Intervention de Nikolaus Meyer-Landrut

Commission d'enquête Frontières européennes et avenir espace Schengen — Réunion du 17 janvier 2017 à 13h30
Audition de s. exc. M. Nikolaus Meyer-landrut ambassadeur d'allemagne en france

Nikolaus Meyer-Landrut, ambassadeur d'Allemagne en France :

En ce qui concerne monsieur Trump, nous sommes tout à fait calmes, en accord avec nous-mêmes et avec le respect des droits fondamentaux tels qu'ils sont inscrits dans la Constitution allemande et qui tiennent compte de l'histoire allemande. Le droit d'asile tel qu'il est inscrit dans notre Constitution est aussi une réponse à la période nazie. Il est important que l'Allemagne l'honore, y compris dans les situations difficiles. Monsieur Trump viendra peut-être un jour en Europe et verra la complexité et l'histoire de notre continent. On pourrait même lui souhaiter d'aller voir quelques cimetières de guerre, y compris américains, pour se rendre compte pourquoi la coopération européenne est si importante.

Honorer les droits fondamentaux figurant dans nos textes ne signifie pas que nous devions être naïfs et accepter toute demande d'asile sans rigueur. Toutefois, le principe du droit d'asile ne sera pas remis en cause par l'Allemagne. La difficulté est l'abus de ce droit par des personnes venant pour d'autres motifs. Pour protéger le droit d'asile et le droit des réfugiés, il faut que nos États soient capables de différencier entre ces personnes et de renvoyer ceux qui ne relèvent pas du droit d'asile. Cette question des retours est absolument cruciale. Grâce à l'ensemble des mesures nationales et à la coopération avec les pays concernés, nous avons, il me semble, réussi le pari sur les Balkans. Les pays des Balkans acceptent ainsi désormais de réintégrer des ressortissants sur la base de documents européens, ce qui supprime un obstacle important à la reconduite.

Nous sommes dans une situation différente concernant la Syrie : aujourd'hui, plus de 90 % des demandeurs d'asile ou de protection provenant de ce pays obtiennent un titre de séjour ou une protection en Allemagne. Mais nous pensons qu'un grand nombre d'entre eux souhaiteront retourner en Syrie dès qu'ils le pourront pour reconstruire leur pays. La situation est plus difficile avec le Maghreb. Nous avons des difficultés à renvoyer des personnes vers cette zone. L'Allemagne réfléchit à sa politique vis-à-vis de ces pays. Il faut être plus clair dans la mise en oeuvre des accords de réadmission européens. Les partenariats migratoires que l'Union européenne est en train de mettre en place avec un certain nombre de pays africains sont très importants à cet égard. Ce que l'Allemagne a compris est qu'il y a, certes, la question des réfugiés de Syrie et d'Irak, mais que l'Europe doit aussi traiter la question de la migration subsaharienne en travaillant avec les pays d'origine et de transit. La situation en Libye est préoccupante. Après, sommes-nous des complices des passeurs ? Le nombre de morts observé en Méditerranée est déjà presque insupportable. Si l'Union européenne retirait ses bateaux de façon importante, le nombre de morts augmenterait fortement et nous aurions beaucoup de mal à le supporter humainement et politiquement. Il faut évidemment essayer de travailler avec les autorités libyennes pour créer les conditions d'un retour mais, pour le moment, ceci n'est pas possible. Ce n'est pas un problème allemand mais un problème commun.

Je ne porte pas de jugement sur la politique italienne en la matière mais nous avons constaté, par le passé, lors de contrôles aléatoires en gares de Munich que certains étrangers en situation irrégulière étaient manifestement mis dans ces trains par les autorités d'un pays voisin ami, qui ne s'étaient pas donné beaucoup de mal pour dissimuler leur opération. À partir de ce moment-là, il y a donc une responsabilité, même si nous sommes les premiers à admettre qu'il faut des mesures exceptionnelles en cas d'afflux majeur. Mais ceci doit rester l'exception pour revenir à un système de Dublin qui fonctionne.

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