Intervention de Benoît Huré

Commission des affaires européennes — Réunion du 30 avril 2020 à 10h00
Environnement — Projet de proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité du projet de loi européenne sur le climat par téléconférence

Photo de Benoît HuréBenoît Huré, rapporteur :

Le deuxième point concerne la perspective d'une révision à la hausse de l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2030, qui avait été validé par le Conseil européen en octobre 2014, puis décliné en 2018 dans un règlement sur la répartition de l'effort entre les États membres.

La Commission devrait réexaminer d'ici septembre 2020 l'objectif spécifique de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne à l'horizon 2030. Elle souhaiterait relever cet objectif, qui était fixé à 40 %, pour le porter à 50 %, voire 55 % par rapport aux niveaux de 1990. Des propositions de modifications législatives européennes pourraient alors être proposées en ce sens d'ici le 30 juin 2021 au plus tard.

Le Parlement européen, dans une résolution adoptée le 28 novembre 2019, a appelé à relever cet objectif de réduction des émissions à l'horizon 2030 à 55 %.

Cette perspective de rehaussement de l'ambition de l'Union européenne à l'horizon 2030 peut apparaître cohérente avec l'objectif élevé que la proposition de règlement fixe d'ici 2050. C'est toutefois un point très sensible politiquement et il n'y a pas, à ce stade, de consensus entre les États membres.

Nous regrettons que l'étude d'impact concernant les cibles de réduction envisagées à l'horizon 2030 n'ait pas été présentée en même temps que la proposition de règlement pour permettre d'apprécier la proportionnalité de cette proposition.

L'Agence européenne pour l'environnement a en effet souligné l'importance des efforts nécessaires pour respecter l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % à l'horizon 2030.

Dès lors que l'actuel objectif 2030 a été validé en 2014 par le Conseil européen, à l'unanimité, nous observons que la décision de rehausser le niveau de l'ambition à l'horizon 2030 devrait également être approuvée par le Conseil européen, avant d'être validée dans le cadre de cette proposition de règlement au terme de la procédure législative ordinaire.

Les deux points qui suivent sont plus problématiques au regard du respect de la répartition des compétences entre les États membres et l'Union.

La proposition de règlement prévoit des modalités d'évaluation des progrès et des mesures prises par l'Union européenne et les États membres. À partir de 2023, et tous les cinq ans ensuite, la Commission évaluera les progrès réalisés et pourra ainsi adresser des recommandations à un État membre si les mesures qu'il a adoptées sont incompatibles avec l'objectif de neutralité climatique, ou inappropriées pour améliorer la capacité d'adaptation au changement climatique.

Nous convenons que le principe d'une évaluation est nécessaire pour assurer un suivi effectif d'un objectif contraignant. Il se justifie également au regard des investissements exigés pour atteindre cet objectif et des financements qui seront octroyés par l'Union européenne.

Lors de l'audition des représentants de la Direction générale en charge du climat, les services de la Commission nous ont indiqué que l'article concernant la procédure d'évaluation des mesures prises par les États membres reprend des éléments déjà validés dans le règlement du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l'union de l'énergie et de l'action pour le climat. Le champ de ces deux textes est toutefois différent.

En effet, la procédure d'évaluation des mesures nationales renvoie notamment à la trajectoire entre 2030 et 2050, que la Commission souhaite définir par voie d'actes délégués, en s'appuyant sur des éléments très larges.

Cela inclut notamment le rapport coût-efficacité et l'efficience économique, la compétitivité de l'économie de l'Union, les meilleures technologies disponibles, l'efficacité énergétique, l'accessibilité financière de l'énergie et la sécurité de l'approvisionnement en énergie, la nécessité de garantir l'efficacité environnementale et une progression dans le temps, enfin les besoins et les possibilités d'investissement.

Après avoir entendu le Secrétariat général des affaires européennes, nous considérons qu'il conviendrait de clarifier cette procédure d'évaluation des mesures nationales, notamment au regard de l'article 194 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui affirme le droit pour un État membre de déterminer les conditions d'exploitation de ses ressources énergétiques, son choix entre différentes sources d'énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique.

Il est évidemment légitime, dès lors que l'Union se fixe un objectif, que la Commission veille à en assurer le respect, mais le principe de subsidiarité impose aussi de veiller à ce qu'elle n'interfère pas de manière excessive dans les compétences des États membres au travers des recommandations qu'elle pourrait leur adresser. Or il nous semble qu'il existe aujourd'hui un flou sur ce point.

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