L’évolution de la nature même du PACS nécessite donc que soient repensées les conditions de son enregistrement : nous proposons par conséquent de l’enregistrer en mairie.
De cela découle notre proposition de créer, à l'article 2, une procédure de « PACS in extremis », à l’image de celle qui existe pour le mariage, en cas d’empêchement grave ou de péril imminent de décès.
Vous indiquez, madame le rapporteur, que cet article serait satisfait grâce à la modification apportée par le biais de l’article 37 de la loi pénitentiaire à l’article 515-3 du code civil, aux termes duquel « le procureur de la République requiert le greffier du tribunal d’instance de se transporter au domicile » du partenaire qu’un empêchement grave interdit de se déplacer. C’est une procédure qui n’existait pas auparavant.
Mais l’article 2 relevant de la même logique que l’article 1er, nous demandons, par cohérence que, à la différence du droit nouvellement en vigueur, ce soit l’officier d’état civil qui se déplace, et non le greffier. Je crois cependant deviner que vous n’y êtes pas favorable.
Je n’évoquerai que brièvement la question de la reconnaissance en France des partenariats conclus à l’étranger, puisque la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures a fort opportunément remédié à cette lacune de la législation. C’était une demande ancienne, et je me réjouis qu’aujourd’hui elle soit entrée en vigueur.
En revanche, le PACS ne confère pas de droit en termes d’acquisition de la nationalité française. La question s’est néanmoins posée dans le passé, puisque la commission des lois de l’Assemblée nationale avait prévu, en octobre 1998, la prise en compte du pacte civil de solidarité dans l’examen d’une demande de naturalisation, avec une condition de durée du PACS fixée à un an, proposition finalement rejetée par les députés.
Sur ce point, notre position n’a pas varié. La proposition de loi que le groupe communiste avait alors déposée au côté de celle de nos collègues socialistes prévoyait déjà ceci : « L’étranger lié à un Français par un pacte civil de solidarité bénéficie de droits plus larges : il est considéré comme ayant des liens personnels en France de nature à lui ouvrir un droit au séjour et il peut acquérir la nationalité française par déclaration un an après la conclusion du pacte […] ».
Aujourd’hui, le droit applicable aux étrangers a été considérablement durci, notamment en ce qui concerne l’acquisition de la nationalité. Désormais, la condition de durée du mariage est fixée à quatre ans avant qu’un conjoint étranger de Français puisse demander sa naturalisation.
Nous n’avons pas voulu être provocateurs en abaissant ce délai à un an, comme le droit le prévoyait en 1998 : nous avons donc repris notre proposition initiale, en fixant la durée du PACS à quatre ans, comme le prévoit l’article 21-2 du code civil pour les conjoints étrangers de Français.
La facilité avec laquelle deux personnes peuvent conclure un PACS, sans contrôle du ministère public alerté par l’officier d’état civil, comme c’est le cas pour le mariage, laisserait à penser qu’après les mariages blancs et les mariages gris nous verrions apparaître les PACS blancs et – pourquoi pas ? – les PACS gris !
Ne partageant pas, comme vous vous en doutez, cette vision suspicieuse des unions entre une personne française et une personne étrangère, nous avons proposé d’étendre aux personnes liées par un PACS le droit à l’acquisition de la nationalité des conjoints.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’en viens maintenant à la deuxième partie de notre proposition de loi, qui tend à élargir un certain nombre de droits sociaux aux partenaires.
À cet égard, la question de la pension de réversion est emblématique. Elle se pose depuis maintenant plusieurs années sans jamais avoir reçu de réponse pour l’instant, alors que, dans le même temps, je l’ai dit, le droit, notamment le droit patrimonial, a considérablement évolué en faveur des personnes liées par un PACS.
Le droit a créé des droits et obligations réciproques : le principe de solidarité entre les partenaires s’applique durant leur vie commune. Les partenaires sont ainsi soumis à trois types d’obligation : une obligation d’assistance, impliquant une aide morale et psychologique ainsi que matérielle, à l’égard du partenaire en difficulté ; une obligation solidaire aux dettes contractées pour les besoins de la vie courante ; une obligation de vie commune. Enfin, le principe de présomption de pouvoir pour les biens meubles détenus individuellement leur est applicable.
Le principe de solidarité s’applique du vivant des partenaires : pourquoi ne serait-ce pas le cas après le décès de l’un d’entre eux ? Prévoir l’attribution de la pension de réversion au partenaire survivant, c’est simplement répondre à cette simple question. Il convient de noter que de nombreuses personnes et institutions s’y sont déclarées favorables.
Je pense en tout premier lieu au Président de la République, qui, durant la campagne électorale, avait tenu l’engagement suivant : « Je suis donc pour une union civile homosexuelle qui ne passe pas par le greffe du tribunal d’instance, mais par la mairie. C’est logique. Et je vais ajouter ceci que je n’ai jamais dit encore : cette union civile, à la mairie, entraînera une égalité fiscale, sociale, patrimoniale totale avec les couples mariés, qui ira, par exemple, jusqu’au droit à la pension de réversion pour le conjoint homosexuel ».
Mais Nicolas Sarkozy n’a pas été le seul à se prononcer en faveur d’une telle évolution du droit. Pour notre part, nous la défendons depuis la création du PACS. Nous l’avons donc proposée dès 1999, puis nous avons déposé des amendements en ce sens à l’occasion des projets de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi qu’une proposition de loi en mars dernier.
En janvier 2006, la mission d’information de l’Assemblée nationale, citée précédemment, préconisait l’extension de la pension de réversion au partenaire survivant pacsé depuis au moins cinq ans.
La justice européenne s’est également prononcée sur la question du bénéfice de la pension de réversion dans le cadre d’un partenariat civil. Dans son arrêt Maruko du 1er avril 2008, la Cour de justice des Communautés européennes a considéré que le refus de verser une pension de réversion à des partenaires de même sexe constituait une discrimination indirecte en raison de l’orientation sexuelle prohibée par la directive 2000/78/CE.
La HALDE, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, s’inspirant de cet arrêt, a rendu, le 19 mai 2008, une délibération qui va encore plus loin que la jurisprudence européenne. S’appuyant sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et non plus sur la directive de 2000, elle a considéré que « les dispositions législatives issues du code de la sécurité sociale constituent une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle en excluant du droit à pension de réversion les partenaires survivants ».
Je citerai également rapidement – ma collègue Isabelle Pasquet y reviendra tout à l’heure – les prises de position du Conseil d’orientation des retraites ou encore de la Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS : tandis que le premier s’est prononcé en faveur de l’ouverture d’un débat, la seconde s’est dite favorable à l’extension de la réversion aux partenaires liés par un PACS, sous la condition d’une durée de PACS de cinq ans.
C’est enfin le Médiateur de la République qui préconise une telle extension, en diminuant la condition de durée à deux années.
L’Allemagne a été condamnée pour discrimination en ne prévoyant pas le bénéfice de la pension de réversion au partenaire survivant. Madame le rapporteur, l’un de vos arguments pour refuser aujourd’hui d’inscrire ce principe dans notre législation est de considérer l’Allemagne comme un cas particulier puisque le PACS n’y a été institué que pour les homosexuels, ceux-ci étant dans l’impossibilité de se marier.
Contrairement à ce que vous affirmez, plusieurs pays européens ont étendu leur législation en matière de réversion aux personnes liées par un PACS, et ce quel que soit leur sexe.
Au Royaume-Uni, les régimes complémentaires professionnels accordent une réversion au partenaire survivant, droit qui est parfois étendu aux concubins. Au Danemark, le régime de retraite complémentaire ATP et le régime complémentaire des fonctionnaires appliquent ce droit à la réversion, y compris aux concubins notoires. En Suède, le régime national d’assurance vieillesse lui-même prévoit un tel bénéfice, y compris aux concubins avec enfants, ainsi que le régime complémentaire professionnel des salariés du secteur privé. Aux Pays-Bas, un droit à la réversion est accordé par les régimes complémentaires professionnels, y compris aux concubins ayant déclaré leur concubinage par acte notarié.
Vous l’aurez compris, les différences de législations relatives aux retraites observées d’un pays à l’autre ne sauraient entraîner le refus d’un droit à pension de réversion pour des personnes qui bénéficient de l’assurance vieillesse d’un régime légal.