La séance est ouverte à quatorze heures trente-cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 4 février 2011, quatre décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité (n° 2010-93 QPC, n° 2010-96 QPC, n° 2010-97 QPC et n° 2010-98 QPC).
Acte est donné de ces communications.
J’ai reçu avis de la démission de M. Jean Desessard, comme membre de la mission commune d’information sur les dysfonctionnements éventuels de notre système de contrôle et d’évaluation des médicaments, révélés à l’occasion du retrait de la vente en novembre 2009 d’une molécule prescrite dans le cadre du diabète commercialisée sous le nom de « Mediator », et sur les moyens d’y remédier en tant que de besoin.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom du candidat proposé en remplacement.
Cette candidature va être affichée, et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.
Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l'article 36 de notre règlement relatif au fonctionnement du Sénat.
L’attitude du Président de la République et du Gouvernement à l’égard de la justice constitue une atteinte grave et répétée au principe républicain de la séparation des pouvoirs.
Alors que trois cents magistrats du tribunal de grande instance de Paris, soit les deux tiers des effectifs de première instance, étaient réunis ce matin en assemblée générale pour voter le report des audiences, alors que, partout, dans ce pays, magistrats des ordres judiciaire et administratif se mobilisent, ainsi que de plus en plus de policiers, il est temps que le Parlement rappelle le Président de la République au respect de la Constitution.
Le mouvement des magistrats, qui fait tache d’huile, la colère de plus en plus forte des policiers face à la réduction des effectifs et la fermeture de compagnies républicaines de sécurité sont les signes non seulement de ce que l’on peut appeler un « ras-le-bol », mais aussi d’une réaction démocratique forte à l’affichage législatif et au populisme des discours.
Monsieur le président, il serait opportun que le Parlement se manifeste et rappelle solennellement à l’exécutif les principes fondateurs de notre République.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Madame Borvo Cohen-Seat, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il ne vous étonnera pas que mon rappel au règlement, formulé au nom du groupe socialiste, aille dans le même sens que celui de notre collègue.
Nous sommes ici pour discuter d’un texte relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, texte qui relève de la compétence de la commission des lois. Celle-ci travaille beaucoup en ce moment, dans un contexte qui ne peut nous laisser indifférents – monsieur le président de la commission des lois, je sais que vous y êtes sensible.
En effet, des propos ont été tenus au plus haut niveau de l’État. Il se trouve que j’étais présent à Orléans. Nous avons reçu de très nombreux témoignages de l’inquiétude – le mot est bien faible ! –, du mécontentement et de la colère que ces propos ont suscités.
Soyons clairs. On peut poser toutes les questions, demander toutes les enquêtes, une chose est sûre : dans la mesure où les moyens ne sont pas là, dans la mesure où les effectifs ne sont pas là, il est difficile de mettre en cause les personnels qui, eux, sont là, mais en nombre très insuffisant pour assurer le suivi des personnes sortant de détention.
Notre collègue Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois sur le programme Administration pénitentiaire de la mission « Justice », a souligné dans son rapport qu’il faudrait créer 1 000 postes de conseiller d’insertion et de probation. Malheureusement, dans la réalité, nous en sommes très loin !
Par conséquent, on peut tenir tous les discours, faire les déclarations les plus fracassantes : sans création de postes, il est impossible de répondre à la question posée.
Monsieur le ministre, le malaise que nous constatons au sein de la magistrature est très profond et sans précédent, me semble-t-il, dans notre pays ! Il est partagé par les avocats, qui se sont exprimés, comme par les policiers, dont les déclarations rejoignent souvent celles des magistrats.
Sur ce sujet, je poserai deux questions.
Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour répondre au malaise très profond des magistrats qui, nous le savons, sont viscéralement attachés à l’indépendance de la justice et à l’esprit républicain, tout comme à la séparation des pouvoirs ?
Je n’en suis pas aussi sûr que vous !
Vous contestez cet attachement à la séparation des pouvoirs ? Vous pourrez vous en expliquer tout à l’heure, monsieur le ministre.
Monsieur le président du Sénat, la Haute Assemblée joue un rôle important dans notre pays ; nous savons tous combien vous y êtes attaché. Face à des réactions aussi fortes de la part du monde judiciaire et policier, ne pensez-vous pas que le Sénat, singulièrement son président, pourrait prendre des initiatives et œuvrer pour faire en sorte que des réponses soient apportées ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur Sueur, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Richert, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai non pas au nom du Président de la République – ai-je besoin de rappeler le principe de la séparation des pouvoirs ?–
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
... mais au nom du Gouvernement, en reprenant simplement les propos de M. le Premier ministre, qui a été interpellé à ce sujet.
Le Gouvernement est attaché au principe de la séparation des pouvoirs, et je le suis tout autant.
Comme l’a rappelé M. le Président de la République, devant cet acte ignoble qui a été commis, et sans avoir encore tous les éclaircissements attendus, ...
... on est en droit de remarquer qu’un homme au passé judiciaire lourd s’est trouvé sans suivi, sans que personne sache où il en était, et qu’il est peut-être l’auteur de ce crime odieux.
Une procédure est en cours. Dans ce contexte, M. le Président de la République a indiqué que, si des erreurs avaient été commises, des sanctions devaient être prises. Ce principe s’applique à tous les niveaux, quels que soient les pouvoirs, et en toute indépendance.
Monsieur Sueur, je répondrai à votre remarque sur l’indépendance et le respect des institutions qui représentent les différents pouvoirs dans notre République.
À titre personnel, il m’est arrivé, lors d’audiences solennelles de rentrée de certains tribunaux, d’entendre tel premier président mettre en cause très directement le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif.
J’ai décidé de ne plus y assister systématiquement, car je pense que les donneurs de leçons sur la séparation des pouvoirs ne sont pas toujours les mieux placés.
Ce respect que nous devons à l’indépendance de la justice, la justice le doit aux autres piliers de la République. C’est dans ces conditions seulement que notre pays pourra fonctionner de façon plus équilibrée.
À mon sens, M. le Président de la République a le droit de déclarer que, lorsque des erreurs ont été commises, il faut trouver les responsables, ...
... et que l’on ne peut pas se contenter de fermer les yeux.
Madame Borvo Cohen-Seat, j’ai écouté votre intervention du début à la fin sans vous interrompre. Veuillez me permettre de terminer mon propos !
Telle est ma position, en tant que ministre de la République, qui croit à l’indépendance de la justice, qui considère que la séparation des pouvoirs doit être garantie dans notre pays, mais qui insiste pour que les différents acteurs se manifestent une estime réciproque.
À entendre un certain nombre de responsables de la justice s’exprimer comme ils le font, parfois même en assemblée, il me semble qu’il serait bon, en effet, de réagir pour ramener les choses à leur juste place...
Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est avec le plus grand calme et une parfaite sérénité que je vous livre mon sentiment.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, je rejoins mes collègues : nous sommes le Parlement, nous votons les lois, qui sont en général proposées par l’exécutif, lequel est chargé de les exécuter.
Il est donc absolument regrettable que le chef de l’État, qui est avocat de formation, qui connaît les lois, emploie des termes qui ne peuvent y figurer parce qu’ils en ont été bannis. Le Président de la République a notamment fait état, depuis Orléans, d’un « présumé coupable », propos qui ont été retransmis à la télévision. Le présumé coupable n’existe pas dans notre législation, qui ne connaît que des présumés innocents !
Je me demande dans quel monde je suis ! Où allons-nous si le plus haut personnage de l’État ne respecte pas la loi que nous avons votée !
M. Jean-Pierre Michel. Je vous demande donc, monsieur le président du Sénat, avec votre collègue de l’Assemblée nationale, de rappeler au pouvoir exécutif qu’il doit respecter les lois que le Parlement vote.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
J’ai le plaisir d’informer le Sénat que le groupe de l’Union centriste a élu ce matin à sa tête notre collègue François Zocchetto.
Je forme, pour le président de l’Union centriste, des vœux de pleine réussite.
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité (projet n° 27, texte de la commission n° 240, rapport n° 239).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre III du titre II, à l’article 17 A.
Titre II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ENTRÉE ET AU SÉJOUR DES ÉTRANGERS
Chapitre III
Dispositions diverses relatives aux titres de séjour
Après l’article L. 121-4 du même code, il est inséré un article L. 121-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 121 -4 -1. – Tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale, les citoyens de l’Union européenne, les ressortissants d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ainsi que les membres de leur famille tels que définis aux 4° et 5° de l’article L. 121-1, ont le droit de séjourner en France pour une durée maximale de trois mois, sans autre condition ou formalité que celles prévues pour l’entrée sur le territoire français. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 138 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 320 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 138.
Cet article a été inséré à l’Assemblée nationale après l’adoption en commission d’un amendement du Gouvernement.
La disposition en cause subordonne la poursuite du séjour à la condition que les intéressés ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale français.
Ce faisant, cette mesure tend à vider de sa substance le droit au séjour de moins de trois mois des ressortissants de l’Union européenne, pourtant reconnu par le droit communautaire.
Elle remet en cause, par là même, les missions d’accueil et d’hébergement d’urgence exercées par un certain nombre d’associations. Sont expressément visés ici les Roumains et les Bulgares !
Selon le droit communautaire, tous les citoyens de l’Union européenne peuvent se déplacer librement sur le territoire des autres États membres sans qu’aucune condition, autre que celle d’être en possession de son passeport ou de sa carte d’identité en cours de validité, leur soit opposable.
Quand bien même cette condition ne serait pas remplie, il est prévu par l’article 5, paragraphe 4, de la directive de 2004, que « l’État membre concerné accorde à ces personnes tous les moyens raisonnables afin de leur permettre d’obtenir ou de se procurer, dans un délai raisonnable, les documents requis ou de faire confirmer ou prouver par d’autres moyens leur qualité de bénéficiaires du droit de circuler et de séjourner librement, avant de procéder au refoulement ».
En aucun cas la notion de « charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale » en France ne saurait être un motif nécessaire et proportionnel pour limiter la liberté fondamentale de circulation dont jouit un citoyen de l’Union.
Certes, l’article 14 de la directive visée laisse penser que les États membres seraient en droit de mettre fin à cette liberté pendant les trois premiers mois de séjour si les personnes concernées deviennent une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de cet État. Néanmoins, la notion de « charge déraisonnable » reste très encadrée par le droit communautaire.
Dans les textes comme dans la jurisprudence, cette notion est en effet très contraignante pour l’État qui l’invoque.
Ainsi, dans ce même article 14 de la directive on peut lire : « Le recours au système d’assistance sociale par un citoyen de l’Union ou un membre de sa famille n’entraîne pas automatiquement une mesure d’éloignement ».
Cela signifie, vous en conviendrez, que le seul recours au système d’assistance sociale ne constitue pas une charge déraisonnable !
Au-delà, cet article nous paraît très dangereux en ce qu’il véhicule l’idée selon laquelle les étrangers ne viendraient en France que pour abuser des droits sociaux.
Je me contenterai de dire que cette affirmation est complètement démentie par les faits et par les textes : l’accès aux droits sociaux pour les ressortissants communautaires est en effet subordonné à une présence sur le territoire français de plus de trois mois de manière ininterrompue.
Tel est le sens de cet amendement.
Cet article important est revenu après le débat qui a entouré la fameuse circulaire du 5 août dernier, dans laquelle on montrait du doigt de façon assez extraordinaire la communauté Rom. On s’étonne que de telles choses soient encore possibles aujourd’hui dans notre pays !
Vous vous rappelez que la Commission européenne s’en était émue et avait fait valoir à la France que le texte de la circulaire était inacceptable – ce qui va de soi. De plus, elle considérait, ce qui valut à Mme Reding de devenir une sorte d’ennemie de la France – j’ai cru qu’on allait envahir le Luxembourg peu de temps après !
Sourires
À l’époque, nous avions, Jean-René Lecerf et moi-même, rédigé un rapport au nom de la délégation pour l’Union européenne dans lequel nous indiquions qu’à notre sens il fallait que le gouvernement français prête attention aux observations de la Commission européenne, notamment pour être plus clair dans ses transpositions. C’est la réponse à ce débat.
Permettez-moi de vous lire le considérant n° 9 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil : « Les citoyens de l’Union devraient avoir le droit de séjourner dans l’État membre d’accueil pendant une période ne dépassant pas trois mois sans être soumis à aucune condition, ni à aucune formalité autre que l’obligation de posséder une carte d’identité ou un passeport en cours de validité… » Ces dispositions sont assez claires !
Parallèlement, l’article 6 du même texte dispose : « Les citoyens de l’Union ont le droit de séjourner sur le territoire d’un autre État membre pour une période allant jusqu’à trois mois, sans autres conditions ou formalités que l’exigence d’être en possession d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité ».
Les textes de base de l’Union sont donc très clairs et autorisent chaque citoyen communautaire, s’il possède un passeport ou une carte d’identité, à séjourner sur le territoire d’un autre État pendant une durée de trois mois.
Il est tout aussi clair que la notion de « charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale » n’est un motif ni nécessaire ni proportionnel pour limiter la liberté de circulation.
L’article 14 de la directive laissait à penser que les États membres seraient en droit de mettre fin à cette liberté ou de la moduler pendant les trois premiers mois de séjour si les ressortissants devenaient une charge déraisonnable pour leur système d’assistance sociale, mais la notion de « charge déraisonnable » est très encadrée par le droit communautaire et par la jurisprudence.
C’est ainsi que le même article 14 prévoit que le recours au système d’assistance sociale par un citoyen de l’Union ou un membre de sa famille « n’entraîne pas automatiquement une mesure d’éloignement ». Cela veut dire que l’administration doit se prononcer au cas par cas sur les dossiers des ressortissants de l’Union qui séjournent sur notre territoire. Il s’agit donc non d’une règle d’application générale, mais d’une mesure qui prend en compte la situation personnelle de l’individu.
De plus, et pour conclure, monsieur le président, la référence à une période de trois mois n’a pas de sens, puisque c’est le délai minimum pour pouvoir accéder aux différentes prestations de sécurité sociale en France.
L’article 17 A du projet de loi place au niveau législatif des dispositions qui figurent dans la partie réglementaire du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Or celles-ci constituent déjà la fidèle traduction de l’article 14 de la directive du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. Toutes les inquiétudes sont donc largement couvertes.
J’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur les amendements identiques n° 138 et 320.
Il s’agit en l’occurrence de faire figurer dans la loi ce qui, jusqu’à présent, relevait en France du domaine réglementaire. Comme l’a rappelé de façon très pertinente M. le rapporteur, cette réglementation intégrait elle-même les normes européennes. Nous savons que, sur ce sujet, il est impossible que notre pays ne tienne pas compte des directives européennes dans sa réglementation.
En outre, je veux repréciser, si tant est que ce soit encore nécessaire, que cet article 17 A transpose très fidèlement la directive de 2004 relative à la liberté de circulation dans l’Union européenne.
Voilà autant de raisons qui s’opposent à la suppression de cet article 17 A.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 138 et 320.
Je veux dire pourquoi cet article me paraît tout à fait inacceptable. Puisque vous avez évoqué la directive européenne sur la liberté de circulation, je rappelle les termes du considérant n°16 de cette même directive : « Une mesure d’éloignement ne peut pas être la conséquence automatique du recours à l’assistance sociale. » Vous n’appliquez donc pas la directive européenne !
En outre, je vois dans cet article le second élément d’un duo qu’il sera amené à former avec la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, ou LOPPSI 2, pour les expulsions quasi automatiques des occupants d’habitats précaires, des Roms comme par hasard…
Je voudrais plutôt demander des explications à M. le rapporteur et, surtout, à M. le ministre qui sait tout, bien entendu !
Je n’arrive pas à comprendre le sens de cet article, dont la rédaction ne veut strictement rien dire. Ces personnes ressortissantes de l’Union ont le droit de séjourner en France pendant trois mois si elles détiennent une pièce d’identité ou un passeport. Très bien !
Au bout de trois mois, si elles restent et si elles ont un titre de séjour, elles ont droit à des allocations sociales. Comment faut-il comprendre : « Tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable » ? Qu’est-ce que cela signifie ? À quel moment devient-on une charge déraisonnable ? Est-ce avant trois mois ? Après trois mois ? Cela ne veut rien dire ! Les rédacteurs du ministère de l’intérieur devraient, à mon avis, réapprendre à écrire le français !
L’interprétation de ce texte va poser des problèmes absolument insolubles ! Personnellement, je ne comprends pas. Peut-être mon intelligence est-elle déficiente ; à moins que ce ne soit le poids des ans…
Sourires
Je m’adresse au représentant du Gouvernement, qui devrait être très au fait de ces questions. M. le ministre de l’intérieur, maître d’œuvre de cette loi, délègue alternativement la défense de ce texte à son ministre chargé des collectivités territoriales ou à sa ministre chargée de l’outre-mer. Peut-être a-t-il autre chose à faire. Quoi qu’il en soit, il n’est pas là pour expliquer son texte. Pourriez-vous le faire à sa place, monsieur le ministre ?
Je reprendrai le dernier argument que j’avais développé : je ne comprends pas à quoi sert cette disposition !
Je le rappelle, l’accès d’un citoyen communautaire aux droits sociaux est subordonné à sa présence sur le territoire français depuis plus de trois mois. Cela vaut notamment pour la couverture maladie universelle, la CMU, pour l’aide médicale de l’État, l’AME, pour le revenu minimum d’insertion, le RMI, et pour l’allocation de parent isolé, l’API.
Franchement, à quoi sert cet article puisque, de toute façon, ces personnes n’accéderont pas à la protection sociale avant trois mois ?
Monsieur Michel, vous vous êtes plaint de ne pas bien comprendre l’expression « charge déraisonnable » figurant dans l’article 17 A. Il ne s’agit pourtant que de la transposition stricte et rigoureuse en droit français de l’article 14 de la directive du 29 avril 2004 précitée, qui dispose : « Les citoyens de l’Union européenne et les membres de leur famille ont un droit de séjour tel que prévu à l’article 6 tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil ».
J’ai bien compris que vous vouliez réécrire le droit européen, mais nous ne pouvons pas le faire ici !
Je réitère donc mon avis défavorable sur ces amendements de suppression.
M. le président. Je ne peux pas vous la donner, mon cher collègue, car vous avez déjà expliqué votre vote.
M. Jean-Pierre Michel proteste.
Je ne fais qu’appliquer le règlement, cher collègue !
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
Nous retrouvons ici une difficulté déjà rencontrée au cours de nos débats, lorsque nous avons examiné des articles qui ne présentaient aucune rigueur juridique et étaient, de ce fait, tout à fait inapplicables.
Votre réponse est insuffisante, monsieur le ministre. Si légiférer consiste simplement à réécrire les directives, alors nous ne sommes que des scribes, vous aussi, et le débat est clos ; ce n’est même pas la peine de discuter...
Mais nous en sommes en train de faire la loi de la République française.
Ah ! sur les travées de l ’ UMP.
Deux problèmes se posent.
Tout d’abord, comme vient de l’expliquer Richard Yung, il existe un certain nombre de prestations sociales auxquelles les ressortissants européens n’ont droit que s’ils peuvent justifier d’une présence minimale de trois mois dans notre pays. Nous sommes d’accord sur ce point.
À quoi sert-il de préciser à nouveau, dans la loi, ce qui existe déjà ? J’essaie de comprendre. Pourriez-vous nous apporter une réponse sur ce sujet, monsieur le ministre ? Si vous considérez que cette démarche est logique, expliquez-moi !
À mon sens, c’est incohérent ! On ne peut pas écrire dans la loi que les étrangers communautaires « ont le droit de séjourner en France pour une durée maximale de trois mois », et, dans le même temps, vouloir éviter, toujours par la loi, qu’ils ne deviennent une charge déraisonnable pour notre système social alors précisément qu’ils n’ont accès aux prestations sociales qu’au-delà de trois mois de séjour sur notre territoire !
Se pose ensuite un problème de rédaction.
L’article 17 A commence par les mots suivants : « Tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale ». Si nous continuons à rédiger la loi de cette façon, où va-t-on ?
Le droit doit énoncer des principes clairs. Sinon, ce n’est plus du droit, c’est du tordu !
Sourires sur les travées du groupe socialiste.- Oh ! sur les travées de l ’ UMP.
Notre droit prévoit les conditions d’attribution de certaines prestations, ce que chacun comprend. De deux choses l’une : soit on a droit aux aides prévues, soit on n’y a pas droit. Nous sommes là pour définir ces conditions. Or nous n’y parviendrons pas – et je m’adresse à tous mes collègues, quelle que soit leur tendance politique ! – si nous continuons à élaborer des textes ainsi rédigés...
Enfin, monsieur le ministre, à quel moment considérez-vous que la charge devient déraisonnable pour notre système de protection sociale ? Qui en jugera ? Et, selon vous, qu’est-ce qu’une charge déraisonnable pour le système ?
Ce projet de loi est vraiment « mal fichu », monsieur le ministre, et je ne comprends pas pourquoi vous ne souscrivez pas à notre amendement de suppression, qui éviterait ces discours creux, vagues, flous et amphigouriques !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur quelques travées du RDSE. – Rires sur certaines travées du groupe CRC-SPG
Sourires
Une analyse sémantique ne peut pas faire de mal de temps en temps !
Je partage l’avis de mon collègue. Vous dites que cet article est la transposition d’une directive. Or transposer une directive en droit national, c’est l’appliquer. En l’occurrence, cette directive s’applique déjà pour un certain nombre de prestations ; elles ne sont d’ailleurs pas si nombreuses...
Quel est le sens de cet article ? S’agit-il de répéter que la directive est appliquée en France, les étrangers communautaires ne pouvant pas bénéficier de telles prestations s’ils n’ont pas séjourné trois mois au moins sur notre territoire ? À moins que vous souhaitiez ajouter d’autres prestations – lesquelles ? – que ces personnes pourraient obtenir avant le terme du délai, afin de les en priver.
Ou alors, ne dites rien, puisque transposer une directive, c’est prendre des dispositions pour l’appliquer : il ne sert à rien de répéter ce qui est écrit dans la directive, car cela ne donne aucune indication précise sur sa signification en droit français. Imaginez que de telles prestations n’existent pas en France ; à quoi cela servirait-il d’inscrire cette phrase ?
Cette répétition est tout à fait inutile et injustifiée, à moins de préciser le sens de l’expression « charge déraisonnable », qui n’est peut-être pas le même dans les autres pays. On pourrait spécifier, par exemple, que cela correspond dans notre droit à tel niveau de prestation.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’article 17 A est adopté.
L’amendement n° 323, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 211-2-1 du même code est ainsi modifié :
1° Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
2° Le début du quatrième alinéa est ainsi rédigé : « Le visa pour...
le reste sans changement
3° Après le mot : « Français », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « dans un délai de deux mois ».
II. - La section 2 du Chapitre Ier du Titre Ier du livre II du même code est complétée par un article L. 211-2-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 211-2-3. - Lorsque la demande de visa long séjour émane d'un étranger souhaitant célébrer un mariage en France avec une personne de nationalité française, les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur cette demande dans un délai de deux mois. La décision de refus de visa doit être motivée. Le visa délivré pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois à un étranger souhaitant célébrer un mariage en France avec une personne de nationalité française donne à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 pour une durée d'un an. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’exigence d’un visa de long séjour pour la délivrance d’une carte de séjour aux conjoints de Français pose de nombreuses difficultés.
L’article L. 211-2-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit que les conjoints de Français entrés régulièrement en France, mariés en France et justifiant de six mois de vie commune avec leur conjoint en France peuvent déposer leur demande de visa auprès de la préfecture.
Cette formalité devrait en principe suffire pour leur éviter un renvoi vers leur pays d’origine. Dans les faits, cette procédure fonctionne mal, notamment lorsque le consulat ne répond pas à la demande dans le délai légal de deux mois qui lui est imparti, ce qui est, hélas ! fréquent. Bien souvent, en effet, le fait que le consulat ne réponde pas dans les deux mois est interprété par la préfecture comme une décision implicite de refus, et les personnes ayant droit à un titre de séjour se trouvent de fait privées de ce droit en raison de ce dysfonctionnement.
Cette exigence du visa de long séjour pour les conjoints de Français déjà présents en France porte donc une atteinte disproportionnée au droit à une vie familiale normale, et cela d’autant plus que les vérifications qui sont effectuées par les consulats lors de la délivrance du visa apparaissent superflues, puisqu’un nouvel examen du dossier est effectué par les préfectures au moment de la délivrance du titre de séjour.
Cet amendement, dont nous espérons qu’il suscitera votre assentiment, monsieur le ministre, simplifiera les choses, puisqu’il vise à supprimer, pour les conjoints de Français, l’obligation de production d’un visa de long séjour pour la délivrance d’une carte de séjour temporaire, compte tenu des garanties qui existent déjà.
Cet amendement tend à réformer le droit en vigueur s’agissant des visas de long séjour délivrés aux étrangers mariés ou souhaitant se marier à un ressortissant français.
Il est notamment proposé de supprimer l’exigence de connaissance préalable de la langue française et des valeurs de la République, et d’instaurer une procédure accélérée et renforcée d’examen des demandes émanant de personnes souhaitant se marier avec un Français.
Ces modifications ne paraissent pas opportunes. S’agissant de la délivrance d’un visa de long séjour, il est parfaitement légitime de contrôler la capacité de l’étranger à s’intégrer dans la société française.
Par ailleurs, les étrangers souhaitant se marier avec un Français ont vocation à demander un visa de court séjour plutôt qu’un visa de long séjour. Or je vous rappelle que l’ensemble des dispositions relatives aux visas de court séjour sont désormais déterminées au niveau communautaire.
La commission émet donc un avis défavorable.
Monsieur Sueur, vous souhaitez, en matière d’obtention de visa, donner les mêmes droits à l’étranger qui déclare avoir l’intention de se marier avec un Français qu’à celui qui est déjà marié avec un Français. Vous conviendrez qu’il n’est pas possible de mettre ces deux situations sur le même plan !
Le fait générateur qui permet à un étranger de se voir délivrer un visa de long séjour valant titre de séjour est, et doit rester, l’acte de mariage. Dans le cas contraire, n’importe qui pourrait déclarer qu’il veut venir se marier en France. Les consulats seraient alors confrontés à des problèmes de preuve insolubles. Tant que le mariage n’a pas été célébré, l’étranger ne peut prétendre bénéficier des droits octroyés à un étranger conjoint de Français.
J’émets donc un avis défavorable.
J’ai beaucoup de mal à suivre le débat...
M. le rapporteur nous parle de l’enseignement du français aux étrangers qui arrivent dans notre pays. Nous sommes très attachés à l’idée que ces personnes puissent apprendre notre langue. Mais cela n’a strictement rien à voir avec la question de savoir s’il faut requérir un document au consulat dans un délai de deux mois, dès lors que la préfecture effectue ensuite les investigations nécessaires. Ce n’est pas le sujet !
M. le ministre nous parle, quant à lui, des candidats au mariage. Or l’article 17 A, tout comme notre amendement, ne concerne que les conjoints. Je ne comprends pas le rapport entre les propos de M. le rapporteur et de M. le ministre, et notre sujet.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 321, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 313-1 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « an », sont insérés les mots : « lors de la première délivrance » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle est de trois ans au premier renouvellement, sauf manquement manifeste d'intégration républicaine à la société française telle que définie au premier alinéa de l'article L. 314-2. »
II. - À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 314-8 du même code, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « quatre ».
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Il est difficile pour toute personne de s’intégrer et de faire des projets lorsque la légalité de sa présence sur le territoire est réexaminée chaque année.
Cet amendement vise donc à sécuriser le séjour d’étrangers en situation régulière et à mettre en œuvre une procédure cohérente.
L’étranger pourra, comme actuellement, se voir délivrer une carte de séjour temporaire d’un an, puis, lors du premier renouvellement, sauf absence manifeste d’intégration républicaine, une carte d’une validité de trois ans pourra lui être délivrée. Ceux qui ne souhaiteraient pas rester en France pourront toujours retourner dans leur pays d’origine avant l’expiration de ce délai de trois ans.
L’allongement de la validité de la carte temporaire de séjour va à l’inverse de la logique actuelle contre-productive de précarisation des migrants, car elle facilitera et encouragera l’intégration des migrants. Par ailleurs, une telle disposition permettra un désengorgement des préfectures en réduisant la fréquence des renouvellements des titres de séjour.
Enfin, au terme de quatre ans, l’étranger pourra solliciter une carte de résident de dix ans. Ainsi, un parcours clair, cohérent et fondé sur les efforts d’intégration des personnes sera proposé.
Il est absolument nécessaire de permettre à l’autorité administrative de procéder à un réexamen périodique pour savoir si les conditions qui ont présidé à la délivrance de la première carte de séjour sont toujours réunies.
La commission émet donc un avis défavorable.
Je partage l’avis de M. le rapporteur. Un contrôle annuel, tout au moins au cours des premières années de présence sur notre territoire, est indispensable. Les années suivantes, je le rappelle, aucune condition nouvelle n’est posée.
Ce contrôle annuel n’est donc pas un obstacle à l’intégration d’une personne étrangère dans la société française, mais garantit au contraire son insertion.
Je rappelle également que, au terme d’une période de cinq ans, l’étranger peut accéder à une carte de résident de dix ans. Il ne me semble pas opportun de porter la durée initiale de renouvellement à trois ans. Un renouvellement annuel nous paraît plus légitime.
J’émets donc un avis défavorable.
Je plaiderai en faveur de cet amendement.
En effet, dans nos circonscriptions, des personnes viennent nous expliquer que, au quotidien, elles ne peuvent pas signer de contrats à durée indéterminée ou de baux trois, six, neuf, par exemple, …
…ni accomplir des actes de la vie courante qui leur permettraient d’être mieux intégrées, d’avoir une situation moins précaire, de s’installer de manière beaucoup plus stable sur notre territoire ; voilà la réalité !
La carte de séjour temporaire, dont la durée de validité est limitée à un an, est un instrument de précarisation perpétuelle que l’on renouvelle et que l’on multiplie.
De nombreuses structures et institutions sont d’ailleurs totalement inaccessibles aux détenteurs de cette carte ; ces derniers ne peuvent notamment pas obtenir de crédit bancaire.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 322, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le mot : « valoir », sont insérés les mots : « ou à l'étranger ne vivant pas en polygamie qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de cinq ans ».
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Par cet amendement, nous proposons de revenir à un système de régularisation sur critères « au fil de l'eau », système clair et transparent auquel a mis fin, comme vous le savez, la loi du 24 juillet 2006.
L’étranger justifiant résider habituellement en France depuis plus de cinq ans pourra solliciter un titre temporaire de séjour.
Aujourd’hui, les régularisations sont opérées dans une certaine opacité, puisque à statut égal et à situation égale, selon les départements, la régularisation peut être accordée ou non.
De surcroît, le seul dispositif de substitution existant, à savoir la Commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour, qui a été créée par la loi de 2006 précitée, est supprimé par un article du présent projet de loi que nous examinerons prochainement.
Le Gouvernement régularise mais ne souhaite pas que l’on sache selon quels critères il prend cette décision ou ne la prend pas.
Il nous paraît nécessaire de proposer un système fondé sur l’égalité de traitement qui permette de faire en sorte que, à situation égale, les possibilités de régularisation soient les mêmes.
Nous proposons donc d’introduire à nouveau de la transparence et de la justice afin que les raisons pour lesquelles une personne est régularisée ou non soient connues et maîtrisées.
Il ne s’agit aucunement d’automaticité – j’insiste sur ce point –, mais il convient de mettre en place un système transparent qui soit fondé sur des critères explicites, afin que toutes les décisions, positives ou négatives, soient justifiées et que les voies de recours puissent s’exercer dans la plus parfaite clarté.
Même si la rédaction en est habile, le présent amendement reviendrait à instaurer la régularisation automatique des étrangers à partir d’un délai de cinq ans, ce qui est contraire aux positions que nous défendons depuis de nombreuses années. En effet, je me permets de vous signaler que le Sénat avait entériné en 2007 la suppression de la régularisation de plein droit après dix années de résidence sur le territoire français.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Le Gouvernement a émis le même avis que la commission : défavorable !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 136, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3° de l'article L. 521-2 du même code est rétabli dans la rédaction suivante :
« 3° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, dont les liens personnels ou familiaux en France sont tels qu'une mesure d'éloignement porterait au respect de son droit à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; »
La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.
Cet amendement vise à compléter l’article L. 521-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui énumère les catégories de personnes ne pouvant faire l’objet d’une mesure d’expulsion du territoire.
Nous souhaitons ajouter à cette liste « l’étranger ne vivant pas en état de polygamie, dont les liens personnels ou familiaux en France sont tels qu’une mesure d’éloignement porterait au respect de son droit à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ».
Vous l’aurez compris, il s’agit ici de garantir les droits fondamentaux des étrangers et de protéger ces derniers contre une mesure d’éloignement.
La rédaction ainsi proposée renvoie directement à la Convention européenne des droits de l’homme. Il nous a semblé important d’inscrire une telle disposition dans le marbre de la loi à l’occasion de l’examen du présent projet de loi.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons d’adopter cet amendement.
L’ajout proposé ne nous semble pas nécessaire.
En effet, les dispositions des articles L. 521-1 et L. 521-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile établissent déjà une protection en faveur de dix catégories de personnes pour des raisons touchant à la vie privée ou à la vie familiale.
Par ailleurs, un étranger peut toujours invoquer l’atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale devant le juge.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable.
La position de la commission telle que vient de l’exposer M. le rapporteur est tout à fait pertinente. Le Gouvernement émet par conséquent le même avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
I. –
Non modifié
I bis (nouveau). – Le premier alinéa de l’article L. 313-4 du même code est ainsi rédigé :
« Par dérogation aux articles L. 311-2 et L. 313-1, l’étranger titulaire d’une carte de séjour temporaire au titre des articles L. 313-7 ou L. 313-8 depuis au moins un an ou, pour l’étranger demandant une carte de séjour temporaire au titre de l’article L. 313-8, d’un visa délivré pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois octroyant à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire susmentionnée, peut, à l’échéance de la validité de ce titre, en solliciter le renouvellement pour une durée supérieure à un an et ne pouvant excéder quatre ans. »
II. –
Non modifié
L'amendement n° 93 rectifié quater, présenté par M. Béteille, Mmes B. Dupont et Procaccia, M. Gournac, Mme Mélot, MM. Houel, Demuynck, Gilles et P. Dominati, Mlle Joissains, M. J. Gautier et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Supprimer les mots :
et à la fin du 5° de l'article L. 313-11
II. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - L'article L. 313-8 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le conjoint, s'il est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants entrés mineurs en France dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou remplissant les conditions prévues par l'article L. 311-3 du présent code, d'un étranger titulaire d'une carte scientifique-chercheur, bénéficient de plein droit de la carte de séjour mentionnée au 3° de l'article L. 313-11. La carte de séjour ainsi accordée est renouvelée de plein droit durant la période de validité restant à courir de la carte scientifique-chercheur susmentionnée. »
... - Le 5° de l'article L. 313-11 du même code est abrogé.
La parole est à M. Laurent Béteille.
Le présent amendement concerne la famille des scientifiques-chercheurs, nombreux dans mon département.
L’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, relatif à la délivrance de plein droit d’une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » à certaines catégories d’étrangers, ne mentionne pas le conjoint et les enfants du ressortissant étranger titulaire d’une carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique ».
Par conséquent, le présent amendement vise tout simplement à réparer cette discordance et à aligner la situation des familles des scientifiques-chercheurs sur celle des autres bénéficiaires.
Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.
La simplification envisagée est tout à fait opportune et contribuera à l’attractivité de nos territoires.
Le Gouvernement partage le sentiment de la commission.
En effet, le présent amendement a pour objet de permettre aux scientifiques-chercheurs de profiter des procédures visées en intégrant ces derniers à la liste des catégories déjà prévues par la loi.
Il est clair que vous souhaitez poursuivre, de façon déterminée, dans la voie de l’immigration choisie et faire venir des cerveaux des pays du Sud – pour aller vite –…
J’ai employé cette formule pour être brève, car je ne souhaite pas vous faire perdre votre temps, chers collègues.
Toutefois, monsieur le sénateur, sur le plan de la vie privée et familiale, pouvez-vous m’expliquer quelle est la différence entre un ouvrier du bâtiment et un scientifique-chercheur disposant chacun d’une carte de séjour temporaire en France ? Sur ce point, je trouve que vous poussez le bouchon un peu loin !
Il faudrait tout de même essayer de respecter l’égalité entre les êtres humains, qu’ils soient étrangers ou français, chercheurs, ouvriers ou employés. Votre proposition est tout de même exagérée !
L'amendement est adopté.
L'article 17 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 133, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 312-2 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « La commission est saisie par l'autorité administrative » sont remplacés par les mots : « La commission est saisie par l'étranger ou par l'autorité administrative » et les mots : « étranger mentionné » sont remplacés par les mots : « un étranger qui se prévaut des dispositions de ».
2° Au début du deuxième alinéa, les mots : « L'étranger est convoqué » sont remplacés par les mots : « L'étranger et l'autorité administrative sont convoqués ».
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Cet amendement a pour objet de modifier l’article L. 312-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, afin de prévoir la possibilité pour l’étranger de saisir la commission du titre de séjour.
Si la préfecture ne saisit pas la commission du titre de séjour, le demandeur doit être en mesure de la saisir lui-même.
Je rappelle que la commission du titre de séjour est censée être saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour ou lorsqu’il est saisi d’une demande d’admission exceptionnelle au séjour émanant d’un étranger qui justifie de sa présence en France depuis plus de dix ans.
La saisine de la commission permet une audition du demandeur et donc une meilleure prise en compte de sa situation. Des précisions et des clarifications doivent être apportées afin d’éviter des refus qui seraient ensuite censurés par les juridictions administratives en cas de recours contentieux.
Aujourd'hui, ce dispositif fonctionne très mal, car les préfectures se dispensent le plus souvent de saisir la commission.
Pour contourner ces difficultés, il convient de donner la possibilité à l’intéressé de soumettre lui-même sa situation à la commission quand la préfecture ne respecte pas son obligation légale.
L'amendement n° 347 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots : « La commission est », est inséré le mot : « obligatoirement ».
La parole est à M. Alain Anziani.
Le présent amendement va dans le même sens que le précédent.
Aujourd'hui, la loi impose à l’autorité administrative de saisir la commission du titre de séjour dans un certain nombre de cas. C’est une très bonne chose, puisque la saisine permet l’audition et, par suite, la personnalisation de la demande de l’étranger, dont la situation sera mieux prise en compte.
Dans les faits, ce dispositif fonctionne très mal : souvent, la commission n’est pas saisie comme l’exigerait l’article L. 312-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Nous proposons de régler cette question définitivement en précisant, au travers de cet amendement, que la commission doit être « obligatoirement » saisie.
L’amendement n° 133 a pour objet d’ouvrir à l’étranger la possibilité de saisir lui-même la commission du titre de séjour.
Permettez-moi de rappeler la procédure actuelle.
La commission doit être saisie par l’autorité administrative qui envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire ou une carte de résident dans des cas bien précis. L’étranger est alors entendu par cette commission. Le cas échéant, il a parfaitement le droit d’être assisté par un avocat qui peut être désigné au titre de l’aide juridictionnelle. Le contrôle de l’application de ces dispositions est réalisé par le juge administratif.
Du point de vue de la commission, les difficultés soulevées par l’auteur de l’amendement ont donc trait à des dispositions qui relèvent non pas du niveau législatif mais véritablement du niveau réglementaire. C’est la raison pour laquelle il ne paraît pas utile de modifier la loi.
La commission demande donc le retrait des amendements n° 133 et 347 rectifié ; à défaut, elle émettra un avis défavorable sur ces amendements.
Monsieur le président, je me rappelle les premières séances auxquelles j’avais participé à l’époque en temps que sénateur. Il nous arrivait de temps à autre d’insérer des termes synonymes d’« obligatoirement » dans le texte.
J’ai toujours gardé en mémoire que si la loi dispose que la commission est saisie, il n’y a pas de choix, c’est impératif. Le fait d’ajouter « obligatoirement » ne change rien, en tous les cas tel que cela m’avait été expliqué ! J’ai toujours considéré que le Sénat était un lieu de l’excellence en matière de rédaction de la loi, et je continue de le penser.
Par conséquent, le débat est clos sur ce point, et le Gouvernement ne peut être favorable à l’amendement n° 347 rectifié.
L’amendement n° 133, quant à lui, vise à étendre la saisine de la commission non seulement aux étrangers appartenant aux catégories protégées prévues par la loi, mais aussi à ceux qui se prévalent de ces catégories.
Madame la sénatrice, il n’est pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que votre proposition, si elle était adoptée, entraînerait une explosion du nombre de saisines de la commission du titre de séjour. Il est d’ailleurs probable que ces saisines seraient alors utilisées massivement à des fins purement dilatoires.
Vous formulez en outre une autre proposition, tout aussi intéressante, qui tend à remplacer les mots : « L’étranger est convoqué » par les mots : « L’étranger et l’autorité administrative sont convoqués ». En d’autres termes, l’administration se convoquera pour la réunion avec l’étranger en question…
Vous comprendrez qu’il est difficile de donner une suite favorable à votre amendement.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l'amendement n° 133.
La réponse de M. le ministre ne me paraît pas satisfaisante.
Selon lui, si le texte précise que « la commission est saisie », cela signifie qu’elle l’est obligatoirement.
Cependant, nous constatons que la commission n’est pas saisie par le préfet ; c’est pourquoi nous proposons que l’étranger lui-même puisse le faire. Sinon, qui la saisit ?
Madame Borvo Cohen-Seat, vous décrivez une situation dont nous n’avons pas d’exemple. Jusqu’à présent, en effet, il n’y a jamais eu, à notre connaissance, de cas dans lesquels la commission du titre de séjour n’ait pas été saisie par le préfet : si vous avez connaissance de telles situations, transmettez-nous les dossiers et nous les examinerons.
M. le ministre a expliqué que l’ajout du mot « obligatoirement », d’une part, n’était pas de bonne technique législative, d’autre part, ne changeait rien.
Pour ma part, je suis au contraire convaincu que l’adverbe change tout, et je le suis encore plus encore après ce que M. le ministre vient de dire à l’instant.
Oui, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a un problème pratique et, dès lors qu’il est constaté que, dans la réalité, l’instance qui doit être saisie ne l’est pas, le législateur doit intervenir pour clarifier, et la meilleure façon de le faire est de préciser que ladite instance doit être « obligatoirement » saisie, ce qui ôte toute place à l’arbitraire.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 325, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 313-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les références : « des articles L. 313-7 ou L. 313-8 » sont remplacées par la référence : « de l'article L. 313-7 » ;
2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Par dérogation aux articles L. 311-2 et L. 313-1, la carte de séjour temporaire délivrée au titre de l'article L. 313-8 est attribuée pour une durée ne pouvant excéder quatre ans en tenant compte de la durée des travaux de recherche et est renouvelable. En cas de rupture du contrat de travail, une nouvelle carte est délivrée. »
II. - Au second alinéa de l'article L. 311-8, les mots : « ou travailleur temporaire » sont remplacés par les mots : «, travailleur temporaire ou scientifique-chercheur ».
La parole est à M. Alain Anziani.
En l’état du droit, l’article L. 311-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit que la carte de séjour temporaire et la carte de séjour « compétences et talents » doivent être retirées à leurs titulaires s’ils cessent de remplir l’une des conditions exigées pour leur délivrance.
L’article 14 du projet de loi prévoit une dérogation à cette règle pour le titulaire de la carte bleue européenne, à qui l’on ne pourra pas retirer son titre de séjour en cas de chômage involontaire.
Il nous paraît logique d’associer à ce dispositif les titulaires de la carte de séjour « scientifique chercheur » afin qu’ils ne puissent pas non plus se voir retirer celle-ci en cas de perte involontaire de leur emploi.
Cet amendement a pour objet d’étendre aux scientifiques-chercheurs les dispositions prévoyant que le titre de séjour d’un salarié ne peut être retiré en cas de chômage involontaire.
Cependant, une distinction doit être faite, car les « scientifiques-chercheurs » ne sont pas, au regard du droit positif, dans une situation comparable à celle des salariés ou des travailleurs temporaires. En effet, leur titre de séjour leur est délivré au vu d’une convention d’accueil avec un organisme agréé afin de mener des travaux de recherche ou de dispenser un enseignement de niveau universitaire ; il y a donc un lien direct avec le travail que doit effectuer le scientifique-chercheur.
Cette convention d’accueil les dispense d’obtenir une autorisation de travail ou de produire un contrat de travail visé par la direction départementale du travail.
Il ne serait donc pas cohérent d’étendre aux scientifiques-chercheurs les règles applicables aux salariés et aux travailleurs temporaires en matière de chômage involontaire.
La commission a donc émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 324 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du dernier alinéa de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « qui réside de manière ininterrompue plus de six mois en France » sont supprimés et sont ajoutés les mots : « dès lors que le contrat de travail du salarié en mission prévoit une résidence ininterrompue en France de plus de six mois ».
La parole est à M. Alain Anziani.
La carte « salarié en mission » peut actuellement être délivrée à tout ressortissant étranger salarié d’une entreprise française ou détaché en France dans le cadre de la mobilité au sein d’un même groupe de sociétés, à condition que sa rémunération brute soit supérieure à 1, 5 fois le SMIC français.
Créée par la loi du 24 juillet 2006, cette carte donne à son titulaire un droit au séjour de trois ans renouvelables.
Au bout de six mois de présence en France, la carte « salarié en mission » permet également à son titulaire d’être rejoint par son conjoint et ses enfants, le temps du détachement en France.
Le présent amendement, qui a reçu en commission l’avis favorable du rapporteur, a pour objet de simplifier les démarches administratives, assez complexes, auxquelles sont assujettis les conjoints des deux mille personnes qui se voient délivrer chaque année la carte portant mention « salarié en mission ».
En effet, à l’heure actuelle, si le conjoint souhaite accompagner le porteur de ladite carte dès son arrivée sur le territoire français, il ne peut séjourner que sous couvert d’une carte de séjour temporaire portant la mention « visiteur » avant de bénéficier d’un nouveau statut au bout de six mois.
Nous vous proposons donc cet amendement de simplification.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
L'amendement n° 134 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le troisième alinéa (2°) de l'article L. 313-11 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° À l'étranger mineur, ou dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qui justifie par tout moyen suivre une formation française, dispensée soit par un organisme public soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d'État ; »
II. - Après le huitième alinéa (6°) du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° À l'étranger qui est père ou mère d'un ou plusieurs enfants résidant en France et suivant, de manière attestée, une formation française, dispensée soit par un organisme public soit par un organisme privé présentant les caractères déterminés par un décret en Conseil d'État ; »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Le présent amendement est la reprise de la proposition de loi pour le respect du droit à l’éducation des jeunes étrangers résidant en France qu’avait présentée mon groupe.
La loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité ainsi que les textes qui ont suivi ont débouché sur une politique de l’immigration extrêmement répressive à l’égard de l’ensemble des étrangers présents sur le territoire français.
Cette orientation a encore été accentuée par la « politique du chiffre » du Gouvernement en matière de reconduites à la frontière, politique affichée dans diverses déclarations.
Cette politique, qui n’est évidemment pas sans conséquence sur les conditions de rétention des étrangers, a aussi mis en évidence de nombreux cas problématiques d’étrangers, mineurs ou jeunes majeurs qui, bien que scolarisés en France, sont menacés par une reconduite à la frontière.
Ces élèves se trouvent dans une situation très précaire et l’actualité se fait régulièrement, hélas ! l’écho de situations dramatiques d’enfants retirés de leur école pour être expulsés du territoire français.
Or, bien souvent, ces enfants sont arrivés en France après avoir quitté leur pays parce qu’ils y étaient en difficulté. Certains sont des mineurs isolés et ne disposent pas de titre de séjour, ce à quoi la loi ne les oblige d’ailleurs pas. D’autres vivent en France avec leurs parents mais, du fait de la situation irrégulière de ces derniers, ils sont, eux aussi, menacés d’être reconduits à la frontière.
Il y a encore quelques années, ces jeunes pouvaient poursuivre leur scolarité normalement et obtenaient le plus souvent la régularisation de leur séjour en France du fait de la prise en compte de leur situation familiale et scolaire, signe d’une forte volonté d’intégration, mais tel n’est plus le cas depuis 2003.
Nous sommes en effet confrontés depuis à cette situation injuste, et indigne d’un pays comme le nôtre, où de jeunes étrangers scolarisés en France se trouvent sous le coup d’un arrêté de reconduite à la frontière. Et quand les jeunes majeurs scolarisés ne sont pas directement visés, c’est la situation de leurs parents qui peut mettre en péril leur avenir.
Dans tous les cas, c’est l’intérêt des enfants qui est bafoué ainsi que leur droit à l’éducation, qu’ils soient en situation régulière ou non.
Nous voulons permettre à ces jeunes de bénéficier d’une scolarité normale, car ils font preuve d’une grande détermination à suivre leurs études en France, où ils envisagent souvent leur avenir familial et professionnel.
À cette fin, il convient de prévoir une protection pour les parents et leur permettre de régulariser leur situation afin de donner à leurs enfants une chance de continuer leur scolarité normalement, comme n’importe quel autre enfant.
Cet amendement prévoit la délivrance de plein droit d’une carte de séjour temporaire à l’étranger mineur qui suit avec assiduité une formation en France ainsi qu’à ses parents.
D’abord, s’agissant d’étrangers mineurs, je rappelle que ceux-ci sont dispensés de titre de séjour en application des dispositions de l’article L. 311-1 du CESEDA.
Ensuite, s’agissant des parents, l’amendement ouvre un champ extrêmement large ; il risque, on le sait tous, de faire des mineurs des « têtes de pont » de l’immigration clandestine, situation qu’il ne faut évidemment pas encourager.
En revanche, il existe d’ores et déjà un arsenal législatif suffisamment large pour accueillir les mineurs étrangers qui suivent des formations et leur permettre de poursuivre sur le territoire national les études qu’ils ont engagées.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à un amendement prévoyant que l’administration délivre systématiquement une carte de séjour aux parents d’enfants étrangers qui suivent une formation en France.
La participation à l’éducation et à l’entretien de ces enfants constitue une obligation légale en France et ne doit donc pas donner lieu à un droit au séjour automatique.
La circonstance d’être le parent d’un enfant suivant une formation en France ne constitue pas en soi un motif de séjour au titre de la vie privée et familiale, celle-ci pouvant être menée dans le pays d’origine.
Comme l’a dit le rapporteur, l’amendement, qui vise en réalité à régulariser automatiquement les parents ayant des enfants scolarisés en France, est inacceptable, car il encouragerait toutes les formes d’immigration clandestine et constituerait un véritable appel d’air.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 135 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 344 rectifié est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au neuvième alinéa (7°) de l'article L. 313-11 du même code, les mots : « liens personnels et familiaux » sont remplacés par les mots : « liens personnels ou familiaux ».
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l’amendement n° 135.
L’article L. 313-11 du CESEDA est relatif à la délivrance de plein de droit de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » à certaines catégories de personnes.
Est notamment concerné « l’étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France […] sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ».
Nous proposons de remplacer les mots : « liens personnels et familiaux » par les mots : « liens personnels ou familiaux ».
Des instruments internationaux ratifiés par la France tels que la Convention européenne des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques donnent une définition large de la notion de « vie privée et familiale » qui est loin d’être appliquée par l’administration et les juridictions administratives en France.
Il est pourtant nécessaire que cette notion soit appréhendée dans sa globalité, sans occulter les liens personnels, les relations sociales, amicales ou professionnelles que les étrangers tissent en France et qui leur permettent une insertion dans la société.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 344 rectifié.
Cet amendement vise à distinguer, d’un côté, le lien familial, de l’autre, les relations sociales, amicales ou professionnelles.
En la matière, j’irai un peu plus loin que ce qui vient d’être excellemment dit : dès l’instant où il y a une ambiguïté d’interprétation, pourquoi ne pas nous « caler » sur la Convention européenne des droits de l’homme ? Ce n’est pas la plus mauvaise boussole et, à mon avis, nous ne pouvons qu’y gagner !
La commission a émis un avis défavorable.
Il ne s’agit pas de faire le choix entre un système cumulatif ou un système exclusif. L’expression : « liens personnels et familiaux » constitue un terme générique et désigne une entité, un tout : conformément aux dispositions législatives, on apprécie la situation à la fois personnelle et familiale.
À cet effet, le juge doit disposer d’un faisceau d’éléments contribuant à le convaincre qu’il convient d’accorder le titre de séjour.
Les préoccupations évoquées par les auteurs des amendements sont d’ailleurs déjà prises en compte par le juge administratif, qui utilise de plus en plus largement le critère tiré de l’insertion de l’étranger dans la société française pour examiner si le refus de titre de séjour est de nature à porter atteinte à son droit à une vie privée et familiale, en se fondant notamment sur sa participation à la vie associative et artistique régionale, à son intégration professionnelle et à sa maîtrise de la langue française.
Ces exemples tirés de la jurisprudence montrent que le juge administratif va donc bien au-delà de la différenciation proposée, qui ne nous paraît pas raisonnable.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Les auteurs de ces deux amendements proposent une révolution conceptuelle qui consiste à remplacer l’expression « liens personnels et familiaux » par l’expression « liens personnels ou familiaux »…
En réalité, l’article L. 313-11 du CESEDA tient fidèlement compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et la proposition d’évolution terminologique ne répond à aucune difficulté identifiée par quiconque pour l’instant, à notre connaissance du moins.
La rédaction actuelle vise précisément à prendre en compte le fait que la vie privée et familiale forme un tout indissociable et que c’est sous cet angle global que le préfet doit examiner les demandes.
Je rappelle d’ailleurs que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme mentionne bien le concept de « vie privée et familiale ». On pourrait prendre parti dans ce combat du « et » et du « ou » et modifier cette convention, mais je ne crois pas que ce soit le lieu pour enfourcher un tel cheval de bataille !
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 137, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après 9° de l'article L. 314-11 du même code, il est inséré un 10° ainsi rédigé :
« 10° À l'étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans ou qui a travaillé régulièrement en France, pendant plus de cent vingt mois cumulés ; »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Monsieur le ministre, vous alternez curieusement entre le souci de la précision et celui du flou, qui laisse à l’autorité administrative une grande marge d’interprétation.
À travers cet amendement, nous souhaitons modifier une nouvelle fois l’article L. 314-11 du CESEDA relatif à la délivrance de plein droit d’une carte de résident pour certaines catégories de personnes protégées des expulsions.
Nous proposons d’ajouter à la liste des bénéficiaires l’étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans ou qui a travaillé régulièrement en France pendant plus de cent vingt mois cumulés, sauf s’il a été, durant toute cette période, titulaire d’une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant ».
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, il s’agit de protéger les travailleurs migrants en fonction de la pérennité de leur emploi et d’imposer la délivrance d’un titre de séjour au bénéfice des personnes qui sont dans des situations semblables à celles des travailleurs saisonniers habituels.
Il est d’autant plus important de protéger ces travailleurs qu’ils ont contribué et contribuent encore à créer de la richesse dans notre pays, raison pour laquelle, d’ailleurs, les employeurs ont recours à eux. Nous vous proposons donc d’en tenir compte et ainsi de faire en sorte que chacun puisse apprécier en toute connaissance de cause !
Je voudrais rappeler que le droit positif permet d’ores et déjà à un étranger présent sur le territoire en situation régulière de se voir délivrer une carte de résident au terme de cinq ans de résidence dès lors qu’il dispose de ressources suffisantes et que son intégration républicaine est avérée.
Il ne paraît pas nécessaire d’aller au-delà en prévoyant une délivrance de plein droit, c’est-à-dire sans condition de ressources ni d’intégration, pour les étrangers qui auraient travaillé dix ans en situation régulière en France.
La commission des lois a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 139, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les étrangers, qui à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont titulaires d'une carte de séjour temporaire d'un an les autorisant à travailler, reçoivent de plein droit une carte de résident à la première échéance de l'un de ces titres de séjour ou de travail.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Nous restons dans le même sujet !
Les législations restrictives en matière de droit au séjour issues des lois successives ont précarisé la situation des étrangers et élevé des obstacles les empêchant d’accéder, notamment, à l’emploi et au logement. En effet, comment peut-on s’intégrer socialement et professionnellement lorsque l’on possède une carte de séjour d’un an et que l’on ignore si, demain, elle sera renouvelée ?
Là encore, chacun interprète à sa façon. Par exemple, les bailleurs considèrent souvent qu’un an ne constitue pas une durée suffisante et refusent, le cas échéant, la location du logement.
L’intégration suppose un minimum de stabilité dans l’exercice du droit au séjour permettant, dans le pays d’accueil, un véritable ancrage qui ne soit pas soumis aux aléas ou à la précarité.
Monsieur le ministre, vous vous servez de l’intégration comme d’un obstacle supplémentaire à la régularisation des personnes en situation irrégulière. Pour vous, la délivrance d’un titre de séjour est la récompense de l’intégration. Or il faut d’abord se préoccuper de la mise en place des moyens permettant cette intégration !
Mes chers collègues, je vous rappelle à cet égard que la carte de résident de dix ans, créée en 1984 et votée alors à l’unanimité par le Parlement, a constitué un élément légal d’intégration de dizaines de milliers de migrants qui se sont par la suite intégrés.
Comme je viens de le souligner, le droit en vigueur ne permet d’accéder à une carte de résident qu’à partir de cinq ans de résidence sur le territoire ou, sous certaines conditions, de trois ans.
À travers cet amendement, il est proposé d’abaisser ce seuil à un an. Il me semble que ces préoccupations sont partiellement prises en compte par le droit positif, puisque certaines cartes de séjour délivrées pour raisons professionnelles peuvent avoir une durée de validité pluriannuelle.
Tel est déjà le cas, par exemple, des cartes « salarié en mission », « compétences et talents » ou, à l’expiration du premier titre, les cartes « étudiant » ou « scientifique ». Les dispositifs relatifs à la carte bleue européenne, qui sont précisés dans le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, prévoient également cette pluriannualité.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
À travers cet amendement, vous voulez rendre systématique la délivrance d’une carte de résident à tout étranger dont le premier titre de séjour l’autorisant à travailler arrive à échéance.
À l’heure actuelle, le renouvellement de ce titre de séjour est accordé dès lors que les conditions initiales de délivrance sont respectées. Ces dispositions participent – vous l’aurez compris – à la protection de l’ordre public social.
En effet, il ne faut pas perdre de vue que c’est l’exercice d’une activité professionnelle qui permet la délivrance d’un titre de séjour autorisant le travail. Il est normal que, pendant les premières années de présence en France, l’administration s’assure que cette condition est toujours remplie avant d’accorder une carte de résident.
Par conséquent, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
Le 3° de l’article L. 313-11 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” délivrée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent a une durée de validité identique à la durée de la carte de séjour du parent ou du conjoint titulaire d’une carte de séjour portant la mention “carte bleue européenne”, “compétences et talents” ou “salarié en mission”. La carte de séjour est renouvelée dès lors que son titulaire continue à remplir les conditions définies par le présent code. »
L'amendement n° 326, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
L'article L. 313-11 du même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase du 2° bis, les mots : «, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et », sont remplacés par les mots : « au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve » ;
2° Après le 2° bis, il est inséré un 2° ter ainsi rédigé :
« 2° ter À l'étranger qui, avant d'être confié au service de l'aide sociale à l'enfance, a pu être victime de réseaux de traite humaine ou d'exploitation et qui ne sont plus soumis au contrôle de tels réseaux. La condition prévue à l'article L. 311-7 ne s'applique pas. » ;
« 3° Le 3° est complété par un alinéa ainsi rédigé :
La parole est à M. Charles Gautier.
Les dispositions de l’article L. 313-11 du CESEDA qui prévoient la régularisation des mineurs étrangers confiés à l’aide sociale à l’enfance, l’ASE, ainsi que la délivrance d’une carte de séjour « vie privée et familiale » comportent des conditions dont la plupart sont difficiles à remplir.
Il en est ainsi du caractère réel et sérieux du suivi de la formation par le mineur et de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d’origine. Ce sont deux points très difficiles à vérifier, vous en conviendrez ! Par conséquent, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer tout simplement cette mention.
Une carte temporaire de séjour portant la mention « vie privée et familiale » pourrait ainsi être délivrée à l’étranger durant sa dix-huitième année, à la seule condition qu’il ait été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance avant l’âge de seize ans.
Par ailleurs, il convient de porter une attention toute particulière aux mineurs victimes de réseaux mafieux. Dans cette perspective, nous proposons d’insérer dans le même article la possibilité de délivrer une carte de séjour temporaire aux étrangers qui, avant d’être confiés aux services d’aide sociale à l’enfance, ont pu être victimes de traite humaine ou d’exploitation.
Cet amendement prévoit la délivrance de plein droit d’un titre de séjour à l’ensemble des mineurs isolés qui ont été confiés à l’ASE, quel qu’ait été leur âge d’entrée sur le territoire et quel que soit le sérieux de leurs efforts d’intégration. Ces dispositions pourraient également profiter aux mineurs victimes de la traite.
Je me dois d’apporter quelques précisions.
À l’heure actuelle, un titre de séjour est délivré de plein droit aux jeunes majeurs entrés en France avant l’âge de seize ans sous réserve, notamment, du caractère sérieux de la formation suivie. La situation des mineurs isolés en France après seize ans, elle, est prise en compte par les dispositions de l’article 19 du présent texte, qui vise à permettre à l’autorité préfectorale de leur délivrer, à leur majorité, un titre de séjour dès lors qu’ils sont engagés dans une démarche sérieuse de formation.
Par ailleurs, je rappelle que, s’agissant des mineurs étrangers victimes de la traite ou d’autres infractions, le juge des enfants est toujours compétent pour ordonner l’ensemble des mesures nécessaires afin d’assurer la protection du mineur.
Enfin, s’agissant des jeunes majeurs qui ne pourraient se prévaloir d’une des dispositions du CESEDA concernant le droit au séjour, il faut préciser, encore une fois, que l’autorité administrative peut à tout moment délivrer une carte « vie privée et familiale » au regard de considérations humanitaires ou de motifs à caractère exceptionnel.
Ainsi, pour la commission des lois, le droit en vigueur permet déjà largement de régler les situations évoquées par les auteurs de cet amendement.
Elle émet donc un avis défavorable.
Monsieur Charles Gautier, vous formulez deux propositions sur le droit au séjour des mineurs étrangers confiés à l’Aide sociale à l’enfance et entrés en France après l’âge de seize ans.
Tout d’abord, vous voulez supprimer dans l’examen du droit à un titre de séjour l’appréciation des liens avec la famille restée dans le pays d’origine. Or la Convention internationale relative aux droits de l’enfant valorise ces liens. Il serait arbitraire de les écarter au seul motif que l’enfant vient d’atteindre sa majorité. Leur prise en compte permet une appréciation objective et complète de la situation personnelle de l’intéressé au regard de son droit au séjour.
Par ailleurs, vous souhaitez garantir l’octroi d’un titre de séjour dès lors que le mineur étranger a été victime d’un réseau mafieux.
Le Gouvernement partage évidemment votre volonté de protéger les étrangers vulnérables, en particulier les mineurs et les jeunes majeurs. À cet effet, un dispositif est déjà prévu par l'article L. 313-14 du CESEDA relatif à la délivrance d’une carte de séjour pour des considérations humanitaires. La traite des êtres humains fait évidemment partie de ces dernières.
Enfin, il convient de souligner que les cartes de séjour temporaire « salarié » et « travailleur temporaire » sont les mieux adaptées pour ce public dans une perspective d’insertion et d’acquisition d’une expérience professionnelle valable aussi bien en France que dans le pays d’origine.
Vous l’aurez compris, nous sommes très sensibles aux arguments que vous avez exposés. Toutefois, pour les raisons que je viens d’évoquer, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 bis est adopté.
(Supprimé)
L’amendement n° 95 rectifié, présenté par MM. Nègre, P. Dominati, Beaumont, Milon et Houel, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
À la première phrase du 11° de l'article L. 313-11 du même code, les mots : « qu'il ne puisse effectivement bénéficier » sont remplacés par les mots : « de l'indisponibilité ».
La parole est à M. Philippe Dominati.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 17 ter de ce projet de loi ne vise, ni plus ni moins, qu’à faire appliquer à la lettre la loi du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile, dite « RESEDA », qui a précisé le régime de droit au séjour des étrangers malades.
Cette loi permet à l’administration de délivrer un titre de séjour à un étranger lorsque le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve que l’intéressé ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine.
En 2009, 5 550 cartes « étranger malade » ont ainsi été délivrées. Cet amendement n’a nullement pour objet de remettre en question ce régime.
Simplement, la jurisprudence du Conseil d’État a étendu le champ de ce dispositif bien au-delà des exigences de la loi et de la Cour européenne des droits de l’homme.
Par un arrêt du 7 avril 2010, le Conseil d’État a radicalement modifié l’appréciation en la matière. Il associe désormais l’impossibilité de recevoir un traitement approprié à la question du coût de celui-ci. La charge de la preuve en est devenue très complexe pour l’administration. Au total, cette jurisprudence ménage une très forte dose de subjectivité là où la loi de 1998 avait au contraire introduit des critères objectifs.
L’objet de cet amendement consiste donc à revenir à ce qui avait été l’intention initiale du rapporteur de la commission des lois de l’Assemblée nationale, c'est-à-dire d’appliquer le statu quo de 1998.
En effet, il incombe au législateur de ramener dans l’esprit de la loi une jurisprudence qui, à force d’interprétation, s’en est beaucoup écartée. Nous avons déjà pu à plusieurs reprises corriger et réorienter l’application de la loi. C’était notamment dans cet état d’esprit que la commission des lois de l’Assemblée nationale avait introduit cet article.
Pour ma part, je regrette que notre commission des lois n’ait pas, dans sa majorité, maintenu ce dispositif. L’objet de cet amendement est donc de rétablir l’article dans sa rédaction initiale.
La commission, qui a largement évoqué ce point lors de ses travaux, a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 95 rectifié.
Monsieur Dominati, vous proposez de rétablir l’article 17 ter introduit par un amendement de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale.
Cet article visait à préciser le cadre juridique du titre de séjour accordé à un étranger malade.
De quoi s’agit-il ?
La loi du 11 mai 1998 permet à l’administration de délivrer un titre de séjour à un étranger lorsque le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité, « sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. » Cette loi est aujourd’hui appliquée.
En 2009, 5 945 cartes « étranger malade » ont été délivrées. Les personnes concernées sont alors couvertes par la sécurité sociale.
Afin de dissiper tout malentendu, je vous indique, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il n’est aucunement question de remettre en cause ce régime. Mais, me direz-vous, pourquoi le présent projet de loi revient-il sur ce point ?
En réalité, l’article 17 ter résulte d’un fait nouveau. Ainsi dans l’arrêt Jabnoun du 7 avril 2010, le Conseil d’État a étendu le champ d’application du titre « étranger malade ». Il prend désormais en compte le coût du traitement dans le pays d’origine. Cette jurisprudence introduit de la subjectivité dans l’interprétation des règles, alors que la loi de 1998 fixe, au contraire, des critères objectifs.
Le Conseil d’État va donc au-delà des exigences de la loi, et même de celles de la Cour européenne des droits de l’homme.
L’application concrète de cette jurisprudence a donné lieu à des aberrations. Au mois de juillet dernier, un tribunal administratif a admis le droit au séjour d’une femme marocaine qui souffrait d’un état anxio-dépressif et qui avait fait valoir l’insuffisance de soins au Maroc sur la foi d’un simple article de presse !
Forte de ce constat, l’Assemblée nationale a adopté l’article 17 ter au mois d’octobre dernier, dans un souci de compromis. Alors que le rapporteur avait initialement proposé de subordonner l’octroi du titre de séjour à l’« inexistence » du traitement médical adéquat, c’est finalement le terme « indisponibilité » qui a été retenu, avec l’accord du Gouvernement.
La position adoptée est équilibrée : l’article 17 ter ne remet pas en cause le droit d’accorder un titre de séjour à un étranger malade ; il ne s’agit que d’appliquer à la lettre la loi du 11 mai 1998.
J’ai bien entendu les arguments développés tant par M. Dominati que par M. le rapporteur. Nous avons déjà eu l’occasion de débattre de cette question, mesdames, messieurs les sénateurs. En cet instant, compte tenu de l’état des discussions et des propositions formulées, il est souhaitable que le débat puisse être poursuivi et que la navette permette de rapprocher les positions des deux assemblées.
Aussi, monsieur Dominati, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 95 rectifié.
Mme Monique Papon remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.
(Non modifié)
L’article L. 313-14 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « sur le fondement du troisième alinéa de cet article » sont supprimés ;
2° Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
3° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article. »
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 140 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 327 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 140.
L’article 18 modifie la procédure d’admission exceptionnelle au séjour créée par la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, qui a, dans le même temps, supprimé la procédure de régularisation des étrangers justifiant de dix années de résidence habituelle en France.
L’autorité administrative ne délivre plus qu’un titre de séjour dans certains cas limités.
Avait alors été créée la Commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour chargée d’établir des rapports et de donner des avis sur ce sujet. Or l’article 18 supprime la mention de cette commission dans la loi, renvoyant la composition et le fonctionnement de cette dernière au pouvoir réglementaire.
Rien, selon nous, ne saurait justifier que le règlement fixe les modalités d’intervention de cette commission, d’autant que cela risque d’augmenter l’opacité du fonctionnement de cette instance et de nuire à son indépendance.
C’est la raison pour laquelle les membres du groupe CRC-SPG ont déposé le présent amendement.
Quel est le sens de l’article 18 ? Pour notre part, nous sommes très étonnés et nous ne comprenons pas.
Jusqu’à ce jour, la commission nationale précitée pouvait être saisie d’une procédure d’admission exceptionnelle au séjour. Elle a le grand mérite d’édicter des règles nationales et d’empêcher que, localement, des appréciations différentes ne prospèrent. Ce point était bien évidemment positif.
En outre, cette commission étant composée, entre autres, d’un député et d’un sénateur, le Parlement pouvait participer à la fixation de règles d’appréciation, lesquelles, dès lors, ne relevaient plus de circulaires ou de directives.
Quel est ici l’objectif ? Supprimer la Commission nationale ? Porter atteinte aux prérogatives du Parlement en supprimant la présence des parlementaires en son sein ? Créer une nouvelle commission ?
Ne voyant pas du tout l’intérêt de l’article 18 et nous espérons que M. le ministre voudra bien nous l’expliquer. Nous estimons qu’il s’agit, en l’état, d’un article de « casse » et non de « construction ».
L’article 18 du projet de loi aménage la procédure d’admission exceptionnelle au séjour.
Dans la mesure où la Commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour n’a pour finalité que d’éclairer les choix de l’autorité administrative sans pour autant la lier dans sa décision – point important –, les dispositions relatives à sa composition, ses modalités de fonctionnement et son activité peuvent être sans difficulté définies par voie réglementaire.
J’ajoute que la suppression du présent article aurait pour effet de supprimer également les dispositions ouvrant au préfet la possibilité de délivrer une carte de séjour « salarié » ou « travailleur temporaire » de manière générale, sans exiger de l’étranger de postuler à un emploi dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
L’article 18 du présent projet de loi n’est, en réalité, qu’un texte de clarification qui tend à remettre chaque chose à sa place, le réglementaire dans le règlement, le législatif dans la loi. Il ne s’agit de porter atteinte ni à la Commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour ni à sa fonction ni à sa vocation.
Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 18 est adopté.
L'amendement n° 267 rectifié bis, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré une sous-section 8 ainsi rédigée :
« Sous-section 8. L'admission au séjour de plein droit
« Art. L. 313 -14-1. - La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 doit être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, justifiant par tous moyens de dix années de présence ininterrompue sur le territoire français, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Le présent amendement tend à permettre la délivrance d’une carte de séjour temporaire d’un an portant la mention « vie privée et familiale » à tout étranger dépourvu de titre de séjour qui justifie de dix années de présence continue sur le territoire français.
Ce titre de séjour, par nature renouvelable, est délivré à la double condition que l’intéressé ne constitue pas une menace pour l’ordre public français et ne vive pas en état de polygamie.
Il s’agit, en l’occurrence, de rétablir l’admission au séjour de plein droit au bénéfice des étrangers en situation irrégulière à l’égard du droit au séjour qui justifient, par tous moyens, résider en France depuis au moins dix ans au jour de leur demande.
Ces preuves de présence peuvent être apportées via différents documents officiels, tels que des justificatifs d’aide médicale d’État, des ordonnances ou analyses médicales, des avis d’imposition sur les revenus – nombreux sont, vous le savez mes chers collègues, les étrangers en situation irrégulière qui déclarent en France leurs revenus et y acquittent les impôts correspondants –, des demandes antérieures d’admission au séjour, ou encore des quittances d’électricité, de téléphone, d’internet, de loyer, etc.
Aujourd’hui, en effet, un grand nombre d’étrangers se voient refuser le droit au séjour, alors qu’ils ont pourtant passé dans notre pays les dix dernières années - dix ans de leur vie ! -, de manière continue. Ils y ont développé des attaches, parfois familiales, souvent sociales, amicales et professionnelles.
La majorité des étrangers en situation irrégulière présents sur le territoire depuis plus de dix ans y exercent très souvent une activité professionnelle, mais ne remplissent pas pour autant les conditions restrictives de l’admission au séjour par l’emploi édictées à l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour prétendre à l’obtention d’un titre de séjour temporaire sur le fondement de l’article L. 313-10 du même code.
En effet, les services préfectoraux exigent, notamment, des étrangers qui aspirent à être « régularisés par le travail » qu’ils fournissent les bulletins de salaire d’une année, ce qui est, en pratique, souvent impossible, en raison souvent de l’irrégularité de leur emploi.
Rétablir l’admission au séjour de plein droit à l’issue de dix années de présence continue sur le territoire français permettrait à des étrangers qui ont, de toute façon, coupé tout lien avec leur pays d’origine, où ils ne sont pas retournés depuis au moins dix ans, de régulariser leur situation administrative quant au droit au séjour.
Cette possibilité, qui existait dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, a été supprimée par la loi relative à l’immigration et à l’intégration du 24 juillet 2006. Il s’agit donc ici de la rétablir et d’octroyer de plein droit aux intéressés un titre de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », qui leur permettra d’exercer légalement l’activité professionnelle de leur choix, activité qu’ils exercent souvent déjà depuis un certain temps, mais de manière illégale.
Une telle faculté permettra ainsi de résoudre la situation inextricable de nombreux sans-papiers installés de façon stable sur notre territoire et qui, quoi qu’il advienne, n’aspirent pas à le quitter. Il est, en effet, fort probable que, après être parvenus durant dix ans à échapper aux mécanismes français de reconduite à la frontière, ils sauront de toute façon se maintenir en France.
Dans un tel cas de figure, il est évidemment préférable qu’ils mènent dans notre pays une vie hors de toute clandestinité ; un titre de séjour permettrait à ceux d’entre eux qui exercent déjà une activité professionnelle de la poursuivre légalement et aux autres d’en débuter une.
Dans la mesure où il s’agit de prévoir une régularisation automatique, la commission est défavorable au présent amendement.
Tout à l’heure, nous avons déjà évoqué la loi de 2006. Le Gouvernement s’était alors opposé à la régularisation au fil de l’eau. Par cohérence, il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 267 rectifié bis.
L'amendement n'est pas adopté.
La sous-section 7 du chapitre III du titre Ier du livre III du même code est complétée par un article L. 313-15 ainsi rédigé :
« Art. L. 313 -15. – À titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l’article L. 313-10 portant la mention “salarié” ou la mention “travailleur temporaire”, ou la carte de séjour portant la mention “étudiant” prévue à l’article L. 313-7, peut être délivrée, dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l’étranger qui a été confié à l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d’origine et de l’avis de la structure d’accueil sur l’insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l’article L. 311-7 n’est pas exigé. »
Je suis saisie de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 145, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. 313 -15. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10, portant la mention “salarié” ou la mention “travailleur temporaire”, peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre une formation, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, après avis de l'équipe pédagogique de la structure d'accueil. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements n° °145 et 143, tous deux portant sur l’article 19.
Le présent projet de loi instaure une régularisation à titre exceptionnel des mineurs étrangers isolés arrivés en France entre seize et dix-huit ans et devenus majeurs.
Cette régularisation, j’y insiste, n’est accordée qu’« à titre exceptionnel », contrairement à ce qui prévaut pour les mineurs arrivés avant l’âge de seize ans, qui bénéficient d’une régularisation de droit.
L’administration conserve donc un pouvoir discrétionnaire qui ne permet pas de sécuriser le parcours juridique de ces jeunes.
C’est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer, d’une part, le caractère d’exception de ce titre de séjour, et, d’autre part, les conditions de durée de suivi de la formation, faute de quoi l’article 19 risque de ne concerner qu’une minorité de jeunes.
Par ailleurs, l’amendement n° 143 tend à ce que les mineurs étrangers puissent recevoir un titre de séjour portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » dès l’âge de seize ans s’ils souhaitent travailler.
En effet, pour pouvoir accomplir des formations professionnelles nécessitant la signature d’un contrat d’apprentissage ou se réalisant en alternance, les mineurs étrangers doivent avoir une autorisation de travailler. Nous ne voyons aucune raison de les exclure de tels parcours de professionnalisation.
L'amendement n° 330, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
peut être
par le mot :
est
et supprimer les mots :
, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine
La parole est à M. Roland Courteau.
Depuis la loi du 24 juillet 2006, une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit au jeune majeur qui a été pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance, avant l’âge de seize ans.
L’article 19 étend cette possibilité au bénéfice des jeunes majeurs, recueillis par l’aide sociale à l’enfance entre seize et dix-huit ans. Cependant – j’attire votre attention sur ce point, mes chers collègues –, dans ce cas, le texte ne prévoit qu’une simple possibilité de délivrance.
L’objet de cet amendement est de prévoir la délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » à l’étranger, suivant une formation, confié à l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans.
Par ailleurs, l’amendement vise à supprimer la condition portant sur la nature des liens avec la famille restée dans le pays d’origine.
Je rappelle que la Convention relative aux droits de l’enfant prévoit, dans son article 10, le droit au maintien des liens familiaux…
L'amendement n° 268, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation
par les mots :
qui est scolarisé, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de ses études
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement consiste à modifier la première phrase de l’alinéa 2 de l’article 19. Cet alinéa traite du cas des jeunes étrangers mineurs isolés confiés à l’aide sociale à l'enfance, l'ASE, entre seize et dix-huit ans.
En l'état actuel de sa rédaction, cet alinéa signifie que, pour prétendre, à sa majorité, à l'obtention d'un titre de séjour portant la mention « étudiant », « salarié », ou « travailleur temporaire », le jeune placé à l'ASE après ses seize ans devra justifier de six mois de formation qualifiante, ce qui renvoie à l'alternance.
Or un jeune dépourvu de titre de séjour l'autorisant à travailler ne peut absolument pas s'inscrire dans ce type de formations professionnelles, réservées aux personnes en situation régulière munies d'une autorisation de travail. L'autorisation de travail est un préalable à l'inscription, exigé par les établissements où s’effectuent ces formations.
L’article L. 341-4 du code du travail, modifié par la loi Borloo de 2005, ne reconnaît, en effet, un droit à l’autorisation de travail en vue de la conclusion d’un contrat d’apprentissage ou d’un contrat de professionnalisation que pour l’étranger qui a été pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance avant qu’il ait atteint l’âge de seize ans et qui l’est toujours au moment où il présente sa demande.
Dès lors, cet alinéa, tel qu’il est rédigé, n’a aucun sens, puisque nul ne sera concerné par le cas hypothétique prévu par l’article L. 313-15 du CESEDA, dans sa rédaction issue de l’article 19.
Par ailleurs, le délai de six mois prévu par l’alinéa 2 est, lui aussi, surréaliste, dans la mesure où il conviendra, pour l’équipe éducative, de déterminer le niveau et les attentes de ce mineur isolé de plus de seize ans, une fois placé à l’ASE. Puis, il faudra procéder à diverses formalités administratives – état civil, passeport – et chercher un établissement scolaire susceptible d’accueillir le mineur.
Ensuite, dans de nombreux cas, ces jeunes devront prendre des cours de français, ce qui, in fine, fait que, dans la quasi-totalité des situations, ils n’auront pas le temps de justifier des six mois de scolarité nécessaires.
Dès lors, il est essentiel d’adopter cet amendement : il tient compte de la réalité des faits constatés en pratique et permet de délivrer un titre de séjour temporaire à des jeunes qui, à défaut, seront, dès la fin de leur prise en charge par l’ASE, donc à leur majorité, à nouveau livrés à eux-mêmes, sans emploi et sans papiers, donc sans perspectives d’avenir.
La nature des titres temporaires que l’article L. 313-15 du CESEDA prévoit de délivrer dans ces cas, permet, quoi qu’il advienne, de s’assurer de l’insertion professionnelle du jeune concerné, puisque le renouvellement des titres de séjour portant la mention « travailleur temporaire » ou « salarié » est subordonné à l’exercice d’une activité professionnelle.
Quant au renouvellement du titre de séjour portant la mention « étudiant », il est subordonné au caractère réel et sérieux des études. Dans ce dernier cas, un jeune qui se verra délivrer un titre de séjour « étudiant » pourra ensuite, s’il trouve une activité professionnelle, solliciter un changement de statut, « salarié » ou « travailleur temporaire », selon la nature de son contrat de travail.
L'amendement n° 328, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le mot :
six
par le mot :
trois
La parole est à M. Roland Courteau.
La délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire », introduite par le nouvel article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est subordonnée à la justification d'une formation professionnelle qualifiante réelle et sérieuse.
Cependant, la condition de durée de six mois est trop restrictive. Entre ses seize ans et ses dix-huit ans, le mineur confié à l'aide sociale à l'enfance doit, dans bien des cas, suivre une formation de remise à niveau scolaire ainsi que des cours de langue française.
Cet amendement vise donc à réduire la durée de la formation qualifiante à trois mois.
Les amendements n° 143 et 329 sont identiques.
L'amendement n° 143 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 329 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« L'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui pourrait recevoir dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire une carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » peut en faire la demande dès l'âge de seize ans s'il souhaite travailler, notamment dans le cadre d'une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. »
L’amendement n° 143 a été précédemment défendu.
La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l'amendement n° 329.
Pour signer un contrat d'apprentissage, suivre une formation en alternance ou même effectuer un stage en entreprise, le mineur étranger doit être titulaire d'une autorisation de travail.
Il apparaît alors normal de prévoir que la carte de séjour temporaire soit délivrée à partir de seize ans, dès lors que le mineur confié à l’aide sociale à l’enfance souhaite travailler et effectivement accomplir une formation professionnelle.
Je rappelle que l’article 19 du projet de loi permet à l’autorité administrative de tenir compte des efforts d’intégration réalisés par un mineur isolé entré en France après l’âge de seize ans, en ouvrant la possibilité de lui délivrer une carte de séjour « salarié » ou « travailleur temporaire » ou, désormais dans le texte de la commission, une carte de séjour « étudiant », lorsqu’il suit avec assiduité une formation depuis au moins six mois, ce qui permet d’envisager l’ensemble des parcours de formation dans lesquels le jeune pourrait être inscrit.
L’amendement n° 145 prévoit de supprimer la condition de suivi d’une formation depuis six mois ainsi que la référence aux liens que le jeune pourrait avoir conservés avec sa famille restée dans le pays d’origine.
Il est toutefois important de laisser au préfet la possibilité d’examiner l’ensemble de la situation du jeune majeur, notamment ses liens familiaux dans son pays d’origine.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
Au sujet de l’amendement n° 330, il faut clarifier une ambiguïté. Les termes « sous réserve de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d’origine » signifient que le titre de séjour est attribué lorsque le jeune majeur n’a plus de liens forts dans son pays d’origine, et non l’inverse, comme semblent le sous-entendre les auteurs de l’amendement.
C’est la raison pour laquelle a la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 268 vise à délivrer un titre de séjour au mineur isolé âgé de seize à dix-huit ans qui est scolarisé.
Il faut clarifier un malentendu. Je vous rappelle qu’en principe un mineur isolé est dispensé de titre de séjour, comme nous l’avons indiqué lors de l’examen d’un précédent amendement, et qu’il ne peut faire l’objet d’une mesure d’éloignement.
Toutefois, entre seize et dix-huit ans, s’il souhaite exercer une activité professionnelle, ce qui inclut les formations professionnelles en apprentissage ou en alternance, il reçoit de plein droit une carte de séjour temporaire, dès lors qu’il remplit les conditions prévues à l’article L. 313-11.
J’ajoute que la commission des lois a étendu le champ de l’article 19 afin de permettre à un jeune majeur isolé entré en France après seize ans d’obtenir une carte de séjour temporaire si, à sa majorité, il suit avec sérieux et assiduité, depuis six mois au moins, un enseignement ou des études lui permettant d’acquérir des compétences professionnelles.
Enfin, s’agissant de la condition de six mois, celle-ci paraît constituer un bon équilibre entre la volonté de tenir compte des efforts d’intégration réalisés par le mineur isolé et le souci de ne pas encourager, par des dispositions trop souples, les filières d’immigration clandestine.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 328 tend à abaisser de six à trois mois la durée pendant laquelle un jeune majeur isolé devra avoir suivi une formation avec sérieux pour pouvoir prétendre à un titre de séjour à sa majorité.
La condition de suivi d’une formation pendant au moins six mois constitue une solution équilibrée, comme je viens de le dire.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
La commission des lois estime que les amendements identiques n° 143 et 329 sont satisfaits par les dispositions de l’article L. 311-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements.
Les amendements rédactionnels n° 145 et 330 sont très proches. En effet, ils visent à rendre automatique la délivrance de la carte de séjour. Or, vous l’aurez maintenant compris, le Gouvernement n’est pas favorable à l’automaticité en la matière.
Par ailleurs, ces amendements tendent à supprimer la prise en considération des liens familiaux dans le pays d’origine.
Or les dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant valorisent ces liens qu’il serait arbitraire d’écarter au seul motif que l’enfant vient d’atteindre sa majorité. Leur prise en compte permet une appréciation objective et complète de la situation personnelle de l’intéressé au regard de son droit au séjour.
En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur les amendements n° 145 et 330.
J’en viens à l’amendement n° 268. Le Gouvernement propose, à l’article 19 du projet de loi, de préciser les conditions dans lesquelles un titre de séjour peut être accordé à un mineur étranger isolé confié à l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans.
Cet amendement a pour objet de faire disparaître l’une de ces conditions, le suivi par l’intéressé d’une formation qualifiante. Or l’obtention d’une qualification professionnelle est un élément fondamental pour ce public.
En effet, ces jeunes, qui n’ont pas été scolarisés en France et qui n’ont pas une bonne maîtrise de la langue française, doivent pouvoir se former à des métiers susceptibles de leur offrir facilement une promesse d’emploi en France ou, s’ils le souhaitent, dans leur pays.
Le dispositif que nous proposons est directement issu des travaux d’un groupe de travail interministériel sur la situation des mineurs isolés, auquel ont participé les associations les plus concernées, de mai à septembre 2009.
En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 328 tend à réduire de six à trois mois la durée requise de formation suivie par les mineurs étrangers pris en charge par l’aide sociale à l’enfance après leur seizième anniversaire pour pouvoir bénéficier, à leur majorité, d’un titre de séjour « salarié » ou « travailleur temporaire ».
La durée de six mois est précisément liée au contrôle du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, par lequel il s’agit d’apprécier la motivation du candidat, son assiduité aux enseignements et sa volonté de s’intégrer par le travail dans la société française.
En conséquence, le Gouvernement a émis un avis défavorable.
Pour les mêmes raisons que celles évoquées par le rapporteur de la commission des lois, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur les amendements identiques n° 143 et 329.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote sur l’amendement n° 145.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez raison, un jeune entre seize et dix-huit ans est exempté de carte de séjour. Mais, sans cette carte de séjour et en raison de la loi Borloo, il ne peut s’inscrire nulle part, ni en apprentissage, ni dans un contrat de professionnalisation, ni dans une école qui lui permettrait d’apprendre un métier.
Alors, oui, il n’a pas besoin de carte pour demeurer sur le territoire, mais il ne peut rien faire. On le prive ainsi de toute chance d’intégration !
En outre, en six mois, il ne peut faire ses démarches administratives et trouver une école pour apprendre le français et un établissement pour son contrat d’apprentissage.
Même si, par miracle – et je ne crois plus beaucoup aux miracles –, le mineur y parvient, il ne peut pas s’inscrire, faute de détenir cette carte !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 19 est adopté.
(Non modifié)
Au 3° de l’article L. 314-9 du même code, après les mots : « à condition », sont insérés les mots : « qu’il séjourne régulièrement en France, ».
L'amendement n° 146, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
La loi du 24 juillet 2006 a déjà durci les conditions de délivrance à un étranger marié à un Français d’une carte de résident : celle-ci n’est plus accordée qu’après un délai de trois ans, contre deux ans auparavant.
Par ailleurs, cette carte n’est plus délivrée de plein droit, puisque l’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier le respect des critères de communauté de vie et des autres conditions mentionnées dans le code.
Sous prétexte de lutter contre les mariages de complaisance, la majorité introduit ici des dispositions qui entravent le droit à mener une vie familiale normale consacré par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
L’article 20 s’inscrit parfaitement dans ce cadre, puisqu’il introduit une nouvelle condition permettant de limiter encore les régularisations : le respect du critère de séjour régulier en France.
Pourtant, même en situation irrégulière, les étrangers conjoints de Français devraient pouvoir obtenir une régularisation de leur séjour.
Monsieur le ministre, nous nous opposons fermement à la politique que vous menez actuellement, puisque vous préférez demander aux étrangers de retourner dans leur pays d’origine pour faire une demande de visa, ce qui précarise le séjour et la vie conjugale des étrangers conjoints de Français.
Cette situation est tout à fait absurde et inhumaine. Nous estimons qu’elle ne peut perdurer.
C'est pourquoi l’amendement n° 146 vise à supprimer cet article, tandis que l’amendement n° 147, de repli, a pour objet de modifier les conditions de régularisation des étrangers. Il tend à réduire le délai de résidence sur le sol français à un an, au lieu des trois ans actuellement prévus, et à supprimer la condition de séjour régulier sur le territoire pour retenir celle de l’entrée régulière.
La politique migratoire du Gouvernement est particulièrement restrictive, ce qui rend de plus en plus difficile le renouvellement du titre de séjour, empêchant ainsi les étrangers de satisfaire à des critères eux-mêmes de plus en plus nombreux et contraignants.
Je le rappelle, l’article 20 du projet de loi vise uniquement à procéder à une coordination oubliée par la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration : l’étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant français peut obtenir une carte de résident à condition de justifier de son séjour régulier en France. Cette condition était déjà fixée par le droit antérieur à la loi du 24 juillet 2006.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
L’article 20 ne fait que corriger une erreur de rédaction. Il s'agit de préciser que la délivrance d’une carte de résident au conjoint de Français présent sur le territoire depuis trois ans est subordonnée à la régularité du séjour de l’intéressé, ce qui relève de l’évidence !
J’émets donc également un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 331, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le 3° de l'article L. 314-9 du même code est supprimé.
II. - Après le 9° de l'article L. 314-11 du même code, il est rétabli un 10° ainsi rédigé :
« 10° À l'étranger marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, qu'il ne vive pas en état de polygamie, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. »
La parole est à M. Richard Yung.
332, dont les dispositions sont très proches, de même qu’elles s’apparentent à celles de l’amendement n° 146 que nous venons d’examiner.
La carte de résident peut être accordée à un étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, sous réserve que trois conditions soient remplies. Le présent article 20 durcit de nouveau l’octroi de cette carte de résident, puisqu’il prévoit une condition supplémentaire : l’étranger devra apporter la preuve qu’il séjourne régulièrement en France.
C’est un cas de figure désormais classique : le Gouvernement poursuit de son hostilité les mariages entre les citoyens français et les étrangers, voilà tout !
On a l’impression qu’il considère qu’il est mal de contracter de telles unions. On retrouvera d'ailleurs cette même attitude un peu plus tard à propos des « mariages gris ».
Nous avons déjà protesté à maintes reprises contre cette politique. Nous proposons d’assouplir le dispositif en vigueur. Nos amendements visent donc à rétablir la délivrance automatique d’une carte de résident à l’étranger marié avec un Français depuis un an.
L'amendement n° 147, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Au 3° de l'article L. 314-9 du même code, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « un » et après les mots : « à condition », sont insérés les mots : « qu'il soit entré régulièrement en France ».
Cet amendement a été précédemment défendu.
L'amendement n° 332, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
même code
insérer les mots :
le mot : « trois » est remplacé par le mot : « un » et
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
En ce qui concerne l’amendement n° 331, qui vise à rétablir la délivrance de plein droit de la carte de résident, je rappelle que la loi du 24 juillet 2006 a précisément supprimé cette disposition, afin de permettre à l’autorité administrative de mieux lutter contre les mariages de complaisance. C’est une position extrêmement importante qui a été prise alors. Il faut s’y tenir.
Du reste, le droit positif demeure favorable aux étrangers, puisque la délivrance de la carte de résident est possible à partir de trois ans de mariage, alors que le droit commun exige une résidence régulière en France de cinq ans.
C'est pourquoi la commission des lois a émis un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 147, je le répète, les dispositions permettant à un conjoint de Français d’obtenir une carte de résident au terme de trois ans de mariage sont déjà dérogatoires par rapport au droit commun, qui exige une durée de résidence régulière en France de cinq ans.
La commission des lois a donc émis un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 332 appelle le même commentaire que les amendements précédents, et j’émets donc également un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 147, j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur une disposition similaire lors de mon précédent passage au banc du Gouvernement, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi. Je n’ai pas changé d’avis : je reste défavorable à la réduction de trois ans à un an de la durée de mariage requise pour l’obtention de la carte de résident.
J’en viens aux amendements n° 331 et332. Monsieur Yung, vous proposez d’accorder de plein droit la délivrance d’une carte de résident aux conjoints de Français après une année de mariage.
Or, si l’étranger a vocation à entrer et à résider en France du fait de son mariage – nous y sommes tout à fait favorables ! –, il n’est pas anormal de vérifier que la condition initiale de son séjour s’est maintenue pendant une durée suffisante pour qu’il puisse faire valoir son intégration sociale propre. C’est seulement dans ce cas que l’étranger acquiert une indépendance sur son droit au séjour, qui cesse d’être en relation directe avec son statut de conjoint.
Nous souhaitons en rester à la durée de trois ans, et c'est pourquoi j’émets un avis défavorable.
Monsieur le ministre, si nous insistons sur ce point, c’est pour des raisons que je crois fondamentales.
Il est normal que l’on contrôle l’immigration et que l’on soit vigilant à cet égard. Toutefois, il est également tout à fait normal que des êtres humains bénéficient du droit à vivre en couple et en famille !
M. Courteau, qui connaît bien ces sujets, reçoit dans sa permanence de nombreux habitants du département dont il est l’élu qui sont concernés par ces problèmes.
Justement, mes chers collègues, j’ai reçu récemment un sympathisant d’un parti de droite, je veux dire de la droite républicaine représentée ici, à savoir l’UMP, dont le fils a épousé une personne de nationalité étrangère.
Ce père de famille est venu me voir parce qu’il me connaissait et sans doute parce qu’il n’était pas sectaire. Du reste, tout comme lui, de très nombreux citoyens viennent rencontrer des parlementaires qui ne partagent pas leurs idées politiques ; il nous arrive tous les jours d’en recevoir, et c’est aussi le cas de M. Courteau, dont chacun connaît la grande tolérance.
Alors donc que ce père de famille m’interrogeait, je lui ai répondu que, non, ce n’était pas parce que cette femme étrangère avait épousé son fils qu’elle avait le droit de vivre en France et d’obtenir un titre de séjour.
Et mon interlocuteur de s’étonner devant cette étrangeté : « Quand on est marié, on a tout de même le droit de vivre ensemble, non ? ».
M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait, mes chères collègues ; je vois que vous êtes très attentives au respect des droits et des devoirs. En l’espèce, manifestement, plus qu’un devoir, c’était sans doute un plaisir !
Sourires
Il ne s'agit que d’une anecdote, mais elle m’a beaucoup frappé, car tout le monde comprend cette réaction spontanée : il semble tout de même assez normal que deux personnes qui s’aiment et se sont mariées aient le droit de vivre ensemble ! Donc, l’étranger, homme ou femme, qui a épousé l’un ou l’une de nos compatriotes doit avoir droit au séjour.
Je comprends bien que l’on prenne des précautions et que l’on soit vigilant en matière d’immigration – je l’ai souligné en introduction de mon propos. Toutefois, monsieur le ministre, vous avez beaucoup de mal à justifier votre position et, derrière l’affirmation toute tautologique, c’est bien l’idéologie qui perce : on met en cause a priori le mariage avec un étranger au motif que l’on suspecte certaines de ces unions d’être fabriquées, truquées ou de complaisance.
Marques d’ironie sur les travées de l’UMP.
De la même manière, on met en cause le droit pour des étrangers de se faire soigner en France, où les hôpitaux peuvent les accueillir, au motif qu’ils pourraient être des tricheurs.
Il y a là quelque chose qui heurte nos principes : sous prétexte qu’il existe des abus – mais la loi est là pour les réprimer et interdire les mariages forcés, arrangés ou truqués ! – on semble considérer qu’il faut restreindre fortement, et de manière générale, le droit au séjour de personnes qui, en l’occurrence, se sont mariées parce qu’elles avaient décidé de vivre ensemble et de fonder une famille.
J’y insiste, parce que l’on finit par s’habituer à ces lois, à ces règlements, à ces manières de penser qui, je crois, posent un véritable problème de principe.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 20 est adopté.
Après le premier alinéa de l’article L. 314-15 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conjoint, s’il est âgé d’au moins dix-huit ans, d’un étranger titulaire du titre de séjour mentionné au premier alinéa bénéficie de plein droit de la carte de résident susmentionnée. » –
Adopté.
(Non modifié)
Les articles L. 315-4 et L. 315-6 du même code sont abrogés.
L'amendement n° 333, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 315-6 du même code est abrogé.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
L’article 21 concerne les conditions de délivrance d’un titre de séjour assorti de la mention « compétences et talents ».
Lorsque l’étranger sollicitant la carte de séjour portant la mention « compétences et talents » est ressortissant d’un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire, il doit apporter son concours à une action de coopération ou d’investissement économique définie par la France avec le pays dont il a la nationalité.
Lors du premier renouvellement de cette carte, l’administration doit tenir compte de l’éventuel non-respect de cette obligation. Or cette condition d’octroi est actuellement trop contraignante. C’est ce qui explique en partie la relative désaffection des ressortissants des pays de la zone de solidarité prioritaire à l’égard de la carte de séjour portant la mention « compétences et talents » : en 2008, cent cinquante de ces cartes avaient été délivrées à des étrangers issus de cette zone, et cent quatre-vingt-trois en 2009.
C’est pourquoi nous sommes favorables à l’abrogation de l’article L. 315-6 du CESEDA.
En revanche, nous sommes défavorables à l’abrogation de l’article L. 315-4 du même code.
Actuellement, la Commission nationale des compétences et des talents détermine annuellement les critères pour l’application des conditions d’attribution de la carte de séjour. L’intervention de cette commission, du fait même de la composition de celle-ci, est un gage de transparence. Nous voulons que les critères de délivrance de ce titre de séjour continuent à être fixés par la Commission nationale des compétences et des talents, plutôt que par le pouvoir réglementaire.
Notre amendement prévoit donc l’abrogation de l’article L. 315-6 du CESEDA, mais le maintien de l’article L. 315-4 du même code, contrairement à l’article 21.
L’article 21 du projet de loi prévoit déjà l’abrogation de l’article du CESEDA disposant que lorsque le titulaire d’une carte de séjour portant la mention « compétences et talents » est ressortissant d’un pays de la zone de solidarité prioritaire, il est tenu d’apporter son concours, pendant la durée de validité de cette carte, à une action de coopération ou d’investissement économique définie par la France avec le pays dont il a la nationalité.
En revanche, l’amendement tend à conserver dans notre droit l’article L. 315-4 du même code, qui renvoie à la Commission nationale des compétences et des talents le soin de définir les critères d’attribution de ce titre de séjour. Ces dispositions paraissant de nature réglementaire, il est souhaitable de les abroger, contrairement à ce que préconisent les auteurs de cet amendement.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
Il n’est pas opportun de revenir sur la délégalisation des dispositions relatives au fonctionnement de la Commission nationale des compétences et des talents. En effet, comme je l’ai expliqué tout à l'heure, ces dispositions relèvent du domaine réglementaire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 21 est adopté.
L'amendement n° 149 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa de l'article L. 111-6 du même code est ainsi rédigé :
« La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans le respect de l'article 47 du code civil. »
II. - L'article 47 du code civil est ainsi rédigé :
« . - Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi. »
La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.
Nous souhaitons modifier l’article L. 111-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, afin de le rendre conforme à l’article 47 du code civil, que nous proposons de rétablir dans la rédaction qui était la sienne avant l’adoption de la loi du 26 novembre 2003.
Nous entendons ainsi mettre fin à la suspicion permanente qui pèse sur l’authenticité des actes de l’état civil des étrangers, rédigés dans les formes usitées dans leur pays d’origine.
La loi du 26 novembre 2003 avait en effet introduit dans le code une « présomption de fraude », pratiquant un amalgame entre mariage mixte et mariage de complaisance, pis encore entre étrangers et fraude.
Il faut en finir avec le climat de suspicion généralisée qui caractérise la politique migratoire gouvernementale. Il s’agit simplement de considérer que les actes de l’état civil établis à l’étranger font foi.
Cet amendement porte sur la valeur probante des actes de l’état civil établis à l’étranger.
Je rappelle les dispositions actuelles de l’article 47 du code civil : « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. »
Cette rédaction est issue de la loi du 26 novembre 2003, qui visait à instaurer une procédure de contrôle afin de mieux lutter contre les faux documents d’état civil. Ainsi, ce texte a mis un terme à la présomption de régularité formelle de l’acte de l’état civil établi à l’étranger qui prévalait jusqu’alors et a ouvert la possibilité d’en contester l’authenticité.
Les auteurs de l’amendement proposent de revenir aux dispositions antérieures à la loi du 26 novembre 2003. La commission estime que cela n’est absolument pas souhaitable, dans la mesure où le rapport d’information du Sénat, établi en juin 2005, sur la nouvelle génération de documents d’identité et la fraude documentaire fait état d’une forte augmentation du nombre d’actes de l’état civil établis à l’étranger irréguliers ou falsifiés. L’objectif premier de leurs détenteurs est de contourner la législation de l’entrée et du séjour en France et d’obtenir un titre d’identité français.
Il paraît donc essentiel de maintenir une base légale permettant à l’administration et à l’autorité judiciaire de mener, lorsque cela semble nécessaire, les investigations utiles pour apprécier la régularité d’un acte de l’état civil lorsqu’un doute subsiste sur son authenticité.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Cet amendement a pour objet de récrire l’article 47 du code civil conformément à la rédaction qui était la sienne avant l’adoption de la loi du 26 novembre 2003. Il s’agit de prévoir qu’un acte d’état civil étranger fait foi, sauf preuve contraire.
Cette présomption de régularité n’est pas irréfragable.
En outre, le fait de remplacer, au premier alinéa de l’article L. 111-6 du CESEDA, les mots : « dans les conditions définies par » par les mots : « dans le respect de » ne changerait évidemment rien à l’état du droit actuel, tel qu’interprété par les décisions du Conseil d’État, qui fait porter la charge de la preuve du caractère irrégulier d’un acte d’état civil sur l’autorité consulaire.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour la mission commune d’information sur les dysfonctionnements éventuels de notre système de contrôle et d’évaluation des médicaments, révélés à l’occasion du retrait de la vente en novembre 2009 d’une molécule prescrite dans le cadre du diabète commercialisée sous le nom de « Mediator », et sur les moyens d’y remédier en tant que de besoin.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame Mme Marie-Christine Blandin membre de la mission commune d’information sur les dysfonctionnements éventuels de notre système de contrôle et d’évaluation des médicaments, révélés à l’occasion du retrait de la vente en novembre 2009 d’une molécule prescrite dans le cadre du diabète commercialisée sous le nom de « Mediator », et sur les moyens d’y remédier en tant que de besoin, à la place laissée vacante par M. Jean Desessard, démissionnaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à dix-sept heures pour les questions cribles thématiques sur l’aggravation des inégalités sociales dans le système scolaire.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur l’aggravation des inégalités sociales dans le système scolaire.
Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.
Ce débat est retransmis en direct sur la chaîne Public Sénat et sera rediffusé ce soir sur France 3, après l’émission Ce soir (ou jamais !) de M. Frédéric Taddéï.
Chacun des orateurs aura à cœur de respecter son temps de parole. À cet effet, des afficheurs de chronomètres ont été placés à la vue de tous.
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.
Ma question portera sur les projets de réussite éducative, les PRE.
Je rappelle que les PRE sont la déclinaison concrète et opérationnelle à l’échelon local du programme de réussite éducative issu de la loi de janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Ils s’adressent aux enfants et aux adolescents qui présentent des signes de fragilité ou ne bénéficient pas d’un environnement social, familial et culturel favorable à leur développement.
Ce programme, trop méconnu, me semble constituer un élément fondamental de la lutte contre les inégalités sociales dans le système scolaire. Il témoigne d’une nouvelle approche dans la prise en compte des jeunes élèves les plus en difficulté et vient compléter les autres dispositifs éducatifs.
Les PRE favorisent l’épanouissement de l’enfant, sa socialisation, son autonomisation et participent ainsi à sa réussite scolaire.
De nombreuses collectivités territoriales se sont engagées dans ce processus, car elles ont indéniablement un rôle essentiel à jouer dans la mise en place d’une véritable politique locale d’éducation.
Il faut se réjouir que, depuis cinq ans, de nombreux projets se soient développés, aient fait leurs preuves et aient obtenu la reconnaissance des acteurs de la vie éducative : les conseils généraux, le ministère de l’éducation nationale, les collectivités locales, les écoles, les parents.
Cependant, alors même que les effets de la crise se font de plus en plus sentir sur une population qui se paupérise littéralement, il semble que, depuis plusieurs mois, les moyens alloués à ces projets se réduisent comme peau de chagrin. Certains PRE ont vu leur financement diminuer de plus de 35 % en 2010, et la baisse atteindra peut-être 20 % en 2011.
À ce rythme, que restera-t-il de cette dynamique si positive ? Aborder les problématiques des enfants et de leurs parents de manière individuelle a prouvé son efficacité dans la lutte contre les inégalités sociales et l’échec scolaire. C’est pourquoi je vous demande de renforcer ce dispositif en lui donnant les moyens de l’ambition qui le sous-tend. Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager sur le devenir et la pérennisation des projets de réussite éducative ?
Madame le sénateur, vous avez raison de rappeler l’importance des programmes de réussite éducative, qui visent à prendre en charge des enfants ou des adolescents de manière globale, c'est-à-dire, au-delà du seul volet éducatif, en termes d’ouverture culturelle ou sportive, de santé, d’accompagnement social ou d’aide à la parentalité. Tel est l’intérêt majeur de ce dispositif.
Depuis ma prise de fonctions, j’ai veillé à ce que ce programme s’articule bien avec d’autres dispositifs dont l’éducation nationale a directement la charge – les PRE étant placés sous la responsabilité de l’ACSÉ, l’Agence nationale pour la cohésion nationale et l’égalité des chances, dans le cadre de la politique de la ville –, notamment l’accompagnement éducatif, que nous avons instauré au collège en 2008 et qui vise à accueillir, après seize heures, des jeunes jusqu’alors laissés livrés à eux-mêmes. Les moyens alloués à l’accompagnement éducatif s’élèvent à 283 millions d’euros et sont consacrés à hauteur de 62 % à l’aide aux devoirs, de 22 % à l’initiation aux arts et à la culture, de 11 % au sport et de 5 % à l’enseignement des langues vivantes.
Nous avons défini clairement le rôle de chacun : l’éducation nationale transmet les savoirs et assure l’accompagnement personnalisé des parcours scolaires, dimension très importante de la politique de personnalisation que nous menons ; la politique de la ville, au travers des PRE, complète l’action de l’école hors temps scolaire, notamment en orientant les jeunes en difficulté vers les dispositifs existants ; enfin, les collectivités territoriales doivent mettre à disposition les ressources locales existantes de nature à faciliter le bon déroulement de l’ensemble des actions.
Mon collègue Maurice Leroy, ministre de la ville, a récemment rappelé que les programmes de réussite éducative méritent d’être étoffés. Nous voulons donc fixer de nouvelles priorités dans les domaines de la santé, de la lutte contre l’absentéisme et le décrochage scolaire, de l’accompagnement individuel, de la prise en charge des élèves temporairement exclus de l’école ou du soutien à la parentalité, pour améliorer les relations entre les parents et l’école.
C’est là tout l’enjeu de la renégociation des contrats urbains de cohésion sociale, dans laquelle l’éducation nationale prendra toute sa part. J’y veillerai particulièrement.
La parole est à M. Jacques Legendre, pour le groupe Union pour un mouvement populaire.
La dernière enquête PISA –programme international pour le suivi des acquis des élèves – pilotée par l’OCDE évalue et compare les connaissances des élèves de 15 ans dans trois domaines : la lecture, les mathématiques et la culture scientifique.
Cette enquête montre le poids de l’origine sociale dans les inégalités scolaires en France, alors que notre pays était dans la moyenne en 2000 selon ce critère. En dix ans, il y a eu chez nous un creusement des inégalités scolaires d’origine sociale.
Je citerai deux exemples frappants à cet égard : en France, un lycéen issu d’un milieu défavorisé a deux fois moins de chances d’accéder à l’enseignement supérieur que s’il avait grandi en Espagne ou en Irlande ; dans notre pays, un lycéen a 4, 3 fois plus de risques d’être en échec à 15 ans s’il est issu d’un milieu social défavorisé, alors que ce facteur est en moyenne de 3 au sein de l’OCDE.
Un autre enseignement fort de cette enquête est que l’efficacité ne se mesure pas seulement au travers de la dépense publique. L’étude montre que certains pays de l’OCDE qui dépensent moins que la France sont mieux classés qu’elle, par exemple la Pologne, Singapour ou la Corée du Sud. L’enjeu est donc de dépenser mieux, de redéployer les moyens en fonction des priorités et des besoins.
Nous avons déjà beaucoup avancé dans cette voie, comme en témoignent deux types de mesures : la mise en place de programmes du primaire recentrés sur les fondamentaux que sont la lecture et l’écriture ; l’instauration d’un véritable dispositif d’accompagnement éducatif comprenant l’aide personnalisée, l’accompagnement personnalisé, le tutorat, l’internat d’excellence.
Ces mesures, que nous soutenons, mettent en lumière l’objectif visé par le Gouvernement ces dernières années : limiter le plus possible le nombre d’élèves en difficulté. Mais cela ne saurait suffire et notre système éducatif doit encore évoluer.
Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, les mesures que le Gouvernement envisage, notamment en matière d’autonomie de décision des établissements scolaires, pour renforcer notre efficacité dans le domaine de l’éducation ?
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur Legendre, les résultats de l’enquête PISA sont très intéressants, car ils nous permettent de comparer notre système éducatif à ceux de soixante-quatre autres pays. Ils montrent que la France se situe à la fin du premier tiers du classement. Nous sommes dans la moyenne des pays de l’OCDE s’agissant des acquis, aussi bien en lecture qu’en mathématiques.
Surtout, cette enquête nous renseigne sur deux faiblesses de notre système éducatif.
D’abord, la France reste le pays du grand écart : le nombre d’élèves qui accèdent à l’excellence est trop réduit, alors que le nombre d’élèves en grande difficulté a plutôt tendance à augmenter.
Ensuite, notre système éducatif, plus que ceux des autres grands pays développés, a du mal à lutter contre les déterminismes sociaux.
Dès lors, que faire ?
La politique que nous menons va dans la bonne direction, non parce que c’est la nôtre, mais parce que c’est celle qui a été mise en place par tous les pays obtenant de meilleurs résultats que nous dans les enquêtes PISA.
Cette politique est fondée sur la personnalisation de l’enseignement. Si l’on veut, après le défi de la massification et de la quantité auquel notre système éducatif a su répondre entre 1970 et 1990, relever le défi de la qualité, en faisant en sorte qu’il y ait une solution pour chacun à la sortie de l’école, nous devons, tout au long de la scolarité, organiser des temps de différenciation, c'est-à-dire faire davantage pour les élèves ayant plus de difficultés, être capables d’accompagner individuellement les élèves, notamment avec les plateformes de suivi et d’appui aux décrocheurs, l’aide personnalisée dès le primaire pour détecter les difficultés de lecture avant qu’il ne soit trop tard ou l’action que nous menons en faveur des enfants handicapés, ceux-ci étant accueillis en beaucoup plus grand nombre aujourd'hui qu’il y a cinq ans.
En outre, comme vous l’avez indiqué, nous devons faire davantage confiance aux acteurs locaux, déléguer, transférer des compétences aux établissements scolaires, aux chefs d’établissement, aux professeurs.
L’autonomie et la personnalisation se renforcent progressivement dans notre système éducatif : tel est l’esprit de la politique que nous menons.
J’avais mis l’accent sur les élèves décrocheurs, car ce problème nous préoccupe. La commission s’est rendue récemment au Canada et a vu ce qui se faisait en Ontario : il vaut mieux rattraper les élèves menacés de décrochage quand ils sont encore à l’école plutôt que de mettre en place des systèmes de rattrapage, plus coûteux et moins efficaces. Priorité à l’école ! (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
Monsieur le ministre, les conclusions de l’étude PISA de 2009 sont alarmantes et révélatrices de l’échec des politiques éducatives de la France.
Selon cette étude, la proportion des élèves les moins performants en compréhension de l’écrit est passée de 15 % à 20 %. Loin d’avoir tiré les leçons du classement moyen de 2003, le Gouvernement a laissé se dégrader la qualité de notre enseignement. Les quelques mesures annoncées, d’ailleurs limitées à quelques expérimentations, n’y ont rien changé.
Les conclusions de l’enquête PISA jettent un éclairage peu flatteur sur le système éducatif français. En prenant en compte divers indicateurs, comme la profession des parents, leur formation, le nombre de livres à la maison ou encore la langue parlée, ce rapport démontre qu’en France, plus que dans n’importe quel autre pays de l’OCDE, il est beaucoup plus difficile pour les jeunes issus de milieux défavorisés de réussir à l’école, les jeunes de la première génération immigrée étant particulièrement vulnérables.
Autrement dit, en France, l’origine sociale et familiale est un facteur déterminant pour réussir à l’école : nous sommes le champion des inégalités en matière d’éducation, et c’est inacceptable !
Dans le même temps, le groupe des meilleurs élèves en lecture est passé, lui, de 8, 5 % à 9, 6 % de l’effectif total. Alors que cette progression devrait nous réjouir, ces chiffres constituent une autre source d’inquiétude, car ils montrent que les écarts se creusent entre les élèves au sein de notre système éducatif. Celui-ci est, à l’heure actuelle, conçu pour les élites. Les mesures les plus récentes, la suppression de la carte scolaire ou la création de lycées d’excellence, par exemple, sont censées permettre l’émergence et l’élargissement de ces élites. Certes, l’intention est bonne, mais encore faudrait-il que, dans le même temps, la grande masse des élèves ne soit pas abandonnée à son sort !
Pourtant, l’un des enseignements fondamentaux de l’enquête PISA est qu’œuvrer au développement de l’excellence…
… n’est nullement contradictoire avec faire progresser le niveau de compétence des élèves peu performants.
Au vu de ces constats, quelles mesures allez-vous prendre, monsieur le ministre, pour inverser la tendance à l’aggravation des inégalités dans les écoles de notre pays et éviter que la prochaine enquête PISA, en 2012, ne fasse apparaître un nouveau recul de la France dans le classement international ?
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, puisque vous n’avez pas adopté un ton polémique
Sourires
Vous avez fait référence à l’action du Gouvernement en matière de politique éducative. À cet égard, je formulerai une simple remarque : les élèves qui ont été évalués en 2009 au titre de l’enquête PISA étaient alors âgés de 15 ans, ce qui signifie qu’ils sont entrés dans le système éducatif en 1997. Il s’agit donc des enfants des réformes qui ont été menées à la fin des années quatre-vingt et au début des années quatre-vingt-dix !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Il convient simplement de bien appréhender les effets et les résultats des politiques éducatives.
Je note comme vous les carences de notre système éducatif. Nous cherchons à y remédier, par exemple en mettant en place des internats d’excellence, afin de permettre à des élèves issus de milieux défavorisés de réussir. On sait très bien que ce ne sera pas le cas s’ils ne sont pas davantage accompagnés sur les plans éducatif et culturel. Actuellement, 4 000 élèves bénéficient de ce nouveau dispositif. En matière d’égalité des chances, c’est un vrai progrès !
Par ailleurs, vous opposez l’élite et les élèves en grande difficulté.
Pour ma part, monsieur le sénateur, j’estime que nous devons relever le niveau de l’ensemble de nos élèves. Notre pays a besoin d’une élite. Or j’observe que, en Finlande, 15 % environ des élèves d’une classe d’âge font partie de l’élite, contre moins de 10 % en France. Nous avons besoin de jeunes très qualifiés, qui tendent vers l’excellence. L’école de la République doit aussi être capable d’emmener les élèves méritants le plus loin possible.
Dans le même temps, nous devons également faire en sorte que moins d’élèves quittent le système éducatif sans qualification, en renforçant l’accompagnement personnalisé. Tel est l’objectif de la politique de personnalisation tout au long de la scolarité que nous menons, pour inverser une tendance structurelle, dont l’origine remonte à plusieurs années.
M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, j’ai cru un instant que vous alliez reprocher à Charlemagne de n’avoir pas pensé plus tôt à inventer l’école !
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Faisons le rêve que les internats d’excellence constituent effectivement une solution pour les élèves en grande difficulté, y compris sur le plan social. Pour autant, êtes-vous aujourd'hui en mesure de nous assurer qu’il y aura une place en internat d’excellence pour chacun d’eux ?
Ce n’est pas en créant une dizaine d’établissements que vous réglerez le problème ! Il en faut quelques centaines ! Or, compte tenu des contraintes budgétaires que vous nous exposez régulièrement, pourrez-vous assurer une place à chaque élève concerné ?
Pour l’heure, la création de ces internats d’excellence n’est qu’une mesure d’affichage ! Des centaines de milliers d’élèves attendent à leurs portes, et ce n’est pas tolérable !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur le dispositif CLAIR – collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite – et sur le démantèlement de l’éducation prioritaire que sa mise en œuvre induit de fait.
Permettez-moi tout d’abord de citer les propos que vous avez tenus à Marseille le 25 juin 2010 : « Le dispositif CLAIR, s’il réussit, si l’expérimentation fonctionne, a pour objectif d’être étendu et de remplacer les dispositifs d’éducation prioritaire qui existent aujourd’hui. »
Puis, au Sénat, le 26 octobre dernier, vous vous êtes exprimé en ces termes : « Ce programme, qui, je le répète, est une expérimentation, n’a pas a priori vocation à se substituer à toute l’éducation prioritaire. Nous en dresserons le bilan, nous l’évaluerons et nous réfléchirons à la façon de coordonner les différents dispositifs. »
Depuis, votre ministère a annoncé l’extension, en septembre, du dispositif CLAIR, qui absorberait ainsi la quasi-totalité des réseaux ambition réussite, les RAR. Sur quels bilans et quelles évaluations vous fondez-vous pour prendre une telle décision après seulement quatre mois d’expérimentation ? En quoi le programme CLAIR est-il plus probant que les dispositifs existants, dont la nature est très différente, CLAIR étant un programme de lutte contre la violence scolaire ? C’est une différence de taille avec l’éducation prioritaire, qui est, avant tout, un dispositif de lutte contre les inégalités sociales et territoriales en matière éducative. Avec le programme CLAIR, plus de notion de zones ni de réseau, c’est la logique d’établissement qui l’emporte. Ce n’est pas étonnant dans la mesure où vous prônez l’autonomie des établissements !
Selon vous, le programme CLAIR se caractériserait par sa dimension innovante. Mais l’innovation pédagogique a toujours été le maître mot de l’éducation prioritaire. Dans ce domaine, la circulaire du 7 juillet 2010 relative à la mise en place du dispositif CLAIR ne prévoit d’ailleurs rien de nouveau. Non, la véritable innovation apportée par celui-ci réside dans l’amorce – prudente, il est vrai, le sujet étant sensible – de la généralisation des postes à profil pour, à terme, imposer la libéralisation du recrutement des enseignants.
Alors que les acteurs de l’éducation prioritaire s’accordent pour en réclamer la relance, vous l’atomisez ! Monsieur le ministre, que deviendront les réseaux ambition réussite et les milliers d’élèves qu’ils accueillent ? §
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, je tiens tout d’abord à vous rappeler que l’éducation nationale investit chaque année plus d’un milliard d’euros dans l’éducation prioritaire ; il s’agit donc d’un engagement significatif. Toutefois, cette politique a besoin d’un toilettage, d’une harmonisation, d’une coordination. En effet, à l’heure actuelle, plus de treize dispositifs se superposent : c’est un véritable millefeuille, qui résulte de l’empilement des politiques depuis le début des années quatre-vingt !
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
C’est un constat, pas une critique ! On a le droit d’avoir des idées et de faire des propositions, mais mettez-vous à la place des enseignants, qui voient des politiques se superposer sans véritable cohérence, alors qu’ils ont besoin de mobiliser leurs moyens et leur énergie pour faire réussir leurs élèves.
Nous avons la conviction, madame le sénateur, qu’en donnant plus de moyens aux acteurs locaux, aux établissements, aux professeurs, aux chefs d’établissement, et en leur faisant davantage confiance, nous obtiendrons de meilleurs résultats dans les établissements qui accueillent un grand nombre d’élèves issus de milieux défavorisés et où peuvent se poser des problèmes de violence. Cette conviction, née des états généraux de la sécurité à l’école que nous avons organisés au mois d’avril 2010, est d’ailleurs corroborée par un certain nombre d’études internationales.
Pour l’heure, nous avons expérimenté le dispositif CLAIR dans 105 collèges. Il offre au chef d’établissement une autonomie sur le plan pédagogique et en matière de recrutement. Un chef d’établissement pourra élaborer avec son équipe un projet pédagogique et recruter en conséquence des enseignants qui partagent celui-ci et s’engagent pour cinq années. Les établissements concernés ont besoin de stabilité, et il convient de mieux rémunérer, de revaloriser les enseignants qui font le choix de travailler dans la durée au sein d’établissements plus difficiles que d’autres. Tel est l’esprit du programme CLAIR : il s’agit là d’une véritable innovation. Les collèges appartenant aux réseaux ambition réussite ont vocation à rejoindre progressivement le programme CLAIR, dans un objectif de clarification et de simplification.
Monsieur le ministre, on sait ce que signifie le mot « toilettage » en langage RGPP ! Dans les Hauts-de-Seine, sur les vingt-quatre collèges constitués en réseau de réussite scolaire, trois seulement seraient préservés. Est-ce cela, votre politique ?
Quid, en outre, de la cohérence avec la politique de la ville ? La révision de la carte des ZEP, les zones d’éducation prioritaires, devait se faire, on s’en souvient, en lien avec celle de la carte des ZUS, les zones urbaines sensibles, laquelle pourrait n’intervenir qu’en 2014, date de la prolongation des contrats urbains de cohésion sociale. D’ici là, la réforme des collectivités territoriales sera entrée en vigueur.
Cette politique éducative n’est pas la bonne, car elle abandonne un objectif fondamental, celui de la mixité sociale, au profit d’une « mixité des élites », en consacrant des moyens à quelques bons élèves issus des milieux défavorisés. Je vous le dis très sincèrement, ces choix ne permettront pas d’inverser la tendance au creusement des inégalités scolaires en France, où l’influence de l’environnement socioéconomique sur la réussite des élèves est particulièrement forte, comme l’indique l’enquête PISA ; pis encore, ils l’accentueront.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour le groupe de l’Union centriste.
Monsieur le ministre, je ne doute pas que vous estimiez que, dans notre démocratie, la reconnaissance des talents et des mérites ne devrait pas dépendre de l’hérédité sociale et des hasards de la naissance. Et pourtant, depuis le début de la massification scolaire, qui a ouvert au plus grand nombre l’accès aux études longues, jamais notre école n’a été aussi inégalitaire.
Ainsi, les statistiques des services de votre ministère indiquent que 79 % des élèves provenant de catégories sociales favorisées obtiennent un bac général, contre seulement 18 % des élèves issus de milieux défavorisés.
Par ailleurs, 55 % des bacheliers qui entrent dans les classes préparatoires aux grandes écoles ont un père cadre, chef d’entreprise, professeur ou membre d’une profession libérale, et 5 % seulement un père ouvrier.
L’inégalité sociale réside aussi dans le fait que des milliers d’enfants ne possèdent pas les éléments fondamentaux du savoir : la lecture, l’écriture et le calcul. Vous le savez, monsieur le ministre, le nombre d’élèves faibles dans ces matières de base a augmenté de façon spectaculaire d’une étude PISA à l’autre, notamment au sein des milieux les plus défavorisés socialement. Nous courons vers une école à deux vitesses !
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le ministre, je suis de ceux qui pensent que les paramètres fondamentaux sont le nombre d’enseignants et leur formation.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
Il ne s’agit pas de vous accuser de quoi que ce soit, monsieur le ministre : chaque gouvernement a sa responsabilité, mais je m’interroge sur la suppression de postes d’enseignant à la rentrée et sur celle de la formation des maîtres, même si le Président de la République a dit qu’il allait rouvrir ce dernier chantier.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Mme Jacqueline Gourault. Ce chantier, il aurait mieux fait de ne pas le fermer !
Nouvelles marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le ministre, quand allez-vous nous présenter des objectifs précis et simples, fixés en concertation avec les acteurs de l’éducation nationale, pour préparer l’école de demain ?
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste, du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, vous avez raison de vous indigner contre l’importance du nombre des élèves qui quittent le système éducatif sans qualification, qui maîtrisent mal les savoirs fondamentaux. Je me permets toutefois d’attirer l’attention de la Haute Assemblée sur le fait que ce nombre n’a jamais été aussi peu élevé dans notre pays.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Mesdames, messieurs les sénateurs, quelle était la situation de notre système éducatif avant le collège unique, avant la création par Jean-Pierre Chevènement des bacs professionnels, cette grande avancée qui a permis de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes grâce à l’éducation nationale ? Il faut aussi considérer les résultats sur la longue durée !
Madame Gourault, vous avez certes raison de vous élever contre le fait que 20 % d’élèves maîtrisent insuffisamment les fondamentaux en sortant du primaire. Ce pourcentage est trop important, et nous devons nous mobiliser pour remédier à cette situation. Or c’est précisément ce que nous avons fait : j’ai décidé de mettre en place un plan de lutte contre l’illettrisme s’appuyant sur l’étude du vocabulaire et l’apprentissage par cœur, dès la classe de maternelle.
En effet, la véritable inégalité sociale tient au fait qu’un élève issu d’un milieu favorisé maîtrise entre 600 et 700 mots en entrant au cours préparatoire, contre 150 ou 200 seulement pour un élève venant d’un milieu défavorisé. On sait bien que ce second élève a beaucoup moins de chances d’apprendre à lire correctement que le premier.
Le rôle de l’école est d’inverser cette tendance en se mobilisant, dès la classe de maternelle, pour lutter contre l’illettrisme. C’est cette mobilisation que nous avons engagée.
Enfin, madame le sénateur, je tiens à vous rassurer à propos du nombre des professeurs : à la rentrée de 2011, notre système éducatif comptera plus d’enseignants qu’au début des années quatre-vingt-dix, alors que les élèves sont moins nombreux !
Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.
Monsieur le ministre, nous ne disposons manifestement pas des mêmes statistiques, mais ce n’est pas grave…
Monsieur le ministre, ne prenez pas en mauvaise part ce que je vais vous dire et ne considérez pas qu’il s’agit d’une attaque personnelle.
Mme Jacqueline Gourault. Voilà quelques semaines, vous avez évoqué l’apprentissage de l’anglais dès l’âge de 3 ans et l’enseignement des sciences physiques, de la chimie, des sciences de la vie et de la technologie par un enseignant unique. Pourquoi pas, mais il s’agit presque de niches !
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
Mme Jacqueline Gourault. Pourquoi ne serions-nous pas capables d’atteindre un tel résultat aujourd’hui, afin que la France puisse être, dans l’avenir, un pays en pointe en matière de recherche, grâce à des têtes bien faites et bien pleines ?
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste, du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
La parole est à M. Alain Dufaut, pour le groupe Union pour un mouvement populaire.
Depuis la rentrée scolaire de 2007, l’assouplissement – pour ne pas dire la suppression ! – de la carte scolaire a entraîné un effet pervers dans les établissements réputés difficiles, en particulier en zones d’éducation prioritaires et dans les collèges des réseaux ambition réussite.
On y assiste en effet à un « écrémage » des meilleurs élèves, qui partent dans d’autres établissements, quand ce n’est pas dans l’enseignement privé, et à une accentuation de la « ghettoïsation » des collèges et des lycées des quartiers défavorisés. La chambre régionale des comptes a d’ailleurs dénoncé, dans un rapport de mai 2010, le risque de création de « ghettos scolaires ».
J’ai le triste privilège d’être le conseiller général d’un canton où le premier des 254 collèges que compte le réseau ambition réussite, le collège Paul-Giéra, situé dans le quartier Monclar, à Avignon, a été fermé. Même si les vraies motivations de cette fermeture sont liées à des considérations politico-financières, il n’en reste pas moins que c’est en raison de l’assouplissement de la carte scolaire que le conseil général de Vaucluse a pris une telle décision.
Après une année d’expérience de redéploiement des élèves concernés dans deux collèges du centre-ville, le bilan éducatif et social marque un véritable fiasco.
L’hétérogénéité des classes rend insurmontable la tâche des équipes éducatives, tandis que l’absentéisme ne cesse de croître, du fait de l’éloignement du quartier en question. Enfin, la diminution des moyens ajoute encore aux difficultés, avec des enseignants non préparés à exercer devant ce public, un nombre d’élèves par classe plus élevé – vingt-six au lieu de vingt en zones d’éducation prioritaires –, moins de conseillers principaux d’éducation, aucune passerelle vers les sections d’enseignement général et professionnel adapté, plus d’école ouverte, etc.
À maintes reprises, j’ai attiré l’attention des responsables de l’éducation nationale sur ce sujet, y compris la vôtre, monsieur le ministre. J’ai même déposé une proposition de loi, le 1er septembre 2009, pour tenter d’instaurer une sorte de mixité à l’envers dans ce type d’établissements. Mais toutes ces démarches sont restées sans suite…
Monsieur le ministre, pourriez-vous m’indiquer quelles pistes sont explorées par l’éducation nationale afin d’optimiser l’« aire d’attraction » de ces établissements, qu’il s’agisse de la différenciation de l’offre de formation ou des modalités d’affectation des élèves ?
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, si le Président de la République a voulu assouplir la carte scolaire, c’est parce que le système antérieurement en vigueur était absolument désastreux.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.
Nous avons donc assoupli – et non supprimé – le système, ce qui a permis à un certain nombre d’élèves boursiers, issus de milieux défavorisés ou handicapés de bénéficier de dérogations, alors que ce n’était pas possible précédemment.
S’agissant de l’exemple que vous avez évoqué, monsieur le sénateur, je ferai d’abord observer que l’éducation nationale ne ferme aucun collège sans l’avis de l’autorité organisatrice départementale, à savoir le conseil général, dont vous êtes membre.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Le nombre d’élèves moyen par division des collèges Frédéric-Mistral et Joseph-Vernet, qui ont accueilli les élèves de l’ex-collège Paul-Giéra, est aujourd’hui analogue à celui des établissements situés en zones d’éducation prioritaires.
Par ailleurs, les moyens qui étaient accordés au collège Paul-Giéra au titre du réseau ambition réussite ont été intégralement redistribués aux collèges d’accueil, et même majorés, monsieur le sénateur, puisqu’un poste supplémentaire de conseiller principal d’éducation a été attribué au collège Frédéric-Mistral. Les neuf assistants d’éducation du collège Paul-Giéra ont été transférés aux deux collèges d’accueil. Ce sont donc autant de moyens supplémentaires.
Monsieur le sénateur, avec le recul, il faut reconnaître que le transfert des élèves du collège Paul-Giéra a été bénéfique, sans que l’attractivité des établissements d’accueil en pâtisse, puisque, à l’échelle du département de Vaucluse, le collège Joseph-Vernet occupe la quatrième place à ce titre et le collège Frédéric-Mistral la seizième. J’ajoute que l’absentéisme a reculé dans ces établissements.
Monsieur le sénateur, je sais qu’il s’agit de décisions difficiles à prendre pour des élus, mais il est important d’étudier comment mieux répartir les moyens sur l’ensemble du territoire, …
… afin que le système éducatif public puisse devenir plus performant. C’est ce que nous faisons au quotidien avec les élus locaux.
M. Alain Dufaut. Monsieur le ministre, il se trouve que les trois établissements en question, y compris les deux de centre-ville, sont situés dans mon canton, et que je participe à tous leurs conseils d’administration. Par conséquent, je suis bien placé pour savoir que la situation n’est pas aussi idyllique que n’a bien voulu vous le dire l’inspection académique !
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
L’objectif n’est pas de remettre en cause l’assouplissement de la carte scolaire ; il est d’essayer de trouver des solutions efficaces pour éviter que ne s’aggrave la « ghettoïsation » des collèges et des lycées des quartiers difficiles, des zones d’éducation prioritaires ou des réseaux ambition réussite.
Instaurer une mixité à l’envers, comme je l’ai suggéré au travers de ma proposition de loi, serait à mon sens une bonne solution. La mixité ne se décrète pas ; il faut la favoriser par des moyens adaptés.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le ministre, je souhaiterais tout d’abord attirer votre attention sur les résultats de la sixième enquête quadriennale réalisée par l’Observatoire national de la vie étudiante, qui ont été publiés au début de l’année. Ils sont alarmants ! Ainsi, le pourcentage d’étudiants issus des classes populaires est moins élevé qu’il y a quatre ans : il a baissé de 35 % en 2006 à 31 % en 2010.
Malgré ces données inquiétantes, rien n’est fait pour conforter notre système éducatif, bien au contraire ! En effet, ni le rapport de la Cour des comptes publié en 2010, ni les résultats de l’enquête PISA n’auront eu d’influence sur votre politique.
Vous vous bornez à constater la croissance du nombre des élèves en échec scolaire, le plus souvent issus de milieux défavorisés. A contrario, vous usez et abusez de la rhétorique de l’excellence.
Il est très bien de fixer un objectif de 30 % de boursiers en classes préparatoires, mais un enfant d’ouvrier sur deux ne décroche pas le bac. Instaurer une évaluation en cours moyen deuxième année pour lutter contre l’échec scolaire n’est pas forcément une mauvaise idée, mais, dans le même temps, les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, sont supprimés et les maîtres absents ne sont pas remplacés.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Votre politique agit comme un tamis éducatif sélectionnant les meilleurs, sans jamais chercher à intervenir en amont. Ainsi, le recul de 35 % à 12 % du taux de scolarisation des enfants âgés de 2 à 3 ans, tout particulièrement dans les zones d’éducation prioritaires, et la suppression de la carte scolaire, qui aggrave la « ghettoïsation » de certains établissements, s’opèrent au détriment des plus fragiles.
Au-delà de l’étranglement budgétaire qui étouffe les équipes sur le terrain, vous vous êtes également attaqué à la formation des enseignants, alors que tous les pays arrivant en tête des classements internationaux ont investi massivement dans celle-ci. La « mastérisation » mise en place à la rentrée dernière aboutit à un véritable gâchis.
Mme Françoise Cartron. Le Président de la République a parlé d’« éléments de la formation à revoir ». Que faut-il entendre par là, monsieur le ministre ? Derrière ces euphémismes se trouve la réalité du terrain. Ne vous perdez pas dans un style amphigourique et donnez-nous une réponse claire et précise sur ce sujet, qui puisse tous nous éclairer !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Madame le sénateur, le temps de parole qui m’est imparti pour répondre à votre question risque d’être un peu trop court ! Je vais néanmoins tâcher de vous apporter quelques éclaircissements.
Ma collègue Valérie Pécresse et moi-même avons décidé de nous attaquer aux inégalités sociales. Le Président de la République avait fixé un objectif de 30 % de boursiers en classes préparatoires, que nous avons dépassé avant l’échéance assignée. C’est donc un signal très fort que nous envoyons à des élèves issus de milieux modestes qui doivent réussir grâce à l’école de la République.
Dans le cadre de la réforme du lycée que nous avons engagée depuis la dernière rentrée, nous avons décidé d’accompagner davantage les élèves dans leurs choix d’orientation, domaine dans lequel les inégalités sociales s’expriment de la manière la plus criante. En effet, un élève issu d’un milieu où l’on connaît le fonctionnement du système éducatif ne fera pas les mêmes choix d’orientation qu’un jeune dont le milieu familial est peut-être déstructuré, en tout cas éloigné de l’école. Là est la véritable inégalité ! Le premier pourra décrypter la complexité du système et éviter certains pièges, tandis que le second sera incapable de s’orienter de manière personnelle.
Par conséquent, nous avons décidé d’accompagner davantage les élèves en matière d’orientation, afin qu’ils puissent élaborer progressivement leurs choix tout au long de la scolarité au lycée, en ayant la possibilité de changer de trajectoire, d’emprunter des passerelles, de suivre des stages de remise à niveau et de bénéficier d’un tutorat assuré par les professeurs. Ces derniers, qui connaissent bien leurs élèves, peuvent ainsi désormais les accompagner en matière d’orientation, au côté des conseillers d’orientation. Il faut détecter le plus tôt possible les talents des élèves, afin d’emmener ceux-ci vers la réussite. C’est dans cet esprit que nous avons décidé de mobiliser notre système éducatif.
Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais vous n’avez pas répondu à ma question, qui portait sur la formation des maîtres ! Les enquêtes PISA montrent que les systèmes éducatifs qui réussissent sont ceux qui investissent massivement dans ce domaine. Or, malheureusement, vous avez agi à rebours, et nous constatons aujourd’hui que la « mastérisation » est un échec.
Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour éviter que, à la prochaine rentrée, de jeunes étudiants sortis tout frais émoulus des universités ne découvrent sans préparation toutes les difficultés du métier d’enseignant ?
La parole est à M. Philippe Darniche, pour la Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Monsieur le ministre, combattre les inégalités sociales est la vocation même de l’école de la République. Pourtant, malgré les différentes réformes menées depuis quarante ans – je pense notamment à la mise en place, en 1975, du collège unique ou à la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 –, ces inégalités s’accroissent.
La massification de l’enseignement n’a pas tenu ses promesses et la prétention à vouloir faire de l’enfant l’acteur de son propre apprentissage s’est révélée vaine.
Certes, les statistiques entretiennent la confusion et le doute sur la nature des problèmes. La massification de l’accès au baccalauréat et à l’enseignement supérieur ne serait-elle pas la preuve que l’égalité des chances est désormais mieux garantie ? En réalité, il n’en est rien, et ce sont avant tout les enfants des milieux les plus favorisés qui accèdent aux filières les plus prestigieuses.
Les rapports de l’éducation nationale font apparaître les conséquences d’une telle politique : 160 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans qualification ; 25 % des écoliers ont des « acquis fragiles » en français et en mathématiques ; 15 % « connaissent des difficultés sévères ou très sévères » à l’issue du primaire. La France a beau abriter certains des meilleurs mathématiciens du monde, ses élèves montrent toujours un niveau très décevant en algèbre ou en géométrie.
Cette crise est également révélée par les comparaisons internationales, que je ne citerai pas, nombre de mes collègues venant d’y faire allusion. Toutes témoignent d’une baisse régulière du niveau de nos élèves.
Les enfants des milieux modestes qui, dépourvus d’informations ou de préparation adéquates, se sont égarés dans des filières non sélectives et n’offrant aucun débouché sont les premières victimes de cette situation. Leurs familles étaient pourtant fières de compter en leur sein un premier bachelier, puis un licencié ! Mais l’ascenseur social n’est pas pour autant au rendez-vous…
Monsieur le ministre, comment lutter contre les inégalités sociales dans le système scolaire sans restaurer la transmission des savoirs fondamentaux par des méthodes qui ont fait leur preuve ?
La volonté d’apporter à des écoliers très jeunes des connaissances élargies est certes louable, mais n’a-t-elle pas nui à l’acquisition des fondamentaux, à savoir la maîtrise de la lecture, de l’écriture et du calcul, qui prépare nos enfants aux études secondaires puis supérieures ?
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, pendant de nombreuses années, en conséquence sans doute de mai 68
Protestations sur les travées du groupe socialiste
Monsieur le sénateur, je crois comme vous à un système éducatif fondé sur la transmission des savoirs et d’un certain nombre de valeurs, pour former les futurs citoyens.
Nous avons donc décidé de redonner la priorité à l’apprentissage d’un certain nombre de fondamentaux. Tel était l’objectif de la réforme du primaire mise en place par mon prédécesseur Xavier Darcos. Pour ma part, j’ai décidé de réinstaurer systématiquement le calcul mental afin de développer, dès le plus jeune âge, la mémoire et l’agilité d’esprit. En ce qui concerne la lecture, nous avons choisi de revenir à des méthodes permettant un meilleur apprentissage.
Par conséquent, comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, nous avons décidé de recourir à des méthodes qui ont fait leurs preuves, car éduquer, c’est d’abord transmettre le savoir.
Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Je voudrais souligner qu’il nous faut très souvent faire appel à des bénévoles pour aider, après la classe, les enfants qui ne trouvent pas chez eux le soutien nécessaire pour compléter le travail effectué avec les maîtres. Cela n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes d’organisation. C’est à mon sens à l’école de la République qu’il revient de mettre en place un dispositif aussi utile.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques sur l’aggravation des inégalités sociales dans le système scolaire.
Avant de reprendre la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures dix, sous la présidence de Mme Monique Papon.
(Texte de la commission)
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein du chapitre III du titre II, des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 21.
Titre II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ENTRÉE ET AU SÉJOUR DES ÉTRANGERS
Chapitre III
Dispositions diverses relatives aux titres de séjour
L'amendement n° 334, présenté par Mme Cerisier-ben Guiga, MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3° de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Enfants mineurs ayant fait l'objet, à l'étranger, d'une décision d'adoption simple ou d'une décision de recueil légal dont la kafala judiciaire, au profit de personnes titulaires d'un agrément délivré par les autorités françaises ; ».
La parole est à M. Alain Anziani.
Avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 335, présenté par Mme Cerisier-ben Guiga, MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 411-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le regroupement familial peut également être sollicité pour un mineur étranger recueilli régulièrement en vertu d'une décision de recueil légal dont la kafala judiciaire. »
II. - Le début du premier alinéa de l'article L. 411-4 du même code est ainsi rédigé :
« À l'exception du cas visé au deuxième alinéa de l'article L. 411-3, l'enfant ... (le reste sans changement) ».
La parole est à M. Charles Gautier.
Aux termes de l’article L. 411–1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, « le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois […] peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d’au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ».
En application de cet article, l’enfant éligible à cette procédure s’entend comme celui « ayant une filiation légalement établie, y compris l’enfant adopté, en vertu d’une décision d’adoption, sous réserve de la vérification par le ministère public de la régularité de cette décision lorsqu’elle a été prononcée à l’étranger ».
Si ces conditions excluent a priori du champ du dispositif les enfants recueillis par décision légale, une dérogation est prévue au bénéfice des seuls enfants algériens, en application de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
Pour les enfants qui sont nés ailleurs, l’autorité consulaire apprécie souverainement, au cas par cas, la délivrance d’un visa de long séjour. Or les refus de visa demeurent fréquents et peuvent inciter à l’entrée illégale de ces enfants en France. Cette situation a des répercussions sur les droits sociaux des intéressés, qui ne peuvent prétendre aux prestations familiales. L’octroi de ces prestations pour les enfants étrangers suppose en effet que ces derniers soient entrés régulièrement en France par la procédure du regroupement familial, condition impossible à remplir pour les enfants sous kafala autres qu’algériens.
Comme l’implique la jurisprudence du Conseil d’État et de la Cour européenne des droits de l’homme, il apparaît nécessaire de modifier le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile afin de prévoir que les enfants régulièrement recueillis en France selon une décision de recueil légal sont éligibles à la procédure de regroupement familial.
Pour toutes ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Le présent amendement vise à créer un droit au regroupement familial pour les enfants mineurs régulièrement recueillis, notamment par un étranger établi en France.
Tout en reconnaissant que la procédure de regroupement familial ne peut en principe concerner que les enfants de l’intéressé, la juridiction administrative impose à l’administration d’en étendre le bénéfice, au cas par cas, aux enfants n’appartenant pas à cette catégorie si son refus serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de l’intéressé à mener une vie familiale normale ou d’être contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant.
Par conséquent, il semble que cet amendement soit largement satisfait par le droit en vigueur et qu’il ne soit pas nécessaire de créer une catégorie spécifique.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
L’opportunité du regroupement familial est appréciée au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant : c’est cela qui importe. Le Conseil d’État a ainsi rappelé que « l’intérêt d’un enfant est, en principe, de vivre auprès de la personne qui, en vertu d’une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l’autorité parentale ».
Il ne s’agit donc, en l’occurrence, ni d’une procédure d’adoption ni d’un cas ouvrant droit au regroupement familial, même si le préfet peut autoriser celui-ci dans ce cadre.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 336, présenté par M. Antoinette, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le second alinéa du III de l'article L. 313-11-1 et après le huitième alinéa de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque sa résidence habituelle fait l'objet d'une opération définie à l'article L. 313-4 du code de l'urbanisme, le demandeur n'a ni à justifier de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins et, le cas échéant, à ceux de sa famille, ni d'une assurance maladie. »
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
Cet amendement nous offre l’occasion d’affirmer la complémentarité des travaux des deux assemblées du Parlement !
L’Assemblée nationale vient en effet d’adopter, à l’unanimité, une proposition de loi dont l’objet est de lutter contre l’habitat indigne en outre-mer, où le problème du logement est particulièrement grave du fait de l’essor démographique et de l’importance de l’immigration clandestine.
L’habitat insalubre n’est certes pas le sujet de notre discussion, mais l’évoquer pourra toutefois éclairer celle-ci.
En Guyane, 11 % des logements n’ont pas l’électricité, 14 % d’entre eux n’ont pas l’eau courante et 40 % seulement sont reliés au tout-à-l’égout. Au total, 20 % du patrimoine bâti peut être considéré comme relevant de l’habitat insalubre et indigne. Ainsi, dans un quartier de Cayenne situé sur le flan ouest du mont Baduel, 200 familles sont logées dans des habitations de fortune, construites sur des terrains qui menacent de s’ébouler. De telles situations sont aussi intolérables en métropole qu’outre-mer.
La politique de la ville doit permettre de résorber l’habitat insalubre, avec les moyens dont disposent les communes, les départements et les régions. Or les acteurs locaux qui mettent en place des opérations de restructuration et de rénovation urbaines font le constat suivant : une partie de la population occupant ces logements indignes est en situation irrégulière. Conduire une politique de résorption de l’habitat insalubre amène alors à aborder un problème de taille, celui que pose la situation de nombreux sans-papiers, installés parfois depuis des années.
Dans la mesure où il est impossible de reloger ces personnes, l’absence de titre de séjour régulier faisant obstacle à l’attribution d’un logement social, même à titre provisoire, il faut soit les régulariser, soit les expulser. Devant les troubles à l’ordre public– et économique – que cette perspective peut susciter, les acteurs publics renoncent bien souvent à mettre en œuvre leurs opérations d’urbanisme, ce qui laisse perdurer une situation insoutenable.
Mener les opérations de restructuration urbaine avec les services de l’immigration de la préfecture, qui s’engagent à traiter les dossiers le plus rapidement possible, en faisant preuve de souplesse en matière de conditions de ressources, afin de pouvoir reloger les habitants dotés d’un nouveau titre de séjour valide et d’expulser les autres, est tout aussi impraticable.
Pour permettre aux collectivités de mettre en œuvre leur politique de résorption de l’habitat insalubre sans que cela ne menace trop l’ordre public, je propose, par cet amendement, de supprimer la condition de ressources pour l’obtention d’un titre de séjour pour les habitants des zones faisant l’objet d’une opération de restructuration urbaine.
La commission est défavorable à cet amendement, qui a pour objet d’exempter de la condition de ressources et de la condition de détention d’une assurance maladie certains étrangers qui sollicitent un titre de séjour et qui résident dans une zone d’habitation insalubre faisant l’objet d’une opération de restauration urbaine.
Cet amendement appelle deux observations.
Tout d’abord, son dispositif vise uniquement les titulaires d’une carte de résident de longue durée-Communauté européenne délivrée par un autre État membre de l’Union, ainsi que les membres de leur famille, ce qui paraît particulièrement restrictif.
Par ailleurs, sur le fond, cet amendement présente l’inconvénient d’introduire une discrimination entre les étrangers résidant dans une zone d’habitation visée par une opération de restauration immobilière et les autres.
Monsieur Antoinette, je comprends les motivations de votre amendement, mais son adoption aboutirait à créer une sorte de prime à la clandestinité. Cela réjouirait peut-être Mme Boumediene-Thiery, mais tel n’est pas l’objectif du texte !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Monsieur le ministre, vous nous avez invités à être concrets. Or cet amendement vise à apporter des solutions pragmatiques à des situations auxquelles tous les maires sont confrontés dès lors qu’ils engagent des opérations de résorption de l’habitat insalubre : des familles en situation irrégulière ne peuvent pas être relogées, et comme l’administration ne parvient pas à les expulser, elles restent sur place, à la charge des collectivités territoriales… Que faire dans cette situation ?
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 314-8 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Les années de résidence sous couvert d’une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” retirée par l’autorité administrative sur le fondement d’un mariage ayant eu pour seules fins d’obtenir un titre de séjour ou d’acquérir la nationalité française, ne peuvent être prises en compte pour obtenir la carte de résident. »
L'amendement n° 150, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer l’article 21 bis, que nous jugeons inadmissible.
En effet, cet article durcit les conditions d’obtention d’une carte de résident et jette, une fois de plus, la suspicion sur les mariages mixtes, envisagés uniquement sous l’angle de la fraude en vue d’acquérir la nationalité française, comme si cette pratique était généralisée et constituait un véritable fléau pour notre société.
Depuis 2003, la majorité n’hésite pas à stigmatiser ces mariages. Dans les textes successifs qui nous ont été présentés, et celui-ci n’échappe pas à la règle, on soupçonne systématiquement l’étranger de vouloir enfreindre les lois.
Ainsi, l’article 21 bis exclut la prise en compte des années de mariage dans le calcul de la durée de résidence requise pour l’attribution de la carte de résident. Cela ne nous semble pas justifié ni adapté, eu égard au faible nombre de condamnations pour fraude. Ces fraudes, rappelons-le, font déjà l’objet d’une sanction pénale et sont punies d’une peine d’amende et de prison, qui semble suffisante au regard de l’enjeu. Il nous paraît donc inopportun de créer une notion juridique de non-résidence sur le sol français dans les cas en question.
L’article 21 bis, qui a été introduit par nos collègues députés, vise à exclure expressément les années pendant lesquelles un étranger a vécu en situation régulière grâce à un mariage frauduleux de la durée de résidence requise pour l’attribution d’une carte de résident. Il s’agit là d’une mesure de cohérence avec les autres dispositions de notre droit visant à prévenir les mariages de complaisance.
La commission des lois émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le législateur a décidé de sanctionner sévèrement les personnes qui contractent ou organisent des mariages de complaisance en vue d’obtenir une carte de séjour. Sans doute n’avez-vous pas voté la loi en question, madame la sénatrice, mais il n’en reste pas moins que le législateur s’est prononcé en ce sens.
Dans la continuité de cette volonté, l’article 21 bis prévoit que les années de résidence permises par la détention d’un titre de séjour qui aurait été obtenu frauduleusement, par un détournement de l’institution du mariage, ne doivent pas entrer en ligne de compte pour la délivrance d’une carte de résident. Cette disposition est la conséquence logique, j’allais dire saine, de la pénalisation des mariages de complaisance.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 21 bis est adopté.
L'amendement n° 345 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « peut obtenir » sont remplacés par les mots : « obtient » ;
b) À la seconde phrase, les mots : « des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et » sont supprimés ;
2° À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « et sont appréciées au regard des conditions de logement » sont supprimés ;
3° Le dernier alinéa est supprimé.
La parole est à M. Alain Anziani.
La directive 2003/109/CE vise à harmoniser les conditions d’acquisition du statut de résident de longue durée et pose un certain nombre de règles. En particulier, les États membres de l’Union européenne peuvent appliquer des dispositions plus favorables, mais en aucun cas adopter une législation plus restrictive.
Or le présent projet de loi est plus dur que cette directive sur trois points au moins.
En premier lieu, le projet de loi prévoit que l’attribution du statut de résident de longue durée sera soumise au pouvoir discrétionnaire du préfet, alors que l’article 4 de la directive dispose de façon très claire que « les États membres accordent » ce statut : il s’agit donc d’un droit. Tout à l’heure, M. Richert nous a d’ailleurs fait la leçon sur le présent impératif. C’est là une première non-conformité à la directive.
En deuxième lieu, contrairement au texte de l’article L. 314-8 du CESEDA, la directive ne prévoit pas que, pour un ressortissant d’un pays tiers, justifier de sa volonté de s’établir durablement dans un pays membre de l’Union européenne soit une condition nécessaire à l’obtention du statut de résident de longue durée, le fait qu’il y ait résidé régulièrement pendant cinq années consécutives prouvant suffisamment son ancrage dans ce pays.
En troisième lieu, la directive dispose simplement que les ressources du ressortissant de pays tiers souhaitant acquérir le statut de résident de longue durée doivent être suffisantes pour lui éviter de devenir une charge pour l’État membre. Il n’est pas fait référence, comme à l’article précité du CESEDA, aux conditions de logement et à l’avis du maire de la commune de résidence du demandeur. Là encore, notre législation est plus restrictive que la directive.
Cet amendement vise à modifier les conditions d’attribution de la carte de résident de longue durée, afin, selon ses auteurs, de mettre notre droit en conformité avec le droit communautaire.
Les conditions prévues par notre droit national pour l’obtention d’une carte de résident paraissent pourtant conformes à la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003.
En effet, aux termes de l’article 5 de cette directive :
« 1 Les États membres exigent du ressortissant d’un pays tiers de fournir la preuve qu’il dispose pour lui et pour les membres de sa famille qui sont à sa charge :
« a) de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille sans recourir au système d’aide sociale de l’État membre concerné. […] ;
« b) d’une assurance maladie pour tous les risques normalement couverts pour leurs propres ressortissants dans l’État membre concerné.
« 2 Les États membres peuvent exiger que les ressortissants de pays tiers satisfassent à des conditions d’intégration conformément à leur droit national. »
On peut donc parfaitement considérer que l’examen des conditions d’activité professionnelle et de logement prévu par le droit en vigueur constitue une déclinaison de ces dispositions. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 345 rectifié.
L'amendement n° 487, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après l'article 21 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 411-4 du même code, il est inséré un article L. 411-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 411-4.-1 - Les méthodes médico-légales de détermination de l'âge d'un étranger, qui affirme être mineur, sont proscrites, en particulier le recours à des examens osseux. En cas de doute sur l'âge de l'intéressé, ce dernier sera autorisé à démontrer par tout autre moyen qu'il a moins de dix huit ans. Il sera notamment fait application de la présomption de validité des actes d'état civil étrangers, prévue à l'alinéa 1 de l'article 47 du code civil. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement ne va pas vous faire plaisir, monsieur le ministre. Mais, après tout, nous ne sommes pas là pour ça !
Sourires.
Il s’inspire des recommandations et des doléances formulées par le Conseil national de l’Ordre des médecins, qui demande « que les actes médicaux réalisés non dans l’intérêt thérapeutique du patient mais dans le cadre des politiques d’immigration, soient bannis, en particulier les radiologies osseuses ».
Cette demande de l’Ordre des médecins repose sur la déclaration européenne des professionnels de santé pour un accès aux soins de santé sans discrimination. Elle fait suite à l’avis rendu le 23 juin 2005 par le Comité consultatif national d’éthique sur les méthodes de détermination de l’âge à des fins juridiques, ainsi qu’au rapport de l’Académie nationale de médecine du 22 janvier 2007 et aux différentes recommandations de la Défenseure des enfants.
Il est donc nécessaire d’interdire ces pratiques pour déterminer l’âge d’un étranger dont la minorité serait mise en question par l’administration, et de permettre à celui-ci de justifier par tout moyen de son âge.
En cas de doute sur la véracité des actes de l’état civil fournis par l’intéressé, l’administration pourra notamment faire application des alinéas 2 et suivants de l’article 47 du code civil, et saisir le procureur de la République de Nantes, afin qu’il soit procédé à la vérification de l’authenticité des actes.
L’objet de cet amendement est d’interdire le recours aux examens osseux pour la détermination de l’âge d’une personne.
En l’état actuel des techniques disponibles, ces examens constituent le seul moyen de déterminer si un étranger qui prétend être mineur a réellement moins de 18 ans, l’authenticité des documents d’état civil, lorsqu’ils existent, étant souvent douteuse.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.
Madame Boumediene-Thiery, vous proposez d’interdire le recours aux méthodes médico-légales pour déterminer l’âge d’un étranger qui affirme être mineur.
Le recours à ces méthodes est très précisément encadré et de nombreuses garanties sont prévues : en particulier, elles ne peuvent être utilisées que sur décision du procureur et seulement s’il existe un doute sérieux sur l’état civil de l’étranger. Vous savez très bien, madame la sénatrice, qu’il est en général très difficile de déterminer si une personne âgée de 16 à 19 ans est majeure ou mineure. Quoi qu’il en soit, en cas de doute, l’étranger est considéré comme mineur et bénéficie de tous les droits et protections attachés à ce statut.
De surcroît, il n’est recouru aux tests osseux que pour les seuls étrangers placés en zone d’attente ou en centre de rétention. Il s’agit donc d’une mesure très ciblée, qui ne s’applique pas à tous les cas de regroupement familial.
Le dispositif proposé me semble à la fois équilibré, juste, efficace et, dans un certain nombre de cas, particulièrement protecteur. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Je voudrais rappeler à M. le ministre que cette demande émane de l’Ordre des médecins, et qu’elle figure dans une déclaration européenne des professionnels de santé.
En outre, les critères utilisées aujourd’hui sont très anciens et ne correspondent plus du tout à la réalité.
Enfin, il est regrettable qu’une suspicion permanente pèse sur la véracité des actes d’état civil. Dans ces conditions, pourquoi ne pas tout simplement demander à l’administration de vérifier l’authenticité de ces actes ?
L'amendement n'est pas adopté.
Le premier alinéa de l’article L. 623-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces peines sont également encourues lorsque l’étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint. »
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 39 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 151 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 337 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 39 rectifié.
L’article 21 ter a été inséré dans le projet de loi sur l’initiative des députés. Il s’agit d’une incongruité juridique.
Dans un « mariage gris », l’un des conjoints est amoureux, l’autre pas, ce dernier étant forcément le ressortissant étranger… Telle est, en résumé, la situation !
Le merveilleux texte introduit par l’Assemblée nationale visait à appliquer aux « mariages gris » – nous sommes vraiment ici en pleine grisaille juridique ! –, en les portant à sept ans d’emprisonnement et à 30 000 euros d’amende, les peines prévues par l’article L. 623-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour réprimer les mariages de complaisance, une quarantaine de condamnations par an en moyenne étant prononcées pour ce motif.
Pour sa part, la commission des lois du Sénat a choisi de revenir aux peines actuellement prévues par l’article L. 623-1 du CESEDA et de préciser que « ces peines sont également encourues lorsque l’étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint ».
Je félicite la commission pour son imagination ! Franchement, il fallait y penser ! Je souhaite bonne chance à qui voudra apporter la preuve d’une telle dissimulation d’intentions !
D’ailleurs, aux pages 122 et 123 de son rapport, M. Buffet exprime lui-même de très fortes réserves sur cet article, en faisant observer, de façon tout à fait pertinente, que « les “mariages gris” sont d’ores et déjà inclus dans le champ de l’infraction de mariage frauduleux réprimée par l’article L. 623-1 du code des étrangers ».
Dans ces conditions, qu’est-ce que ce « mariage gris » ? En réalité, cette infraction n’a aucun sens ! La commission des lois a tenté d’atténuer les choses en ramenant la sanction prévue à cinq ans d’emprisonnement et à 15 000 euros d’amende et en faisant référence à la dissimulation de ses intentions par le conjoint étranger, mais je crois vraiment que l’on aurait pu se passer de cet article 21 ter, qui ne changera strictement rien, dans la pratique, en matière de poursuites en cas de mariage de complaisance et n’aura qu’un bien triste effet d’affichage…
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l’amendement n° 151.
L’article 21 ter nous semble dangereux, car il relève d’une vision suspicieuse de l’étranger et des mariages mixtes.
Il vise en effet à réprimer les « mariages gris », où un conjoint étranger est censé avoir trompé son conjoint français sur ses intentions réelles, l’étranger étant systématiquement considéré comme le fauteur de trouble.
Pour ce faire, cet article tend à créer une sorte de délit d’escroquerie aux sentiments, dont la sécurité juridique n’est pas suffisamment garantie. En effet, comment apporter la preuve d’une escroquerie aux sentiments ? Comment prouver la bonne foi du conjoint français ?
Il nous paraît particulièrement dangereux d’introduire dans la loi des dispositions aussi floues et subjectives, qui ne feront qu’accroître l’insécurité et la précarité de statut des couples mixtes, et particulièrement des conjoints étrangers.
De surcroît, cette mesure est tout à fait superflue : non seulement l’arsenal juridique destiné à lutter contre les mariages blancs est déjà bien étoffé, mais une multitude de réformes relatives à l’immigration, toutes focalisées sur le mariage de complaisance, ont été engagées depuis 2003. N’est-ce pas suffisant ?
Une pléthore de mesures inadmissibles ont été adoptées. Les instruments de lutte contre les mariages blancs existent déjà et les sanctions pénales également, n’excluant aucunement les « mariages gris », qui peuvent être frappés de nullité et sanctionnés par le retrait ou le refus de renouvellement de la carte de séjour, voire par une décision d’éloignement.
Le présent dispositif tend à faire accroire que cette situation échapperait à la loi, ce qui est loin d’être le cas. Il n’y a donc aucune raison de l’évoquer de manière particulière dans le texte, ni d’aggraver les sanctions applicables.
En conséquence, nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer cet article en votant notre amendement. La surenchère dans la lutte contre les mariages de complaisance doit cesser !
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 337.
Cet amendement vise à supprimer l’article 21 ter, relatif aux peines pénales encourues par un étranger accusé de mariage de complaisance « avec tromperie volontaire », autrement dénommé « mariage gris ».
Cet article nauséabond stigmatise les mariages mixtes, et introduit une suspicion de « fraude aux sentiments », pesant uniquement, bien sûr, sur le conjoint étranger.
Cette disposition est donc contraire à l’article 1er de la Constitution, qui assure l’égalité de tous devant la loi, les Français étant, selon la rédaction de cet article 21 ter, exempts de tout soupçon.
Par ailleurs, en pratique, cette mesure, qui présuppose qu’il soit statué sur la nature et l’intensité des sentiments d’un conjoint, est évidemment inapplicable, sauf à conduire à l’arbitraire. Sur quels éléments se fonder in concreto pour déterminer qu’untel ou unetelle a pu feindre des sentiments en vue de conclure une union maritale, à seule fin, selon la philosophie de cet article, d’obtenir un titre de séjour ou la nationalité française ?
Enfin, permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, qu’en droit civil de la famille, le dol, c’est-à-dire les manœuvres mensongères ayant été déterminantes du consentement, ne constitue pas une cause d’annulation du mariage. Ce principe est repris par Antoine Loysel, considéré comme le premier « penseur » du droit français, dans une formule devenue un adage du droit civil français : « En mariage, trompe qui peut ! »
En d’autres termes, comment le droit pénal français pourrait-il sanctionner, en visant de surcroît uniquement le conjoint de nationalité étrangère, ce qui est, depuis des siècles, rejeté au nom des principes fondateurs du droit civil de la famille ?
Il en va différemment lorsque les deux époux s’accordent à conclure un mariage de complaisance, dit « mariage blanc », qui lui est déjà sanctionné par le code pénal, ainsi que par le code civil, sous l’angle du défaut de consentement entraînant la nullité du mariage. Il est donc inutile de prévoir d’autres sanctions.
Cet amendement de suppression doit donc être adopté, l’article 21 ter étant tout à la fois discriminant envers les conjoints de nationalité étrangère, inapplicable et inutile !
La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques visant à supprimer l’article 21 ter.
Je précise que la commission des lois a complètement revu la rédaction de cet article, pour tenir compte, notamment, des observations relevées tout à l’heure par M. Mézard.
La première préoccupation de la commission a été d’intégrer la notion de « mariage gris » dans la législation actuellement en vigueur, en reprenant la sanction pénale aujourd’hui encourue pour les mariages frauduleux. Elle a, pour ce faire, adopté un amendement que j’avais moi-même déposé.
La rédaction retenue par la commission permet tout à la fois de préciser les conditions dans lesquelles le mariage doit être intervenu et de maintenir l’échelle des peines.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Il s’agit aujourd'hui de reconnaître la différence fondamentale entre le mariage blanc et le mariage avec tromperie sur les sentiments et de la traduire dans notre droit pénal. Dans le premier cas, les deux époux sont complices, alors que, dans le second, il y a une victime.
Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de lire quelques extraits d’une lettre qui est parvenue à mon prédécesseur, Éric Besson : « Aujourd'hui, je me rends compte que mon mariage est une mascarade. Tout est mensonge. Je n’arrive plus à dormir. Tout défile dans ma tête. Comme ai-je pu être assez naïve pour croire en ses sentiments ? Ma famille m’avait pourtant prévenue, mais j’étais aveuglée. Je pensais offrir ma virginité à l’homme de ma vie, mais il s’est avéré être un monstre de la pire espèce. »
Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Si ça vous fait sourire… C’est tout de même un témoignage particulièrement émouvant, et je tiens cette lettre à votre disposition !
Protestations sur les mêmes travées.
M. Brice Hortefeux, ministre. Je poursuis : « Je me suis fait avoir. Il ne m’a jamais aimée. Tout était manqué dès le départ. Son seul but était d’avoir ses papiers français. Je me sens détruite, violée. »
Nouvelles marques d’ironie sur les mêmes travées.
Moi, je ne vois vraiment pas ce qu’il y a d’amusant dans ces phrases ! Elles ont des accents de vérité qui ne peuvent que toucher et l’on ne peut pas faire comme si ces situations n’existaient pas. Je suis surpris que cela puisse même faire sourire un certain nombre de femmes sur les travées de gauche !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je souhaite revenir sur le problème de la mesure de la sincérité, que Jacques Mézard a, le premier, soulevé. Nous sommes vraiment là au royaume de l’absurde ! Quoi que puissent nous expliquer M. le rapporteur et M. le ministre, je leur pose la question : quels pourraient être les instruments de mesure de la sincérité et de la tromperie ?
Peut-être nous faudrait-il nous inspirer de l’exemple des Tadjiks, qui, inquiets de voir des étrangers épouser leurs filles, viennent d’adopter une loi aux effets très concrets : elle impose au prétendant étranger, d’abord, d’acheter un appartement pour la jeune fille qu’il convoite, ensuite, de résider sur le sol tadjik pendant au moins un an avant de lui passer la bague au doigt. Voilà qui a au moins le mérite d’être tangible – il faut même des espèces sonnantes et trébuchantes ! – et d’éviter une intrusion arbitraire dans la vie intime.
L'article 21 ter est scandaleusement discriminant à l’égard des étrangers. Il crée un obstacle nouveau aux mariages mixtes et à l’établissement d’une vie familiale, qui est pourtant une liberté fondamentale.
J’ajoute que ce texte est absolument disproportionné en regard de la réalité du phénomène des mariages mixtes. En 2004, sur 88 123 mariages mixtes célébrés, seuls 395 mariages ont été considérés comme blancs et annulés par la justice, soit 0, 45 %.
Faut-il d’ailleurs rappeler que le renouvellement de la carte de séjour temporaire est subordonné au fait que la communauté de vie n’ait pas cessé ? Faute de preuve d’amour, c’est au moins une garantie de constance !
Avec l’invention du « mariage gris », la majorité cherche, une fois de plus, à instiller dans l’opinion publique – mais j’espère qu’elle sera plus clairvoyante que nos gouvernants ! – une méfiance irraisonnée à l’égard des étrangers.
Cette disposition est un poison dangereux pour notre démocratie et ces amendements de suppression sont parfaitement justifiés.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Au-delà même des positions de principe légitimes que les membres de cette assemblée peuvent avoir à propos de cet article, celui-ci est choquant en ce que, je le répète, ses dispositions seront manifestement inapplicables.
Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous nous avez lu une lettre fort intéressante qui avait été adressée à M. Besson. Mais, en matière de séparation, les choses ne sont pas forcément aussi limpides que vous l’avez laissé entendre. Permettez-moi de faire à mon tour une citation, du rapport de M. Buffet, cette fois : « Enfin, plusieurs personnes entendues par votre rapporteur ont exprimé la crainte que les dispositions introduites par les députés ne soient utilisées comme un moyen de pression ou de chantage par le ressortissant français dans le cadre d’une procédure de séparation conflictuelle. »
Votre lettre, monsieur le ministre, était certes très émouvante et votre indignation...
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Peut-être !
... nous a au moins partiellement convaincus.
Ce dont je suis en tout cas convaincu, de par mon expérience professionnelle, c’est qu’il y a surtout des séducteurs et des séductrices français qui ont utilisé ce type de mariage au détriment d’étrangers ou d’étrangères.
Franchement, je ne crois pas que l’on s’honore à mesurer le degré de sentiment ou à parler de viol, comme c’est le cas dans cette lettre.
À mon sens, cette disposition n’a pas sa place dans ce projet de loi et elle est extrêmement néfaste. D’ailleurs, l’expression « mariage gris » révèle quelle était la volonté de celui qui a introduit cet article à l'Assemblée nationale.
Par conséquent, je persiste et je signe !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 39 rectifié, 151 et 337.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 21 ter est adopté.
L'amendement n° 497, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 211-2 du même code est ainsi rédigé :
« 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendants de ressortissants français et partenaires liés à un ressortissant français par un pacte civil de solidarité ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit d'insérer l'article 12 bis du projet de loi dans le chapitre du CESEDA consacré aux titres de séjour plutôt que dans celui qui a trait aux zones d'attente.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21 ter.
L'amendement n° 342, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf en cas de menace à l'ordre public, le visa est délivré de plein droit aux personnes mentionnées aux 1° à 4°, et 7° de l'article L. 211-2. »
La parole est à M. Alain Anziani.
L’État a des obligations en matière de protection de la vie de la famille. Ainsi, il doit s’abstenir de porter atteinte à la vie privée et familiale. Il doit également mettre en œuvre tout ce qui est possible pour assurer au citoyen une vie familiale normale.
Le CESEDA traduit cette obligation en faveur de certaines catégories d'étrangers qui disposent d’un titre de séjour.
Or ces titres de séjour sont soumis à la présentation d’un visa de long séjour qui, lui, n’est pas de droit. Nous sommes donc en pleine contradiction : d’un côté, le CESEDA affirme le droit au respect de la vie familiale de l’étranger et, d’un autre côté, la jouissance du droit de vivre en famille peut être empêchée par un refus de délivrance de visa.
C’est pourquoi nous proposons de rétablir l’harmonie en accordant la délivrance de plein droit aux personnes mentionnées aux 1° à 4°, et 7° de l’article L. 211-2 du CESEDA.
Cet amendement vise à instaurer une délivrance de plein droit d’un visa de long séjour lorsqu’il est demandé par certaines catégories d’étrangers : membres de la famille de ressortissants communautaires, enfants adoptés, bénéficiaires d’une autorisation de regroupement familial, etc.
Le droit en vigueur permet déjà une délivrance de plein droit d’un visa de long séjour à l’étranger marié à un ressortissant français. Par ailleurs, l’article L. 211-2 du CESEDA oblige l’autorité administrative à motiver les refus de visa de long séjour opposés à un certain nombre de catégories d’étrangers : membres de la famille d’un ressortissant français, bénéficiaires d’une autorisation de regroupement familial, etc. La motivation s’effectue notamment, sous le contrôle du juge administratif, au regard du droit à une vie privée et familiale ; ce point me semble essentiel.
Ces dispositions paraissent suffisantes. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 343, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.
II. - Le 4° de l'article L. 313-11 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque la demande de carte de séjour temporaire émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié, qui séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint français, la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée ; ».
La parole est à M. Alain Anziani.
L’exigence d’un visa de long séjour pour la délivrance d’une carte de séjour aux conjoints de Français pose de nombreuses difficultés.
L’article L. 211-2-1 du CESEDA prévoit que les conjoints de Français entrés régulièrement en France, mariés en France et justifiant de six mois de vie commune avec leur conjoint en France, peuvent déposer leur demande de visa auprès de la préfecture.
Cette formalité est en théorie le moyen de se prémunir contre toute expulsion. Dans les faits, cette procédure fonctionne autrement, en particulier lorsque le consulat ne répond pas à la demande de visa dans le délai légal qui lui est imparti. En l’absence de réponse à la demande de visa dans un délai de deux mois, la préfecture considère qu’il s’agit d’un refus implicite et, le plus souvent, refuse d’instruire la demande de titre de séjour ou notifie un refus de délivrance de titre.
Ce dysfonctionnement de la procédure pénalise les personnes ayant droit à un titre de séjour.
Nous attirons donc votre attention sur le fait que l’exigence du visa de long séjour pour les conjoints de Français déjà présents en France porte une atteinte disproportionnée au droit à une vie familiale normale, consacré par la Convention européenne des droits de l’homme.
L'amendement n° 295 rectifié bis, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise et Tuheiava, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « entré régulièrement en France » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
L'amendement n° 148 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Lorsque la demande de carte de séjour temporaire émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié avec un ressortissant de nationalité française, et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la condition prévue à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas exigée.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Il s’agit de supprimer l’obligation de produire un visa de plus de trois mois lors de la demande de carte de séjour temporaire lorsque cette demande émane d’un étranger entré régulièrement en France, marié avec un ressortissant français, et que tous deux séjournent ensemble en France depuis plus de six mois.
L’obtention d’un visa de long séjour ne va pas sans poser des difficultés. Il est prévu que ces personnes, sous les conditions que nous avons déjà évoquées, peuvent demander un visa auprès de la préfecture, mais cette procédure fonctionne mal. Il arrive que le consulat ne réponde pas à la demande de visa dans le délai légal imparti de deux mois. Or l’absence de réponse après deux mois équivaut à un refus et la préfecture n’instruit alors pas la demande de titre de séjour.
Ce problème procédural aboutit à priver de leurs droits des personnes qui peuvent prétendre à l’obtention d’un titre de séjour. Pour les conjoints de Français résidant en France, ce dysfonctionnement paraît hautement préjudiciable au droit de vivre en famille et ses conséquences sont démesurées par rapport à l’intérêt de ce visa. En effet, les vérifications effectuées par le consulat pour la délivrance du visa sont les mêmes que celles auxquelles procède la préfecture pour la délivrance du titre de séjour : absence de fraude, trouble à l’ordre public, annulation de mariage, etc.
Dans ce cas, il n’y a donc pas lieu de conserver la nécessité d’un visa long séjour.
amendements n° 343 et 295 rectifié visent à délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire à l’étranger qui est entré régulièrement sur le territoire, est marié et séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint français.
En réalité, à l’heure actuelle, ces étrangers sont tenus d’obtenir, tout d’abord, un visa de long séjour.
La préoccupation des auteurs des amendements est déjà prise en compte par le droit positif puisque la loi du 24 juillet 2006 a facilité les démarches nécessaires en prévoyant la possibilité d’introduire une demande de visa sur le territoire national pour le conjoint de Français séjournant en France depuis plus de six mois.
En outre, le visa ainsi délivré pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois au conjoint d’un ressortissant de Français donne à son titulaire les droits attachés à une carte de séjour temporaire.
C’est la raison pour laquelle la commission des lois sollicite le retrait des amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 295 rectifié bis, l’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 489 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 211-2-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le partenaire lié à un ressortissant français par un pacte civil de solidarité et pouvant attester d’un an de vie commune bénéficie des dispositions visées au présent article. »
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Cet amendement vise à étendre au partenaire d’un ressortissant français lié par un PACS certaines dispositions bénéficiant aux couples mariés en matière d'obtention d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois.
Nous avons introduit le PACS dans notre système juridique. Il me semble donc normal d’accorder au partenaire pacsé d’un de nos ressortissants des conditions d’obtention d’un visa plus souples, moins restrictives.
La commission a déjà examiné cet amendement sous une autre rédaction et a décidé de ne pas l’intégrer dans son texte.
En l’état du droit, en effet, les autorités consulaires sont tenues de délivrer un visa à un conjoint de Français, sauf manœuvres frauduleuses ou menaces à l’ordre public.
Vous proposez d’étendre ce dispositif aux personnes pacsées justifiant d’un an de vie commune.
La commission avait considéré que l’adoption de l’amendement dans sa version précédente risquerait de créer des effets inopportuns dans la mesure où le PACS n’est pas assorti des mêmes mécanismes de contrôle que le mariage. De ce fait, cette proposition pourrait encourager la multiplication des PACS dits de complaisance ou supposés de complaisance.
Mme Alima Boumediene-Thiery s’exclame.
Toutefois, l’amendement a été rectifié afin de viser les personnes pacsées justifiant d’une année de vie commune. Dans ces conditions, la commission souhaite, avant de se prononcer, entendre l’avis du Gouvernement.
Madame Garriaud-Maylam, vous proposez, s’agissant de la délivrance d’un visa de long séjour, d’aligner le traitement des conjoints de Français et celui des partenaires étrangers liés à un Français par un PACS.
Il faut bien réfléchir et avoir présentes à l’esprit les conséquences d’un tel alignement.
La délivrance d’un visa de long séjour permet de droit d’obtenir un titre de séjour d’un an.
Par ailleurs, l’adoption de cet amendement remettrait en cause l’architecture générale du CESEDA non seulement en matière de visa, ce que vous avez anticipé, mais également en matière de titre de séjour.
La situation des conjoints de Français, c’est-à-dire des personnes mariées, est globalement plus favorable que celle des étrangers non liés par le mariage avec un Français. C’est d’ailleurs l’un des principes fondamentaux et directeurs du code.
Le PACS n’ouvre pas de droit au séjour en tant que tel. Mais il est bien évidemment pris en compte pour l’appréciation du droit au séjour de l’étranger lié à un Français. Il constitue une circonstance importante, qui est retenue dans l’appréciation au cas par cas du droit au séjour.
Madame Garriaud-Maylam, je vous le dis très clairement : nous ne souhaitons pas aller au-delà. Nous n’entendons pas bouleverser aujourd’hui et au travers de ce texte l’équilibre général des règles d’entrée et de séjour prévues par notre droit.
Compte tenu de ces explications, je vous remercie par avance de bien vouloir retirer votre amendement.
Madame Joëlle Garriaud-Maylam, l’amendement n° 489 rectifié bis est-il maintenu ?
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.
L’amendement n° 489 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 316 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code est ainsi rédigé :
« Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre des 3° et du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale. »
La parole est à M. Alain Anziani.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 132 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 346 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est complété par les mots : «, sauf si elle résulte du décès du conjoint français ».
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour défendre l’amendement n° 132 rectifié.
L’article L. 313-12 du CESEDA prévoit que le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l’article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n’ait pas cessé. Cela signifie a contrario que, en cas de rupture de la vie commune, la personne étrangère ne peut bénéficier du renouvellement de son titre de séjour.
En l’état actuel de la législation, et même si la rupture de la vie commune est due au décès du conjoint français, il n’y a pas de renouvellement de titre de séjour possible.
Cette possibilité de renouvellement du titre de séjour en cas de décès du conjoint est prévue pour les bénéficiaires du regroupement familial par l’article L. 431-2 du CESEDA.
Le dispositif prévu à cet article ne doit pas bénéficier aux seules personnes étrangères mariées.
Afin de pallier ce qui nous semble une incohérence, il nous paraît indispensable d’adopter une formulation similaire pour les étrangers conjoints de Français. Tel est le sens de l’amendement que je soumets à votre approbation. Son adoption par notre assemblée ne devrait pas poser de problème puisqu’il a déjà reçu l’avis favorable de la commission des lois.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 346.
Cet amendement tend à insérer un article additionnel après l’article 21 ter, afin de compléter la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 313-12 du CESEDA.
Ce deuxième alinéa de l’article L. 313-12 du CESEDA est relatif au renouvellement des titres de séjour temporaires portant la mention « vie privée et familiale », VPF, spécialement délivrés aux conjoints de Français – c’est un renvoi explicite à la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l’article L. 313-11.
En l’état actuel du droit, le deuxième alinéa de l’article L. 313-12 subordonne le renouvellement de ce titre de séjour au fait que « la communauté de vie n’ait pas cessé » entre les époux, sans apporter d’autres précisions.
Nous proposons, par cet amendement, de compléter la première phrase dudit article par les mots : «, sauf si elle résulte du décès du conjoint », afin de protéger ainsi tous les étrangers conjoints de Français.
En effet, les étrangers conjoints de Français, titulaires d’un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale », entrés en France au titre du regroupement familial, sont déjà prémunis du non-renouvellement de leur carte de séjour par l’article L. 431-2 du CESEDA.
Cela signifie que les autres conjoints de Français, bénéficiaires du même titre de séjour, octroyé sur le même fondement juridique, voient actuellement leur carte de séjour non renouvelée en cas de décès de leur conjoint français.
Il paraît dès lors incohérent que, face à une situation similaire, une différence de traitement injustifiée soit opérée selon que le conjoint soit ou non venu au titre du regroupement familial.
Cela peut notamment concerner tous les étrangers qui ont bénéficié d’un « changement de statut » après leur mariage avec un Français déjà en France et en situation régulière. Ils pouvaient en effet être titulaires d’un titre de séjour portant la mention « étudiant » ou « salarié », changé en « vie privée et familiale » après le mariage.
Cela peut également concerner le conjoint étranger de Français, bénéficiaire de la procédure dérogatoire de demande de visa de « long séjour », déposée en préfecture, mais à trois conditions : s’il est entré régulièrement en France, s’il s’est marié en France et qu’il y a séjourné depuis plus de six mois avec son conjoint français. La demande de visa a donc été diligentée depuis la France, ou il résidait déjà, et a abouti à la délivrance de ce titre de séjour.
Dans tous ces cas, le renouvellement de la carte de séjour « VPF » du conjoint étranger doit être assuré en cas de décès de son époux, au même titre que s’il était entré en France via une procédure de regroupement familial.
L'amendement n° 340, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « peut en accorder le renouvellement » sont remplacés par les mots : « en accorde le renouvellement ».
II. - À la première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « peut en accorder le renouvellement » sont remplacés par les mots : « en accorde le renouvellement ».
La parole est à M. Roland Courteau.
Les personnes victimes de violences conjugales doivent pouvoir bénéficier d’un titre de séjour autonome afin de ne plus dépendre administrativement de leur conjoint.
À l’heure actuelle, le renouvellement des titres de séjour des personnes qui rompent leur vie commune en raison de violences conjugales est laissé à la libre appréciation du préfet.
Quel choix une personne étrangère victime de violences conjugales a-t-elle entre, d’une part, quitter son conjoint avec le risque de perdre son droit au séjour ou, d’autre part, rester et subir la violence ?
D’une préfecture à l’autre, les documents requis varient. S’il est nécessaire d’apporter la preuve des violences conjugales via une plainte et des certificats médicaux, les préfectures exigent de plus en plus souvent la preuve de l’engagement d’une procédure de divorce pour faute et d’une condamnation pénale de l’auteur des faits pour décider de renouveler le titre de séjour. Ces documents sont extrêmement longs et difficiles à obtenir.
Ce pouvoir d’appréciation, en ce qui concerne la situation des violences conjugales, engendre des différences de traitements d’une préfecture à l’autre.
Telle est la raison du dépôt de cet amendement.
L’amendement n° 316 rectifié vise à apporter deux modifications au texte applicable. La commission a émis un avis défavorable car le texte de 2010 est protecteur : les dispositions qu’il contient suffisent à atteindre les objectifs visés par les auteurs de l’amendement.
Je confirme à Mme Assassi que la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 132 rectifié. Il en va de même s’agissant de l’amendement n° 346, qui est identique.
La commission émet en revanche un avis défavorable sur l’amendement n° 340, qui vise à rendre automatique le renouvellement du titre de séjour de l’étranger victime de violences conjugales.
Je rappellerai que les préoccupations des auteurs de l’amendement ont été reprises dans les dispositions de la loi du 9 juillet 2010, qui a ouvert à la victime de violences conjugales la possibilité de se voir délivrer ou renouveler automatiquement son titre de séjour dès lors qu’elle bénéficie d’une ordonnance de protection délivrée par le juge des affaires familiales.
En outre, en cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident peut être délivrée à la victime.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 316 rectifié.
Les amendements identiques n° 132 rectifié et 346 me donnent l’occasion de rappeler une réalité : en rendant le renouvellement obligatoire, cet article empêche le préfet de discerner les cas dans lesquels il pourrait y avoir une fraude. Toutefois, après avoir entendu la position de la commission, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
J’en viens, enfin, à l’amendement n° 340. La loi relative aux violences faites aux femmes a été adoptée voilà peu de temps – en juillet 2010 –, à l’unanimité. Le Gouvernement n’a pas l’intention de rouvrir le débat quelques mois seulement après l’adoption d’une loi. Il émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements sont adoptés à l’unanimité des présents.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 21 ter.
La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l’amendement n° 340.
Il est vrai que nous avons légiféré récemment sur le fléau – je n’hésite pas à employer ce mot ! – des violences conjugales. Il est également vrai que le titre de séjour d’une victime de violences conjugales ayant bénéficié d’une mesure de regroupement familial peut être renouvelé, lorsque cette personne fait l’objet d’une ordonnance de protection.
Je tiens cependant à attirer votre attention, mes chers collègues, sur le fait que les victimes de violences conjugales ne font pas toujours l’objet d’une ordonnance de protection. Que se passera-t-il dans ces cas-là ? Le titre de séjour ne sera-t-il pas renouvelé ? Ces personnes seront-elles victimes d’une double peine, les violences conjugales et l’expulsion vers leur pays d’origine ?
C’est ce problème que nous voulons résoudre car, en l’occurrence, il existe manifestement un vide juridique !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 349, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 524-3 et L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont abrogés.
La parole est à M. Roland Courteau.
Actuellement, l’étranger qui souhaite demander le relèvement d’une interdiction du territoire ou l’abrogation d’un arrêté d’expulsion doit obligatoirement résider hors de France. À défaut, sa demande est déclarée irrecevable.
Pourtant, certaines personnes sont « inexpulsables », soit en raison de leurs très fortes attaches en France, de leur longue présence sur le territoire ou de leur état de santé, soit parce qu’elles se trouvent dans l’impossibilité de retourner dans leur pays d’origine ; c’est par exemple le cas des réfugiés statutaires, victimes de traite ou de réseaux.
Par ailleurs, cette condition porte atteinte au droit à un recours effectif de l’étranger contre une décision d’expulsion ou d’interdiction du territoire.
Les conditions restrictives de recevabilité ont bien souvent comme conséquence de dissuader l’étranger d’exercer un recours, et ce d’autant plus qu’il est matériellement difficile, lorsque l’on se trouve dans un pays en développement, d’exercer des actes de procédure en France.
Cet amendement tend donc à supprimer la condition de résidence hors de France pour la recevabilité d’une requête en relèvement d’interdiction du territoire français ou d’une mesure d’expulsion.
Cet amendement vise à supprimer purement et simplement la condition de résidence hors de France pour la recevabilité d’une requête en relèvement d’interdiction du territoire français ou d’une mesure d’expulsion.
Le fait de supprimer de manière générale cette condition enlèverait une grande partie de leur portée aux mesures d’expulsion ou d’interdiction du territoire. Il est préférable d’en rester au droit en vigueur, qui prévoit plusieurs hypothèses dans lesquelles l’étranger peut obtenir l’abrogation de ces mesures, alors même qu’il réside en France : l’examen quinquennal de l’arrêté, ou l’assignation à résidence du fait de son état de santé, par exemple.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Je partage l’avis de la commission.
J’ajoute, monsieur le sénateur, que l’étranger qui ne peut pas retourner dans son pays d’origine n’est pas « inexpulsable », contrairement à ce que vous avez dit. En effet, il peut et il doit rechercher un pays tiers d’accueil. Il est donc tout à fait expulsable !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 348, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 541-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 541-1-1. - Les étrangers mentionnés à l'article 131-30-2 du code pénal se voient délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale ».
La parole est à M. Roland Courteau.
La loi du 26 novembre 2003 a institué dans le code pénal, à l’article 131-30-2, quatre catégories d’étrangers protégés contre les peines complémentaires d’interdiction du territoire, dont deux tiennent compte expressément des liens familiaux tissés en France. Toutefois, l’application de cette réforme de « la double peine » connaît quelques hoquets.
Dans les faits, de nombreux étrangers ont obtenu le relèvement de leur peine d’interdiction du territoire, mais ils se heurtent désormais à un refus de délivrance de la carte de séjour. La peine complémentaire est alors non pas pénale, mais administrative !
En conséquence, ces personnes constituent une nouvelle catégorie d’étrangers « ni expulsables ni régularisables ». Ils vivent en France sans titre de séjour, ou sous couvert d’une autorisation provisoire de séjour, ce qui ne favorise pas leur intégration dans la société.
Cet amendement vise donc à éviter que la sanction administrative, c’est-à-dire le refus de délivrance du titre de séjour, ne serve à contourner les dispositions de l’article 131-30-2 du code pénal énonçant la liste des personnes ne pouvant faire l’objet d’une peine d’interdiction du territoire français.
En conséquence, nous proposons de garantir la délivrance d’un titre de séjour « vie privée et familiale » aux étrangers protégés contre le prononcé d’une peine d’interdiction du territoire français.
Cet amendement tend à prévoir que les étrangers bénéficiant, en vertu de l’article 131-30-2 du code pénal, d’une protection contre la peine d’interdiction du territoire reçoivent une carte de séjour « vie privée et familiale ».
Ce faisant, cet amendement vise non pas, comme les auteurs le souhaiteraient, les personnes relevant d’une interdiction du territoire, mais des étrangers qui disposent déjà de titres de séjour, la plupart du temps de longue durée. Il ne semble donc pas logique à la commission de prévoir que leur soit accordée une carte de séjour temporaire.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n’est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.