Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 6 février 2019 à 16h30
Audition conjointe de mmes isabelle de gaulmyn rédactrice en chef au journal la croix catherine bonnet ancien membre de la commission vaticane chargée de lutter contre la pédophilie dans l'église soeur véronique margron théologienne présidente de la conférence des religieuses et religieux en france corref père stéphane joulain père blanc psychothérapeute spécialisé dans le traitement des abus sexuels père pierre vignon prêtre du diocèse de valence

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

Notre mission doit essayer de dégager des solutions concrètes, même si vos réflexions sont évidemment fondamentales.

Selon moi, l'origine du problème réside dans le secret. Nous avons tendance à considérer que le droit français s'applique quoi qu'il arrive. Je crois d'ailleurs que le pape lui-même a dit des choses de cet ordre il y a quelques mois. Vous l'avez dit de manière très claire, et de façon assez courageuse, madame : cela ne sait peut-être pas assez, mais l'obligation de signalement existe. Ne faut-il pas explique que le secret de la confession n'est pas intangible et ne peut dispenser de révéler les crimes ?

Père Joulain, vous avez reçu en confession des pédophiles à qui vous avez dû donner l'absolution, et vous vous êtes orienté vers la psychologie pour vous dégager de tout ceci. N'avez-vous pas révélé les faits ? Je ne veux pas vous mettre en difficulté, mais je pense que les choses évoluent : sans doute est-il possible d'apprendre à la communauté religieuse que le secret de la confession ne prime pas sur le droit et qu'il faut révéler les actes criminels.

Père Stéphane Joulain. - Le cas que je citais est intervenu dans un pays qui n'applique pas les mêmes lois que la France. En tant que sénateurs, vous pouvez vous demander si l'arrêt rendu par la Cour de cassation au début du XIXe siècle a encore sa pertinence dans le projet de société dans lequel on s'inscrit.

Cet arrêt définit le droit des ministres du culte au secret professionnel. Il a été élargi pour dépasser le seul cadre sacramentel et couvre toutes les activités pastorales d'accompagnement. La question pour le législateur est de savoir ce que la société peut faire pour rendre le signalement obligatoire. C'est selon moi une vraie question juridique.

Cela étant, je suis sûr que l'Église, en tant qu'institution, aura son mot à dire, et je lui laisse ce privilège. Pour l'instant, c'est ainsi que cela fonctionne en France.

Soeur Véronique Margron. - Les canonistes eux-mêmes réfléchissent pour savoir comment suspendre le rite de la confession et intimer à une personne l'ordre de se dénoncer, en indiquant que le rite de la confession ne pourra reprendre qu'ensuite. Je ne veux pas contrevenir au droit de l'Église, mais on ne peut pas rester dans cette situation, même si les dénonciations de faits sont minoritaires.

Il y a une réflexion à mener en profondeur, y compris du côté canonique. Nombre de mes collègues théologiens et théologiennes travaillent sur ces questions. Je ne peux dire si l'Église y est prête - encore moins l'Église universelle -, mais étant donné la crise d'une gravité extrême que traverse l'Église catholique, qui touche aux plus vulnérables, je ne vois pas comment nous pourrions entretenir le statu quo.

La question du célibat me semble concerner le rapport à la responsabilité. La structuration de l'Église, dans sa hiérarchie, peut déresponsabiliser. C'est un vrai danger. Selon moi, la question porte plutôt sur l'immaturité et sur le refuge que peut constituer l'institution catholique pour certains. Comment s'assurer, dans le cadre de la formation, que les personnes sont suffisamment armées pour affronter toutes les épreuves de la vie ?

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