Vous savez toutes et tous ici que l’application de l’article 40 de la Constitution, qui interdit aux Parlementaires d’aggraver les charges de l’État, empêche de déposer un amendement portant extension du droit à pension de réversion pour les pacsés.
Nous l’avons encore expérimenté à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2010 : nous avions présenté un tel amendement, qui a été déclaré irrecevable en application de l’article 40, ce qui nous a contraints à proposer un amendement prévoyant un rapport sur le coût d’une telle mesure, lequel a d’ailleurs été repoussé.
Pour notre part, nous sommes convaincus qu’il faut aller de l’avant, qu’il s’agit non seulement d’une mesure de justice sociale, mais également d’une mesure de bon sens. En effet, et ce n’est pas notre collègue Dominique Leclerc qui nous contredira, ce report fait courir le risque d’une condamnation de la France par la Cour de justice des Communautés européennes ; je fais expressément référence à l’avis de la HALDE, qui considère que la France, en refusant le droit à pension de réversion pour les partenaires liés par un PACS, méconnaît les dispositions de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme.
J’ai pris connaissance du rapport de Mme Troendle, et son argumentation visant à écarter ce risque ne me convainc pas. Si le Conseil d’État a rappelé que le principe d’égalité n’imposait pas que des personnes placées dans des situations juridiques différentes soient traitées dans tous les cas de manière identique, il ne s’est pas opposé à une modification législative visant à revenir sur ces situations juridiques différentes.
Par ailleurs, on ne peut ignorer que cet avis, rendu en 2002, ne peut tirer toutes les conséquences des évolutions législatives intervenues, notamment celles qui sont issues de la loi du 23 juin 2006, qui a constitué un pas supplémentaire vers l’alignement des droits des couples pacsés sur ceux des couples mariés.
En outre, depuis 2002, la représentation nationale a adopté la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Pour mémoire, celle-ci proscrit les discriminations indirectes et dispose, dans son article 1er : « Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs mentionnés au premier alinéa – cela fait notamment référence à l’orientation sexuelle –, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime ».
Or priver du droit à pension de réversion le partenaire survivant d’un PACS liant deux personnes de même sexe, au motif qu’il faudrait conserver une spécificité au mariage, mariage auquel n’ont précisément pas droit les couples homosexuels en raison même de leur orientation sexuelle, est, à n’en pas douter, une discrimination indirecte, proscrite à la fois par les directives européennes et par la législation nationale.
Nous voterons évidemment cet article et espérons que nos collègues, tant de l’opposition que de la majorité, décideront eux aussi de faire avancer les droits et les protections des personnes liées par un PACS.