Pour nous, le chômage structurel en France se situe peu ou prou autour de 6,3 %. Cela veut dire que, pour atteindre le plein emploi, que je situe autour de 4,5 %, voire 5 %, il y a des réformes à faire.
On a beaucoup parlé de formation, mais je pense que l'immobilier est une problématique qui n'est pas assez prise en compte. Or le mal logement est une source fondamentale de mauvaise intégration dans l'emploi, et elle commence à produire ses effets dès l'enfance. Quand on est mal logé, on n'est pas dans de bonnes conditions pour réussir son parcours scolaire. Une étude du Collège de France montre que l'on est en mesure de dire à 82 % à la fin de la maternelle ou du cours préparatoire qui va décrocher scolairement à 16 ans ou être en situation d'échec au vu des conditions de logement durant son enfance.
Par ailleurs, on peut évoquer la mobilité, mais c'est la plupart du temps lié au logement. On a voulu faire une France des propriétaires. Résultat : une fois que l'on accède à la propriété, on est fixé à son territoire et on ne bouge plus.
Ce qui nous différencie des autres scénarios, c'est que l'on ne sait pas dire s'il y aura un rationnement de l'énergie, d'autres crises sanitaires ou des catastrophes naturelles. La crise sociale, c'est différent, car elle est latente depuis 2019.
Depuis lors, selon l'Insee, le taux de pauvreté s'est stabilisé grâce au « quoi qu'il en coûte », mais les inégalités se sont creusées au profit des 20 % les plus riches, qui ont pratiqué la sur-épargne. De même, les effets du choc énergétique ne sont pas les mêmes pour tout le monde : 5 % d'inflation au niveau national, ce n'est pas 5 % pour tout le monde.
Si, en plus, on fait des économies sur le chômage et les retraites, il y a des chances que la crise sociale nous revienne comme un boomerang. À mon sens, il sera très compliqué de dire que l'on continue à baisser les impôts dans les années qui viennent, d'autant qu'il y a eu 200 milliards d'euros de dette en plus ces dernières années.
Un dernier point sur le climat, avec une question un peu iconoclaste : le réchauffement climatique est-il bon pour la croissance économique ? Cela dépend du niveau initial des températures. Si elles sont basses à l'origine, le réchauffement a du bon pour l'économie, en revanche, si elles sont déjà hautes... À l'évidence, les incidences négatives du réchauffement climatique sont plus importantes pour le Sud que pour le Nord, ce qui aura des conséquences sur les flux migratoires, qui vont devenir gigantesques. Comment va-t-on les gérer ? Le choc risque d'être si violent qu'il sera impossible à gérer à l'horizon de 2050.