Je vous remercie pour vos questions pertinentes et sensibles. Il est nous agréable de voir que vous percevez l'enjeu que représente l'herboristerie, un enjeu qui n'est pas qu'économique, mais qui revêt une autre dimension.
Concernant la formation future, il faut schématiquement penser à trois niveaux. Premièrement, un niveau de proximité avec le producteur, qui certes va vendre son produit, mais répond au rendez-vous de la communion avec la nature, un échange dont nous avons tous besoin. Deuxièmement, l'herboriste de comptoir s'adresse plutôt aux gens des villes, sans concurrence avec les pharmaciens : chacun exerce son métier, en cohésion. Il faut pouvoir lui donner tous les moyens d'exercer légalement son métier, avec une offre de plantes raisonnable. Troisièmement, une montée en puissance des techniciens, des chercheurs : des gens qui vont travailler sur la connaissance de l'histoire de l'herboristerie, qui a des millénaires, et sur les réponses à apporter demain pour satisfaire nos besoins et connaître la biodiversité. C'est une imbrication entre les besoins humains et la nécessité impérieuse de mieux connaître notre territoire et de protéger la biodiversité. Je n'ai pas de solution toute faite à vous proposer ; il faut dialoguer et bâtir.
Concernant la production, l'Association française des professionnels de la cueillette de plantes sauvages a travaillé en étroite collaboration avec le ministère de l'environnement ; la charte que nous avons élaborée tient la route, mais il faut la déployer au travers de guides de bonnes pratiques. Il faut travailler sur la notion de filières avec les interprofessions pour bien définir les besoins, les contrats de production avec les laboratoires, les herboristes, les négociants. Comme le disait Michel Pierre, les herboristes qui tiennent des comptoirs en ville ne peuvent pas tous aller ramasser leurs plantes ; ils ont besoin de négociants fiables pour connaître la traçabilité, la fiabilité analytique et la qualité. Structurons les filières, comme cela a été fait dans d'autres professions de l'agriculture.
Pourquoi l'herboriste n'aurait-il pas un diplôme ? C'est une nécessité. On ne part pas de nulle part ; cela fait des dizaines de milliers d'années que l'on infuse : on a de la matière et de la diversité.
C'est un long chemin pour cultiver une plante : elle a poussé - à l'état sauvage ou cultivée -, elle a été ramassée, coupée, séchée, stockée, conditionnée, avec tous les problèmes inhérents à l'agriculture traditionnelle, tels que la météorologie, par exemple.
Oui, c'est un nouveau rendez-vous. Lorsque j'ai débuté en 1976, la moyenne d'âge de mes clients était de soixante-dix ans, contre trente ans aujourd'hui. Ce métier dit quelque chose à notre temps ; il nous parle parce que l'on va à l'essentiel pour ce qui concerne le rapport que nous avons au temps et à la nature.
Précédemment, j'ai abordé la question du bien-être et de la prévention : c'est l'attention à l'autre, le partage et la qualité de nos terroirs - le thym des Alpilles n'est pas celui des Corbières ou du Larzac. Construisons tout cela ensemble pour parvenir à proposer à la population discernement et sécurité ! Le travail que nous avons à faire est extraordinaire. Tout est devant nous et l'innovation est considérable. Si l'on stabilise notre situation, on pourra créer beaucoup d'emplois.