Intervention de Marc Massion

Réunion du 18 décembre 2008 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2008 — Article 18

Photo de Marc MassionMarc Massion :

L’article 18 met en œuvre l’une des annonces faites par le Président de la République dans le discours qu’il a prononcé à Toulon le 23 octobre dernier.

Cet article vise à mettre en place un énième mécanisme de dégrèvement de taxe professionnelle pour tous les nouveaux investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2009.

Dans le même temps, il signe un peu plus encore la mort de la taxe professionnelle, taxe que le Gouvernement – j’y reviendrai ultérieurement – supprime par touches successives.

Le rapporteur général à l’Assemblée nationale a dû considérer que la situation n’était pas encore assez grave. Il a donc proposé d’en revenir à une application plus stricte de la liaison des augmentations des taux de la fiscalité directe locale, en supprimant la faculté de déliaison partielle.

Cette faculté permet pourtant aux collectivités territoriales de s’affranchir de la liaison et de voter une augmentation du taux de la taxe professionnelle supérieure à celle des impôts-ménages.

Il est inadmissible, dans la situation actuelle, de penser à contraindre un peu plus les collectivités territoriales.

C’est la raison pour laquelle nous vous proposons d’aller plus loin que la simple suppression du dispositif adopté par l’Assemblée nationale. Nous vous proposons d’achever le mouvement de déliaison des taux de la fiscalité locale timidement engagé dans la loi de finances pour 2003 et totalement abandonné depuis par la majorité.

Cette évolution vers la déliaison est rendue indispensable par les pressions qui s’exercent inévitablement sur les finances des collectivités locales en raison des transferts massifs de compétences sous-financés et des baisses drastiques des concours financiers de l’État.

Cet amendement tend donc à donner aux collectivités locales la possibilité d’augmenter librement leur taux de taxe professionnelle à compter du 1er janvier 2009. Cette possibilité est partie intégrante de l’autonomie fiscale des collectivités locales, dont chacun s’accorde à dire qu’elle doit être restaurée.

Notre envie de réforme répond à la volonté des élus d’exercer pleinement leurs responsabilités, y compris en matière fiscale, volonté qu’ils revendiquent et entendent assumer devant leurs concitoyens.

En adoptant cet amendement, mes chers collègues, vous adresserez une marque de confiance significative aux collectivités territoriales.

En ce qui concerne plus particulièrement le nouveau dispositif de dégrèvement mis en place à l’article 18, il prouve, s’il le fallait, que la taxe professionnelle est à bout de souffle, épuisée par tant d’attaques, et qu’une réforme est non seulement indispensable, mais urgente.

En 2006, du fait des dégrèvements et compensations d’exonérations, l’État prenait à sa charge 38 % du produit total de la taxe professionnelle. Avec cette réforme, dont le coût s’élève à 1, 2 milliard d’euros, la moitié environ du produit de la taxe professionnelle sera prise en charge par le contribuable national et non local. Cette situation n’est plus tenable.

Il faut donc, dès maintenant, s’interroger sur la nouvelle source de financement qui sera proposée aux collectivités locales : celle-ci devra maintenir le lien entre entreprises et collectivités territoriales. Il ne suffit pas de répéter à l’envi, comme le fait le Gouvernement, que la taxe professionnelle nuit à la croissance des entreprises.

Bien entendu, la situation des entreprises doit être prise en compte, mais il faut absolument s’interroger sur le rôle des collectivités locales dans le dynamisme économique de nos territoires. Quels services publics et quels investissements réalisés par nos collectivités ne bénéficient pas directement aux entreprises et à leur bon développement, qu’il s’agisse des transports, du logement, des infrastructures, pour ne citer que cela ? Les entreprises elles-mêmes le disent : la fiscalité n’est pas le premier critère pris en compte dans le choix d’implantation d’une entreprise.

L’institution d’un impôt économique au profit des collectivités territoriales est indispensable. Nous ne pouvons admettre la tendance déjà ancienne du Gouvernement à vouloir couper le cordon ombilical entre les collectivités territoriales et les entreprises.

Le Gouvernement a d’ores et déjà évoqué une future réforme de la taxe professionnelle, à l’issue des travaux du comité Balladur. Encore une fois, pourquoi engager une réforme de cette importance hors de l’enceinte du Parlement ? Les parlementaires doivent être associés à la réflexion et ne pas être placés devant le fait accompli, avec un texte dont les contours auront déjà été arrêtés.

Enfin, la réforme de la taxe professionnelle ne doit pas être isolée mais elle doit être intégrée à une réforme de l’ensemble de la fiscalité locale, sans quoi l’équilibre entre ménages et entreprises serait remis en cause.

Mes chers collègues, cessons d’opposer les intérêts des collectivités territoriales à ceux de nos entreprises.

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