Intervention de Philippe Léglise-Costa

Commission des affaires européennes — Réunion du 17 avril 2020 à 11h00
Institutions européennes — Audition de M. Philippe Léglise-costa représentant permanent de la france auprès de l'union européenne par téléconférence

Philippe Léglise-Costa, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne :

Le rebond de l'épidémie, Monsieur Rapin, est un sujet qui préoccupe les institutions européennes. Nous y travaillons.

La Commission européenne, dans sa feuille de route, envisage ce risque à différents niveaux, le premier par la définition de la gradualité de l'approche de la date de sortie du confinement, avec des délais suffisants entre chaque étape, de manière à vérifier l'absence d'accélération au regard de l'épidémie.

En deuxième lieu, il faut s'assurer que l'analyse épidémiologique, les capacités des systèmes de santé et les moyens disponibles en termes de protection de la population sont bien réunis pour procéder à chaque nouvelle étape de déconfinement.

Enfin, la Commission européenne estime, en cas de résurgence de l'épidémie, qu'il conviendrait de prévoir la réversibilité des mesures de déconfinement.

Malheureusement, l'épidémie se répand dans le reste du monde, ce qui a déjà amené les États membres à prolonger l'interdiction d'entrée sur le territoire des personnes en provenance des pays tiers d'un mois, jusqu'au 15 mai. Il est probable que cette interdiction soit prolongée, de manière à éviter tout rebond, comme on le voit en Chine aujourd'hui.

Monsieur Reichardt, concernant la sortie du confinement et les enjeux transfrontaliers, nous avons plaidé en faveur de dispositifs de coordination et d'échanges d'informations spécifiques, ce que la Commission européenne a pris en compte. Nous savons par avance que les mesures nationales ne seront pas toutes synchronisées. Il vaut mieux l'anticiper et s'assurer qu'il y aura bien coordination sur tous les sujets : travail transfrontalier, approvisionnement de l'autre côté de la frontière....

Nous avons deux types de réunions plusieurs fois par semaine, d'une part avec le Comité des représentants permanents (COREPER), qui instruit les dossiers de manière classique, et d'autre part avec les mêmes, mais dans le format différent du mécanisme de réactions aux crises (IPCR), que nous avons activé le 2 mars pour régler les questions urgentes.

La Commission européenne a mis en place sa propre task force pour gérer les questions matérielles et pratiques, ainsi que les enjeux qui remontent des États et des régions dans la réponse à la crise. C'est dans ce cadre que nous essaierons d'avoir une coordination d'ensemble.

Enfin, nous avons mis en place une task force entre la France et l'Allemagne pour pouvoir anticiper des décalages en termes de déconfinement.

S'agissant de l'Eurogroupe, un échange a eu lieu hier entre les ministres des finances, qui se sont réunis en vue du Conseil européen. Nous n'en sommes qu'au début, mais votre remarque concernant les assurances est clairement prise en compte.

Enfin, pour ce qui est de l'Afrique, nous avons demandé à la Commission européenne de mettre en place une initiative globale pour prendre en compte le développement de la pandémie dans des pays vulnérables, qui risquent de faire face à des défis encore plus graves qu'en Europe étant donné la faiblesse de l'État, les difficultés que connaissent les structures sanitaires ou les conflits en cours. La Commission européenne et la BEI ont débloqué 15,6 milliards d'euros, en essayant d'apporter une réponse très rapide à ces pays.

Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, dans une visioconférence, a soutenu avec force la priorité africaine, pour des raisons évidentes au regard des vulnérabilités d'un très grand nombre de pays africains et de leur proximité avec l'Europe.

La Commission européenne a identifié quatre enjeux.

Le premier est un enjeu humanitaire. Nous travaillons à l'acheminement très rapide d'une aide humanitaire vers les pays africains.

Le deuxième enjeu est sanitaire et porte à la fois sur les structures et la fourniture d'équipements médicaux, de médicaments ou de personnels soignants.

Le troisième enjeu est économique. Une grande partie de l'économie de ces pays est informelle. Certaines personnes risquent par ailleurs de ne pas accepter les mesures de confinement parce qu'elles ne seront plus en mesure d'assurer la survie de leur foyer.

Le dernier enjeu est politique et concerne la sécurité dans différentes régions d'Afrique, en particulier au Sahel ou en Libye.

L'Europe - et la France au premier chef - agit aussi au niveau international et au G20 en faveur d'un moratoire sur les dettes et d'un déblocage de droits de tirage spéciaux du FMI.

Une dernière action a enfin été engagée par la Commission européenne et de grands partenaires afin d'avancer ensemble en termes de recherches de traitements, de vaccin et de tests au niveau mondial. La Commission européenne a annoncé que cette conférence internationale, qui rassemblera les principales puissances mondiales et les acteurs comme l'OMS, l'Alliance globale pour les vaccins et l'immunisation (GAVI), la fondation Gates, aurait lieu le 4 mai prochain par visioconférence. Nous essayons donc d'ordonner l'action internationale et multilatérale, et de mobiliser des moyens, avec l'Afrique comme priorité.

Monsieur Gattolin, la recherche fait partie des cinq axes que les chefs d'État ou de gouvernement ont retenus pour ordonner l'action européenne dans cette période de crise. C'est l'une des grandes priorités. Nous réfléchissons, au-delà de l'initiative internationale dont je viens de parler, à coordonner les moyens européens de façon à être mieux préparés. Ceci vaut pour les vaccins, les tests, la collecte de données, les traitements.

Nous avons pu débloquer en quelques semaines près de 284 millions d'euros sur le budget européen en faveur de la recherche appliquée, de la recherche fondamentale, de la coopération avec l'industrie et du soutien à des entreprises européennes ayant la capacité de développer des vaccins ou des traitements.

Le Parlement européen, en particulier Mme Trillet-Lenoir, a porté ce sujet à Bruxelles dans une résolution sur la réponse à la crise. Il est proposé de mettre en place un fonds pour lutter contre le coronavirus prenant en charge le soutien à la recherche.

J'ai pris bonne note de votre observation s'agissant de ce que fait l'INSERM en France.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion