Intervention de Emmanuelle Pérès

Mission d'information Culture citoyenne — Réunion du 8 février 2022 : 1ère réunion
Audition de Mme Emmanuelle Pérès directrice de la jeunesse de l'éducation populaire et de la vie associative déléguée interministérielle à la jeunesse

Emmanuelle Pérès, de l'éducation populaire et de la vie associative, déléguée interministérielle à la jeunesse :

Nous disposons d'informations concernant les personnes qui s'inscrivent, notamment leur établissement. Cet algorithme permet de ne pas retrouver dans un même centre des élèves de la même classe ou du même lycée. En raison de la pandémie, nous restons à ce stade sur une mobilité infrarégionale. Nous proposons à un jeune d'un département une inscription dans un site extérieur à son département, pour lui permettre d'appréhender un environnement dont il n'a pas l'habitude. Nous avons bien progressé au niveau des lycéens de la voie professionnelle, qui représentaient 24,6 % des jeunes pour la session de février, contre 11 % l'année dernière. Ils représentent 33 % de la totalité des lycéens. Je continue de travailler avec le DGESCO sur des bénéfices immédiats pour ces publics. Il s'agit ainsi de reconnaître leur séjour de cohésion et, a fortiori, leur mission d'intérêt général, dans leur parcours de vie professionnelle, en valorisant un certain nombre de compétences qui peuvent leur être utiles.

En termes de parité, en fonction des sessions et des régions, nous respectons la proportion de 50/50. La session de 2021 et les inscriptions de 2022 ont enregistré légèrement plus de jeunes filles. Nous travaillons avec une start-up d'État et suivons en temps réel toutes les inscriptions et leurs particularités.

Un axe important porte sur les jeunes en situation de handicap, qui représentaient 4 % en 2021. Les chiffres sont à ce stade similaires pour 2022. Nous sommes attachés à cette dimension du SNU à double titre : d'abord pour les jeunes en situation de handicap bien sûr, mais aussi pour leurs concitoyens. Cette dynamique en termes de cohésion de groupe est importante.

Les objectifs sont ambitieux, puisque nous devrions accueillir de 20 à 25 000 jeunes en juin et juillet. Plus de 22 000 dossiers sont aujourd'hui ouverts. Nous avons initié une grande campagne sur les réseaux sociaux et lancerons dès lundi prochain une campagne radio jusqu'au 10 mars. Celle-ci vise à convaincre aussi les parents, qui sont des prescripteurs potentiels. Un travail étroit est également conduit avec les recteurs, les chefs d'établissement, les associations partenaires et les ambassadeurs du SNU. Compte tenu du niveau de satisfaction l'année dernière, toutes ces personnes sont prêtes à témoigner de leur expérience dans les lycées, en classes de seconde générale, technologique et professionnelle, mais également auprès des missions locales qui permettent d'atteindre les décrocheurs. Pour la session de février, nous souhaitons pouvoir nous appuyer ensuite sur ces 3 000 jeunes. Il s'agira de la première session qui sera immédiatement suivie d'un retour en classe.

Concernant les missions d'intérêt général, le SNU est constitué de trois étapes : le séjour de cohésion, suivi dans l'année d'une mission d'intérêt général d'une dizaine de jours, et enfin l'engagement volontaire de trois mois et plus avant 25 ans. Le déploiement du SNU s'opère à un rythme très soutenu, avec l'organisation du séjour de cohésion. Pour la cohorte de 2019, sur 2 000 jeunes, 50 % environ ont effectué leur mission d'intérêt général. Sur la cohorte de 2020, où n'ont pas été organisés de séjour de cohésion sauf en Nouvelle-Calédonie, nous avons permis aux jeunes qui s'étaient préinscrits de réaliser des missions d'intérêt général. 2?000 jeunes en ont profité. Pour 2021 - sur les quelque 15 000 jeunes ayant effectués un SNU -, 1 371 jeunes ont déjà validé leur mission d'intérêt général, 780 MIG sont en cours de réalisation et 4 700 jeunes candidatent actuellement à des missions d'intérêt général. Les jeunes ont jusqu'à l'été prochain pour la réaliser. Il s'agit d'une priorité absolue : nous devons offrir un certain nombre de MIG, mais aussi valoriser les formes d'engagement propres aux jeunes. Le décret de 2020 est peut-être trop restrictif sur la notion de MIG. Nous disposons en l'occurrence de quatre options et de trois grands réseaux : les différents ministères, les associations (qui font parfois part de difficultés organisationnelles en matière d'encadrement) et les élus (mairies, communes). Sur la plateforme d'inscription, les jeunes peuvent donner l'autorisation que leurs coordonnées soient transmises au préfet de leur département et au maire de leur commune, pour deux raisons : permettre aux élus de les inviter à différentes cérémonies, pour leur permettre d'entrer dans la vie citoyenne, et trouver des MIG qui ont du sens pour les deux parties. Enfin, notre jeunesse est très active et peut avoir elle-même de très bonnes idées, développer des associations et s'engager dans des actions. Il s'agit de trouver comment reconnaître ces formes d'engagement. C'est la quatrième option possible. Nous avons initié un recensement et identifié des pistes très sérieuses qui méritent d'être approfondies.

Le service civique répond quant à lui à une politique ambitieuse, qui a plus de douze ans. Avec le plan de relance, nous avons bénéficié, dans le cadre de Un jeune, une solution, de 100 000 missions supplémentaires. En 2021, nous enregistrions 145 000 missions, parmi lesquelles environ 45 000 jeunes avaient commencé leur mission de service civique l'année précédente. En 2021, en raison de la crise sanitaire, certaines associations ayant été en retrait, nous n'avons pas atteint les objectifs que nous nous étions fixés. Nous sommes en attente des chiffres définitifs, que nous aurons en mars. Le dernier budget prévisionnel d'exécution, que nous avons voté en décembre, projette 165 000 missions en 2021. Pour 2022, nous avons voté un objectif de 220 000 millions en stock. Le flux dépendra du nombre de missions de 2021. Le service civique est pour nous la « tête de gondole » de la 3e étape du SNU. Il s'agit d'un engagement volontaire de six mois et plus, qui se développe sur des thématiques très proches de celles du SNU.

S'agissant des perspectives de développement, peu de jeunes viennent aujourd'hui de terminer leurs deux premières étapes de SNU. Nous travaillons étroitement avec le ministère du travail dans le cadre du « contrat d'engagement jeune », afin que le service civique soit reconnu non pas comme un dispositif d'insertion professionnelle - ce n'est pas son rôle - mais comme un dispositif de remobilisation des jeunes, en particulier ceux ayant le moins d'opportunités. Le service civique n'est parfois pas assez pris en compte par les missions locales et Pôle emploi.

En ce qui concerne le service civique dans les outre-mer, en 2020, 7 430 volontaires ont réalisé une mission en Guyane, Guadeloupe, à La Réunion, Martinique, Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna. Ces missions portent essentiellement sur l'éducation pour tous et ont trait à la solidarité. Elles sont généralement réalisées dans les services de l'État et les collectivités territoriales. En effet, il est difficile de faire émerger une vie associative dense et dynamique outre-mer. Le public est plutôt de niveau baccalauréat et en recherche d'emploi.

Sur l'engagement bénévole, les outils pour le renforcer sont le SNU, avec ce moment, à 15-16 ans, de passage à l'âge adulte. L'enjeu du séjour de cohésion est aussi de mobiliser l'enseignement moral et civique dispensé à l'école et de valoriser toutes les formes d'engagement des jeunes : délégués, éco-délégués, sapeurs-pompiers volontaires, scouts, etc. L'ambition du SNU est d'assurer le parcours d'engagement. C'est pourquoi nous y avons intégré la journée « défense et mémoire ». Nous avons également dans nos compétences la réserve civique. Lors du premier confinement, nous avons développé la plateforme jeveuxaider.gouv.fr, dont l'ambition était de mettre en relation des offres de bénévolat et des bénévoles. Ce système a très bien fonctionné lors du premier confinement. Ces missions étaient de toute nature : distribution alimentaire, soutien, courses, etc. Plus de 340 000 bénévoles sont aujourd'hui inscrits sur cette plateforme dont 42 % ont moins de 30 ans.

Le « compte engagement citoyen » est un autre moyen de favoriser l'engagement bénévole. Il vise à s'inscrire dans la stratégie de reconnaissance du bénévolat et des compétences acquises. Une fois qu'un jeune peut justifier de 240 heures de bénévolat par an, jusqu'à 220 euros peuvent être versés sur son compte engagement citoyen, qui abonde lui-même le compte personnel de formation. Cette somme peut permettre de cofinancer le permis de conduire, de financer ou cofinancer des certifications de compétences ou des formations certifiantes.

S'agissant des freins à la mobilité, ce sujet ne relève pas que de nous. Nous avons déployé un appel à projets, dans le cadre du service civique, sur la ruralité. Le SNU est également l'occasion de toucher ces publics ruraux, qui représentent plus de 30 % des jeunes, selon la définition de territoires « peu denses » et « très peu denses » de l'Insee. Notre enjeu est de démontrer que cet engagement est possible sur place, qu'il s'agisse du SNU ou du service civique. Nous avons de bonnes expériences en la matière. Une sociologue de l'INJEP a consacré un ouvrage aux jeunes filles dans les milieux ruraux, intitulé Les filles du coin - vivre et grandir en milieu rural, qui montre que les jeunes filles sont engagées, mais que leur l'engagement n'est pas visible. Les séjours de cohésion, par ailleurs, ont parfois lieu dans des territoires plus isolés. Un des objectifs forts de 2021 était d'ouvrir un centre par département. En termes de répartition, nombre d'entre eux sont situés hors des villes.

Enfin, le dispositif Un jeune, un mentor a été annoncé le 1er mars 2021 par le Président de la République, avec un objectif ambitieux de 100 000 mentors et mentorés ; 200 000 en 2022. Nous travaillons sur cette politique publique en lien étroit avec le ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion (MTEI) et en particulier le Haut-commissariat à l'emploi et à l'engagement des entreprises (HC3E). 30 millions d'euros ont été alloués en 2021 à ce programme, dont 3 millions d'euros au MTEI pour contractualiser avec le collectif Mentorat (qui anime la plateforme) sur trois ans ; 27 millions d'euros ont fait l'objet d'appels à projets gérés par la DJEPVA : deux lancés à l'été dernier et à la rentrée. Ces 27 millions d'euros ont été alloués à 57 associations, partout sur le territoire, sur tout type de mentorat, aussi bien pour des jeunes scolarisés, des jeunes femmes, des jeunes issus de quartiers difficiles, des territoires ruraux, des outre-mer, de l'Aide sociale à l'enfance, etc. L'Institut de l'engagement, Unis-cité, Chemins d'Avenirs font partie des structures ayant répondu à ces appels à projets. Fin 2021, nous comptions 81 200 mentorés. L'objectif de 100 000 devrait être atteint au 1er mars. Pour atteindre l'objectif de 200 000 mentorés, nous allons lancer l'appel à projet très prochainement. La plateforme a permis d'identifier 10 080 jeunes et 6 060 mentors. En janvier, le collectif Mentorat a organisé un événement pour fédérer tous les acteurs, les entreprises et les associations. On dénombre une trentaine d'entreprises motrices.

Tous ces éléments s'inscrivent dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Une Conférence européenne de la jeunesse a été organisée la semaine dernière. Nous avons prévu que les jeunes puissent intervenir pendant la réunion informelle des ministres qui se tient à l'issue de cette conférence. L'année européenne de la jeunesse est en outre en cours, suite à une proposition de la présidente de la Commission européenne. L'ambition est de démontrer que les jeunes ne sont pas la variable d'ajustement de la crise pandémique et doivent être une priorité, et de présenter les actions conduites à leur profit, avec et par eux dans chacun des États membres. Le dispositif du mentorat, en l'occurrence, intéresse les autres pays européens.

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