Intervention de Christophe Pitré

Mission d'information sur la pénurie de médicaments et de vaccins — Réunion du 19 juillet 2018 à 14h00
Audition conjointe de représentants de centrales d'achats de produits de santé en milieu hospitalier

Christophe Pitré, membre du bureau du Claps, pharmacien coordinateur du groupe Vivalto :

Schématiquement, le marché du médicament comprend les molécules sous monopole de l'AMM, protégées par un brevet, pour lesquelles les ruptures sont exceptionnelles ; les produits génériqués, pour lesquels existaient auparavant cinq à dix fournisseurs différents pour la même molécule avec pour conséquence une concurrence assez sauvage qui a fait baisser les prix, et que désormais se partagent deux ou trois fournisseurs reprenant la main sur les prix de marché ; les produits matures, en situation de monopole par défaut car il s'agit de produits peu chers, pour lesquels les laboratoires envisagent au bout de quelques années un arrêt de commercialisation, ou qu'ils rebasculent vers des sous-traitants, ou dont ils cèdent le brevet, ou encore dont ils augmentent le prix.

Le problème de la délocalisation de la production des matières premières est majeur. Je me trompe peut-être mais il me semble qu'il n'y a aujourd'hui quasiment plus de site de production en France de médicament en tant que tel. J'entends par là la production de matière première, et non de mise en forme ou de conditionnement. 'Pour l'Augmentin®, un antibiotique injectable majeur encore fabriqué voilà quelques années sur un site à Mayenne doté d'un réacteur qui produisait la matière première. Aujourd'hui, il n'existe plus de site de production de la matière première en France pour l'Augmentin®, mais bien un seul génériqueur qui détient la matière première pour l'ensemble de l'Europe. Sanofi, qui couvrait 90 % des besoins français d'héparine, un anticoagulant essentiel, n'en fabrique plus que 10 %. Pour l'anecdote, la matière première, issue d'intestins de porc, provient de Chine. Les fournisseurs ne maîtrisent plus la production de matière première et ne font que conditionner et vendre le produit fini.

La maîtrise du marché nous échappe, un certain fatalisme s'installe, à tel point que les laboratoires nous fournissent des notes hebdomadaires de ruptures. C'est devenu habituel. Un accord doit être passé avec les fournisseurs afin que l'AMM soit aussi soumise à un contrôle des arrêts de commercialisation. Il faudrait lier les autorisations au retrait.

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