Monsieur le ministre, le budget de l'éducation nationale est l'un des plus importants budgets de l'État. Le temps accordé en séance publique, sans parler de l'horaire parfois, n'est peut-être pas proportionnel à ce qu'il représente dans les dépenses publiques, d'où l'importance de nos échanges et du temps que vous y passez. Nous vous en remercions.
Je remercie notre collègue Jacques Grosperrin pour sa vigilance, ses remarques justes et avisées sur le budget. Je veux aussi saluer la sagesse et la modération de Gérard Longuet, dont je risque, à mon corps défendant, de m'éloigner quelque peu dans mon intervention.
Il ressort de ce premier budget de la mandature que le Président de la République, à juste titre, a fait de l'éducation une priorité et a tenu des propos extrêmement forts. Je pense que nous pourrons être tous d'accord sur le fait qu'une politique volontariste est attendue.
En vous écoutant, monsieur le ministre, j'ai du mal à lire le contenu de votre politique, au-delà des mots-clés, des titres de chapitres et des éléments de langage. J'y vois des tentatives de réponses qui entrent en résonance avec de nombreux problèmes sectoriels. C'est louable, mais, à force d'avoir trop de caps, on va finir par affoler la boussole et se perdre en chemin !
On peut en effet se satisfaire et saluer, comme je le fais, les 935 millions d'euros que vous avez obtenus de Bercy pour revaloriser les salaires. C'est essentiel, mais vous avez fixé quelques règles de répartition. On peut s'étonner que, face à cette somme importante, il y ait si peu sur la réforme du métier d'enseignant.
Notre commission a eu souvent l'occasion d'appeler votre prédécesseur à une réforme de fond, à une véritable refonte de la gestion des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale pour rompre, par exemple, avec le véritable « bizutage institutionnel » des néotitulaires car, au-delà de la rémunération, il y a des questions prégnantes sur la formation, l'entrée dans le métier, le déroulement de la carrière.
Nous pensons qu'il serait temps de travailler à des déroulements de carrière plus souples, plus dynamiques, comme nous l'avons proposé par exemple, en adoptant une démarche de contractualisation pour les titulaires en cours de carrière, afin de réduire la seule approche par l'ancienneté et de prendre en compte les réalités de terrain que vient d'évoquer excellemment Gérard Longuet.
Nous pensons que le ministère de l'éducation nationale a besoin d'une réforme en profondeur de sa gestion des ressources humaines, qui doit rompre avec une culture verticale, centralisée, très globale, qui laisse peu de place à une gestion individualisée tenant compte des réalités.
Ma question est simple : avez-vous prévu des moyens spécifiques pour initier une réforme de la gestion des ressources humaines du ministère ? Au-delà de la valorisation salariale, comment comptez-vous réformer en profondeur le déroulement de carrière des enseignants ?
Vous n'avez pas non plus évoqué la réforme du master consacré aux métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation (MEEF), qui est certainement l'une des causes des difficultés que l'on a rencontrées lors des derniers concours. Quel bilan tirez-vous de cette réforme ? Envisagez-vous de la faire évoluer ?
Je voudrais prendre un deuxième exemple concernant l'école du futur, dotée d'un fonds d'innovation pédagogique de 150 millions d'euros en 2023, qui pourrait être porté à 500 millions d'euros d'ici 2027.
Nous sommes nombreux à nous réjouir, dans cet hémicycle, de cette prise de conscience portée par le Président de la République à propos du besoin de donner plus d'autonomie et de liberté aux établissements et à leurs professeurs, mais, là encore, je m'interroge sur l'ambition. L'autonomie des établissements scolaires, que le Président de la République appelle de ses voeux, nécessite certainement bien plus qu'un financement par un appel à projets centralisé. Cela exige une réforme systémique et certainement un travail législatif.
On vient d'aborder la question : peut-il y avoir autonomie pour les écoles primaires s'il n'y a pas personnalité morale ? Peut-il y avoir autonomie pour les écoles primaires si les directeurs ne peuvent exercer leur autorité, au-delà de l'autorité fonctionnelle apportée par la réforme Rilhac ?
Finalement, vous nous proposez une réponse qui s'apparente étonnamment à ce qui a été rejeté par cette assemblée : des établissements publics locaux et des savoirs fondamentaux rattachant les écoles primaires aux collèges. Ne craignez-vous pas de générer la même colère des maires ruraux, qui verront des risques de disparition de leurs écoles, et des syndicats d'enseignants ?
Vous avez lancé quelques titres de chapitres sur le collège et la voie professionnelle. Nous attendons du contenu. Nous serons patients. Le groupe Les Républicains a souhaité un débat sur la réforme de l'enseignement professionnel, qui aura lieu dans l'hémicycle le 14 novembre.
Vous aviez souhaité la dernière fois que je vous pose des questions sur l'enseignement des langues régionales. Je ne l'avais pas fait. Mon plaisir est donc grand de vous donner satisfaction aujourd'hui : quelle est votre position sur l'enseignement des langues régionales par la méthode de l'immersion dans les écoles publiques ? Quel est votre avis sur la question du passage des épreuves du brevet et du Baccalauréat « langues régionales » ? Une réponse est attendue par les enseignants, qui vont bientôt avoir achevé le programme du premier trimestre.
Où en sommes-nous du rapport des députés Euzet et Kerlogot, qui préconisaient une loi-cadre sur les langues régionales ? J'ai cru comprendre que vous n'aviez guère envie de présenter des lois devant le Parlement. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi. Je pense pourtant que certains sujets, comme l'autonomie des établissements ou la place des langues régionales, ne vous permettront pas de faire l'économie d'un passage devant le Parlement.