Intervention de Laurent Courbois

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 22 décembre 2016 à 11h05
Audition des représentants de la fédération nationale des chasseurs et de la fédération nationale de la pêche en france

Laurent Courbois, directeur de la fédération régionale des chasseurs du Languedoc-Roussillon et chargé de mission de la Fédération nationale des chasseurs :

Je présenterai brièvement le réseau des fédérations de chasseurs puis les trois principes que nous défendons au niveau de la Fédération nationale. Enfin, je tâcherai de montrer l'implication des fédérations de chasseurs dans la compensation des atteintes à la biodiversité.

Aujourd'hui, il existe 90 fédérations de chasseurs sur le territoire, treize fédérations régionales et un réseau de 1 300 collaborateurs exerçant des métiers en lien avec la faune sauvage et ses habitats, ainsi qu'avec la biodiversité. Nous avons également créé une fondation nationale pour la protection des habitats de la faune sauvage qui intervient sur les territoires, notamment pour procéder à des acquisitions foncières et à des opérations de gestion conservatoire de la biodiversité.

La Fédération nationale des chasseurs défend un premier principe, celui d'une « utilisation raisonnée » de la biodiversité. Au travers de leur pratique de la chasse, les citoyens habitant dans les communes rurales s'investissent dans des actions de conservation des espèces et des habitats. C'est ce que nous appelons la « conservation par l'utilisation raisonnée », concept que nous avons fait inscrire dans la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Bien que ne figurant pas encore dans le code de l'environnement, nous estimions en effet que ce concept était conforme aux principes et directives de la convention internationale sur la diversité biologique.

Nous défendons un deuxième principe, celui de la reconnaissance des usages tels que la chasse et la pêche sur nos territoires, principe qui a également été introduit dans le code de l'environnement. Nous considérons que bon nombre des actions de conservation de la biodiversité que nous menons sur le terrain sont liées à ces usages.

Aujourd'hui, force est malheureusement de constater que l'efficacité de nombreuses mesures de conservation de la biodiversité est remise en cause, en raison notamment du report des directives « Habitat » et « Oiseaux » et que, d'une manière générale, l'état de conservation des espèces et des habitats ne s'est pas amélioré depuis la loi de 1976 relative à la protection de la nature. Nous constatons en outre que les pouvoirs publics n'ont plus toujours les moyens de leur ambition en matière de politique de conservation de la biodiversité.

Le troisième principe que nous soutenons est le principe de bonne intendance des territoires : il s'agit de faire en sorte que les propriétaires privés, les agriculteurs, les forestiers, les chasseurs, les pêcheurs, les ayants droit du foncier en d'autres termes, soient mieux impliqués dans les politiques de conservation de la biodiversité, et donc dans les programmes de compensation écologique.

Dans la mesure où les chasseurs s'intéressent, en raison de leur pratique, à la conservation des espèces « gibier » sur le terrain, ils contribuent aujourd'hui à conserver la biodiversité de manière directe et indirecte. Selon nous, la conservation du gibier mène à la conservation de la biodiversité. Pour donner un exemple concret, la conservation de la perdrix rouge dans le sud de la France contribue indirectement à protéger l'outarde canepetière.

L'étude sur les valeurs socio-économiques de la chasse, qui a été réalisée par le cabinet de conseil (BIPE), évalue à 57 000 équivalents temps plein l'investissement bénévole des chasseurs. Ce sont autant d'effectifs que la sphère publique n'a pas à investir dans l'aménagement des espaces et la conservation des espèces sur le territoire. Une autre étude de ce cabinet, relative aux services écosystémiques liés à la chasse montre par ailleurs que cet investissement bénévole équivaut à un engagement à hauteur de 460 millions d'euros en faveur de la conservation de la nature.

Nous avons également développé une base nationale de données pour démontrer l'implication des chasseurs et illustrer le concept de « conservation par l'utilisation » dont j'ai parlé il y a quelques instants. Cette base, évidemment consultable sur internet, a déjà permis de répertorier plus de 500 actions menées par les fédérations de chasseurs ou la fondation pour la protection des habitats de la faune sauvage.

Je terminerai mon intervention en soulignant l'implication de nos fédérations et de la fondation pour la protection des habitats de la faune sauvage dans la compensation écologique. Nous intervenons en fournissant des données aux bureaux d'études des conservatoires des espaces naturels ou des conservatoires botaniques qui nous sollicitent. Nous intervenons aussi dans la phase d'évaluation des projets quand on nous demande de réaliser des diagnostics cynégétiques et environnementaux. In fine, un certain nombre de fédérations de chasseurs participent à la mise en oeuvre de mesures de compensation écologique et à leur suivi, qu'il s'agisse de contrebalancer les effets de projets d'infrastructures routières, ferroviaires, portuaires ou éoliennes.

Enfin, si vous me permettez de formuler quelques recommandations, j'ajouterai que nous souhaiterions la mise en place d'une meilleure territorialisation, d'une meilleure contextualisation et d'une meilleure appropriation des programmes de compensation écologique. Aujourd'hui, quand un opérateur engage un programme de compensation écologique de 30 millions d'euros pour l'outarde canepetière, la démarche est assez mal comprise par les élus locaux et les citoyens ruraux que nous représentons. Je rappelle à cet égard qu'avant d'être chasseurs, ces citoyens sont des entrepreneurs du monde rural, des retraités, des ouvriers.

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