Intervention de Nicolas Beytout

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 21 janvier 2022 à 14h40
Audition de M. Nicolas Beytout fondateur de l'opinion M. éric Fottorino cofondateur de le 1 hebdo M. Edwy Plenel président et cofondateur de mediapart et Mme Isabelle Roberts présidente du site d'information les jours

Nicolas Beytout, fondateur de L'Opinion :

La loi française oblige une société éditrice à rendre publique la liste de ses actionnaires. La société éditrice de L'Opinion s'appelle Bey Médias Presse & Internet, et son actionnaire à 100 % est Bey Médias. . Pour être précis sur ce point, permettez-moi de faire un détour par un épisode qui a failli nous être fatal, sous le gouvernement socialiste, qui voyait d'un mauvais oeil notre survie.

En 2013, il était possible à toute personne, physique ou morale, de déduire de ses revenus 25 % de son investissement dans un journal de presse d'information générale, une disposition qui a été renouvelée dans la loi de finances de 2022. Cette disposition était très intéressante pour capitaliser notre société, mais l'administration nous l'a refusée lorsque nous lui avons demandé un rescrit, au motif que les fonds avaient été recueillis par Bey Médias, que l'administration a qualifiée de « holding », et non pas par notre filiale chargée directement de l'édition (la société éditrice, Bey Médias Presse et Internet). Selon l'administration fiscale, c'est cette filiale qui aurait dû lever les fonds pour que nos investisseurs aient droit à la déduction. J'ai contesté, faisant valoir que le texte de la loi visait explicitement « toute société exploitant un journal » (et non pas « éditant » un journal), mais l'administration fiscale a balayé l'argument d'un revers de la main. Nous sommes allés en justice, le tribunal administratif de Paris nous a donné raison, puis la cour d'appel de Paris, puis le Conseil d'État, qui a condamné l'État aux dépens... Il faut donc bien préciser les choses, monsieur le rapporteur : lorsqu'il exige la publicité des actionnaires, le droit français vise explicitement ceux de la société éditrice, c'est-à-dire, pour L'Opinion, Bey Médias.

Au départ, j'ai accepté la demande de certains de nos actionnaires qui pensaient que leur participation à un média jugé libéral risquait de passer pour une forme d'agression du pouvoir en place - et ils ne voulaient pas être des victimes collatérales de notre média. Les actionnaires ont donc fait connaître leur nom progressivement (vous n'avez pas mentionné l'un de nos soutiens initiaux, en la personne de Claude Perdriel, qui a été actionnaire dès le démarrage). Tous participaient à une aventure dont l'orientation était libérale.

S'agissant de l'indépendance rédactionnelle, je vous réponds que, dans le pacte qui lie entre eux nos actionnaires, une disposition particulière me donne la majorité absolue sur toutes les questions éditoriales : le contenu, les choix, les limites à se fixer, le choix des journalistes. Pour le reste, la différence avec les médias dont vous avez abondamment parlé, c'est que se trouve au capital de L'Opinion un grand nombre de milliardaires, qui se surveillent, se contrôlent les uns les autres, ce qui me donne une extraordinaire liberté. En réalité, il n'y a pas de lancement d'entreprise d'envergure sans faire appel à des personnes qui ont de l'argent. Edwy Plenel vous a dit que Mediapart vivait sans actionnaires, mais il a en réalité fait appel à des grandes fortunes pour lancer son média, des gens extrêmement riches ont mis de l'argent pour qu'il devienne ensuite indépendant.

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