Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame le rapporteur, mesdames et messieurs les sénateurs, cette proposition de loi de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat est l’occasion de débattre du pacte civil de solidarité, dispositif dont nous avons tout récemment fêté les dix ans d’existence.
Institué par la loi du 15 novembre 1999 au terme de vifs et longs débats – je m’en souviens : j’étais député, à l’époque – qui avaient passionné nos concitoyens, le pacte civil de solidarité, désormais appelé PACS, rencontre depuis lors un succès indéniable. Si, la première année, 22 276 PACS ont été conclus, leur nombre a ensuite crû de façon très significative, de plus de 25 % par an entre 2002 et 2004, avant d’atteindre un pic de 50 % en 2005.
Bref, ce sont aujourd'hui plus de 1 200 000 personnes qui ont choisi cette forme d’union. Cette évolution ne peut être ignorée : le PACS est désormais entré dans les mœurs, aux côtés du mariage et du concubinage.
Il peut être relevé que, au cours de cette décennie, les profils des partenaires liés par un PACS se sont fortement modifiés. Si, à l’origine, un quart des PACS étaient conclus par des personnes de même sexe, aujourd’hui, 94 % des PACS sont le fait de couples hétérosexuels.
Répondant à des aspirations nouvelles, notamment à la possibilité de conclure, de modifier ou de mettre fin au contrat de façon aisée, le PACS doit sans doute son succès à la voie médiane qu’il offre aux personnes souhaitant vivre en couple : bénéficier de la souplesse du concubinage, notamment quant aux conditions de sa rupture, tout en bénéficiant de certains des droits reconnus actuellement aux époux.
Le succès croissant de ce mode contractuel d’organisation de la vie de couple a conduit le législateur à élargir et à clarifier les dispositions juridiques initialement adoptées. Il ne s’est pratiquement pas passé une année sans qu’intervienne une amélioration du PACS sur un aspect ou un autre.
Ainsi, le régime juridique du PACS a évolué, tout en préservant sa spécificité, que vous avez rappelée tout à l’heure, madame le rapporteur. Je reviens brièvement, à mon tour, sur certaines de ces évolutions.
Cinq années après la création du PACS, c’est la loi de finances rectificative pour 2004 qui a posé la première pierre de cette évolution en prévoyant, pour les partenaires, une imposition commune immédiate.
Ensuite, la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et libéralités, entrée en vigueur le 1er janvier 2007, a accru la sécurité juridique offerte par le PACS.
Les partenaires peuvent choisir entre un régime de séparation des patrimoines et un régime d’indivision organisée pour régler le sort des biens qu’ils acquièrent ensemble ou séparément et définir les pouvoirs de gestion qu’ils peuvent avoir sur ces biens.
S’ils souhaitent avoir les conseils d’un spécialiste sur ces questions, ils peuvent conclure une convention de PACS en la forme authentique en ayant recours à un notaire.
Le partenaire survivant est mieux protégé puisqu’il peut bénéficier, pendant un an après le décès de son partenaire, de la jouissance du domicile commun.
De même, les droits des tiers ont, eux aussi, été renforcés. Les tiers sont en effet informés, grâce à la publicité à laquelle est soumise la convention, une mention étant portée en marge de l’acte de naissance des partenaires.
Plusieurs autres dispositions législatives sont par la suite intervenues pour rapprocher, sur certains aspects – mais sur certains seulement –, le statut du « pacsé » de celui de l’époux.
Ainsi, la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a poursuivi la démarche de protection du partenaire survivant en l’exonérant des droits de mutation liés au décès.
Puis la loi du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit a autorisé la représentation, devant certaines juridictions, par le partenaire, tandis que la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile a étendu le bénéfice de la suspension de la prescription entre partenaires, comme c’est le cas entre époux.
La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a étendu au partenaire lié à un chef d’entreprise les mesures existant au profit du conjoint de l’entrepreneur.
Plus récemment, la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allégement des procédures a reconnu les partenariats enregistrés à l’étranger, sous la seule réserve qu’ils soient conformes à notre ordre public.
Cette loi prévoit également qu’à compter du 1er janvier 2010 le juge aux affaires familiales sera compétent pour connaître des procédures en matière d’indivision existant entre pacsés, comme de la liquidation des régimes matrimoniaux.
La loi pénitentiaire, adoptée le mois dernier, a facilité la conclusion du PACS dans l’hypothèse d’une détention et prévu également la possibilité pour le greffier de se déplacer pour recueillir la déclaration de PACS en cas d’empêchement grave de l’un des futurs pacsés, cette disposition s’appliquant d’ailleurs de façon générale, au-delà du cadre pénitentiaire.
Enfin, un décret publié voilà quelques jours a étendu aux partenaires, dès lors que le PACS a été conclu plus de deux ans auparavant, le droit au capital décès jusque-là réservé aux conjoints de fonctionnaires.
On le voit, les améliorations progressives que le Parlement et le Gouvernement ont apportées au régime du PACS et aux modalités de son enregistrement sont loin d’être négligeables.
Ces aménagements successifs ont été motivés par le souci de favoriser le PACS et de conforter le statut des futurs partenaires. Nul doute que ces évolutions ne sont pas étrangères à l’engouement croissant que suscite le PACS. Aujourd’hui, le succès de celui-ci est tel, avec un PACS pour deux mariages en moyenne et même un PACS pour un mariage à Paris, qu’il est clair que nous sommes parvenus à un tournant.
Il convient donc de s’interroger sur le PACS de demain, et c’est un des mérites de cette proposition de loi que de nous amener à nous pencher ensemble sur son avenir.
Plusieurs des questions que vous soulevez, madame Borvo Cohen-Seat, nous invitent ainsi à nous interroger, l’une des plus significatives étant celle qui porte sur la possibilité, également évoquée par Mme le rapporteur, de confier aux mairies la compétence pour enregistrer les PACS en lieu et place des greffes des tribunaux d’instance.
Je rappelle qu’en 2004 le groupe de travail installé à la Chancellerie avait proposé de maintenir la compétence de ces derniers pour l’enregistrement des PACS et que le législateur avait suivi cette proposition en juin 2006.
Il est vrai que, dans son rapport sur la répartition des contentieux rendu le 30 juin 2008, la commission présidée par le recteur Serge Guinchard a préconisé de transférer aux officiers de l’état civil les compétences assurées par les greffiers, préconisation que reprend l’article 1er de la proposition de loi.
Certes, la tâche consistant à enregistrer les déclarations de PACS ne constitue pas une attribution juridictionnelle, mais il nous paraît néanmoins difficile de confier cette tâche aux mairies.
Comme l’a rappelé Mme le rapporteur, le Gouvernement doit être à l’écoute des élus et prendre en considération les réticences de communes §…