Je voudrais remercier nos invités pour leur travail très approfondi sur le sujet difficile de l'évolution assez spectaculaire et différenciée de l'accueil des élèves allophones nouvellement arrivés.
Ce rapport va sans doute susciter des réactions de la part du ministère de l'Éducation nationale ainsi que des retours du terrain de la part du recteur de l'académie de Créteil, qui viendront éclairer les travaux de notre commission.
Le nombre d'élèves allophones est conséquent et en évolution rapide. On dénombre aujourd'hui 85 000 EANA, dont environ 20 000 Ukrainiens. Il s'agit donc d'un véritable défi quantitatif.
La répartition de ces élèves entre les rectorats est toutefois très contrastée. En effet, les situations de Mayotte et de la Guyane diffèrent largement de celles des rectorats métropolitains, avec un taux de 2 % de nouveaux arrivants, pour une moyenne métropolitaine de l'ordre d'à peine 0,5 %.
Par ailleurs, les différences par rectorat en France métropolitaine sont aussi significatives. Elles sont inversement proportionnelles au dynamisme démographique des régions. Les régions les plus dynamiques, comme celles de l'Ouest français, sont également celles qui sont les moins concernées par l'accueil d'EANA.
À ce titre, l'idée de cohorte permet en effet de mieux comprendre pourquoi une région en particulier est bénéficiaire de nouveaux arrivants de façon significativement supérieure, proportionnellement à une autre région. La première explication est liée à un phénomène de capillarité, dès lors que l'on va là où on a des parents, ce qui crée des effets cumulatifs. Si l'on part du principe que les besoins seront d'autant plus forts qu'il y a déjà une présence d'EANA, cela pourrait permettre de simplifier les prévisions d'accueil.
Il ressort du rapport de la Cour des comptes que la circulaire de 2012 qui constitue le cadre juridique actuel aurait besoin d'être actualisée, sur des questions liées d'abord et avant tout à la connaissance statistique et au suivi des élèves. Il est nécessaire d'être informé de la répartition des élèves allophones, de leur évolution démographique, mais aussi de leur niveau scolaire. Les Casnav ont des moyens différenciés, du fait de la pression démographique contrastée entre les rectorats. Dans les rectorats où la pression est forte, il y a toutefois un vrai besoin de suivi sur les arrivées et les performances des différents établissements.
En ce qui concerne plus précisément les moins de six ans et l'obligation de scolarisation dès trois ans, leur apprentissage est plus aisé car les jeunes enfants ont des facilités à acquérir un langage qui n'est pas le leur. En revanche, pour les plus de 16 ans, l'apprentissage est plus compliqué car il peut se mêler à un sentiment de déclassement. En effet, il est difficile d'exprimer toutes les nuances de sa pensée dans une langue qui n'est pas la sienne.
Concernant les mineurs non accompagnés, vous avez en face de vous de nombreux élus avec des responsabilités départementales, pour lesquels le statut de mineur non accompagné n'est qu'un statut administratif d'attente et ne correspond souvent pas à une réalité. Lorsque nous avons des mineurs qui peuvent accéder à des formations professionnelles par l'apprentissage, il semble que cela se passe très bien. Cela permet une perspective d'insertion plus rapide et bien identifiée. Pour les nouveaux arrivants qui ne sont pas mineurs non accompagnés, il n'y a pas nécessairement de réseau. Ils sont pris en charge par des familles qui jouent le jeu ou non. Dans la mesure où cette prise en charge repose sur le volontariat, l'amélioration du suivi statistique est très délicate.
S'agissant de la grande différence d'encadrement par rectorat, est-ce une différence issue de l'expression des besoins, ce qui est légitime ? ou bien est-ce une différence fortuite, liée à un plus grand nombre d'enseignants volontaires ?
Sur la formation professionnelle, notre commission souligne régulièrement la faiblesse de la formation continue, toutes catégories confondues. Gérer des jeunes qui n'ont pas eu de formation scolaire, ou dans une culture très différente, n'est pas une tâche aisée. Il est donc souhaitable qu'il y ait dans ce domaine plus de volontariat, mais aussi plus de certifications liées à de vraies formations.