Nous avons besoin d’un État responsable et, surtout, plus protecteur, dans cette période de tourmente. C’est une nécessité pour nos concitoyens, pour nos entreprises et pour nos collectivités locales.
Le groupe de l’Union centriste, vous le savez, insiste toujours particulièrement sur la vigilance à conserver à l’égard de la situation de nos finances publiques ; c’est pourquoi il convient, d’ores et déjà, de souligner le caractère temporaire des mesures prévues par le plan de relance.
Le déficit budgétaire associé au collectif de fin d’année va s’élever à 51, 4 milliards d’euros – voire 52 ou 53 milliards d’euros, selon l’état des recettes –, soit des augmentations respectives de 2 milliards d’euros par rapport à la prévision retenue dans la loi de finances rectificative du 16 octobre 2008, de 9, 7 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2008 et de 13 milliards d’euros par rapport au déficit d’exécution de la loi de finances pour 2007.
Dans le même temps, les prévisions de recettes fiscales pour 2008, annoncées lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2009, sont réduites de 2 milliards d’euros, soit une baisse globale de 7 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2008. Les impôts les plus sensibles à la conjoncture voient leurs recettes les plus atteintes : 1 milliard d’euros pour l’impôt sur les sociétés et 1, 1 milliard d’euros pour la TVA. L’impôt sur le revenu, quant à lui, baisse légèrement – 300 millions d’euros – compte tenu du résultat des émissions et du niveau des encaissements à la fin du mois d’octobre.
Par ailleurs, M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a annoncé hier la probabilité d’un déficit budgétaire à 79, 3 milliards d’euros, soit 3, 9 % du PIB pour 2009. La différence avec les 54, 1 milliards d’euros que nous avons votés la semaine dernière tient aux prévisions de moindres recettes liées à la révision par le Gouvernement des hypothèses de croissance, ainsi qu’à la mise en œuvre de 9, 2 milliards d’euros de mesures fiscales du plan de relance.
À la lumière de ces résultats concernant nos finances publiques, on peut assez naturellement s’interroger sur l’utilité ou, en tout cas, sur la valeur de la loi de programmation sur les trois années à venir que nous avons adoptée il y a quelques semaines. Nous avons l’impression assez fastidieuse de nous répéter en changeant seulement quelques chiffres.
Venons-en au projet de loi de finances rectificative pour 2008. Avec ses cent vingt articles, il constitue une véritable encyclopédie de mesures. On en oublierait presque l’objectif essentiel du traditionnel « collectif de fin d’année », à savoir la régularisation des montants des crédits et les ouvertures et annulations de crédits nouveaux, en fonction de l’exécution de la loi de finances initiale.
Je ne vais pas énumérer l’ensemble des mesures fiscales qui ont retenu mon attention : elles sont pourtant nombreuses. Mais l’essentiel du texte qui nous intéresse est constitué par les principales mesures fiscales du plan de relance de l’économie annoncé le 4 décembre 2008 par le Président de la République.
C’est sans doute l’intérêt majeur de cette loi de finances rectificative. Je tiens à saluer la volonté déterminée de ne pas transformer cette relance en un plan de soutien massif à la consommation, et d’avoir délibérément soutenu l’investissement.
Outre les 26 milliards d’euros prévus, il faudrait que les collectivités territoriales accompagnent ce plan en investissant massivement. Car c’est par l’investissement que l’on retrouvera le chemin de la croissance, et non par des mesures conjoncturelles de soutien à la consommation, qui se traduiraient par une aggravation des déficits commerciaux et par une diminution, à moyen terme, de la croissance française.
Rappelons que la croissance est avant tout fonction de l’investissement et de la régularité de celui-ci. Si la Chine a un taux de croissance de 10 % à 12 %, c’est parce qu’elle investit 50 % de son produit intérieur brut. Lorsque vous investissez moins de 8 % ou 10%, vous ne progressez pratiquement plus.
Ne serait-ce que sur ce point, la crise aura été un électrochoc positif pour notre pays dans notre rapport à l’investissement et à l’avenir de notre production et de notre recherche.
La crise qui nous touche actuellement peut trouver ses origines dans la conjonction de trois phénomènes : d’abord, naturellement, la crise bancaire et financière née cet été aux États-Unis ; ensuite, la légère récession provoquée par la hausse vertigineuse des prix du pétrole, des matières premières, du blé et du lait ; enfin, la très lente évolution d’un système marqué depuis 1972 par une série de crises et par la fin du plein emploi.
Il apparaît aujourd’hui comme de plus en plus évident que l’ensemble de nos économies paie la conséquence d’une certaine immoralité, dans les pratiques bancaires, immobilières ou encore assurantielles.
Les États-Unis ont souhaité renforcer le capitalisme en incitant chacun à devenir propriétaire, sans limite et sans encadrement. Les banques ont prêté de 100 % à 120 % de la valeur du bien, persuadées de la hausse permanente de l’immobilier, et surtout persuadant les acquéreurs de ces mêmes prévisions. Au final, en 2007, 1, 7 million de familles ont été expropriées aux États-Unis.
Parallèlement, les rémunérations des traders et des directeurs de banque ont explosé ; les autorités de contrôle ont été défaillantes. On peut donc s’interroger sur la possibilité d’avoir un capitalisme véritablement éthique. L’ultralibéralisme, c’est le refus des règles. Or la crise actuelle et les solutions qui y sont apportées nous le prouvent : il est nécessaire que l’État soit un régulateur. Le plan de sauvetage des banques en France et en Europe, mais aussi aux États-Unis, démontre qu’en dernier ressort seul l’État doit garantir les dépôts bancaires.
Le « laisser-faire laisser-aller » ne peut plus, ne doit plus diriger notre politique économique. La réforme de la gouvernance dans tous ces secteurs est primordiale pour la bonne santé de notre économie. Notre assemblée a pu débattre la semaine dernière, sur l’initiative du groupe Union centriste, de la question du surendettement et de sa prévention. Nous sommes au cœur du même sujet, celui de la responsabilité des acteurs économiques et financiers.
Moralisation et responsabilisation sont les seuls mots d’ordre que l’on peut défendre si l’on veut sortir de la crise et ne pas y retourner.