Intervention de Marie-Christine Lepetit

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 7 mars 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Marie-Christine Lepetit chef de l'inspection générale des finances ancienne directrice de la législation fiscale à la direction générale des finances publiques dgfip

Marie-Christine Lepetit, chef de l'Inspection générale des finances, directrice de la législation fiscale à la Direction générale des finances publiques :

J'ai pour l'instant considéré dans mes propos que les deux projets d'accord étaient semblables. En réalité, ce n'est pas le cas. Après un examen minutieux, l'accord britannique paraît un peu plus respectueux des principes et des standards internationaux que l'accord allemand, et ce pour deux raisons.

En premier lieu, l'accord britannique semble mieux préserver le droit d'échanger de l'information, nonobstant le mécanisme de retenue à la source. Il est en effet plus prudent sur les possibilités d'échanges d'informations en cas de fraudes et protège mieux le droit pour le Royaume-Uni d'interroger la Suisse que l'accord négocié par l'Allemagne. En conséquence, il assure une meilleure articulation entre la logique pragmatique, strictement budgétaire, et la logique de transparence.

En second lieu, et je ne doute pas que vous serez sensibles à cet argument, mesdames, messieurs les membres de la commission, il permet un meilleur respect de la législation interne du Royaume-Uni, en particulier l'application des taux élevés en vigueur là-bas. En cela, il s'articule mieux avec la directive Épargne, puisqu'il permet de continuer à taxer ceux qui se trouvent dans cette situation à un taux supérieur à 40 %, conformément au droit britannique. À l'inverse, en Allemagne, même les contribuables qui ne jouent pas le jeu de la transparence ne seront pas taxés à 35 %, comme le prévoit la directive Épargne, mais à 26,375 %, c'est-à-dire au taux en vigueur en droit interne allemand.

L'accord britannique offre donc un meilleur respect des règles fiscales internes, ce qui me semble très important.

Au-delà des questions de principe qu'ils soulèvent, notamment au regard de l'amnistie - j'ai déjà évoqué ces questions devant vous tout à l'heure, et Valérie Pécresse a eu l'occasion de les développer bien mieux que moi au banc des ministres -, les accords Rubik ont pour inconvénient de bloquer la personnalisation de l'impôt. Avec de tels accords, comment appliquer l'ISF ou un impôt éventuellement progressif ? Cela nous est impossible puisque la Suisse prélève un taux uniforme, les yeux fermés, sans dire s'il s'applique à M. Dupont ou à M. Durand.

D'où la perplexité de la France, dont l'objectif de droit interne est autre. Nous prétendons continuer à appliquer des impôts à caractère personnel sur les revenus de l'épargne et sur le patrimoine. Par ailleurs, nous continuons à penser qu'il est pertinent d'avoir un dispositif qui puisse être adapté dans le temps. Avec Rubik, la législation interne est bloquée par un accord international bilatéral. Dès lors, que faire si, demain, le Parlement change d'avis ? Faudra-t-il repartir en négociations ? Cela n'est pas satisfaisant.

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