La question que vous posez est intéressante : y a-t-il quelque chose de spécifique dans l'Église ? Véronique Margron a commencé à y répondre. Je pense que la commission Sauvé est utile. C'est à l'Église de changer elle-même. On a évoqué la confusion entre le pouvoir et le sacré. L'Église est constituée ainsi. J'ai passé quatre ans comme journaliste à Rome à n'interviewer que des hommes. Pour avoir une autorité dans l'Église, il faut en effet être ordonné. Il y a donc une confusion totale entre la personne sacrée qu'est le prêtre et la personne qui incarne l'autorité. C'est un vrai problème. Pourquoi ne pas avoir des cardinales femmes, des femmes responsables de congrégation, responsables du diocèse, etc. ? Tant que le prêtre détiendra l'autorité, il y aura confusion.
Autre problème : pourquoi n'y a-t-il pas eu plus de vigilance ? Cela vient d'un problème interne à l'Église : l'évêque, notamment depuis Vatican II, a beaucoup de pouvoirs. Chaque diocèse manque de mécanismes de régulation comme il en existe dans toutes les entreprises et toutes les institutions aujourd'hui. Lorsqu'un dirigeant commet une erreur, le conseil d'administration est là pour le lui faire remarquer.
Il faut mener une réflexion au sein de l'Église pour savoir pourquoi il n'existe pas de système de régulation interne dans les diocèses, où tout dépend de l'évêque. Si l'évêque est très sensible à la pédophilie, il ira voir les victimes, comme c'est parfois le cas. En revanche, quand l'évêque ne veut pas agir, on ne peut rien faire. Il y a là un vrai problème d'organisation, mais il concerne plutôt l'Église. C'est pourquoi j'attends beaucoup de la commission Sauvé.