Intervention de Alain Liberty

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 17 janvier 2022 à 15h35
Audition de M. Alain Liberty président du syndicat des radios indépendantes

Alain Liberty, président du syndicat des radios indépendantes (Sirti) :

Le phénomène de concentration est déjà intervenu, il y a une vingtaine d'années, pour les radios. Les fameuses règles anti-concentration l'ont stoppé net dans son élan. Le plafond des 160 millions d'auditeurs, initialement fixé à 150 millions, a mis fin aux velléités des grands groupes nationaux de racheter l'ensemble des radios locales. Tous les réseaux nationaux que vous connaissez ont alors pu se constituer, notamment les groupes NRJ, Lagardère, Virgin Radio, Radio Nostalgie. Depuis lors, un certain équilibre s'est installé.

Pour que le système puisse fonctionner d'un point de vue économique, il est impératif de maintenir les règles d'accès au marché publicitaire, car elles nous protègent et garantissent le financement des radios. Le chiffre de 170 acteurs peut paraître énorme, mais ramené à un pays comme la France avec ses régions, ses villes et son extrême diversité, il n'est en réalité pas très important et reste très éloigné des 3 000 ou 4 000 radios dites « libres » qui existaient au début des années 1980.

Il faut donc maintenir les règles en vigueur pour préserver les 170 radios indépendantes qu'écoutent quotidiennement plus de 9 millions d'auditeurs.

Il faut, bien évidemment, être attentif aux incidences que la concentration peut avoir sur l'expression de la démocratie et au respect des règles de notre société. Cependant, la liberté d'accès aux médias, ou encore l'intermédiation, doit absolument être encadrée, car elle ne l'est pas véritablement, à ce jour.

Par exemple, certaines règles imposent la présence d'une puce de réception radio dans tous les véhicules. Or les systèmes embarqués tendent de plus en plus à se répandre, comme celui de Google, que l'on connaît sous le nom de « Google Automotive », dans lequel Androïd gère directement l'autoradio, ou du moins l'appareil, qui donne accès à l'ensemble des médias. Rien ne garantit que les radios s'afficheront toutes sur l'écran, selon la zone où l'on se trouvera, ni que l'ordre d'affichage sera impartial. Rien ne garantit non plus que les radios ne se transformeront pas en playlists dont le contenu sera choisi par les plateformes, qui décideront ainsi de ce que nos concitoyens pourront écouter.

L'intermédiation est un enjeu très important et il est essentiel d'accompagner les radios dans le déploiement du DAB, la technologie hertzienne de diffusion de la radio, car celle-ci garantira durant les années à venir une forme de souveraineté reposant sur un lien direct avec les auditeurs. Il est nécessaire de préserver cette relation directe et sans intermédiaire, car, malheureusement, les plateformes en ligne et les grands acteurs que sont les Gafam s'adaptent très rapidement pour contourner la réglementation qui impose la présence d'une réception hertzienne. Le dispositif de Google Automotive en est la preuve.

S'il est évident qu'il faut contrer les effets de la concentration pour préserver le pluralisme des idées, il faut également veiller à ce que nos concitoyens puissent continuer d'avoir accès à tous les médias.

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