Intervention de Paolo Gentiloni

Commission des affaires européennes — Réunion du 27 avril 2020 à 14h00
Économie finances et fiscalité — Audition de M. Paolo Gentiloni commissaire européen à l'économie par téléconférence

Paolo Gentiloni, Commissaire européen à l'économie :

Comment répondre au risque de divergence entre les différentes économies et de déconstruction du marché intérieur ? Comment peut-on avoir une réaction autre que celle que nous avons eue après la crise financière ?

Déjà, nous sommes dans la bonne direction ! En effet, au moment de la crise financière, un État en difficulté pouvait demander de l'aide, mais, pour l'obtenir, il devait répondre à des conditions très strictes. La crise actuelle, elle, affecte tous les pays et a des conséquences sur l'ensemble de l'Europe ; il s'agit d'éviter que ce phénomène, commun à tous, ait des conséquences très différentes entre pays. Comment le faire quand on a une politique monétaire commune, mais pas de politique économique commune ? En introduisant des outils, des projets et des financements communs à cet effet !

La finalité générale du plan de soutien de 540 milliards d'euros de l'Eurogroupe, comme du plan de relance que nous allons mettre en place, est bien de bénéficier à l'ensemble des pays européens, en évitant que, d'une crise commune dont nul n'est responsable, certains puissent sortir vainqueurs et d'autres perdants. Nous avons bien avancé dans cette direction, je l'ai dit, mais il reste encore beaucoup de chemin à faire. Ce ne sera pas facile : il faudra trouver des accords entre des positions qui divergent depuis des dizaines d'années. Pour cela, il me semble nécessaire de regarder, non pas derrière, mais devant !

Quelles ressources nouvelles ? Cette question n'est pas facile. Au-delà de la piste de la fraude à la TVA, que j'ai déjà évoquée, il est difficile pour moi d'y répondre ici en détail...

Effectivement, la Croatie et la Bulgarie cherchent à se rapprocher de la zone euro. Pour cela, elles suivent, accompagnées par la Commission européenne et la BCE, un parcours très strictement défini, comprenant étapes et conditions à remplir. Les efforts de ces deux pays doivent être appréciés, mais le parcours à accomplir reste celui qui a été établi.

Même si l'on a bien vu à quel point le système européen, comparé au système américain, était résilient - nous n'avons pas eu d'explosion soudaine du chômage -, cette crise aura des conséquences sociales très sérieuses, avec des phénomènes de pauvreté. Il faudra donc renforcer nos mécanismes de lutte contre la pauvreté ou de chômage partiel, et le plan global de relance comprend bien un pilier social.

Sur le Green deal, la Commission européenne est très claire : non seulement il ne faut pas oublier ce processus dans le plan de relance, mais l'opportunité de changement qui se présente à nous doit même être utilisée pour apporter des corrections dans le sens de la soutenabilité sociale et écologique de nos systèmes. Il faut être conscient que ce ne sera pas immédiat sur les plans économique et culturel, que des oppositions fortes se manifesteront. Pour autant, ce serait une erreur tragique que de remettre le Green deal à dix ans au motif de la crise.

Nous le savons, le système de filtrage des investissements n'est pas très puissant au niveau européen et se concentre autour des questions de sécurité. Des mesures sont prises au niveau des États membres pour renforcer leur golden power et, à notre tour, nous travaillons à l'échelle de l'Union européenne. Associé au fonds de relance, pourrait ainsi être proposé un fonds paneuropéen destiné à apporter un soutien commun à nos entreprises les plus stratégiques. J'espère que cette proposition pourra voir le jour dans les prochains mois, mais pour l'instant, je l'ai dit, les réactions sont plutôt nationales.

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