Intervention de Marta de Cidrac

Commission des affaires européennes — Réunion du 25 janvier 2022 à 16h30
Environnement et développement durable — Énergie climat transports - paquet « ajustement à l'objectif 55 » - communication

Photo de Marta de CidracMarta de Cidrac, rapporteure :

Deuxième volet important : le règlement sur la répartition de l'effort. Jusqu'à présent, le marché carbone et ce règlement sont étanches : on se trouve soit dans un cadre, soit dans l'autre.

Ce ne serait plus le cas. La Commission souhaite maintenir le champ du règlement sur la répartition de l'effort aux secteurs du transport routier et du bâtiment, qui représentent près de la moitié des émissions de ce périmètre, même si elle propose de les inclure aussi dans le marché carbone.

La méthode de calcul utilisée pour la détermination des objectifs nationaux reste fondée sur le PIB par habitant, un nombre limité de corrections ciblées étant appliqué afin de répondre aux préoccupations en matière d'efficacité au regard des coûts.

Les ministères français auraient souhaité que l'on prenne davantage en compte le rapport coût-efficacité et un peu moins la solidarité intra-européenne. D'autres États membres seraient sur la même ligne mais, à ce stade, il n'y aurait pas de volonté de rouvrir cette question dans la mesure où il s'agit d'un jeu à somme nulle entre États membres. L'effort de négociations porterait davantage sur les flexibilités envisageables.

Le dernier grand cadre du paquet est relatif à la prise en compte de l'utilisation des terres, du changement d'affectation des terres et de la foresterie, qui vient d'entrer en vigueur.

Le dispositif proposé par la Commission européenne fixe un objectif de neutralité climatique des terres à l'horizon 2035. Il s'agit d'un objectif ambitieux puisque que les absorptions de CO2 ont diminué dans le secteur des terres ces dernières années.

La trajectoire proposée par la Commission européenne comprendrait trois étapes : en 2030, un niveau d'absorption de carbone à hauteur de 310 millions de tonnes d'équivalent CO2, réparti entre les États membres en objectifs contraignants ; la neutralité en 2035 ; enfin, une hausse supplémentaire des absorptions à compter de 2036.

À cela s'ajoute le fait qu'à compter de 2031, seraient prises en compte les émissions hors CO2 du secteur agricole. Cela doit nous conduire à bien évaluer les conséquences potentielles du dispositif sur le secteur agricole. Le directeur général de l'énergie et du climat du ministère de la transition écologique considère lui-même que le niveau d'ambition pour les puits de carbone est particulièrement élevé. C'est un point qui mérite d'être davantage approfondi en vue de la proposition de résolution européenne du Sénat qui sera présentée fin février.

J'évoquerai brièvement les secteurs du bâtiment et des transports, qui sont au coeur du paquet.

La Commission européenne veut renforcer l'efficacité énergétique des bâtiments et intensifier le recours aux énergies renouvelables. Lors du Conseil « énergie » de décembre dernier, les ministres de l'énergie ont discuté de l'équilibre entre la nécessité de soutenir le potentiel des énergies renouvelables en tant que source d'énergie rentable et la nécessité de tenir compte des situations nationales et des situations de départ différentes. C'est évidemment un point politique important.

Le président de la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie du Parlement européen appelle à ne pas faire de surenchère sur les objectifs. Il considère en particulier que l'objectif de relèvement de 32 % à 40 % d'énergie renouvelable dans la consommation finale brute d'énergie de l'Union en 2030 paraît « réalisable mais très difficile à atteindre ».

J'ajoute que pour atteindre les objectifs, la Commission assortit sa démarche de contraintes spécifiques pour les bâtiments publics. Le secteur public serait ainsi tenu de rénover 3 % de la surface de ses bâtiments chaque année.

Le schéma d'ensemble pose un défi important d'adaptation des logements privés et d'évolution du parc social. Il pose des questions de fond, tant sur l'accompagnement financier que sur les garanties d'efficacité des travaux et, plus largement, sur la conception même de l'urbanisme et le lien entre bâtiment et mobilité.

S'agissant des transports, je me contenterai d'évoquer deux points. Concernant l'aérien, le paquet prévoit un plafonnement plus strict du nombre de quotas pour les vols intra-UE et la suppression progressive totale des quotas gratuits d'ici 2026. C'est un sujet qui mérite une expertise spécifique compte tenu des impacts territoriaux potentiels.

S'agissant de l'industrie automobile, l'impact de ce paquet sera très fort et il y a un vrai enjeu de stratégie industrielle et de visibilité pour les constructeurs. En lien avec les objectifs plus ambitieux du règlement sur la répartition de l'effort, la Commission propose de majorer les objectifs de réduction des émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes à l'échelle de l'Union européenne d'ici 2030 et, surtout, fixe un nouvel objectif de 100 % de réduction d'ici 2035. Dans la pratique, cela signifie qu'à partir de 2035, il ne serait plus possible de mettre sur le marché de l'Union des voitures ou camionnettes équipées d'un moteur à combustion interne, y compris des modèles hybrides.

Des débats existent entre États membres, certains sont plus maximalistes que d'autres. Comme l'a souligné l'une des personnes auditionnées, et cela vaut pour les transports comme pour le bâtiment, la démarche générale de la Commission européenne ne prend pas en compte l'usage et interroge sur la prise en compte de l'ensemble du cycle de vie, de la production jusqu'au recyclage.

Dans le cadre de ces débats, se posent plusieurs sujets connexes, comme celui de la définition de l'hydrogène renouvelable et bas carbone et l'enjeu de déploiement des infrastructures de recharge.

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