Monsieur le ministre, combattre les inégalités sociales est la vocation même de l’école de la République. Pourtant, malgré les différentes réformes menées depuis quarante ans – je pense notamment à la mise en place, en 1975, du collège unique ou à la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 –, ces inégalités s’accroissent.
La massification de l’enseignement n’a pas tenu ses promesses et la prétention à vouloir faire de l’enfant l’acteur de son propre apprentissage s’est révélée vaine.
Certes, les statistiques entretiennent la confusion et le doute sur la nature des problèmes. La massification de l’accès au baccalauréat et à l’enseignement supérieur ne serait-elle pas la preuve que l’égalité des chances est désormais mieux garantie ? En réalité, il n’en est rien, et ce sont avant tout les enfants des milieux les plus favorisés qui accèdent aux filières les plus prestigieuses.
Les rapports de l’éducation nationale font apparaître les conséquences d’une telle politique : 160 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans qualification ; 25 % des écoliers ont des « acquis fragiles » en français et en mathématiques ; 15 % « connaissent des difficultés sévères ou très sévères » à l’issue du primaire. La France a beau abriter certains des meilleurs mathématiciens du monde, ses élèves montrent toujours un niveau très décevant en algèbre ou en géométrie.
Cette crise est également révélée par les comparaisons internationales, que je ne citerai pas, nombre de mes collègues venant d’y faire allusion. Toutes témoignent d’une baisse régulière du niveau de nos élèves.
Les enfants des milieux modestes qui, dépourvus d’informations ou de préparation adéquates, se sont égarés dans des filières non sélectives et n’offrant aucun débouché sont les premières victimes de cette situation. Leurs familles étaient pourtant fières de compter en leur sein un premier bachelier, puis un licencié ! Mais l’ascenseur social n’est pas pour autant au rendez-vous…
Monsieur le ministre, comment lutter contre les inégalités sociales dans le système scolaire sans restaurer la transmission des savoirs fondamentaux par des méthodes qui ont fait leur preuve ?
La volonté d’apporter à des écoliers très jeunes des connaissances élargies est certes louable, mais n’a-t-elle pas nui à l’acquisition des fondamentaux, à savoir la maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul, qui prépare nos enfants aux études secondaires puis supérieures ?