Je crois beaucoup au rôle de la communauté éducative. Un des problèmes majeurs que nous rencontrons avec le harcèlement et le cyberharcèlement concerne la libération de la parole. Les victimes subissent des actes de harcèlement ou de persécution par des auteurs qui sont souvent dans l'établissement. Pour favoriser la libération de cette parole, il revient à la communauté éducative d'installer une culture de la protection des mineurs et de la détection des infractions pénales subies par les élèves.
Nous avons affaire à des victimes, c'est-à-dire des mineurs qui sont persécutés par internet ou par des comportements humains au quotidien. Ces victimes doivent être protégées et il est essentiel de signaler les faits à l'autorité judiciaire et à l'autorité administrative pour qu'une enquête soit rapidement ouverte. Pour qu'il soit constitué, le délit de harcèlement doit être caractérisé par des comportements répétés. La loi du 4 août 2018 a apporté des améliorations sensibles sur le harcèlement de groupe avec une définition de la coaction qui englobe dans la qualification pénale tous les acteurs du harcèlement. Le harcèlement doit également avoir pour conséquence une dégradation des conditions de vie se traduisant par une altération de la santé physique ou mentale. Ce sont des éléments que la communauté éducative peut détecter, comme le changement de comportement d'un élève ou l'expression d'une souffrance.
L'intervention de la communauté éducative peut être suffisante sur des faits naissants d'intimidation pour enrayer le processus et l'interrompre avant qu'il n'ait des conséquences graves. Mais dès lors que nous sommes en présence de faits de harcèlement au sens du Code pénal, la question de la protection des victimes doit se poser. L'enquête judiciaire permettra de caractériser l'infraction pénale et d'identifier les auteurs. Elle permettra aussi de mettre en place des mesures de protection en saisissant le juge des enfants qui pourra décider d'une procédure d'assistance éducative pour protéger les victimes.
S'il est important de faire de la prévention et de la formation, il est essentiel d'alerter sans délai l'autorité judiciaire en cas de harcèlement avéré, pour interrompre les comportements répréhensibles qui constituent des délits punis de deux à trois ans de prison et pour protéger la victime.