Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 18 décembre 2008 à 9h30
Loi de finances rectificative pour 2008 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, au même titre que la commission des affaires culturelles dont la position vient d’être exprimée par Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur pour avis, la commission des affaires économiques a souhaité se saisir de l’article 44 bis.

Cet article n’est autre que l’article 19 du projet de loi initial du Gouvernement relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, consacré à la redevance. C’est donc l’article pivot concernant le financement notamment de la télévision publique en France. Pour les raisons que l’on sait, notamment à la suite du retard pris dans le déroulement des débats à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a retiré cet article 19 pour l’insérer dans le présent collectif budgétaire, où il est devenu l’article 44 .

Si la commission des affaires économiques s’est saisie de cette question, c’est parce que le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle fait porter aux opérateurs de télécommunications et aux fournisseurs d’accès à internet – domaine qui relève du champ de compétences de la commission des affaires économiques – l’essentiel de la charge du financement de la compensation des 450 millions d’euros qui manqueront à l’audiovisuel public du fait de la suppression de la publicité après vingt heures. Autrement dit, cette somme sera compensée à hauteur de 85 % par une taxe de 0, 9 % applicable aux opérateurs de télécommunications.

Comme elle s’en expliquera lors de l’examen par le Sénat, début janvier, du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle, la commission des affaires économiques a été quelque peu heurtée par le fait qu’il existait très peu de liens entre l’activité, le chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications et des fournisseurs d’accès, d’une part, et les images diffusées par France Télévisions, d’autre part.

Sur les 42 milliards d’euros de chiffre d’affaires réalisés par les opérateurs de télécommunications et fournisseurs d’accès à internet, 37 milliards d’euros correspondent aux services de messagerie SMS – –, à la téléphonie fixe, à la téléphonie mobile, c'est-à-dire à des activités qui n’ont strictement rien à voir avec l’image, avec la télévision publique, alors que seulement 5 milliards d’euros, donc une part très faible, résultent des activités audiovisuelles.

Pour autant, ces opérateurs participent, par le biais du compte de soutien à l’industrie des programmes, ou COSIP, au financement de la création audiovisuelle et cinématographique, et s’acquittent déjà de leurs droits en la matière.

Il nous a donc semblé curieux qu’une réforme, au demeurant souhaitable et bonne, visant à diminuer progressivement la dépendance de l’audiovisuel public de la publicité et de la pression de l’audimat, débouche sur une taxe de 0, 9 % qui, loin d’être infinitésimale, comme elle aurait dû l’être, représente près de 7 % des investissements annuels de ces opérateurs.

C’est pourquoi la commission des affaires économiques vous proposera, lors de l’examen du projet de loi sur la communication audiovisuelle, des amendements visant à revenir à la proposition qui avait été faite par la commission « Copé », c'est-à-dire à une taxe de 0, 5 % sur les opérateurs de télécommunications et des fournisseurs d’accès, afin de la ramener à un niveau plus normal, plus juste – dans l’injuste !

Cela étant, dans la perspective d’une modification profonde du financement de l’audiovisuel public impliquant, notamment, la disparition complète de la publicité à partir de 2012 du compte d’exploitation de France Télévisions, la redevance doit rester, selon nous, une ressource dynamique, pivot du secteur audiovisuel public. Le montant de la redevance est moins élevé en France que chez nos partenaires européens ; il est inférieur en moyenne de 45 euros.

C’est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques a souhaité émettre un avis et s’associer, si j’ose dire, aux initiatives de la commission des affaires culturelles visant à actualiser et à indexer la redevance sur le taux de l’inflation, ainsi que l’Assemblée nationale l’a voté, afin de regagner la perte enregistrée en 2008 et de faire de cette redevance une recette véritablement dynamique à l’avenir. C’est une question fondamentale à nos yeux. Tel est le premier point.

J’aborderai à présent un deuxième aspect, concernant l’article 30 de ce collectif budgétaire.

Au-delà du grand respect et de la profonde estime que je porte à notre rapporteur général, Philippe Marini, je dois dire que je suis gêné par son amendement visant à instituer l’obligation de transmission à l’administration fiscale des informations détenues par les grandes plateformes de e-commerce dès lors qu’une personne se livrant à des opérations de vente ou de prestations de service en ligne réalise, par ce biais, plus de douze transactions et un chiffre d’affaires de 5 000 euros au cours de l’année civile.

À en juger par les textes dont nous sommes saisis, par exemple le projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet et l’instauration de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, l’HADOPI, mais aussi le projet de loi sur la communication audiovisuelle, chacun d’eux fournit systématiquement l’occasion de « taper » sur le numérique. Contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, où M. Obama inscrit le développement du numérique au cœur de son plan de relance, en France, soit nous créons des taxes, soit nous imposons des contraintes à ce secteur.

Permettez-moi d’insister sur le fait que le numérique représente un espace de liberté. Internet constitue un formidable gisement de croissance et d’emplois et offre des perspectives prometteuses pour nombre d’activités.

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