Intervention de Fadi Chehadé

Mission commune d'information sur la gouvernance mondiale de l'Internet — Réunion du 21 février 2014 à 16h25
Audition de M. Fadi Chehadé président de l'internet corporation for assigned names and numbers icann

Fadi Chehadé :

La réorganisation opérationnelle n'est qu'un premier pas. J'ai présenté au conseil d'administration de l'ICANN cinq initiatives beaucoup plus ambitieuses, sur lesquelles il vient de me donner le feu vert. Premièrement, créer une structure légale internationale parallèle - peut-être en Suisse. Deuxièmement, globaliser les fonctions IANA (Internet Assigned Numbers Authority), qui sont au coeur de notre travail sur les identifiants, en substituant une gestion internationale à la supervision américaine. Troisièmement, transformer la nature de notre Affirmation of Commitments, notre charte de responsabilités, en la faisant contresigner non plus seulement par l'État américain mais par tous les pays. Quatrièmement, internationaliser nos structures, et notamment le Governmental Advisory Committee. Enfin, accroître le contrôle des pays sur les changements effectués sur leur racine (.fr pour la France), afin que l'ICANN ne puisse plus y apporter unilatéralement des modifications. Je me félicite que notre conseil d'administration m'ait donné son feu vert. La France y est d'ailleurs le pays proportionnellement le mieux représenté : Bruno Lanvin et Sébastien Bachollet, qui m'accompagnent, en sont membres ; Bertrand de la Chapelle m'a également beaucoup soutenu.

J'évoquerai dans quelques jours l'idée d'un Internet allemand ou européen avec des responsables allemands. La fragmentation de l'Internet serait très dangereuse. Même les Chinois, avec leurs 620 millions d'utilisateurs, n'en veulent pas : leurs applications sont utilisées par des centaines de millions d'utilisateurs hors de Chine. Personne ne veut voir se fragmenter la base d'Internet - ce qui n'interdit pas des adaptations régionales et nationales : l'innovation doit continuer à se développer comme elle le fait, par exemple, à Numa, dans le Sentier. Nous avons étudié, avec le Boston Consulting Group, 55 cas de « frictions » sur Internet, c'est-à-dire de facteurs empêchant les consommateurs ou les entreprises de participer pleinement à l'économie digitale nationale. Il faut que Mme Merkel lise ce rapport ! Si on ajoute encore à ces frictions imputables aux infrastructures, à l'industrie, aux individus ou aux difficultés d'accès aux contenus, on affaiblit la croissance économique. Les frictions les plus faibles se trouvent en Suède, les plus fortes au Nigeria. En tout cas, il me semble essentiel qu'un système global respecte les systèmes nationaux : il importe que le principe de subsidiarité s'applique ; aussi est-il nécessaire de coordonner le système global avec les différents échelons régionaux.

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