Intervention de Alain-Michel Ceretti

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 1er juin 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Alain-Michel Ceretti conseiller santé auprès du médiateur de la république auteur d'un rapport sur le bilan et les propositions de réformes de la loi du 4 mars 2001 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé

Alain-Michel Ceretti, conseiller santé auprès du Médiateur de la République :

Mes raisons sont d'abord personnelles. Il convient de rappeler mon parcours professionnel. Je suis chef d'entreprise dans l'industrie électronique, sans lien avec le médicament. Mon épouse a malheureusement fréquenté la Clinique du Sport. Elle a été opérée en 1991. Une infection vertébrale l'a paralysée. L'établissement ne l'a pas prise en charge. Il a fallu presque sept ans pour qu'un diagnostic soit posé. En 1997, ma femme et moi avons établi le lien de causalité entre l'opération initiale et l'infection. D'autres personnes avaient été touchées ; elles fréquentaient le même établissement à Paris. La question d'une action judiciaire collective s'est donc posée rapidement. Nous avons créé l'association des victimes du xénopi, du nom de la bactérie. Puis cette association s'est transformée, en lien avec les infections nosocomiales.

Ma première démarche en tant que président de l'association a été d'obtenir des pouvoirs publics qu'ils mettent en place des moyens permettant de retrouver les malades. Nous avons dépisté 15 000 personnes et retrouvé 60 contaminées. La deuxième étape a été de trouver une solution d'indemnisation rapide avec les compagnies d'assurance. J'ai une formation personnelle et presque familiale en matière d'assurance. Axa, qui était l'assureur principal de l'établissement, a rapidement accepté le principe de l'indemnisation de l'ensemble des victimes et par la suite de se rembourser auprès des autres assureurs en fonction des responsabilités établies. Les plaintes ont été déposées en 1997. La première instance a eu lieu fin 2009 avec des condamnations de prison ferme en mars 2010. Aujourd'hui nous attendons l'appel.

Les personnes qui n'ont pas pu bénéficier de l'accord que j'ai signé avec Axa pour l'ensemble des victimes, volontairement ou involontairement, sont en cours d'indemnisation pour des préjudices survenus entre 1990 et 1993.

La class action n'existant pas, nous avons proposé à un avocat de mutualiser les coûts pour prendre en charge l'ensemble des dossiers pour les personnes qui le souhaitaient. Nous avons trouvé un avocat qui a porté à lui seul 90 % des affaires. Il avait le sens de l'intérêt général pour les victimes. Cet avocat est devenu familier des magistrats, des compagnies d'assurance et des experts judiciaires. Cette intimité a permis de faire progresser les dossiers très rapidement.

Les affaires sanitaires sont les plus compliquées. Lorsque j'ai plaidé pour la loi du 4 mars 2002, j'ai rencontré un certain nombre de vos collègues et confrères médecins. Nous avions beaucoup parlé des infections nosocomiales. A l'époque, la jurisprudence était extrêmement favorable puisque le doute profitait à la victime. En effet, il n'appartenait plus à la victime de démontrer la faute mais il appartenait à l'établissement privé de démontrer qu'il n'avait pas commis de faute. Dans tous les autres domaines, il fallait que le lien de causalité soit certain et la faute prouvée. Lorsque le lien de causalité est incertain, il ne profite pas à la victime.

Dans le cadre du Mediator, nous n'allons pas opérer les personnes uniquement pour démontrer que les complications cardiaques sont bien liées à ce médicament. Cette question s'était posée pour le xénopi. Certaines personnes avaient été opérées de nouveau pour reconstruire les vertèbres. Pour d'autres personnes en revanche, les antibiotiques ont suffi. Cependant nous ne disposions pas de la preuve bactériologique. Elle nécessite d'effectuer un prélèvement de l'os de la colonne vertébrale pour le mettre en culture. La présomption ne suffisait pas aux compagnies d'assurance.

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