Intervention de Hervé Maurey

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 12 novembre 2019 à 14h30
Audition de Mme Agnès Buzyn ministre des solidarités et de la santé

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey, président :

Madame la Ministre, notre commission d'enquête a souhaité entendre les différents ministres concernés par la catastrophe de l'usine Lubrizol de Rouen au début de ses travaux, car leurs déclarations, ainsi que celle du Premier ministre, qui n'ont pas toujours paru très cohérentes les unes par rapport aux autres, ont quelque peu semé le trouble dans les esprits.

Le Premier ministre a estimé, je le cite, que « les odeurs étaient gênantes, mais pas nocives ». Vous-même, quelques jours plus tard, avez déclaré que vous ne saviez pas ce que donnent ces produits mélangés quand ils brûlent. Vous avez également dit que la ville était polluée, alors que la ministre de la transition écologique et solidaire expliquait qu'il n'y avait pas de polluants anormaux dans les prélèvements effectués. Bref, tout cela a suscité un certain trouble dans l'esprit de nos concitoyens.

Si nous avons souhaité vous recevoir la première, c'est parce que les inquiétudes concernent principalement l'impact sanitaire de cette catastrophe. On est ici devant un type d'accident que l'on n'avait pas encore connu en France. À la différence de la catastrophe d'AZF, il n'y a pas eu de morts, de blessés ou de destructions, mais tout le monde s'interroge sur le fait de savoir si, à moyen ou à long terme, on sera confronté à des conséquences sanitaires, et sur quelles zones. Nous aimerions donc savoir ce que l'on peut réellement en dire aujourd'hui.

Nous avons auditionné la semaine dernière Mme Thébaud-Mony, spécialiste santé et environnement, qui indiquait que, selon elle, des substances cancérigènes étaient présentes sur le site, et qu'on pouvait par là même s'attendre à un certain nombre de pathologies à terme. Que pensez-vous de ces affirmations, qui ne sont pas anodines ?

Certains articles de presse évoquent la trace de produits toxiques dans le lait maternel. Nous voudrions savoir ce qu'il en est et si des éléments n'ont pas encore été divulgués : à ce stade, il n'est pas normal que l'on ne sache pas tout. Des études de sol sont, je crois, en cours, ainsi que différents examens et analyses. Quand et comment ces questions trouveront-elles des réponses ?

La semaine dernière, nous avons également auditionné les représentants de Santé publique France, qui nous ont annoncé une enquête de santé à compter mars 2020. Pourquoi si tard ? Celle-ci sera-t-elle suffisante pour lever toutes les inquiétudes ?

En corollaire, nous aimerions savoir pourquoi l'État a, jusqu'à présent, refusé de faire appel à des experts indépendants, comme on nous l'a indiqué.

Enfin, nous nous interrogeons sur la stratégie de l'État, qui semble surtout s'efforcer de rassurer et non d'informer. Nous avons entendu ce matin Delphine Batho, qui rappelait qu'à la suite de l'accident de 2013 concernant Lubrizol, un rapport d'Inspection préconisait de cibler la communication sur le factuel et le clinique, d'informer et non de chercher à rassurer à tout prix - ce qui, paradoxalement, semble aujourd'hui augmenter l'anxiété.

Je me dois, conformément à la procédure applicable, de vous rappeler que tout témoignage mensonger devant une commission d'enquête est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Je vous demande de bien vouloir prêter serment.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, Mme Agnès Buzyn prête serment.

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