concernant le séjour de cohésion, les associations sont aujourd'hui en lien avec les services territoriaux. Si les structures associatives accueillent le centre ou si elles proposent leurs animateurs pour encadrer les jeunes dans le centre, les expérimentations dépendent des territoires. Ensuite, vient le temps des MIG. L'idée n'est pas d'en passer par les appels à projets ; les services déconcentrés de l'État contactent les collectivités pour sensibiliser les maires et développer les MIG.
Concrètement, voilà le calendrier que nous suivons : nous avons commencé par les mairies accueillant des centres Service national universel (SNU) ; la deuxième phase, d'ici la fin de l'été, consiste à travailler avec celles qui envoient des jeunes en séjour de cohésion - 5 000 communes sont concernées ; enfin, des travaux ont vocation à être menés avec les associations d'élus au bénéfice des communes qui le souhaitent.
Depuis très longtemps, les associations d'éducation populaire jouent un rôle essentiel auprès de la jeunesse. Mais elles ont peine à survivre... Lorsque nous les avons rencontrées, elles se sont notamment plaintes des modes de financement par appels à projets. Nous devons les entendre !
Les associations d'éducation populaire avaient pourtant retrouvé leur raison d'être et avaient fait montre de leur efficacité lors de la modification des rythmes scolaires. Mais votre gouvernement y a mis fin et nous sommes revenus à la semaine de 4 jours. Cette réforme a été mise en place de façon précipitée, dans une période de crise où nombre de communes ont vu leurs dotations diminuer.
Plutôt que de mettre fin aux dispositifs d'éducation populaire, il aurait mieux valu les renforcer et octroyer aux communes des moyens supplémentaires - bon nombre n'y auraient pas renoncé, tel que cela s'est produit.
Tous les travailleurs de la petite enfance le reconnaissent : la semaine de 4 jours et demi facilite vraiment les apprentissages. Que ce soit dans les villes ou en zones rurales, elle permettait aux enfants, grâce à l'investissement des associations d'éducation populaire ou aux engagements d'éducation des petites communes, de faire connaissance avec toutes sortes de choses auxquelles ils n'avaient alors pas accès. Je déplore sincèrement qu'il ait été mis fin à ce dispositif...
Quel est votre avis sur la question, madame la secrétaire d'État ?
Aujourd'hui, il est clair que nous pouvons améliorer les relations avec les structures d'éducation populaire. Certaines communes sont revenues sur le rythme scolaire, avec toutes les différences territoriales que cela a pu engendrer...
Nous sommes en train de démultiplier les contrats pluriannuels afin que les acteurs de l'éducation populaire, qu'ils dépendent ou non de l'éducation nationale, n'aient plus à répondre de leurs missions d'une année sur l'autre, vis-à-vis d'interlocuteurs divers. C'est d'autant plus important que leur action socio-éducative répond à un besoin réel.
Dans un premier temps, beaucoup d'enseignants se sont engagés dans l'éducation populaire ; plusieurs étaient accompagnateurs de colonies de vacances. S'est succédé à cela une période de creux, durant laquelle l'éducation nationale et l'éducation populaire ont pris leurs distances. Aujourd'hui, une période de renouveau s'ouvre à nous : le ministre Blanquer veut rapprocher de nouveau ces deux corps d'éducation, dans le but d'améliorer leur fonctionnement. C'est d'ailleurs dans cette perspective qu'a été déployé le plan Mercredi, qui propose des activités culturelles et de loisirs à vocation émancipatrice.
Durant la crise, les centres de colonies de vacances, avec ou sans hébergement, n'ont eu d'autre choix que de rester fermés. Ils permettent pourtant à tant de jeunes de partir en vacances, notamment à ceux qui en ont le plus besoin ! C'est pourquoi j'ai lancé un plan d'urgence de 15 millions d'euros destiné à les financer.
Aujourd'hui, le premier enjeu est de prioriser les contrats pluriannuels par rapport au financement par appels à projets. Telle est la philosophie poursuivie par le ministère, à travers les plans Mercredi et Vacances apprenantes, afin d'assurer une coordination et une coconstruction plus grandes.
Toutes les associations et les structures que nous avons rencontrées se sont dites favorables à un revenu de subsistance pour les jeunes de moins de 25 ans.
Nous avions déposé une proposition de loi visant à créer un RSA jeunes - le RSA existant déjà, il aurait été facile de mettre en oeuvre un tel dispositif -, mais, pour le moment, cet appel n'est pas entendu. Comment l'expliquez-vous ?
Dernièrement, le Président de la République a annoncé le lancement d'une allocation de 500 euros pour les jeunes de moins de 25 ans. Où en est ce projet ?
Madame la rapporteure, au-delà des lignes politiques qui nous séparent, notre préoccupation en matière de précarité des jeunes est commune. Cette dernière s'est accrue pendant la crise : aider financièrement les jeunes qui ne s'en sortent pas va donc de soi.
Aujourd'hui, le Gouvernement met en oeuvre tous les moyens nécessaires pour soutenir financièrement les jeunes qui en ont besoin, tout en renforçant les mesures d'accompagnement social. Le nombre de bénéficiaires de la Garantie jeunes a été élargi - 100 000 jeunes supplémentaires en ont ainsi bénéficié. Ce qui compte, en définitive, c'est le parcours d'insertion, car il lève toutes les difficultés.
Il n'y a aucun tabou sur la question de l'accompagnement financier des 18-25 ans, mais notre priorité était d'élargir le nombre de bénéficiaires de la garantie jeunes et d'assurer un accompagnement individualisé et plus long, jusqu'à 18 mois.
Le RSA nous paraissait ne pas jouer son rôle d'insertion, d'où le choix du Gouvernement de renforcer la Garantie jeunes : c'est un magnifique dispositif, qui finit par répondre à toutes les difficultés, qu'il s'agisse, entre autres, de l'accès à la santé ou du logement.
Au-delà d'une aide financière, les jeunes ont besoin d'un accompagnement humain. Telle est la ligne que nous avons adoptée en priorité et, à ce titre, nous avons considéré qu'il fallait concentrer nos efforts sur la Garantie jeunes : dès la remise du rapport du Conseil d'orientation des politiques de la jeunesse (COJ), Élisabeth Borne et moi-même avons travaillé à l'élargir, sans aucun frein financier.
Notre mission d'information a mené beaucoup d'auditions sur la question du fossé numérique entre les jeunes. Les jeunes ont pour point commun de posséder un équipement numérique mobile, mais ils ne l'utilisent pas tous de la même manière.
Que compte faire le Gouvernement à ce sujet ?
Sur cette question, il y a presque un malaise. L'illectronisme des jeunes n'est pas un fantasme, c'est une réalité.
En effet, c'est les plus âgés que nous avons l'habitude d'accompagner. Mais les plus jeunes sont aussi victimes de la fracture numérique - et elle s'accroît !
À travers les dispositifs « 1 jeune, 1 solution » et La Boussole des jeunes, le Gouvernement s'efforce d'accompagner les jeunes vers plus d'autonomie numérique.
Le ministre Blanquer travaille au renforcement des projets pédagogiques, via un plan numérique. En raison de l'expertise des acteurs de l'éducation populaire, sur des temps scolaires et périscolaires, les jeunes peuvent acquérir des compétences et de nouveaux outils. Nombreux sont ceux qui, grâce à ce système, ont pu trouver leur chemin et s'en sortir.
Frédérique Vidal et moi-même sommes en train de développer 89 campus connectés. Mais pour pleinement lutter contre les inégalités, nous devons assurer l'accès des jeunes aux outils numériques, ce qui n'est pas toujours acquis comme l'a démontré la crise. Les jeunes ne possèdent pas tous un ordinateur et beaucoup n'ont pas accès à internet ; en revanche, ils ont tous des smartphones, mais ces derniers ne permettent ni d'étudier ni de remplir des formulaires d'aides et créent en définitive une sorte de barrière.
L'éducation à l'information, dans le cadre de l'utilisation des smartphones, est indispensable pour prémunir les jeunes contre les fake news et les problèmes de harcèlement, d'autant que ces outils numériques tombent entre les mains des enfants à un âge de plus en plus précoce. Parce que l'accès aux médias via les smartphones constitue un fléau et peut mener au pire, nous nous efforçons d'y sensibiliser les jeunes et de renforcer leur éducation, avec l'aide des acteurs de l'éducation populaire.
Enfin, à travers les maisons France Service, nous nous employons à coordonner le réseau Information Jeunesse et travaillons à ce que les jeunes puissent être accompagnés par d'autres jeunes accomplissant leur service civique ou bénéficiant d'un premier contrat, dans un lien de pair à pair, sur le modèle des missions numériques.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, d'être venue échanger avec nous sur ces sujets.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 16 heures.